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07/11/2023 | FRANCE | N°23BX01956

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 07 novembre 2023, 23BX01956


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 21 juin 2021 par lequel la préfète de la Vienne a rejeté sa demande de titre de séjour.

Par un jugement n° 2102948 du 29 juin 2023, le tribunal administratif de Poitiers a, d'une part, annulé cet arrêté portant refus de séjour, d'autre part, enjoint au préfet de la Vienne de délivrer à M. B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à com

pter de la notification dudit jugement et, enfin, a mis à sa charge une somme de 900 eur...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 21 juin 2021 par lequel la préfète de la Vienne a rejeté sa demande de titre de séjour.

Par un jugement n° 2102948 du 29 juin 2023, le tribunal administratif de Poitiers a, d'une part, annulé cet arrêté portant refus de séjour, d'autre part, enjoint au préfet de la Vienne de délivrer à M. B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification dudit jugement et, enfin, a mis à sa charge une somme de 900 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 juillet 2023, le préfet de la Vienne demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 29 juin 2023 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Poitiers.

Il soutient que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que les éléments soulevés par M. B... en première instance étaient de nature à justifier qu'un titre de séjour lui soit délivré sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 août 2023, M. C..., représenté par Me Hay, demande à la Cour de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, et conclut au rejet de la requête du préfet de la Vienne et à ce qu'une somme de

1 200 euros, à verser à son conseil, soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le moyen invoqué par le préfet n'est pas fondé ;

- l'arrêté en litige a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que la commission du titre de séjour n'a pas été saisie ;

- l'arrêté en litige méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté en litige est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par une ordonnance du 18 juillet 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 4 septembre 2023.

M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux en date du 24 août 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant congolais né le 16 avril 1975 a sollicité le 31 janvier 2021 la délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale ". Par un arrêté du 21 juin 2021, le préfet de la Vienne a rejeté sa demande. Cette autorité relève appel du jugement n° 2102948 du 29 juin 2023 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a, d'une part, annulé cette décision portant refus de séjour, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à M. B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification dudit jugement et, enfin, a mis à la charge de l'Etat une somme de 900 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Sur l'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle :

2. Par une décision du 24 août 2023 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux, M. B... s'est vu maintenir le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale qui lui avait été accordée par une décision du 15 octobre 2021. Sa demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle étant devenue sans objet, il n'y a pas lieu d'y statuer.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :

3. Pour prononcer l'annulation de l'arrêté préfectoral du 21 juin 2021, le tribunal administratif de Poitiers a considéré qu'en refusant de délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " à M. B..., la préfète de la Vienne avait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.

4. Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1,

L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".

5. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré en France en 1985 alors qu'il était âgé de dix ans et y a effectué une grande partie de sa scolarité Il a ensuite bénéficié, de manière continue, sur la période comprise entre le 16 août 2008 et le

18 octobre 2019, de la délivrance de plusieurs titres de séjour ainsi que d'une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " vie privée et familiale ". Il ressort également de ces mêmes pièces que son père, arrivé en France en 1983, réside sur le territoire de façon régulière, et qu'il en est de même de sa sœur, chez qui il était hébergé à la date d'édiction de l'arrêté en litige, ainsi que de son frère et ses quatre demi-frères et sœur, dont deux sont de nationalité française. En outre, si les deux enfants de M. B..., de nationalité congolaise et qui sont nés, résident et sont scolarisés en France, ont fait l'objet d'une mesure de placement en septembre 2019, renouvelée par un jugement du 16 septembre 2020 du tribunal pour enfants près la cour d'appel de Paris, il ressort des motifs de ce jugement que le requérant bénéficie d'un droit de visite libre qu'il exerce à raison d'une fois par semaine et qui " se déroule bien ", tandis que la mère de ses enfants n'exercice plus son droit de visite depuis presque un an. Enfin, M. B... justifie avoir exercé plusieurs activités professionnelles en France et y avoir suivi des formations en vue de faciliter son intégration, notamment professionnelle. Dans ces circonstances, s'il est établi que

M. B... s'est rendu coupable en 2017 d'une infraction ayant conduit au prononcé d'une condamnation à une peine d'emprisonnement de six mois avec sursis pour des faits de violences suivies d'incapacité n'excédant pas huit jours par une personne étant ou ayant été conjoint, et quand bien même il aurait déclaré être également le père de deux enfants de nationalité congolaise résidant au Congo et respectivement nés en 2012 et 2017, la préfète de la Vienne a, compte tenu de la durée du séjour en France de M. B... et des liens personnels et familiaux dont il dispose sur le territoire, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise et a ainsi méconnu les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Vienne n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a annulé l'arrêté

du 21 juin 2021. Par suite, sa requête ne peut qu'être rejetée.

Sur les frais liés au litige

7. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 200 euros à Me Hay, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la part contributive de l'État à l'aide juridictionnelle.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. B... tendant à son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : La requête du préfet de la Vienne est rejetée.

Article 3 : L'Etat versera à Me Hay une somme de 1 200 euros en application de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C..., à Me Hay ainsi qu'au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 9 octobre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Ghislaine Markarian, présidente,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

M. Julien Dufour, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 novembre 2023.

Le rapporteur,

Julien A...

La présidente,

Ghislaine Markarian

La greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23BX01956 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX01956
Date de la décision : 07/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MARKARIAN
Rapporteur ?: M. Julien DUFOUR
Rapporteur public ?: M. DUPLAN
Avocat(s) : HAY

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-11-07;23bx01956 ?
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