Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Madame B... C... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 11 février 2022 par lequel le préfet de La Réunion a refusé de lui renouveler son titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée à l'expiration de ce délai.
Par un jugement n° 2200348 du 27 juin 2022, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 3 novembre 2022, Mme B... C..., représentée par Me Rabearison, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de La Réunion du 27 juin 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de La Réunion du 11 février 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet de La Réunion de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à défaut, de réexaminer sa situation les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au bénéfice de son conseil, une somme de 1 500 euros, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- l'arrêté en litige portant refus de séjour est entaché d'une insuffisance de motivation et a été pris sans examen réel et sérieux de sa situation et l'obligation de quitter le territoire est, du fait de cette motivation irrégulière du refus de séjour, également dénuée de motivation ;
- la décision portant refus de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors le tribunal administratif a dénaturé les pièces du dossier en estimant qu'elle ne démontrait ni une résidence commune avec sa fille, alors qu'elle a produit un certificat de scolarité établi à la même adresse que son domicile, ni que cette dernière était à sa charge ;
- la décision portant refus de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 juin 2023, le préfet de La Réunion conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 6 juin 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 28 juin 2023.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux en date du 29 septembre 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique du 25 septembre 2023.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... C..., ressortissante malgache née le 6 avril 1982 à Mahasoabe, est entrée à La Réunion le 1er février 2019 sous couvert d'un visa de long séjour valant titre de séjour en qualité de conjointe d'un ressortissant français et a obtenu sur ce fondement un titre de séjour mention " vie privée et familiale ". A la suite de son divorce prononcé le 14 décembre 2021, elle a demandé le renouvellement de son titre de séjour le 18 janvier 2022 sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté en date du 11 février 2022, le préfet de La Réunion a rejeté sa demande et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours suivant la notification de l'arrêté en litige et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée à l'expiration de ce délai. Mme C... relève appel du jugement du 27 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté précité.
Sur la régularité du jugement :
2. Le moyen invoqué par la requérante et tiré de la dénaturation des pièces du dossier par les premiers juges ne relève pas de l'office du juge d'appel, mais de celui du juge de cassation. Si Mme C... a entendu, en invoquant une telle dénaturation, contester l'appréciation faite par les premiers juges des pièces qu'elle a produites, un tel moyen se rapporte au bien-fondé du jugement, et non à sa régularité, et doit par suite être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne l'arrêté pris dans son ensemble :
3. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) constituent une mesure de police... ". Aux termes de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
4. D'une part, l'arrêté en litige vise les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du code des relations entre le public et l'administration dont il fait application, ainsi que la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8. Il mentionne, notamment, outre la date d'arrivée en France de Mme C..., les visas et cartes de séjour temporaire qui lui ont été délivrés antérieurement ainsi que sa situation privée et familiale en France comme son activité professionnelle, relève en détaillant la procédure de son divorce qu'elle ne justifie pas d'une communauté de vie sur le territoire national avec son époux, ni ne justifie être à la charge de sa fille de nationalité française et de ses liens personnels et familiaux en France. Ainsi, et contrairement à ce que soutient la requérante, l'arrêté litigieux, est suffisamment motivé. Cette motivation établit par ailleurs que l'autorité préfectorale a procédé à un examen réel et sérieux de la situation de Mme C....
5. D'autre part, il résulte des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que la décision portant obligation de quitter le territoire français, prise concomitamment à une décision de refus de titre de séjour, qui en l'espèce est suffisamment motivée, n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte.
6. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté en litige ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
8. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... s'est mariée le 17 mai 2018 à Madagascar avec un ressortissant français, qui a reconnu le 15 mai précédent la fille de la requérante alors âgée de 17 ans. Si Mme C... est entrée à La Réunion le 1er février 2019, munie d'un visa de long séjour valant titre de séjour en qualité de conjointe d'un ressortissant français, la communauté de vie a rapidement cessé puisque son époux a engagé dès le mois de juin 2020 une procédure en divorce, arguant devant le Préfet avoir été trompé sur la réalité de son union. Si la requérante a sollicité, à l'appui de sa demande de renouvellement de son titre de séjour, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de la vie privée et familiale en invoquant la présence en France de sa fille, de nationalité française depuis sa reconnaissance par son ex-époux, elle se borne à produire un certificat de scolarité de cette dernière pour l'année 2021/2022 en 1ère année de BTS comptabilité et gestion, laquelle formation est toutefois dispensée par le CNED de Poitiers. En outre, si Mme C... se prévaut également de la présence de ses sœurs sur le territoire français, elle ne démontre cependant pas entretenir avec elles des liens réels, stables et intenses au sens des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Enfin, Mme C... ne démontre pas s'être particulièrement intégrée dans la société française et disposer d'une stabilité professionnelle. Dans ces conditions, et quand bien même la requérante percevrait une pension alimentaire pour sa fille, elle n'est pas fondée à soutenir, compte tenu du caractère récent et des conditions de son séjour en France, et dans la mesure où elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, que la décision portant refus de séjour porterait une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de sa vie privée et familiale et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. En second lieu, et pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8 du présent arrêt, le moyen tiré de ce que la décision portant refus de séjour en litige méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :
10. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de séjour à l'encontre de la décision en litige doit être écarté.
11. En second lieu, et ce pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8 du présent arrêt, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de La Réunion
Délibéré après l'audience du 25 septembre 2023 à laquelle siégeaient :
Mme Ghislaine Markarian, présidente,
M. Frédéric Faïck, président-assesseur,
Mme Caroline Gaillard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 octobre 2023.
La présidente-rapporteure,
Ghislaine A...
Le président-assesseur,
Frédéric Faick
La greffière,
Stéphanie Larrue La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 22BX02806
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