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18/04/2023 | FRANCE | N°21BX02198

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 18 avril 2023, 21BX02198


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Pau de " confirmer qu'il a droit à la nouvelle bonification indiciaire au titre de ses fonctions de responsable de production depuis le 28 août 2015 " et de condamner le département des Landes à lui verser une somme de 2 340 euros au titre de la perte de la bonification.

Par un jugement n° 1900548 du 23 mars 2021, le tribunal a intégralement fait droit à la demande de M. B....

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire

enregistrés le 21 mai 2021 et le 5 avril 2022, le département des Landes, représenté par l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Pau de " confirmer qu'il a droit à la nouvelle bonification indiciaire au titre de ses fonctions de responsable de production depuis le 28 août 2015 " et de condamner le département des Landes à lui verser une somme de 2 340 euros au titre de la perte de la bonification.

Par un jugement n° 1900548 du 23 mars 2021, le tribunal a intégralement fait droit à la demande de M. B....

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 21 mai 2021 et le 5 avril 2022, le département des Landes, représenté par la société civile professionnelle (SCP) Lyon-Caen et Thiriez, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1900548 du tribunal ;

2°) de rejeter la demande de première instance de M. B... ;

3°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient, en ce qui concerne la régularité du jugement attaqué, que :

- le jugement a été rendu en méconnaissance de la procédure contradictoire dès lors qu'il n'a pas été informé de la date de l'audience ;

- le jugement est insuffisamment motivé ;

Il soutient, au fond, que :

- seule l'exercice de fonctions impliquant une technicité particulière peut ouvrir droit à la nouvelle bonification indiciaire en application du décret du 3 juillet 2006 portant création de cette bonification dans la fonction publique territoriale ; or les fonctions de responsable de production au sein de la cuisine d'un collège qu'occupe M. B... n'impliquent aucune technicité particulière ;

- de plus, pour prétendre à la nouvelle bonification indiciaire, l'agent doit exercer des fonctions y ouvrant droit au plan statutaire ; tel n'est pas le cas de M. B... qui est titulaire du grade d'adjoint technique territorial des établissements d'enseignement, lequel ne lui donne pas vocation à exercer des fonctions d'encadrement conformément à l'article 4 du décret du 15 mai 2007 portant statut particulier de ce cadre d'emplois.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 12 août 2021 et le 28 avril 2022, M. B..., représenté par Me Noël, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge du département des Landes la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que tous les moyens de la requête doivent être écartés comme infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991 ;

- le décret n° 2006-779 du 3 juillet 2006 ;

- le décret n° 2007-913 du 15 mai 2007 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D... A...,

- les conclusions de Mme Florence Madelaigue, rapporteure publique,

- et les observations de Me Latour se substituant à Me Noël représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du président du conseil départemental des Landes du 26 août 2016, M. B... a été titularisé dans le grade d'adjoint technique territorial des établissements d'enseignement à compter du 27 août 2016 à l'issue d'un stage d'une année. Par arrêté du 17 décembre 2018, le président du conseil départemental des Landes a attribué à M. B... la nouvelle bonification indiciaire (NBI) de 15 points à compter du 1er janvier 2019 au titre de ses fonctions de responsable de production. Le 2 janvier 2019, M. B... a demandé aux services du département des Landes que cette NBI lui soit attribuée rétroactivement à compter du 28 août 2015, date à laquelle il a commencé à exercer ses fonctions. Par une autre demande, également datée du 2 janvier 2019, M. B... a sollicité le versement d'une somme de 2 340 euros au titre de la NBI qui aurait dû lui être versée entre le 28 août 2015 et le 31 décembre 2018. Après le rejet implicite de ses demandes, M. B... a saisi le tribunal administratif de Pau d'une requête que ce dernier a requalifiée comme tendant à la condamnation du département des Landes à l'indemnisation du préjudice financier résultant de l'illégalité de la décision rejetant implicitement la demande d'attribution rétroactive de la NBI. Par un jugement du 23 mars 2021, dont le département des Landes relève appel, le tribunal a fait intégralement droit à la demande de M. B....

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier de première instance que l'avis d'audience a été mis à la disposition du département des Landes le 23 février 2021 au moyen de l'application Telerecours. A défaut de consultation de ce document dans le délai de deux jours à compter de cette date, le département des Landes est, en application des dispositions de l'article R. 611-8-6 du code de justice administrative, réputé en avoir reçu notification à l'expiration de ce délai, soit le 25 février 2021 alors que l'audience devant le tribunal s'est tenue le 23 mars 2021. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement a été rendu irrégulièrement, faute de convocation régulière du département à l'audience, doit être écarté.

3. En second lieu, il ressort des motifs du jugement attaqué que le tribunal, après avoir décrit la nature des fonctions exercées par M. B..., a énoncé avec une précision suffisante les motifs pour lesquels il a estimé que ce dernier remplissait les conditions réglementaires lui ouvrant droit au versement de la NBI à compter du 28 août 2015. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement doit être écarté.

4. Le jugement attaqué n'est pas entaché des irrégularités qu'invoque l'appelant.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

5. Aux termes de l'article 27 de la loi du 18 janvier 1991 portant dispositions statutaires relatives à la santé publique et aux assurances sociales : " I. - La nouvelle bonification indiciaire des fonctionnaires (...) est attribuée pour certains emplois comportant une responsabilité ou une technicité particulières dans des conditions fixées par décret (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 3 juillet 2006 portant attribution de la nouvelle bonification indiciaire à certains personnels de la fonction publique territoriale : " Une nouvelle bonification indiciaire (...) est versée mensuellement aux fonctionnaires territoriaux exerçant une des fonctions figurant en annexe au présent décret. ". Le 2 de l'annexe au décret, intitulé " fonctions impliquant une technicité particulière " comprend un point 28 en vertu duquel sont éligibles à la NBI les agents exerçant les fonctions de " Responsable ouvrier en fonction dans les établissements publics locaux d'enseignement ", lesquels se voient attribuer une bonification de 15 points.

6. Il résulte des dispositions précitées de l'article 27 de la loi du 18 janvier 1991 que le bénéfice de la NBI est lié non au corps ou cadre d'emplois d'appartenance ou au grade des fonctionnaires, ou encore à leur lieu d'affectation, mais aux seules caractéristiques des emplois occupés, au regard des responsabilités qu'ils impliquent ou de la technicité qu'ils requièrent. Ainsi, alors même qu'en vertu de l'article 4 du décret du 15 mai 2007, portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux des établissements d'enseignement, M. B... n'aurait pas vocation, compte tenu de son grade, à exercer des fonctions d'encadrement, il a droit à percevoir la NBI si ses fonctions de cuisinier, responsable de production au sein du collège Lubert-Barbon de Saint-Pierre-du-Mont, présentent une technicité particulière.

7. Il résulte des éléments du dossier, et notamment de la fiche de poste correspondant à l'emploi de M. B..., que ce dernier est chargé de gérer le secteur de restauration du collège, d'encadrer, pendant la préparation, la distribution et jusqu'à la fermeture du service de restauration, les adjoints techniques des établissements d'enseignement placés sous sa responsabilité, de participer à l'exécution des taches des agents en fabricant les plats dans le respect des règles d'hygiène de la restauration collective, de participer aux missions de distribution, de service et d'accompagnement des convives selon les catégories auxquelles ces derniers appartiennent (enfants, adultes, convives dont l'état de santé nécessite une alimentation adaptée) et selon le type de service (à table ou en self-service), ou encore d'entretenir le matériel et les espaces dévolus à la préparation et à la distribution.

8. En particulier, M. B... doit, à hauteur de 60 % de ses missions, proposer des menus et des nouvelles recettes dans le cadre du plan national nutrition santé, veiller au goût, à la qualité et à la présentation des préparations culinaires, évaluer la qualité des produits de base, participer aux missions d'éducation à la santé et au goût (" semaine du goût ", " animation fruits et légumes "). Il doit encore mettre en place et appliquer les procédures destinées à garantir le respect de l'hygiène des locaux et matériels, vérifier le bon fonctionnement des équipements.

9. En raison de ses missions, M. B... est astreint à suivre des formations, notamment dans le domaine de l'hygiène et de la sécurité et dans celui de la prévention des risques relatifs à la consommation des denrées alimentaires.

10. Dans ces circonstances, l'emploi de responsable de production des cuisines du collège qu'occupe M. B... correspond à celui de responsable ouvrier dans les établissements publics locaux d'enseignement, visé au point 28 de l'annexe au décret du 3 juillet 2006, et présente une technicité particulière.

11. S'agissant enfin des décisions relatives à la carrière des fonctionnaires, l'administration peut, en dérogation à la règle selon laquelle les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir, leur conférer une portée rétroactive quand il s'agit de procéder à la régularisation de la situation de l'agent intéressé. Par suite, le principe de non-rétroactivité des actes administratifs ne faisait pas obstacle à ce que le département des Landes verse à M. B... la NBI à compter du 28 août 2015, date à laquelle ce dernier a pris ses fonctions de responsable des cuisines de collège.

12. Il résulte de tout ce qui précède que le département des Landes n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a fait droit à la demande de M. B....

Sur les frais de l'instance :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle aux conclusions présentées par le département des Landes tendant à ce que M. B..., qui n'est pas la partie perdante à l'instance, lui verse une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de faire application de ces mêmes dispositions en mettant à la charge du département la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.

DECIDE

Article 1er : La requête n° 21BX02198 du département des Landes est rejetée.

Article 2 : Le département des Landes versera à M. B... la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au département des Landes et à M. C... B....

Délibéré après l'audience du 20 mars 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Florence Demurger, présidente,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

Mme Caroline Gaillard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 avril 2023. Le rapporteur,

Frédéric A...

La présidente,

Florence DemurgerLa greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au ministre de la transformation et de la fonction publiques, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX02198 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX02198
Date de la décision : 18/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme DEMURGER
Rapporteur ?: M. Frédéric FAÏCK
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : CABINET LYON-CAEN THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-04-18;21bx02198 ?
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