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05/07/2022 | FRANCE | N°21BX02454

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 05 juillet 2022, 21BX02454


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

M. H... N..., Mme M... K..., M. F... N... et M. G... N... ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la délibération du 5 décembre 2019 approuvant le plan local d'urbanisme intercommunal partiel de la communauté d'agglomération du GrandAngoulême.

Par un jugement n° 2001786 du 8 avril 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 juin 2021 et un mémoire enregistré le 1er avril 2022, M. G... N...,

M. H... N..., M. F... N..., M. J... K..., Mme I... K..., Mme E... K..., M. A... K... et M. B....

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

M. H... N..., Mme M... K..., M. F... N... et M. G... N... ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la délibération du 5 décembre 2019 approuvant le plan local d'urbanisme intercommunal partiel de la communauté d'agglomération du GrandAngoulême.

Par un jugement n° 2001786 du 8 avril 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 juin 2021 et un mémoire enregistré le 1er avril 2022, M. G... N..., M. H... N..., M. F... N..., M. J... K..., Mme I... K..., Mme E... K..., M. A... K... et M. B... K..., représentés par Me Enckell, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 8 avril 2021 ;

2°) d'annuler la délibération contestée ou, subsidiairement, de l'annuler partiellement ;

3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération du GrandAngoulême le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- leur requête d'appel est recevable ; Mme M... K... étant décédée en cours de première instance, ses héritiers reprennent l'instance ;

- le jugement est irrégulier en ce qu'il fait application de l'article L. 123-8 du code de l'urbanisme qui était abrogé à la date de la délibération contestée ;

- les modifications apportées au projet de PLUi appelaient une nouvelle enquête publique ; celles rendues nécessaires par les compléments à l'état initial de l'environnement sur plusieurs sites ne procèdent pas de l'enquête publique ; compte tenu de la quantité, de l'importance et de la nature des modifications apportées, celles-ci sont de nature à bouleverser l'économie du PLUi ;

- les choix d'aménagement ne sont pas suffisamment motivés dans le rapport de présentation, en méconnaissance de l'article L. 151-4 du code de l'urbanisme ; le rapport de présentation ne justifie notamment pas des modifications apportées dans la répartition des zonages par rapport aux documents antérieurs ; il ne justifie pas la disparition du pôle commercial du quartier de Lunesse ni du classement des parcelles BC 157, BC 158 et BC 160 en zone naturelle ;

- le classement en zone N de leurs parcelles cadastrées section BC n° 157, 158 et 160 est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 151-24 du code de l'urbanisme ; les parcelles sont situées dans une zone urbaine dense ; le précédent PLU classait les parcelles en zone 1AUh pour les deux tiers et en zone N pour un tiers seulement ; la zone de la Côte de Lunesse était identifiée comme un secteur à urbaniser à vocation résidentielle, compatible avec la préservation d'espaces naturels et de corridors écologiques ; une étude montre le faible enjeu écologique du secteur ;

- l'absence de classement de leurs parcelles en zone à urbaniser est également entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; un tel classement aurait été en cohérence avec les objectifs du PADD qui visent à redonner de l'attractivité aux centralités et à organiser l'extension qualitative de leur enveloppe urbaine et avec le rapport de présentation qui fait référence à la nécessité de réinvestir les friches urbaines ; les parcelles auraient dû être listées par le rapport de présentation comme ayant un potentiel de reconquête ; elles sont situées à proximité immédiate d'une zone urbaine et constituent une dent creuse ; les services de l'Etat et la chambre d'agriculture ont émis un avis en faveur du réinvestissement des friches ;

- le classement retenu méconnaît le SCoT de l'Angoumois fixant un objectif de rééquilibrage du développement urbain vers le cœur de l'agglomération en réinvestissant les friches urbaines ; or leurs parcelles sont des friches urbaines situées sur le territoire de la commune d'Angoulême ; le PLUi est incompatible avec le DOO et le PADD du SCoT qui tendent à favoriser la production de logements par l'intensification ou l'extension des zones déjà urbanisées, prévoient que le développement de l'offre de logements doit s'effectuer autour des polarités de l'Angoumois et favorisent le renforcement des pôles commerciaux secondaires auxquels des opérations d'habitats doivent être associées ; la disparition de la référence au pôle commercial de Lunesse traduit également une incompatibilité du PLUi par rapport au SCoT

Par des mémoires enregistrés les 4 et 29 avril 2022, la communauté d'agglomération du GrandAngoulême, représentée par la SELARL Valadou-Josselin et Associés, conclut au rejet de la requête ou, subsidiairement, à ce qu'il soit sursis à statuer en application de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme dans l'attente d'une régularisation et à ce que soit mis à la charge des requérants le versement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués par les requérants, tant en appel qu'en première instance, ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le décret 2015-1783 du 28 décembre 2015 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme L... D...,

- les conclusions de M. Stéphane Gueguein, rapporteur public,

- et les observations de Me Enckell, représentant MM. N... et MM. et Mmes K... et de Me Varnoux, représentant la communauté d'agglomération du GrandAngoulême.

Considérant ce qui suit :

1. M. H... N..., Mme M... K..., M. F... N... et M. G... N..., propriétaires indivis des parcelles cadastrées section BC n° 157, 158 et 160 situées à Angoulême, ont saisi le tribunal administratif de Poitiers d'une demande tendant à l'annulation de la délibération du 5 décembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté d'agglomération du GrandAngoulême a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal partiel de la communauté d'agglomération. M. G... N..., M. H... N..., M. F... N..., ainsi que M. J... K..., Mme I... K..., Mme E... K..., M. A... K... et M. B... K..., ayants droit de Mme M... K..., décédée en cours de première instance, font appel du jugement du 8 avril 2021 par lequel le tribunal a rejeté la demande.

Sur la régularité du jugement :

2. A supposer même que le tribunal ait fait application à tort de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme qui a été abrogé par l'article 10 du décret n° 2015-1783 du 28 décembre 2015, cette circonstance affecte le bien-fondé du jugement et non sa régularité. Les requérants ne sont donc pas fondés à soutenir que le jugement est irrégulier de ce fait.

Sur la légalité de la délibération du 5 décembre 2009 :

3. Aux termes de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme : " A l'issue de l'enquête, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire ou de la commission d'enquête, est approuvé par : / 1° L'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale à la majorité des suffrages exprimés après que les avis qui ont été joints au dossier, les observations du public et le rapport du commissaire ou de la commission d'enquête aient été présentés lors d'une conférence intercommunale rassemblant les maires des communes membres de l'établissement public de coopération intercommunale ; / 2° Le conseil municipal dans le cas prévu au 2° de l'article L. 153-8 ".

4. Il résulte de ces dispositions que le projet de plan ne peut subir de modifications, entre la date de sa soumission à l'enquête publique et celle de son approbation, qu'à la double condition que ces modifications ne remettent pas en cause l'économie générale du projet et qu'elles procèdent de l'enquête. Doivent être regardées comme procédant de l'enquête les modifications destinées à tenir compte des réserves et recommandations du commissaire enquêteur, des observations du public et des avis émis par les autorités, collectivités et instances consultées et joints au dossier de l'enquête.

5. Il ressort des pièces du dossier et notamment des termes de la délibération contestée du 5 décembre 2019 que le conseil communautaire a apporté quatre catégories de modifications au projet arrêté de plan local d'urbanisme : celles " résultant des demandes des conseils municipaux ", celles " résultant des avis des personnes publiques associées, de la CDPENAF et de l'autorité environnementale ", celles " résultant de l'enquête publique " et celles " rendues nécessaires par des compléments à l'état initial de l'environnement sur plusieurs sites ". Cette dernière catégorie portait, d'une part, sur le secteur des Chirons à Puymoyen et sur le secteur de Bel air Baconneau à Angoulême et, d'autre part, sur le secteur de Poulet à La Couronne.

6. S'agissant des secteurs des Chirons et de Bel air Baconneau, après complément de l'étude environnementale ayant fait apparaître une grande sensibilité du site en termes de faune avec des enjeux modérés pour les habitats de quatre espèces d'oiseaux nicheurs et des enjeux forts liés à la présence de l'azuré du serpolet, un corridor écologique inconstructible Nord-Sud de la rue du capitaine C... à la RD 1000 a été classé en zone NS, défini et intégré dans l'orientation d'aménagement et de programmation des Chirons et dans celle de Bel Air Baconneau, en partie Est de ces sites, et une zone 1 AUp a été inscrite en secteur de projet à Bel air Baconneau pour geler toute urbanisation dans l'attente de la définition d'un projet d'aménagement qui tienne compte de la sensibilité environnementale du lieu. Bien que ces modifications n'aient pas été classées dans la catégorie de celles résultant de l'avis de l'autorité environnementale, il ressort des pièces du dossier qu'elles résultent de l'avis de cette autorité du 20 mars 2019, qui a été joint au dossier de l'enquête publique, ainsi que l'indique la commission d'enquête en page 8 de son rapport, et qui recommandait de justifier d'une prise en compte suffisante de l'environnement dans les choix de développement, en particulier dans ces deux secteurs pour lesquels le projet arrêté se bornait à renvoyer à une étude ultérieure. Ainsi, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que cette modification ne résulterait pas de l'enquête publique.

7. S'agissant du secteur de Poulet, la modification a consisté, après complément de l'étude environnementale, à délimiter un secteur NXp pouvant accueillir une aire de stationnement non imperméabilisée, à protéger le Nord du site et à définir à l'Est un autre espace en cours d'enfrichement destiné à être restauré pour devenir une prairie favorable à l'habitat de l'azuré du serpolet. Il ressort des pièces du dossier que cette modification résulte de la prise en compte de l'avis émis le 6 mars 2019 par la commune de La Couronne sur le territoire de laquelle une entreprise souhaitait étendre ses bâtiments et créer des capacités de stationnement sur des espaces classés Natura 2000. Ainsi, les requérants ne sont pas non plus fondés à soutenir que cette modification, mentionnée d'ailleurs pour ce qui concerne la création d'un secteur pour une aire de stationnement, dans la liste des modifications demandées par les conseils municipaux, ne résulterait pas de l'enquête publique.

8. Le nombre important de modifications apportées ne traduit pas, par lui-même, un bouleversement de l'économie du plan local d'urbanisme intercommunal. Les requérants n'apportent par ailleurs aucun élément permettant d'estimer qu'eu égard à leur nature et à leur importance, ces modifications, qui consistent pour beaucoup en des zonages, aménagements et précisions ponctuels, remettraient en cause l'économie générale du projet.

9. Aux termes de l'article L. 151-4 du code de l'urbanisme : " Le rapport de présentation explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement. Il s'appuie sur un diagnostic établi au regard des prévisions économiques et démographiques et des besoins répertoriés en matière de développement économique, de surfaces et de développement agricoles, de développement forestier, d'aménagement de l'espace, d'environnement, notamment en matière de biodiversité, d'équilibre social de l'habitat, de transports, de commerce, d'équipements et de services (...) Il analyse la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers au cours des dix années précédant l'approbation du plan ou depuis la dernière révision du document d'urbanisme et la capacité de densification et de mutation de l'ensemble des espaces bâtis, en tenant compte des formes urbaines et architecturales. Il expose les dispositions qui favorisent la densification de ces espaces ainsi que la limitation de la consommation des espaces naturels, agricoles ou forestiers. Il justifie les objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain compris dans le projet d'aménagement et de développement durables au regard des objectifs de consommation de l'espace fixés, le cas échéant, par le schéma de cohérence territoriale et au regard des dynamiques économiques et démographiques (...).

10. Le rapport de présentation du plan local d'urbanisme comporte un premier tome intitulé " Diagnostic territorial ", un deuxième tome intitulé " Justifications du projet " et un troisième tome intitulé " Résumé non technique ". Le document expose notamment le contexte du projet et les perspectives de développement de l'habitat à l'horizon 2015, ainsi que le scénario de développement retenu, la répartition de l'offre en logements et la répartition du foncier pour l'accueil des activités et des équipements. En matière commerciale, il indique que l'un des objectifs du plan local d'urbanisme est de redynamiser le commerce des secteurs de centralité identifiés au plan de zonage ainsi que le commerce de proximité du centre d'Angoulême pour en faire la locomotive des autres pôles commerciaux. Il précise que le schéma commercial est intégré dans le règlement du plan, dans une orientation d'aménagement et de programmation spécifique. Il expose également la consommation passée des espaces agricoles et naturels en indiquant qu'elle a été de 411,8 ha entre 2005 et 2015 sur le territoire des communes couvertes par le plan local d'urbanisme intercommunal partiel et qu'elle sera de 189,47 ha en application du nouveau document d'urbanisme soit une baisse de la consommation foncière de 54 %, dans le respect du schéma de cohérence territoriale. Il développe la justification des choix ayant présidé à l'élaboration du projet d'aménagement et de développement durables, dont il rappelle les objectifs, ainsi que les motifs de la délimitation des zones, des règles applicables et des orientations d'aménagement et de programmation. Il analyse également les incidences du projet sur l'environnement. Aucune disposition ni aucun principe n'exige que le rapport de présentation fournisse parcelle par parcelle les motifs des classements opérés par le plan local d'urbanisme, ni qu'il comporte une justification spécifique des modifications apportées dans la répartition des zonages par rapport aux documents antérieurement en vigueur. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le rapport de présentation ne répondrait pas aux exigences de l'article L. 151-4 précité du code de l'environnement.

11. En application de l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable en l'espèce, le " projet d'aménagement et de développement durables définit (...) Les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques (...) " et " fixe des objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain ". Selon l'article L. 151-8 du même code : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3 ". Aux termes de l'article L. 151-9 de ce code : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ". Aux termes de l'article R. 151-24 de ce code : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : 1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; 2° Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; 3° Soit de leur caractère d'espaces naturels ; 4° Soit de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ; 5° Soit de la nécessité de prévenir les risques notamment d'expansion des crues ". Enfin, aux termes de l'article R. 151-25 du même code : " Peuvent être autorisées en zone N : 1° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole et forestière, ou au stockage et à l'entretien de matériel agricole par les coopératives d'utilisation de matériel agricole agréées au titre de l'article L. 525-1 du code rural et de la pêche maritime ; 2° Les constructions, installations, extensions ou annexes aux bâtiments d'habitation, changements de destination et aménagements prévus par les articles L. 151-11, L. 151-12 et L. 151-13, dans les conditions fixées par ceux-ci ".

12. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. S'ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, leur appréciation peut cependant être censurée par le juge administratif au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

13. Le projet d'aménagement et de développement durable du plan local d'urbanisme contesté affiche des axes et objectifs de réduction de la consommation d'espaces naturels et de valorisation des richesses patrimoniales, naturelles et agricoles en tant que vecteurs de qualité de vie, notamment les trames vertes et bleues, pour garantir le maintien des espaces de respiration en ville et des coulées vertes dans le tissu urbain. Le rapport de présentation expose en particulier le choix de mettre en valeur la trame verte et bleue, de lutter contre les ruptures et de préserver les corridors écologiques de proximité notamment au moyen de classements en zones naturelles. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles cadastrées section BC n° 157, 158 et 160, d'une superficie totale d'environ 4 ha, sont situées sur le plateau de la Côte de Lunesse, à l'est d'Angoulême et que, si elles sont situées à proximité d'un supermarché, implanté au nord en contrebas, et de zones densément construites au sud et à l'ouest, elles s'ouvrent à l'est sur un vaste espace naturel constitué de prairies et d'espaces boisées classés. Il ressort également des pièces du dossier et en particulier de l'étude réalisée par l'association Charente Nature, produite par la communauté d'agglomération du GrandAngoulême et dont les éléments ne sont pas contredits par l'étude écologique produite par les requérants, que ces parcelles abritent une pelouse calcaire dite " pelouse sèche ", constituant un élément important de corridor écologique " en pas japonais " identifié au schéma régional de cohérence écologique de Poitou-Charentes et que si la pelouse proprement dite ne représente que 0,15 ha, le reste du terrain est à l'état naturel et peut être réhabilité et enrichi par des travaux écologiques et servir de ceinture de protection, notamment boisée, à cet espace de biodiversité. Eu égard à leur superficie et à l'intérêt écologique qu'elles représentent, ces parcelles ne peuvent être regardées comme une dent creuse ou comme étant au nombre des friches urbaines, et notamment industrielles, que les auteurs du plan local d'urbanisme ont entendu, conformément aux objectifs affichés par le projet d'aménagement et de développement durables, réinvestir en vue de renforcer l'offre de logements en particulier dans la ville-centre, en limitant le recours à l'extension de l'enveloppe urbaine existante. Ainsi, compte-tenu du parti d'aménagement retenu par les auteurs du plan local d'urbanisme, de la configuration des lieux ainsi que de la superficie et de la vocation naturelle des parcelles, alors même qu'elles étaient auparavant classées en zone 1 AUh aux deux tiers en tant que secteur à vocation résidentielle compatible avec la préservation des parties du terrain présentant un intérêt écologique, et à supposer même qu'un classement de tout ou partie des parcelles en zone à urbaniser aurait été légalement possible, les auteurs du plan local d'urbanisme contesté, en classant la totalité de ces parcelles en zone naturelle, n'ont pas entaché leur décision d'erreur manifeste d'appréciation.

14. Il résulte de l'article L. 142-1 du code de l'urbanisme et des articles L. 141-3 et suivants de ce code, qu'à l'exception des cas limitativement prévus par la loi dans lesquels les schémas de cohérence territoriale peuvent contenir des normes prescriptives, ceux-ci doivent se borner à fixer des orientations et des objectifs. Les plans locaux d'urbanisme sont soumis à une simple obligation de compatibilité avec ces orientations et objectifs. Si ces derniers peuvent être en partie exprimés sous forme quantitative, il appartient aux auteurs des plans locaux d'urbanisme, qui déterminent les partis d'aménagement à retenir en prenant en compte la situation existante et les perspectives d'avenir, d'assurer, ainsi qu'il a été dit, non leur conformité aux énonciations des schémas de cohérence territoriale, mais leur compatibilité avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent. Pour apprécier la compatibilité d'un plan local d'urbanisme avec un schéma de cohérence territoriale, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert en prenant en compte l'ensemble des prescriptions du document supérieur, si le plan ne contrarie pas les objectifs qu'impose le schéma, compte tenu des orientations adoptées et de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation du plan à chaque disposition ou objectif particulier.

15. Les auteurs du plan local d'urbanisme contesté n'ont pas entaché leur décision d'incompatibilité avec le schéma de cohérence territoriale de l'Angoumois approuvé le 10 décembre 2013, dont le document d'orientation et d'objectifs et le projet d'aménagement et de développement durables tendent notamment au rééquilibrage du développement urbain vers le cœur de l'agglomération par le réinvestissement des friches urbaines et des dents creuses et qui permettent sans l'imposer le développement de pôles commerciaux secondaires, mais tendent également à la protection et la valorisation du patrimoine paysager en portant une attention particulière aux espaces de nature en ville, et à la protection et la mise en valeur ses espaces naturels constitutifs de la trame bleue et verte formée des continuités écologiques. Il ressort également des pièces du dossier et notamment du rapport de présentation que l'objectif de 800 logements par an fixé par le schéma de cohérence territoriale doit être atteint à hauteur de 600 logements par le réinvestissement urbain et l'extension urbaine et, pour le surplus, par la division parcellaire et le réinvestissement des friches. Les requérants n'apportent aucun élément permettant d'estimer que le plan local d'urbanisme en litige serait de nature à contrarier cet objectif.

16. Il résulte de tout ce qui précède que les consorts N... et K... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du 5 décembre 2019.

Sur les frais liés à l'instance :

17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté d'agglomération du GrandAngoulême, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent les requérants au titre des frais d'instance exposés. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge des consorts N... et K..., solidairement, le versement à la communauté d'agglomération du GrandAngoulême d'une somme de 1 500 euros au titre des frais d'instance qu'elle a exposés.

DECIDE :

Article 1er : La requête de MM. N... et de Mmes et MM. K... est rejetée.

Article 2 : MM. N... et Mmes et MM. K... verseront, solidairement, à la communauté d'agglomération du GrandAngoulême la somme globale de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... N..., à M. H... N..., à M. F... N..., à M. J... K..., à Mme I... K..., à Mme E... K..., à M. A... K..., à M. B... K... et à la communauté d'agglomération du GrandAngoulême.

Délibéré après l'audience du 14 juin 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

Mme Nathalie Gay, première conseillère,

Mme Laury Michel, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022.

La première assesseure,

Nathalie GayLa présidente-rapporteure,

Elisabeth D...

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne à la préfète de la Charente en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX02454


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX02454
Date de la décision : 05/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Elisabeth JAYAT
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : ENCKELL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-07-05;21bx02454 ?
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