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08/03/2005 | FRANCE | N°03DA00796

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation a 3, 08 mars 2005, 03DA00796


Vu le recours, enregistré le 23 juillet 2003 sous le n° 03DA00796 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présenté pour l'Etat, par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, représenté par le directeur départemental des services fiscaux du Nord ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :

1') d'annuler l'article 1er du jugement n° 99-3749 du Tribunal administratif de Lille en date du 13 mars 2003 en tant que ledit Tribunal a déchargé la société Auchan France des droits de taxe d'apprentissage et de participat

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Vu le recours, enregistré le 23 juillet 2003 sous le n° 03DA00796 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présenté pour l'Etat, par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, représenté par le directeur départemental des services fiscaux du Nord ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :

1') d'annuler l'article 1er du jugement n° 99-3749 du Tribunal administratif de Lille en date du 13 mars 2003 en tant que ledit Tribunal a déchargé la société Auchan France des droits de taxe d'apprentissage et de participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue mis à sa charge pour la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1991et des pénalités y afférentes ;

2°) de remettre lesdites cotisations et pénalités à la charge de la société Auchan France ;

Il soutient :

- que le Tribunal s'est mépris sur la nature des sommes soumises aux taxes assises sur les salaires en vertu de l'article 231 du code général des impôts et qui ne peuvent bénéficier des dispositions de l'article 231 bis C du même code ; que l'intéressement, imposable en vertu des dispositions de l'article 158-5 du code général des impôts à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires, a la même nature que les salaires au sens du droit fiscal ; que conformément aux dispositions des articles 225 et 235 ter E du code général des impôts, dans leur rédaction applicable au litige, la taxe d'apprentissage et la participation des employeurs à la formation professionnelle continue sont assises sur les salaires selon les bases et modalités prévues aux articles 231 et suivants du même code relatifs à la taxe sur les salaires ; que, compte tenu des dispositions de l'article 231-1 du code, l'ensemble des rémunérations versées par l'entreprise, et non pas uniquement les salaires, sont soumises aux taxes assises sur les salaires ; qu'il a été ainsi jugé que doivent être inclus dans les bases de la taxe professionnelle les compléments de rémunérations constitués par les sommes qui sont versées par une entreprise à ses salariés en application d'un accord d'intéressement ; que d'ailleurs, l'article 5 de l'ordonnance du 21 octobre 1986 prévoit que l'intéressement versé immédiatement au salarié est soumis à l'impôt sur le revenu ; qu'il est ainsi regardé comme versé à titre de salaire ; que, dès lors, la notion de salaires recouvre une acception beaucoup plus large et inclut l'intéressement qui, à la différence du régime de la participation institué par l'ordonnance du 17 août 1967, ne s'analyse pas comme une affectation du résultat ;

- que, par ailleurs, les primes versées au fonds commun de progrès ne peuvent être assimilées aux primes d'intéressement ; que l'instruction du 25 avril 1988 (5 F-18-88) prévoit que les sommes attribuées régulièrement, dans le cadre de l'intéressement ou de la participation ou de l'abondement de l'entreprise, à un plan d'épargne d'entreprise ne sont pas comprises dans les bases des participations assises sur les salaires ; qu'il en résulte que seules les sommes attribuées dans le cadre de la prime de progrès et bloquées sur le compte du plan d'épargne d'entreprise ne sont pas soumises aux taxes assises sur les salaires au sens de l'article 231 bis C du code ; qu'ainsi, c'est à bon droit que les sommes versées au fonds commun de progrès ont été soumises à la taxe d'apprentissage et à la participation des employeurs à la formation professionnelle continue ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 octobre 2003, présenté par la société Auchan France, dont le siège est ... (59964), représentée par son directeur juridique et fiscal ; la société Auchan France demande à la Cour de rejeter la requête ;

Elle soutient :

- que les sommes versées à titre de primes de progrès en 1990 et 1991 l'ayant été en vertu d'un accord d'intéressement, les dispositions combinées des articles 231 bis C et 235 bis du code général des impôts s'opposaient directement à leur inclusion dans l'assiette de la participation des employeurs à la formation professionnelle continue et de la taxe d'apprentissage, peu important qu'elles revêtent ou non la nature de salaires ; qu'en effet, l'article 231 bis C du code exonérait expressément de taxe sur les salaires les participations versées en espèce aux travailleurs en vertu d'un accord d'intéressement ; que de même la doctrine (instruction 5 F-18-88, n°58) prévoyait que les sommes attribuées régulièrement dans le cadre de l'intéressement ou de la participation ou au titre de l'abondement à un plan d'épargne d'entreprise ne sont pas comprises dans les bases des taxes et participations assises sur les salaires ; que cette instruction ne limitait nullement le bénéfice de l'exonération aux seules sommes affectées dans un plan d'épargne d'entreprise ;

- que la circonstance que les sommes en cause aient la nature de salaire ne saurait pour autant entraîner leur inclusion dans les bases de la taxe d'apprentissage et de la participation des employeurs à la formation professionnelle continue ; que la solution retenue pour la taxe professionnelle, pour laquelle, dès lors qu'aucune exonération expresse n'est prévue, la question de la nature de salaire de l'intéressement s'est posée, n'est pas transposable en l'espèce ; que l'administration n'ayant jamais contesté que les sommes versées par l'exposante à son personnel au titre de primes de progrès étaient versées en application d'un accord d'intéressement au sens de l'ordonnance du 21 octobre 1986, lesdites sommes n'avaient pas à être incluses dans les bases des taxes et participations sur les salaires en application des dispositions expresses de la loi et de la doctrine administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu l'ordonnance n° 86-1134 du 21 octobre 1986 relative à l'intéressement et à la participation des salariés aux résultats de l'entreprise et à l'actionnariat des salariés et la loi organique n°90-1002 du 7 novembre 1990 modifiant ladite ordonnance ;

Vu le décret n° 87-544 du 17 juillet 1987 fixant les conditions d'application de l'ordonnance n° 86-1134 du 21 octobre 1986 relative à l'intéressement et à la participation des salariés aux résultats de l'entreprise et à l'actionnariat des salariés ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 février 2005, à laquelle siégeaient M. Gipoulon, président de chambre, Mme Signerin-Icre, président-assesseur et M. Soyez, premier conseiller :

- le rapport de Mme Signerin-Icre, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Paganel, commissaire du gouvernement ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 2 de l'ordonnance du

21 octobre 1986 susvisée : Les accords (...) doivent, pour ouvrir droit aux exonérations prévues aux articles 4 à 6 ci-après, instituer soit un intéressement des salariés lié aux résultats ou à l'accroissement de la productivité, soit tout autre mode de rémunération collective contribuant à réaliser l'intéressement des salariés à l'entreprise ; qu'aux termes du quatrième alinéa du même article, dans sa rédaction issue de la loi organique susvisée du 7 novembre 1990 : La répartition de l'intéressement entre les salariés est uniforme, calculée en fonction du salaire, de l'ancienneté, de la qualification ou de la durée de présence dans l'entreprise au cours de l'exercice, ou combine ces différents critères... ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 231 du code général des impôts : Les sommes payées à titre de traitements, salaires, indemnités et émoluments, y compris la valeur des avantages en nature, sont soumises à une taxe sur les salaires ... ; et qu'aux termes de l'article

231 bis C du même code : 1. Dans la mesure où elles sont admises en déduction des bénéfices imposables de l'entreprise versante, en vertu de l'article 39 undecies, les participations versées en espèces aux travailleurs en application d'un accord d'intéressement sont exonérées de la taxe sur les salaires prévue à l'article 231. ; qu'aux termes de l'article 225 relatif à la taxe d'apprentissage, dans sa rédaction applicable au litige : La taxe est assise sur les salaires, selon les bases et modalités prévues aux articles 231 et suivants ... ; et qu'aux termes de l'article 235 ter, relatif à la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue : Le taux de la participation prévue à l'article L. 950-1 du code du travail est fixé à 1,2 % du montant entendu au sens du 1 de l'article 231, des salaires payés pendant l'année en cours ; les exonérations mentionnées aux articles 231 bis C à 231 bis N s'appliquent ... ; qu'il résulte de ces dispositions que l'exonération prévue par l'article 231 bis C précité du code général des impôts est applicable à la taxe d'apprentissage et à la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue ;

Considérant que le ministre ne conteste pas que le montant des sommes versées au fonds commun de progrès , avant d'être distribuées une fois par an aux salariés de la société Auchan France, dépend, dès lors qu'elles constituent le reliquat des primes trimestrielles de progrès versées auxdits salariés, des résultats ou de l'accroissement de la productivité de l'entreprise ; que le versement de ces sommes constitue, par suite, un mode de rémunération contribuant à réaliser l'intéressement des salariés à l'entreprise ; que, dès lors, et peu important, d'une part, qu'elles soient réparties entre ceux-ci en fonction de leur ancienneté, circonstance qui n'a pas pour effet de leur conférer la nature d'une prime d'ancienneté et de leur retirer celle de participations versées en espèces aux travailleurs en application d'un accord d'intéressement , et, d'autre part, qu'elles entrent dans la base à l'impôt sur le revenu de leurs bénéficiaires, les sommes dont il s'agit sont exonérées, en application de l'article 231 bis C précité, de la taxe d'apprentissage et de la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue ; qu'il suit de là que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, qui ne peut utilement se prévaloir de ce que les sommes litigieuses auraient été retenues dans les bases d'impositions qui sont régies par des dispositions différentes, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a déchargé la société Auchan France des droits de taxe d'apprentissage et de participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue mis à sa charge pour la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1991, ainsi que des pénalités y afférentes ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et à la société Auchan France.

Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience du 22 février 2005, à laquelle siégeaient :

- M. Gipoulon, président de chambre,

- Mme Signerin-Icre, président-assesseur,

- M. Soyez, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 8 mars 2005.

Le rapporteur,

Signé : C. SIGNERIN-ICRE

Le président de chambre,

Signé : J.F. GIPOULON

Le greffier,

Signé : G. VANDENBERGHE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le Greffier

G. VANDENBERGHE

2

N°03DA00796


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 03DA00796
Date de la décision : 08/03/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Gipoulon
Rapporteur ?: Mme Corinne Signerin-Icre
Rapporteur public ?: M. Paganel

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2005-03-08;03da00796 ?
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