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07/11/2023 | FRANCE | N°22BX01368

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 07 novembre 2023, 22BX01368


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... B..., Mme A... B..., M. C... B..., M. D... B... et Mme A... B..., cette dernière agissant en qualité de représente légale de ses trois filles mineures, ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner la commune d'Arcachon, d'une part, à leur verser la somme de 39 416 euros en réparation des préjudices subis par M. F... B..., d'autre part, à verser à Mme E... B..., veuve de M. F... B..., la somme de 164 680,04 euros à titre de dommages et intérêts, enfin, à verser à chacun des

trois enfants de M. B... la somme de 30 000 euros ainsi que la somme de 10 00...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... B..., Mme A... B..., M. C... B..., M. D... B... et Mme A... B..., cette dernière agissant en qualité de représente légale de ses trois filles mineures, ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner la commune d'Arcachon, d'une part, à leur verser la somme de 39 416 euros en réparation des préjudices subis par M. F... B..., d'autre part, à verser à Mme E... B..., veuve de M. F... B..., la somme de 164 680,04 euros à titre de dommages et intérêts, enfin, à verser à chacun des trois enfants de M. B... la somme de 30 000 euros ainsi que la somme de 10 000 euros à chacune de ses petites filles à titre de dommages et intérêts.

Par un jugement n° 2002223 du 16 mars 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 16 mai 2022, 23 janvier 2023 et

20 avril 2023, Mme E... B..., Mme A... B..., M. C... B...,

M. D... B... et Mme A... B... agissant en qualité de représente légale de ses trois filles mineures, représentés par Me Noël, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 16 mars 2022 ;

2°) de désigner un expert chargé de prendre connaissance du dossier médical de M. F... B..., de dire si sa maladie et son décès sont imputables au service, si la commune d'Arcachon a pris toutes les mesures de sécurité pour prévenir le risque de survenance de la maladie dont l'intéressé a été victime ;

3°) de condamner la commune d'Arcachon à leur verser la somme totale de

39 416 euros en réparation des préjudices subis par M. F... B..., assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 février 2020, date de réception de leur réclamation indemnitaire préalable, avec capitalisation ;

4°) de condamner la commune d'Arcachon à verser Mme E... B... la somme totale de 164 680,04 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis à la suite du décès de son époux, assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 février 2020, avec capitalisation ;

5°) de condamner la commune d'Arcachon à verser à chacun des trois enfants de M. B... la somme de 30 000 euros en réparation de leur préjudice d'affection, assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 février 2020, avec capitalisation ;

6°) de condamner la commune d'Arcachon à verser la somme de 10 000 euros à chacune des petites-filles de M. B..., assortie des intérêts au taux légal à compter du

3 février 2020, avec capitalisation ;

7°) de mettre à la charge de la commune d'Arcachon une somme de 1 500 euros à verser à Me Noël sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

8°) de mettre à la charge de la commune d'Arcachon une somme de 1 500 euros à verser à Mme A... B... et M. C... B..., chacun, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- M. B..., agent de la commune depuis 1975, s'est vu diagnostiqué en 2015 " un carcinome non à petites cellules paratrachéal droit ", cette maladie étant référencée au tableau des maladies professionnelles et qui a été reconnue imputable au service à compter du

2 octobre 2015, M. B... étant décédé le 18 juillet 2016 ; par suite, le tribunal a commis une erreur de fait en jugeant que les arrêtés du maire des 23 mai et 25 octobre 2016, reconnaissant l'imputabilité au service de la maladie de M. B... et de son décès, ont été abrogés, alors que ces décisions sont devenues définitives et ont créé des droits acquis à leur profit ;

- les premiers juges ont retenu à tort que la maladie dont était atteint M. B... était imputable à son tabagisme et que les travaux effectués par ce dernier n'entraient pas dans la liste limitative des travaux définis par le tableau 16 bis des maladies professionnelles et ont méconnu les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, qui prévoient que si la condition tenant à la liste limitative des travaux n'est pas remplie, la maladie désignée au tableau des maladies professionnelles peut être reconnue imputable au service quand l'agent ou ses ayants-droits établissent qu'elle est directement causée par les fonctions ;

- le tribunal, qui a fondé son appréciation sur le rapport d'expertise d'un médecin généraliste sans tenir compte de l'avis d'autres médecins spécialistes de pathologies professionnelles, ne pouvait, sans commettre d'erreur d'appréciation juger, qu'il n'y avait pas de lien direct et certain entre la maladie de M. B... et son exposition pendant plus de dix ans aux goudrons de houille et de silice ;

- cette situation engage la responsabilité pour faute de la commune qui a manqué à son obligation d'assurer la sécurité de ses agents, laquelle découle de l'article 23 de la loi du

13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de l'article 2-1 du décret du

10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la médecine professionnelle et préventive dans la fonction publique alors que les risques liés à l'exposition aux goudrons de houille sont connus depuis au moins 1972 et que la commune n'a pas justifié avoir mis en place des équipements de protection individuelle pour prévenir l'exposition aux goudrons de houille ;

- ils ont droit à être indemnisés de l'ensemble des préjudices qui découlent de la maladie et du décès de M. B... qui a connu un déficit fonctionnel temporaire, a enduré des souffrances et subi un préjudice moral, un préjudice d'agrément, un préjudice esthétique et un préjudice sexuel à hauteur d'une somme totale de 39 416 euros ;

- Mme E... B..., sa veuve, subit un préjudice économique, un préjudice d'affection, des troubles dans ses conditions d'existence et a assumé des frais d'obsèques et a droit à la somme totale de 164 680,04 euros ;

- les enfants de M. B... ont subi un préjudice d'affection qui sera évalué à

30 000 euros chacun et à 10 000 euros pour chacun des petits-enfants de M. B....

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 février 2023, la commune d'Arcachon, représentée par la SARL Boissy Avocats Associés, agissant par Me Boissy, conclut :

1°) à titre principal, au rejet de la requête ;

2°) à titre subsidiaire, à la limitation des indemnités demandées par les requérants en réparation de leurs préjudices.

Elle soutient que les moyens doivent être écartés comme infondés.

Le 3 octobre 2023, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que le jugement attaqué est irrégulier pour avoir omis d'appeler à la cause la caisse primaire d'assurance maladie dont relevait F... B... en vue de lui permettre, le cas échéant, d'obtenir le remboursement de ses débours.

Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Bordeaux

du 29 septembre 2022, Mme E... B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle.

Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Bordeaux du 10 novembre 2022, M. D... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 916647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Frédéric Faïck,

- les conclusions de M. Anthony Duplan, rapporteur public,

- et les observations de Me Latour représentant les consorts B... et de Me Dubois, substituant Me Boissy, représentant la commune d'Arcachon.

Considérant ce qui suit :

1. M. F... B..., fonctionnaire territorial né le 4 mai 1956, a été employé par la commune d'Arcachon, comme agent technique de voirie entre 1975 et 1988, puis comme agent technique aux espaces verts de 1988 à 2015. Après qu'un cancer des poumons lui eut été diagnostiqué le 2 octobre 2015, M. B... est décédé de cette maladie le 18 juillet 2016. Par une décision du 21 juin 2017, la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) a refusé d'accorder à Mme E... B..., veuve de M. B..., le bénéfice d'une rente viagère d'invalidité au motif que le lien direct et certain entre la maladie et l'exercice des fonctions n'était pas établi. La requête de Mme B... dirigée contre cette décision a été rejetée par un jugement du 23 février 2021 devenu définitif. A la demande de

Mme E... B... et de ses trois enfants, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, a, par une ordonnance du 17 avril 2018, ordonné une expertise en vue d'examiner le dossier médical de M. B... et de déterminer si sa maladie et son décès sont en lien avec ses fonctions exercées comme agent de voirie. Après le dépôt du rapport d'expertise en mai 2019, Mme B... et ses enfants ont, le 30 janvier 2020, adressé une demande préalable d'indemnisation à la commune d'Arcachon qui a été implicitement rejetée. Mme B..., ses enfants et petits-enfants ont saisi le tribunal administratif de Bordeaux d'une demande tendant à la condamnation de la commune d'Arcachon à les indemniser de leurs préjudices résultant de la maladie et du décès de leur époux, père et grand-père. Ils relèvent appel du jugement rendu le

16 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leurs demandes.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes du huitième alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : " L'intéressé ou ses ayants droit doivent indiquer, en tout état de la procédure, la qualité d'assuré social de la victime de l'accident ainsi que les caisses de sécurité sociale auxquelles celle-ci est ou était affiliée pour les divers risques. Ils doivent appeler ces caisses en déclaration de jugement commun ou réciproquement (...).

3. Il appartient au juge administratif qui dirige l'instruction d'assurer, en tout état de la procédure, le respect des dispositions précitées. Ainsi, le tribunal administratif, saisi par la victime ou ses ayants droit d'une demande tendant à la réparation du dommage corporel par l'auteur de l'accident, doit appeler en la cause la caisse. La méconnaissance de cette obligation entache le jugement d'une irrégularité que le juge d'appel doit, au besoin, relever d'office.

4. Si Mme B... s'est vu refuser le bénéfice d'une rente viagère d'invalidité, les consorts B... conservent le droit de demander à la commune d'Arcachon la réparation de leurs préjudices. Par suite, il appartenait au tribunal administratif de Bordeaux d'appeler dans la cause la caisse de sécurité sociale à laquelle M. B... était affilié. En s'abstenant d'y procéder, le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité. Par suite, il y a lieu d'annuler le jugement, d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes présentées en première instance par les consorts B....

Sur la responsabilité de la commune d'Arcachon :

5. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et, pour les fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales du II de l'article 119 de la loi du 26 janvier 1984, les articles 1er et 2 du décret du 2 mai 2005, relatif à l'attribution de l'allocation temporaire d'invalidité aux fonctionnaires relevant de la fonction publique territoriale, ainsi que les article 37, 40 et 42 du décret du 26 décembre 2003, relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales, déterminent forfaitairement la réparation à laquelle un fonctionnaire victime d'un accident de service ou atteint d'une maladie professionnelle peut prétendre, au titre de l'atteinte qu'il a subie dans son intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Compte tenu des conditions posées à leur octroi et de leur mode de calcul, la rente viagère d'invalidité et l'allocation temporaire d'invalidité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle.

6. Ces dispositions ne font en revanche obstacle, ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne, ces actions pouvant être présentées par ses ayants droit.

7. Ainsi qu'il a été dit, M. F... B... a travaillé pour la commune d'Arcachon comme agent technique de voirie entre 1975 et 1988, période durant laquelle il a pu être exposé aux goudrons de houille et à la silice. Il résulte de l'instruction que, après avis favorable de la commission de réforme, sa maladie a été reconnue imputable au service par une décision du maire prise le 23 mai 2016. Son décès, survenu le 18 juillet suivant, a également été reconnu imputable au service par une décision du 25 octobre 2016 faisant suite à un avis favorable de la commission de réforme. Par une décision du 21 juin 2017, la CNRACL a toutefois refusé d'accorder à Mme E... B..., veuve de M. B..., le bénéfice d'une rente viagère d'invalidité au motif que l'existence d'un lien direct entre la maladie et l'exercice des fonctions n'était pas établi. L'expert désigné par le juge des référés du tribunal a également estimé, dans son rapport remis en mai 2019, qu'il n'existait pas de lien direct entre les conditions de travail de M. B... et son décès.

8. En premier lieu, si les décisions précitées du 23 mai 2016 et du 25 octobre 2016 ont créé des droits au profit de M. B... et de ses ayants droit, les requérants ne peuvent utilement soutenir qu'ils tirent des décisions des 23 mai et 25 octobre 2016 un droit acquis à être indemnisés de leurs préjudices découlant du décès de M. B....

9. En second lieu, selon le certificat médical rédigé le 11 janvier 2016 par le médecin chef du service de médecine du travail et des pathologies professionnelles du centre hospitalier universitaire de Bordeaux, le cancer des poumons dont a été victime M. B... est " en rapport avec une exposition professionnelle aux goudrons de houille et silice ". Pour justifier cette conclusion, l'auteur de ce certificat se réfère au tableau 16 bis des maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale annexé à l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale. Toutefois, les dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale instituant une présomption d'origine professionnelle pour toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans des conditions mentionnées à ce tableau n'ont été rendues applicables aux agents de la fonction publique territoriale que le 13 avril 2019, date d'entrée en vigueur du décret du 1er avril 2019 visé ci-dessus, soit après le décès de M. B..... Au surplus, il résulte de l'instruction que les tâches effectuées par M. B... comme agent de voirie n'entraient pas dans la liste, limitative, des travaux définis par le tableau 16 bis comme étant susceptibles de provoquer un cancer broncho-pulmonaire primitif présumé d'origine professionnelle. Dans ces conditions, il appartient aux appelants d'établir que la maladie dont a souffert M. B... présente un lien direct avec les conditions dans lesquelles ce dernier a exercé ses fonctions d'agent de voirie, de nature à susciter le développement de sa maladie, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

10. Le certificat médical du 17 août 2016 que produisent les requérants se borne à affirmer que le décès de M. B... est la conséquence de sa maladie professionnelle sans que cette conclusion soit précédée d'une quelconque démonstration. L'autre certificat daté du

2 mars 2017 adopte la même conclusion, en se fondant uniquement sur le certificat médical précité du 11 janvier 2016 qui retient à tort que M. B... aurait accompli des travaux relevant du tableau 16 bis des maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale.

11. Il est constant, comme cela a été rappelé par l'expert judiciaire, que M. B... présentait de forts antécédents de tabagisme, ayant fumé pendant 30 ans, jusqu'à l'annonce de sa maladie, l'équivalent d'un paquet de cigarettes par jour. Selon le rapport d'expertise, non seulement le tabagisme est le premier facteur du cancer du poumon, dont il provoque la survenance dans neuf cas sur dix pour les patients de sexe masculin, mais sa durée est un facteur plus important encore que la quantité fumée dans la réalisation du risque. Toutefois, l'expert n'a pas omis d'étudier si les travaux de voirie auxquels M. B... a participé entre 1975 et 1988 ont contribué à la survenance de sa maladie, l'exposition aux goudrons de houilles pouvant se combiner avec le tabagisme pour favoriser une telle maladie. Ainsi, s'il résulte, certes, de l'instruction qu'à l'occasion de certaines tâches qu'il a été amené à effectuer, M. B... a pu être exposé aux goudrons de houille et de silice, les requérants n'apportent pas, en appel comme en première instance, d'éléments permettant d'apprécier les circonstances exactes et la fréquence de l'exposition de l'intéressé à ces substances, alors que l'expert souligne, en particulier, qu'aucune anomalie médicale n'a été relevée chez M. B... après qu'il eut cessé, en 1988, ses fonctions comme agent technique de voirie.

12. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'expertise repose sur une argumentation suffisamment étayée, et se réfère à une bibliographie médicale citée en annexe relative au type de cancer dont a souffert M. B.... Pour contester les conclusions de l'expert judiciaire, les requérants produisent en appel une " note médico-légale " du 7 septembre 2022 regrettant que l'avis de spécialistes consultés par l'expert judiciaire n'ait pas été retranscrit dans le rapport, et que le tableau 16 bis des maladies professionnelles n'ait pas servi de référence. Toutefois ces seuls éléments, alors que les travaux accomplis par M. B... n'étaient en tout état de cause pas au nombre de ceux visés au tableau précité, ne sont pas suffisants pour remettre en cause les conclusions de l'expert judiciaire. De même, l'auteur de la note du 7 septembre 2022 se borne à relever que le lien entre la maladie de M. B... et son tabagisme n'est pas nécessairement exclusif, sans apporter d'éléments de nature à établir que les conditions dans lesquelles l'intéressé a exercé ses fonctions d'agent de voirie auraient pu être la cause, qui n'a certes pas à être exclusive, mais qui doit être directe, de sa maladie et de son décès.

13. Dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise, les consorts B... ne sont pas fondés à demander la condamnation de la commune d'Arcachon à réparer les préjudices qu'ils allèguent.

14. Il résulte de tout ce qui précède que les consorts B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Sur les frais d'instance :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle aux conclusions des consorts B... tendant à ce que la commune d'Arcachon qui n'est pas la partie perdante à l'instance, leur verse une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE

Article 1er : Le jugement n° 2202223 du tribunal administratif de Bordeaux du 16 mars 2022 est annulé.

Article 2 : La demande de première instance et les conclusions d'appel des consorts B... sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B..., à Mme A... B..., à M. C... B..., à M. D... B..., à la commune d'Arcachon, et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 9 octobre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Ghislaine Markarian, présidente,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

Mme Caroline Gaillard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2023.

Le rapporteur,

Frédéric Faïck

La présidente,

Ghislaine Markarian

La greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 22BX01368 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX01368
Date de la décision : 07/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme MARKARIAN
Rapporteur ?: M. Frédéric FAÏCK
Rapporteur public ?: M. DUPLAN
Avocat(s) : NOEL

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-11-07;22bx01368 ?
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