Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 17 juin 2019 par lequel la maire de La Possession l'a suspendu de ses fonctions à compter du 18 juin 2019, l'arrêté du 14 janvier 2020 lui infligeant un blâme et la lettre du 7 février 2020 l'informant que de nouvelles missions lui seraient confiées à compter du 19 février 2020.
Par un jugement n° 2000225 du 12 mars 2021, le tribunal administratif de La Réunion a annulé l'arrêté du 14 janvier 2020 par lequel la maire de La Possession a infligé un blâme à M. A..., a enjoint à la maire de La Possession de procéder à la suppression dans le dossier de M. A... de toute mention de la sanction du 14 janvier 2020, et a rejeté le surplus de ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 10 mai 2021, la commune de La Possession, représentée par Me Benoiton, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de La Réunion du 12 mars 2021 en tant qu'il a annulé l'arrêté du 14 janvier 2020 du maire de la commune de La Possession ;
2°) de mettre à la charge de M. A... la somme de 2 500 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
En ce qui concerne la régularité du jugement :
- le tribunal a statué " ultra petita " et a méconnu l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que le principe d'impartialité en annulant la sanction en litige alors que le moyen tiré de l'absence de proportionnalité de la sanction n'était pas soulevé ;
En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :
- contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, la requête présentée par M. A... est irrecevable dès lors que le requérant ne peut saisir le juge de conclusions à fin de retrait de l'arrêté en litige ; en outre il ne présente aucun moyen à l'encontre de cette arrêté lui infligeant la sanction du blâme ; enfin, sa requête était tardive ;
Au fond :
- le tribunal a commis une erreur de fait, en ne retenant pas l'intégralité des faits et circonstances qui avaient fondé la sanction en litige ;
- la sanction prononcée est fondée sur des faits matériellement inexacts et n'est entachée d'aucune erreur d'appréciation.
La requête a été communiquée à M. A... qui, bien qu'informé par courrier du greffe du 28 septembre 2022 de l'obligation de ministère d'avocat, n'a pas produit de mémoire par avocat.
Par une ordonnance du 8 février 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 6 mars 2023 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Caroline Gaillard,
- les conclusions de Mme Florence Madelaigue, rapporteure publique,
- et les observations de Me Benoiton, représentant la commune de La Possession.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., brigadier de police municipale employé par la commune de La Possession, a été suspendu de ses fonctions à compter du 18 juin 2019 par un arrêté de la maire de La Possession du 17 juin 2019. Par un arrêté du 14 janvier 2020, la maire lui a infligé un blâme à titre de sanction. Par lettre du 7 février 2020, M. A..., alors en congé de maladie, a été informé des nouvelles missions qui lui seraient confiées à son retour. M. A... a demandé au tribunal administratif de La Réunion l'annulation de ces trois décisions. Par un jugement du 12 mars 2021, le tribunal a annulé l'arrêté du 14 janvier 2020 par lequel la maire de La Possession a infligé un blâme à M. A..., a enjoint à la commune de La Possession de procéder à la suppression dans le dossier de ce dernier des mentions relatives à la sanction du 14 janvier 2020, et a rejeté le surplus. La commune de La Possession relève appel de ce jugement dont elle demande l'annulation en tant qu'il a fait droit partiellement aux demandes présentées par M. A....
Sur le bien-fondé du motif d'annulation retenu par les premiers juges :
2. Aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire (...) ".
3. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
4. Aux termes de l'arrêté en litige, il est notamment reproché à M. A... son attitude outrageante et provocatrice à l'encontre de ses collègues et des usagers, à l'origine de troubles dans l'organisation du service.
5. Pour annuler la sanction prononcée à son encontre, le tribunal a estimé que les témoignages versés par la commune ne pouvaient être pris en compte au motif qu'ils étaient anonymes ou émanaient de collègues contre lesquels M. A... avait déposé plainte pour harcèlement moral, alors que les pièces produites par ce dernier montraient qu'il subissait l'animosité de ses collègues. Toutefois il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport du 10 octobre 2018 rédigé par le responsable du service de la police municipale, que M. A... adoptait un comportement provocateur et inapproprié, tant envers les usagers, notamment à l'occasion de contrôles routiers, qu'envers ses collègues, lesquels étaient réticents à patrouiller avec lui. Il ressort également d'un courrier qui lui a été adressé le 7 décembre 2018 par le chef de service de la police municipale, que M. A... a eu un comportement inapproprié en se rendant dans son bureau pour exiger énergiquement le règlement d'un différend l'opposant à un collègue. Selon un compte-rendu du 5 juin 2019, établi par le responsable-adjoint de la police municipale, M. A... a tenu des propos provocants et irrespectueux au seul motif qu'il avait dû attendre pour pouvoir accéder aux vestiaires. Enfin, un rapport d'information du brigadier-chef du 7 juin 2019 relate qu'à l'occasion d'un incident de service lié à la perte d'une télécommande de climatisation, M. A... a adopté, une nouvelle fois, une attitude agressive et provocatrice.
6. Dans ces circonstances, en dépit de l'avis défavorable à toute sanction rendu par le conseil de discipline, la maire de La Possession a pu considérer que les faits précités, reprochés à M. A..., étaient matériellement établis et qu'ils étaient constitutifs d'une faute. Quant à la circonstance alléguée selon laquelle M. A... serait ostracisé par ses collègues, elle ne permet pas de retirer le caractère fautif qui caractérise son comportement.
7. Par suite, la commune de La Possession est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a annulé l'arrêté en litige au motif que les faits précités, reprochés à M. A..., ne sont pas constitutifs d'une faute de nature à justifier l'infliction d'une sanction disciplinaire.
8. Il appartient à la cour, saisie du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés en première instance par M. A... à l'encontre de la sanction du 14 janvier 2020.
Sur les autres moyens de première instance :
9. En premier lieu, le comportement provocateur et irrespectueux adopté par M. A..., et ce de manière répétée, justifiait à lui seul que la sanction du blâme fût appliquée sans que cette sanction, qui appartient au premier groupe des sanctions disciplinaires, soit disproportionnée par rapport à la gravité des fautes commises.
10. En second lieu, à supposer que M. A... ait été victime de harcèlement de la part de ses collègues, cette circonstance serait sans incidence sur les faits qui lui sont reprochés, qui sont établis et fautifs.
11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées à la demande de première instance, ni la régularité du jugement attaqué, que la commune de La Possession est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de La Réunion a annulé l'arrêté du 14 janvier 2020 en litige. Dès lors, ce jugement doit être annulé en tant qu'il a prononcé cette annulation et prescrit à la commune de supprimer du dossier de M. A... toute mention relative à la sanction en litige.
Sur les frais liés à l'instance :
12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... une somme de 1 000 euros à verser à la commune de La Possession en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : : Le jugement n° 2000225 du tribunal administratif de La Réunion du 12 mars 2021 est annulé en tant qu'il a annulé la sanction du 14 janvier 2020 et prescrit à la commune de supprimer du dossier de M. A... toute mention relative à cette sanction.
Article 2 : La demande de première instance de M. A... dirigée contre la sanction du 14 janvier 2020 est rejetée.
Article 3 : M. A... versera la somme de 1 000 euros à la commune de La Possession en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de La Possession.
Délibéré après l'audience du 3 juillet 2023 à laquelle siégeaient :
M. Frédéric Faïck, président,
Mme Caroline Gaillard, première conseillère,
M. Anthony Duplan, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 juillet 2023.
La rapporteure,
Caroline Gaillard
Le président,
Frédéric Faïck
La greffière,
Catherine JussyLa République mande et ordonne au préfet de la Réunion en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21BX01919