Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... B... et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2013, pour un montant total de 10 239 euros, à raison de la rémunération de M. B... regardée comme excessive.
Par un jugement n° 1900735 du 8 octobre 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2020, M. et Mme B..., représentés par Me Calderini et Me Destruhaut, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1900735 du 8 octobre 2020 du tribunal administratif de Bordeaux ;
2°) de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2013, pour un montant total de 10 239 euros, à raison de la rémunération de M. B... regardée comme excessive ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que l'intégralité de la rémunération versée à M. B... en 2013 en tant que gérant de la société d'exercice libéral à responsabilité limitée Architecture sites et environnement (selarl ASE), soit 237 046 euros, doit être admise ; cette rémunération n'était pas excessive, dès lors que les éléments de comparaison tant internes qu'externes retenus par l'administration ne sont ni pertinents ni objectifs ; par suite, ils doivent être déchargés du supplément d'impôt sur le revenu mis à leur charge au titre de l'année 2013 à hauteur de 8 648 euros en droits, de 726 euros au titre des intérêts de retard et de 865 euros au titre de la majoration de 10 %.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 mai 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A... C...,
- les conclusions de Mme Florence Madelaigue, rapporteure publique,
- et les observations de Me Destruhaut, représentant M. et Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. À la suite d'une vérification de comptabilité de la société d'exercice libéral à responsabilité limitée Architecture sites et environnement (selarl ASE), qui exerce depuis 1997 une activité d'architecture dans le secteur aéronautique, mais également dans le secteur de l'immobilier résidentiel et de bureaux, et dont le capital social est détenu à 75 % par M. D... B... et à 25 % par son épouse, le service a notamment réintégré aux résultats de l'exercice 2013 de cette société la fraction regardée comme excessive des rémunérations allouées à son gérant, M. B..., à concurrence de 84 373 euros. Le déficit reportable de la société ASE, au titre de l'année considérée, a ainsi été réduit de 168 908 euros à 84 535 euros. Le rehaussement a été maintenu à la suite d'un recours hiérarchique et d'un recours devant l'interlocuteur départemental. Il a également été soumis à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires qui, dans sa séance du 19 mai 2017, a considéré que la rémunération en litige avait bien un caractère excessif, mais en a ramené le montant non déductible de 92 286 euros à 84 373 euros. L'administration a tenu compte de cet avis et a ramené le déficit de la société de 168 908 euros à 84 535 euros. Parallèlement, la fraction de rémunération estimée non déductible a été considérée comme un revenu distribué soumis à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, et à ce titre, une proposition de rectification a été adressée aux époux B..., le redressement qui leur a alors été notifié ayant été réduit à hauteur de la réduction du déficit de la société après prise en compte de l'avis de la CDI. En outre, à la suite d'une réclamation de M. et Mme B..., une décision d'admission partielle a été prise le 14 décembre 2018, l'administration ayant fait droit à leur demande en matière de prélèvements sociaux.
2. M. et Mme B... font appel du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 8 octobre 2020, qui a rejeté leur demande tendant à la décharge du supplément d'impôt sur le revenu laissé à leur charge, soit la somme totale de 10 239 euros.
Sur les conclusions à fin de décharge :
3. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) / d) la fraction des rémunérations qui n'est pas déductible en vertu du 1° du 1 de l'article 39 (...) ". Aux termes du 1° du 1 de ce dernier article : " (...) les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu (...) ".
4. Il résulte de l'instruction que l'imposition en litige procède de ce que l'administration a, par application des dispositions précitées du code général des impôts, regardé la rémunération versée à M. B... au titre de l'année 2013 par la société dont il est le gérant comme excessive au-delà de la somme de 152 672 euros et a ainsi imposé la somme de 84 373 euros dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Il appartient à l'administration d'apporter la preuve du caractère excessif de cette fraction de rémunération.
5. Pour estimer excessive la rémunération de M. B... de ses fonctions de gérant de la société ASE, le service a constaté que ce dernier avait perçu 135 000 euros au titre de l'année 2010, 123 480 euros au titre de l'année 2011, 172 840 euros au titre de l'année 2012 et 237 046 euros au titre de l'année 2013 en litige, soit une augmentation sur cette dernière année de 37,18 % par rapport à l'année précédente. Il a également relevé que cette augmentation avait porté le niveau de sa rémunération, réduite à 94 995 euros au titre de l'année 2014, à 94,1 % du chiffre d'affaires de la société, alors même que ce chiffre d'affaires était en baisse de 39,36 % par rapport à l'année précédente et que le résultat imposable de la société, au titre de l'année 2013, consistait en une perte de 168 908 euros, la rémunération de son gérant représentant ainsi 71 % du déficit. Le service a également établi une moyenne de la rémunération totale des dirigeants de trois sociétés comparables à la société ASE, en matière de secteur d'activité, de secteur géographique et de structuration juridique et financière, dont il est ressorti que leur rémunération représentait en moyenne 12,81% du chiffre d'affaires, soit 86 030 euros. Outre le constat de ces données brutes, tant internes qu'externes à la société, le service a également relevé que, du fait de la structure du capital social de la société ASE, M. B... disposait de la maîtrise de l'affaire pour fixer librement le niveau de sa rémunération, celle-ci n'étant encadrée par aucun contrat de travail et ni fixée par l'assemblée générale, et que le rôle de l'intéressé au sein de la société n'avait ni évolué par rapport aux années précédentes, ni entraîné un accroissement du chiffre d'affaires. Si les requérants font état de l'accroissement du nombre d'heures travaillées par M. B..., cet accroissement n'est ni établi ni cohérent en comparaison avec la rémunération des deux années précédentes. Au demeurant, M. B... n'a pas travaillé entièrement seul au cours de l'année 2013, dès lors qu'il résulte de l'instruction que la société ASE a eu recours à la sous-traitance au cours de cet exercice et qu'elle a précisé à l'interlocuteur départemental " co-traiter " des activités techniques avec des confrères. Par ailleurs, contrairement à ce que font valoir les appelants, le service a tenu compte des spécificités de l'activité de la société, puisqu'il a déterminé la part de la rémunération comme étant excessive à partir des propres données de la société relatives aux exercices 2010 à 2014 et en effectuant la moyenne des rémunérations versées à son gérant sur ces quatre années. Au surplus, il a également constaté que la rémunération de l'année 2013 avait permis au niveau comptable de solder le compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans les écritures de la société ASE, qui présentait en fin d'année un solde débiteur de 236 673 euros, soit 99,8 % de la rémunération allouée sur l'année, ce qui a permis d'afficher un solde créditeur. Au vu de ces éléments, le service a estimé que la fraction de rémunération de M. B... excédant la moyenne des rémunérations servies de 2010 à 2014, qui s'est élevée à 152 672 euros, soit la somme de 84 373 euros, correspondait à une rémunération excessive au sens des dispositions précitées de l'article 39 du code général des impôts, dès lors que cette rémunération apparaît en inadéquation avec la dimension de l'entreprise et ne correspond pas à la réalité économique et financière de la société.
6. Dans ces conditions, eu égard aux éléments pertinents de comparaison ainsi choisis, au mode de calcul retenu, à l'appréciation du rôle de M. B... et de la valeur de ses services au sein de la société ASE que ce dernier ne conteste pas utilement, l'administration, qui s'est fondée sur des critères objectifs, doit être regardée comme ayant apporté la preuve de l'existence d'une rémunération excessive en 2013 au profit de M. B..., tant au regard des critères internes à la société que des critères externes.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2013 à raison de la somme de 84 373 euros présentant le caractère d'un revenu distribué par la société ASE.
Sur les frais de l'instance :
8. L'État n'étant pas partie perdante, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de M. et Mme B... relatives aux frais liés au litige.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et à Mme B..., ainsi qu'au ministre de l'économie, des finances et de la relance. Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Ouest.
Délibéré après l'audience du 5 mai 2022 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,
Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 2 juin 2022.
La rapporteure,
Florence C...
Le président,
Éric Rey-Bèthbéder
La greffière,
Angélique Bonkoungou
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 20BX04179