La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/10/2023 | FRANCE | N°23BX01223

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 03 octobre 2023, 23BX01223


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 25 novembre 2022 par lequel la préfète de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n°2300201 du 6 avril 2023, le tribunal administratif de Limoges a annulé l'arrêté du 25 novembre 2022.

Pr

océdure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 mai 2023, la préfète de la Haute-...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 25 novembre 2022 par lequel la préfète de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n°2300201 du 6 avril 2023, le tribunal administratif de Limoges a annulé l'arrêté du 25 novembre 2022.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 mai 2023, la préfète de la Haute-Vienne demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 6 avril 2023 ;

2°) de rejeter la demande de M. E....

Elle soutient que :

- la décision de refus de séjour ne méconnaît pas l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que la communauté de vie n'est pas établie et que l'intéressé n'établit pas participer à l'éducation et à l'entretien de son enfant ;

- le signataire de l'arrêté contesté était titulaire d'une délégation de signature régulièrement publiée ;

- aucune atteinte disproportionnée n'est portée au droit au respect de la vie privée et familiale de M. E..., garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et du citoyen.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juin 2023, M. C... E..., représenté par Me Pion, conclut au rejet de la requête et à ce que le versement à son avocat d'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

M. E... soutient que les moyens invoqués par la préfète de la Haute-Vienne ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 20 juin 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 juillet 2023.

Le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux a accordé à M. E... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 20 juin 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... E..., ressortissant nigérian né le 19 novembre 1995, est entré irrégulièrement en France, le 15 juillet 2017, selon ses déclarations. Le 15 mars 2018, il a fait l'objet d'un arrêté de transfert aux autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile, dont la légalité a été confirmée par un jugement du 20 mars 2018 du tribunal administratif de Limoges. Le requérant s'est maintenu sur le territoire français et sa demande d'asile a été rejetée en dernier lieu par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 1er avril 2021. Il a fait l'objet le 26 avril 2021 d'un arrêté portant retrait de son attestation de demande d'asile et obligation de quitter le territoire. Le 3 août 2021, M. E... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en raison de ses liens familiaux en France, qui a été rejetée par une décision du 26 janvier 2022 de la préfète de la Haute-Vienne. Cette même autorité a, par un arrêté du 25 novembre 2022, opposé un refus à la nouvelle demande de M. E... déposée au titre de ses liens privés et familiaux en France, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement. Par un jugement du 6 avril 2023 dont la préfète de la Haute-Vienne relève appel, le tribunal administratif de Limoges a annulé cet arrêté, et a enjoint à la délivrance à M. E... d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

Sur la légalité de l'arrêté du 25 novembre 2022 :

2. Aux termes de l'article L. 423-23 du CESEDA : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. E... a eu un enfant, A..., né le 8 avril 2021, avec Mme D... F..., compatriote résidant en France avec son premier enfant, âgé de six ans, sous couvert d'une carte de résident valable du 23 avril 2014 au 22 avril 2024. Si l'acte de naissance A... mentionne une adresse différente pour les deux parents, M. E... produit différents documents administratifs suffisamment probants pour établir l'existence d'une communauté de vie antérieure, dont le plus ancien est l'avis d'impôt sur le revenu de l'intéressé au titre de l'année 2019, établi en juillet 2020, mentionnant l'adresse figurant sur la carte de résident de Mme F.... M. E... a produit également des pièces témoignant de sa participation à l'éducation de son enfant, en particulier une attestation de la crèche qui accueille son fils, ainsi que d'un médecin du pôle solidarité enfance du département de la Haute-Vienne. Si ces documents ont été établis postérieurement à l'arrêté contesté, ils se rapportent à la situation existant à la date de celui-ci. Dans ces conditions, en refusant de délivrer à M. E... un titre de séjour, la préfète de la Haute-Vienne a méconnu les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Il résulte de ce qui précède que la préfète de la Haute-Vienne n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a annulé l'arrêté du 25 novembre 2022.

Sur les frais de l'instance :

5. M. E... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Pion, avocate de M. E..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Pion de la somme de 1 000 euros.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la préfète de la Haute-Vienne est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à Me Pion une somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Pion renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer, à M. C... E... et à Me Pion.

Copie en sera adressée pour information à la préfète de la Haute-Vienne.

Délibéré après l'audience du 11 septembre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Ghislaine Markarian, présidente,

M. Frédéric Faïck, président assesseur,

M. Julien Dufour, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 octobre 2023.

Le rapporteur,

Julien B...

La présidente,

Ghislaine Markarian

La greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne à la préfète de la Haute-Vienne en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°23BX01223 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX01223
Date de la décision : 03/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MARKARIAN
Rapporteur ?: M. Julien DUFOUR
Rapporteur public ?: M. DUPLAN
Avocat(s) : PION

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-10-03;23bx01223 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award