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07/11/2023 | FRANCE | N°23BX01304

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 07 novembre 2023, 23BX01304


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 27 janvier 2023 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 2202899 du 13 avril 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée, le 15 mai 2023, M. B... A..., représenté par

Me Cesso, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif

de Bordeaux du 13 avril 2023

précité ;

2°) d'annuler l'arrêté du 27 janvier 2023 par lequel le préfet de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 27 janvier 2023 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 2202899 du 13 avril 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée, le 15 mai 2023, M. B... A..., représenté par

Me Cesso, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 13 avril 2023

précité ;

2°) d'annuler l'arrêté du 27 janvier 2023 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un certificat de résidence d'un an, à défaut, de réexaminer sa situation à compter de la notification de l'arrêt à venir et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant refus de séjour a été signée par une autorité incompétente ;

- la décision en litige est entachée d'une erreur de fait dès lors qu'elle mentionne qu'il n'est père que d'un enfant ;

- il ne représente pas une menace pour l'ordre public dès lors que les faits qui lui sont reprochés sont anciens et peu graves, et ont été commis sous l'empire d'un état alcoolique ;

- l'un de ses enfants est actuellement malade et nécessite des soins de sorte que la présence de ses deux parents à ses côtés est essentielle ;

- la décision méconnaît le 4) de l'article 6 de l'accord franco-algérien dès lors qu'il est père de deux enfants français mineurs résidant en France ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et le 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation eu égard à l'ancienneté de son séjour, à sa situation familiale et à son intégration ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors que ses enfants, et le fils de sa compagne, sont de nationalité française et ont vocation à résider en France.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 août 2023, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Il s'en remet à son mémoire déposé devant le tribunal.

Par une ordonnance du 7 août 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au

6 septembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Au cours de l'audience publique, ont été entendus :

- le rapport de Mme C...,

- et les observations de Me Esseul, substituant Me Cesso, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant algérien né le 16 janvier 1982, a déclaré être entré en France le 5 juillet 2016 de manière irrégulière et a sollicité le bénéfice de l'asile le

4 octobre 2016. Sur le fondement de la prise d'empreintes, il a été identifié comme ayant déposé une demande d'asile en Italie et la demande de remise faite aux autorités italiennes a été implicitement acceptée le 11 décembre 2016. M. A... a toutefois fait l'objet d'une déclaration de fuite. Il a sollicité, le 21 septembre 2021, son admission au séjour sur le fondement du 4) de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Par un arrêté du 27 janvier 2023, la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du

27 janvier 2023 précité.

2. En premier lieu, à l'appui de son moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté en litige, le requérant ne se prévaut devant la Cour d'aucun élément de droit ou de fait nouveau par rapport à son argumentation en première instance et ne critique pas la réponse apportée par le tribunal. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par le tribunal.

3. En deuxième lieu, la circonstance que l'arrêté litigieux mentionne par erreur qu'il est le père d'un enfant français et non de deux enfants français, est en l'espèce sans incidence sur la légalité de l'arrêté litigieux dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que la Préfète aurait pris la même décision si elle n'avait pas commis cette erreur.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 4) au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résident en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. Lorsque la qualité d'ascendant direct d'un enfant français résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à la naissance, le certificat de résidence d'un an n'est délivré au ressortissant algérien que s'il subvient à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an. ".

5. Ces stipulations ne privent pas l'autorité compétente du pouvoir qui lui appartient de refuser à un ressortissant algérien la délivrance du certificat de résidence d'un an lorsque sa présence en France constitue une menace pour l'ordre public, au sens des dispositions de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. Pour refuser le titre de séjour demandé par M. A... en qualité de parent d'enfant français, la préfète de la Gironde s'est fondée sur le motif tiré de ce que M. A... constitue une menace pour l'ordre public. Si M. A... soutient qu'il est le père de deux enfants de nationalité française nés les 1er juillet 2020 et 9 avril 2022 et qu'il ne constitue pas une menace pour l'ordre public, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il a été condamné par le tribunal correctionnel de Bordeaux à quatre mois d'emprisonnement avec sursis le 23 mars 2018 pour des faits commis le 9 janvier 2018 de vol par ruse, effraction ou escalade dans un local d'habitation ou un lieu d'entrepôt aggravé, à deux mois d'emprisonnement le 5 novembre 2020 pour des faits de dégradation ou détérioration du bien d'autrui commis en réunion le 24 mai 2020 et à cinq mois d'emprisonnement et interdiction de séjour pendant trois ans le 16 novembre 2020 pour violence commise en réunion, suivi d'incapacité n'excédant pas huit jours, faits commis le

12 novembre 2020. A cet égard l'intéressé fait valoir qu'il a obtenu la conversion des peines d'emprisonnement prononcées les 5 et 16 novembre 2020, en deux peines de travail d'intérêt général d'une durée respectivement de 105 et 70 heures, par deux jugements des 27 mai 2021 et 5 décembre 2022 du tribunal judiciaire de Bordeaux. Toutefois, cette conversion ne constitue qu'un mode d'aménagement de ses peines alors en outre qu'il ressort des mentions figurant au fichier du traitement des antécédents judiciaires concernant le concernant repris dans l'arrêté contesté qu'il est défavorablement connu des services de police pour des faits notamment de vol commis du 12 au 13 février 2022, soit après le premier jugement prononçant la conversion de ses peines. Eu égard au nombre, à la nature et au caractère répété et récent des faits délictueux qui lui sont reprochés, la préfète de la Gironde a pu estimer sans commettre d'erreur d'appréciation que l'intéressé représentait une menace pour l'ordre public. Par ailleurs, il ressort également des pièces du dossier que la commission du titre de séjour a émis, le 7 décembre 2022, un avis défavorable à la délivrance d'un titre de séjour à M. A... en retenant à son encontre un manque d'intégration sociale et professionnelle, l'absence de justification de son implication dans sa vie familiale et la prise en charge de ses deux enfants. Dans ces conditions, la préfète de la Gironde a pu, pour ce motif tiré de l'atteinte à l'ordre public, refuser de délivrer à M. A... un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien précité : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". En outre, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".

8. Il résulte de ces dernières stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

9. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui a déclaré être entré en France le

5 juillet 2016, s'est marié avec une ressortissante française le 27 juillet 2019, et a divorcé le

28 juin 2021 par une convention mentionnée au registre d'état civil le 11 août 2021. Le requérant soutient qu'il vit maritalement avec son ex-épouse, sans toutefois l'établir par la seule attestation d'hébergement de cette dernière indiquant qu'elle l'héberge à titre gratuit depuis janvier 2023. Par ailleurs, si M. A... est le père de deux enfants français, nés les 1er juillet 2020 et

9 avril 2022, de sa relation avec son ex-épouse, les justificatifs d'achats et un document attestant de la programmation d'un rendez-vous médical pour son fils, ne permettent pas d'établir qu'il contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation des enfants, ni même qu'il entretient avec ces derniers des liens réguliers. Enfin, M. A... a fait l'objet de plusieurs condamnations pénales et sa présence en France constitue, en raison de ses divers agissements, une menace pour l'ordre public. Ainsi, en dépit de l'insertion professionnelle, dont le requérant fait nouvellement état en appel, la décision contestée n'a pas porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, en prenant cette décision, la préfète de la Gironde n'a pas méconnu les dispositions du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Pour les mêmes motifs, la décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 janvier 2023 en litige. Sa requête doit, par suite, être rejetée, y compris, par voie de conséquence, ses conclusions présentées aux fins d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera délivrée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 9 octobre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Ghislaine Markarian, présidente,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

Mme Caroline Gaillard, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 novembre 2023.

Le rapporteur,

Caroline C...

La présidente,

Ghislaine Markarian

La greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23BX01304 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX01304
Date de la décision : 07/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MARKARIAN
Rapporteur ?: Mme Caroline GAILLARD
Rapporteur public ?: M. DUPLAN
Avocat(s) : CESSO

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-11-07;23bx01304 ?
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