1 ) Vu, sous le n 99DA20042, le recours, enregistré au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 9 septembre 1999, présenté par le ministre de l'intérieur ; le ministre de l'intérieur demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 98-3783 en date du 8 juillet 1999 par lequel le tribunal administratif de Lille a, à la demande de Mlle Y..., annulé la décision implicite de rejet opposée par le ministre de l'intérieur à la demande, présentée le 7 mai 1998 par Mlle Y..., tendant à la communication de la main courante du commissariat de police de Roubaix en date du 25 mars 1998 concernant sa convocation au commissariat et son transfert au centre hospitalier spécialisé de Lommelet le même jour ;
2 ) de rejeter la demande de Mlle Y... ; ---- ---- -- Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la loi n 78-753 du 17 juillet 1978 modifiée par la loi n 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n 99-435 du 28 mai 1999 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 juin 2001
- le rapport de M. Yeznikian, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Bouchier, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un seul arrêt ;
Sur les conclusions d'appel du ministre de l'intérieur :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, susvisée, dans sa rédaction alors applicable : "Le droit de toute personne à l'information est précisé et garanti par le présent titre en ce qui concerne la liberté d'accès aux documents administratifs de caractère non nonimatif. / Sont considérés comme documents administratifs au sens du présent titre tous dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès verbaux, statistiques, directives, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles qui comportent une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives, avis, à l'exception des avis du Conseil d'Etat et des tribunaux administratifs, prévisions et décisions revêtant la forme d'écrits, d'enregistrements sonores ou visuels, de traitements automatisés d'informations non nominatives" ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 6 bis de la même loi : "Les personnes qui le demandent ont droit à la communication, par les administrations mentionnées à l'article 2, des documents de caractère nominatif les concernant, sans que les motifs tirés du secret de la vie privée, du secret médical ou du secret en matière commerciale et industrielle, portant exclusivement sur des faits qui leur sont personnels, puissent leur être opposé" ;
Considérant qu'ayant été convoquée le 25 mars 1988 au commissariat de police de Roubaix, Mlle Y... a été, le même jour, placée d'office au centre hospitalier spécialisé de Lommelet par un arrêté du maire de Roubaix ; que, suite au silence gardé sur la demande du 7 mai 1997 par laquelle Mlle Y... a sollicité la communication de la main courante du commissariat de police de Roubaix, en date du 25 mars 1988, la concernant, le ministre de l'intérieur a pris une décision implicite de rejet dont Mlle Y... a demandé l'annulation ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient le ministre de l'intérieur, l'article 1er de la loi susvisée du 17 juillet 1978 n'exige pas que, à l'instar des notes et réponses ministérielles, les autres documents administratifs comportent une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives pour se voir reconnaître le caractère de document communicable ; que, par suite, la circonstance qu'un registre de la main courante renseigné dans le cadre des activités administratives d'un commissariat de la police nationale ne comporterait que des renseignements d'ordre factuel ne fait pas obstacle à sa communication sur le fondement de la loi précitée ; que, par ailleurs, un tel registre, tout au moins dans sa partie dite "événements", qui comprend des informations à caractère nominatif concernant des personnes extérieures au service, ne saurait être regardé comme un simple document d'ordre interne audit service ; que, dès lors, en application de l'article 6 bis de la loi du 17 juillet 1978 susrappelé, Mlle Y... avait droit, selon les modalités prévues par cet article, à la communication de l'extrait du registre de la main courante, en date du 25 mars 1988, la concernant ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de répondre aux fins de non recevoir opposées par Mlle Y..., que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé, par l'unique moyen qu'il invoque, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a, à la demande de Mlle Y..., annulé la décision implicite par laquelle il a rejeté la demande de communication de l'extrait de la main courante, en date du 25 mars 1988, la concernant ;
Sur les conclusions de Mlle Y... tendant à l'application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel devenu l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat (ministère de l'intérieur) à payer à la somme de 5 000 francs au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Sur les conclusions d'exécution :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative désormais applicable : "En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution./ Toutefois, en cas d'inexécution d'un jugement frappé d'appel, la demande d'exécution est adressée à la juridiction d'appel. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte. / Le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel peut renvoyer la demande d'exécution au Conseil d'Etat" ;
Considérant que, par le présent arrêt, la cour a rejeté le recours du ministre de l'intérieur dirigé contre le jugement n 98-3783, en date du 8 juillet 1999, par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté la demande de communication de l'extrait de la main courante, en date du 25 mars 1988, figurant au registre du commissariat de police de Roubaix, concernant Mlle Y... ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment des dernières diligences accomplies par les services du ministre de l'intérieur que le registre de la main courante du commissariat de police de Roubaix n'a pas été versé à un service d'archives mais a été détruit fin 1990 suite au regroupement des trois commissariats de quartier en un commissariat central de police à Roubaix ; qu'aucune trace du document demandé n'a pu, en outre, être retrouvée auprès des services préfectoraux et notamment auprès de ceux de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales, ni même auprès de l'établissement hospitalier spécialisé où Mlle Y... a été placée d'office ; que, dans ces conditions, le ministre de l'intérieur doit être regardé comme ayant assuré l'exécution du jugement du tribunal administratif de Lille, lequel avait, d'ailleurs, retenu, au soutien de son dispositif, le motif tiré de ce que, si le ministre de l'intérieur faisait valoir qu'il n'était plus en possession de la main courante, il n'étayait cette affirmation d'aucun élément et n'alléguait pas que le document n'était pas conservé aux archives départementales ou par tout autre service de l'Etat ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que le ministre de l'intérieur a également assuré l'exécution de l'article 2 du jugement prononçant la condamnation de l'Etat à verser à l'intéressée 5 000 francs au titre des frais irrépétibles, en assortissant le versement de cette condamnation du montant des intérêts légaux ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de Mlle Y... tendant à obtenir l'exécution du jugement du tribunal administratif de Lille en date du 8 juillet 1999, doivent être rejetées ;
Sur les conclusions de Mlle Y... tendant à l'application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel devenu l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions susmentionnées de Mlle Y... ;
Article 1er : Le recours du ministre de l'intérieur est rejeté.
Article 2 : L'Etat (ministère de l'intérieur) versera, dans l'instance n 99DA20042, à Mlle Eliane Y... la somme de 5 000 francs en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions de Mlle ElianeVan X... tendant à l'exécution du tribunal administratif de Lille en date du 8 juillet 1999 et les conclusions de Mlle Eliane Y... présentées, dans l'instance n 00DA01191, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mlle Eliane Y... et au ministre de l'intérieur. Copie sera transmise au préfet du Nord.