Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 14 juin 2022 par lequel le préfet de l'Indre a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jour.
Par un jugement n° 2200954 du 29 septembre 2022, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 octobre 2022, M. A..., représenté par Me Gomot-Pinard, demande à la cour :
1°) de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 29 septembre 2022 ;
3°) d'annuler l'arrêté du 14 juin 2022 du préfet de l'Indre ;
4°) d'enjoindre au préfet de l'Indre de lui délivrer un titre de séjour, ou à défaut, de procéder au réexamen de sa demande, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'État les entiers dépens lesquels seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé ;
- il méconnaît les articles L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard à sa situation familiale et professionnelle ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judicaire de Bordeaux par une décision n°2022/015584 du 8 décembre 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant arménien, né le 21 juin 1987, est entré dans l'espace Schengen sous couvert d'un visa court séjour délivré par les autorités consulaires tchèques, avant de rejoindre la France, le 15 septembre 2016 selon ses déclarations. Après avoir sollicité l'asile auprès de la préfecture du Loiret le 24 octobre 2016, il a fait l'objet, le 9 juin 2017, d'un arrêté de transfert vers la République Tchèque auquel il s'est soustrait. Le 1er juillet 2020, il a sollicité un titre de séjour " salarié " sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 14 juin 2022, le préfet de l'Indre a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. A... relève appel du jugement du 29 septembre 2022, par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 14 juin 2022.
Sur l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :
2. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n° 2022/015584 du bureau de l'aide juridictionnelle du tribunal judicaire de Bordeaux du 8 décembre 2022. Par suite, ses conclusions tendant à l'admission à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet.
Sur les conclusions afin d'annulation :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui :/1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
4. Ainsi que l'ont jugé les premiers juges, la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour à M. A... comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet de l'Indre s'est fondé. Elle vise les textes dont l'administration a entendu faire l'application, et notamment l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Au titre des considérations de faits, la décision mentionne, plusieurs éléments de la situation professionnelle de l'intéressé, et se réfère notamment à son activité au sein de la communauté d'Emmaüs, ainsi qu'au contrat de travail à durée déterminée en qualité d'ouvrier applicateur, conclu de juin à décembre 2020 avec la société Woodworking. Si la décision contestée ne fait pas mention de la situation de concubinage du requérant avec une compatriote et de la naissance de leur fils en octobre 2021, il n'est pas soutenu ni même allégué que cette situation aurait été portée à la connaissance du préfet préalablement à l'édiction de la décision contestée. Dès lors, la décision attaquée est suffisamment motivée au regard des dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 précités du code des relations entre le public et l'administration.
5. En deuxième lieu, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a présenté une demande d'admission exceptionnelle au séjour en sollicitant la délivrance d'un titre de séjour " salarié " sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et il ne résulte pas des termes de la décision attaquée que le préfet aurait examiné d'office sa demande sur le fondement de l'article L. 423-23 du même code. Par suite, M. A... ne peut utilement se prévaloir à l'encontre de la décision portant refus de séjour de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23, au regard desquelles cette autorité n'a pas fait porter d'office son examen, ni soutenir que le préfet aurait dû examiner sa situation au regard de ces dispositions.
6. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
7. M. A... se prévaut de son concubinage avec une compatriote titulaire d'un titre de séjour valable du 11 mai 2022 au 10 mai 2023, dont il a eu un enfant né le 21 octobre 2021 et qui est par ailleurs mère d'une enfant née d'une autre union et scolarisée en cours élémentaire. Toutefois, en se bornant à produire le seul témoignage d'une voisine attestant de la communauté de vie depuis juin 2021, le requérant n'établit ni l'ancienneté, ni la stabilité de la relation dont il se prévaut. Il ne ressort pas des pièces du dossier que sa concubine titulaire d'un titre de séjour temporaire aurait vocation à s'établir durablement en France, ni que la cellule familiale ne pourrait se reconstituer dans leur pays d'origine, en Arménie. Dans ces conditions, et alors même que M. A... a été employé durant six mois en 2020 et cinq mois en 2021 par la même société, qui atteste vouloir l'employer, le préfet de l'Indre n'a pas, en refusant de lui délivrer un titre de séjour et en l'obligeant à quitter le territoire français, porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de refus qui lui ont été opposés et des buts en vue desquels ces décisions ont été prises. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
8. Il résulte de ce tout qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 juin 2022. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ainsi qu'en tout état de cause, ses conclusions tendant à la condamnation de l'État aux dépens.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire de M. A... à l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Une copie sera adressée au préfet de l'Indre.
Délibéré après l'audience du 30 mars 2023 à laquelle siégeaient :
M. Jean-Claude Pauziès, président,
Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,
Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 avril 2023.
La rapporteure,
Birsen B...Le président,
Jean-Claude PauzièsLa greffière,
Marion Azam Marche
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 22BX02726