Vu l'ordonnance en date du 31 août 1999 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nantes a, en application du décret n 99-435 du 28 mai 1999 portant création de la cour administrative d'appel de Douai et modifiant les articles R. 5, R. 7 et R. 8 du code des tribunaux et cours administratives d'appel, transmis à la cour administrative d'appel de Douai la requête présentée pour M. Christophe X..., demeurant ... par Me Y..., avocat ;
Vu la requête, enregistrée le 28 octobre 1998, au greffe de la cour administrative d'appel de Nantes par laquelle M. X... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement en date du 12 juin 1998 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 25 septembre 1997 par laquelle le maire de Rouen a fixé le préjudice qu'il avait subi par suite de son licenciement, et condamné la ville à lui payer une somme de 122 417,61 francs ;
2 ) d'annuler ladite décision et condamner la ville de Rouen à lui payer cette même somme ;
3 ) de lui donner acte qu'il est disposé à accepter que la ville de Rouen règle directement à l'ASSEDIC de Haute Normandie par prélèvement sur la somme de 122 417,61 francs, la somme de 69 045,25 francs dont le remboursement lui est demandé ;
4 ) de condamner la ville de Rouen à lui verser la somme de 8 000 francs au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 84-53 du 26 janvier 1984 ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le décret n 99-435 du 28 mai 1999 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 novembre 2000
- le rapport de Mme Brenne, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Evrard, commissaire du gouvernement ;
Considérant que par jugement du 30 avril 1997, le tribunal administratif de Rouen a annulé pour vice de forme la décision en date du 18 décembre 1995 par laquelle le maire de Rouen avait licencié M. Christophe X..., employé comme artiste chorégraphique au Théâtre des Arts ; que M. Christophe X..., après avoir été réintégré dans ses fonctions le 26 juin 1997, a refusé l'indemnité de 26 500 francs que le maire lui a proposé par lettre du 10 septembre 1997, en réparation des préjudices résultant de son éviction ; que M. Christophe X... demande à la Cour d'annuler cette décision et de condamner la ville à lui payer une somme de 122 417,61 francs ;
Sur la recevabilité de certaines conclusions du requérant :
Considérant que si M. Christophe X... demande à la Cour de lui donner acte qu'il est disposé à accepter que la ville de Rouen règle directement à l'ASSEDIC de Haute Normandie la somme de 69 045,25 francs, qu'il lui doit, par prélèvement sur les dommages-intérêts d'un montant de 122 417,61 francs qu'il réclame à la ville, de telles conclusions sont irrecevables devant le juge administratif ;
Sur le jugement contesté :
Considérant qu'il ne ressort ni de son dispositif, ni de sa motivation que le premier jugement du tribunal administratif du 30 avril 1997 se soit prononcé sur l'insuffisance professionnelle de M. Christophe X... ; que le jugement attaqué du 12 juin 1998, qui a constaté que le bien-fondé de l'insuffisance professionnelle de l'intéressé n'ayant pas été remise en cause cela le privait de tout droit à indemnisation, a méconnu la portée du premier jugement ; qu'il doit par suite être annulé ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Christophe X... devant le tribunal administratif de Rouen ;
Sur la responsabilité de la ville :
Considérant que, par lettre du 25 septembre 1997, le maire de Rouen a proposé à M. Christophe X... de réparer son préjudice par le versement d'une somme de 26 500 francs, sous réserve qu'il contresigne un projet de transaction à intervenir ; que cette lettre refuse ainsi de faire droit à l'intégralité de la demande indemnitaire adressée par le requérant à la ville le 8 septembre 1997 et, à hauteur de la somme de 26 500 francs, ne constitue qu'une simple proposition conditionnelle sans porté décisoire ; qu'ainsi les conclusions de la requête doivent être regardées dans leur ensemble comme un litige de plein contentieux, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur la demande d'annulation de la décision du 25 septembre 1997 ;
Considérant que M. Christophe X... a été seulement informé, quatre jours avant l'examen probatoire, des conditions du programme de cet examen, alors qu'il devait être prévenu un mois avant ; que dans ces circonstances, les épreuves qu'il a subies n'ont pu révéler de manière objective l'insuffisance professionnelle de l'intéressé, lequel soutient, sans être contredit, que c'est en raison de son âge qu'il aurait été évincé ; que dès lors son licenciement repose sur des faits dont l'exactitude matérielle n'a pas été établie et engage la responsabilité de la ville pour faute ;
Sur le préjudice du requérant :
Considérant que si en l'absence de service fait, M. Christophe X... ne peut prétendre au rappel des traitements dont il a été privé du fait de son licenciement illégal, il a droit à une indemnité égale à la différence entre les salaires nets qu'il aurait perçus s'il était resté en activité, non compris les indemnités et avantages en nature liés à l'exercice effectif des fonctions, et les rémunérations ou indemnités qu'il a pu toucher pendant la période d'éviction ;
Considérant que la prime de rendement, l'indemnité vestimentaire et la participation de l'employeur à l'achat de tickets-restaurants constituent des indemnités et avantages liés à l'exercice effectif des fonctions ; que dès lors M. Christophe X... n'est pas fondé à demander que les sommes que la ville de Rouen aurait dû lui verser à ce titre soient prises en compte dans le montant des émoluments dont il a été privé ;
Considérant qu'en l'absence de preuve du remboursement par M. Christophe X... des allocations pour perte d'emploi que lui a versées l'ASSEDIC de Haute Normandie pendant la période de son éviction, la restitution de ces sommes n'est qu'éventuelle ; que dès lors M. Christophe X... n'est pas fondé à soutenir que ces allocations, qu'il a effectivement perçues, doivent être écartées du calcul de son préjudice ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préjudice financier réellement subi par M. X... s'élève à 21 432 francs ; qu'il y a lieu, par suite, de condamner la ville de Rouen à lui verser ladite somme à titre de dommages et intérêts ;
Sur l'application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel :
Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que M. Christophe X..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante soit condamné à verser à la ville de Rouen la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu à condamner la ville de Rouen à payer à M. Christophe X... la somme de 3 000 francs au même titre ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rouen en date du 12 juin 1998 est annulé.
Article 2 : La ville de Rouen est condamnée à verser à M. Christophe X... la somme de 21 432 francs à titre de dommages et intérêts et la somme de 3 000 francs sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par M. Christophe X... est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de la ville de Rouen tendant à l'application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée au maire de la ville de Rouen, à M. Christophe X... et au ministre de l'intérieur. Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.