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19/04/2022 | FRANCE | N°20BX00448

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 19 avril 2022, 20BX00448


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Inboard Diesel Service a demandé au tribunal administratif de la Martinique la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2015 et 2016.

Par un jugement n° 1900311 du 6 décembre 2019, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour administrative d'appel :

Par une requête, enregistrée le 6 février 2020, la SARL Inboard D

iesel Service, représentée par Me Planchat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 190...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Inboard Diesel Service a demandé au tribunal administratif de la Martinique la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2015 et 2016.

Par un jugement n° 1900311 du 6 décembre 2019, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour administrative d'appel :

Par une requête, enregistrée le 6 février 2020, la SARL Inboard Diesel Service, représentée par Me Planchat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1900311 du tribunal administratif de la Martinique du 6 décembre 2019 ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2015 et 2016 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, la proposition de rectification est insuffisamment motivée dès lors que ce document s'abstient de préciser la nature du justificatif manquant concernant la remise en cause, au titre de l'exercice clos en 2015, de la dépense de 6 000 euros correspondant à la mise à la disposition de son gérant d'un bureau au domicile de ce dernier ;

- elle est spécialisée dans la réparation, la maintenance et l'installation de moteurs de bateau ; ses salariés ne sont pas de simples vendeurs mais ont une formation de mécanicien ; l'étude des factures émises au titre de l'exercice clos au cours de l'année 2015 confirme la nature de son activité et démontre qu'elle étudie, au cas par cas, les besoins de ses clients pour leur apporter des solutions techniques individualisées et qu'elle choisit ensuite les assemblages appropriés à partir d'éléments acquis auprès de divers fournisseurs ; ainsi, contrairement à ce qu'a estimé le service, son activité ne relève pas du secteur d'activité du commerce, exclu du dispositif de réduction d'impôt prévu à l'article 199 undecies B du code général des impôts et, partant, du régime d'abattement fiscal prévu à l'article 44 quaterdecies du même code ;

- elle a souscrit ses déclarations au titre de la taxe sur la valeur ajoutée des exercices clos en 2015 et 2016 et ne peut, dès lors, être considérée comme défaillante, au sens et pour l'application de l'article 302 nonies du code général des impôts.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 septembre 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Michaël Kauffmann,

- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Inboard Diesel Service (IDS), qui exerce son activité en Martinique, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er octobre 2014 au 30 septembre 2016. A l'issue des opérations de contrôle, le service lui a notifié, selon la procédure de rectification contradictoire, des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés résultant, d'une part, de la réintégration dans ses résultats imposables d'une charge estimée non déductible, au titre de l'exercice clos en 2015 et, d'autre part, de la remise en cause de l'abattement sur les bénéfices réalisés en zone franche d'activité des départements d'outre-mer prévu à l'article 44 quaterdecies du code général des impôts, au titre de l'exercice clos en 2016. La SARL IDS relève appel du jugement du 6 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a, en conséquence, été assujettie au titre desdits exercices.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ". Conformément à l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article. ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rehaussements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler de façon utile ses observations. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs.

3. La proposition de rectification du 23 avril 2018 adressée à la SARL IDS mentionne, en ce qui concerne le chef de rehaussement relatif à la charge non déductible au titre de l'exercice clos en 2015, l'article 39 du code général des impôts qui a fondé en droit la rectification opérée et rappelle les règles générales de déductibilité des charges et dépenses. Elle expose, par ailleurs, le motif de cette rectification, tiré de ce que la société a comptabilisé en charge, au titre de l'exercice dont s'agit, une somme de 6 000 euros correspondant à des loyers versés à M. A..., son gérant, pour la mise à disposition d'un bureau à son domicile, sans toutefois ne fournir aucun justificatif. Contrairement à ce que soutient la requérante, cette motivation était suffisante pour qu'elle soit mise à même d'appréhender la nature du justificatif faisant défaut, tenant à la réalité et au montant des loyers prétendument versés à son gérant. Dans ces conditions, la proposition de rectification qui mentionne, pour l'exercice en cause, les bases d'imposition rehaussées et le montant des droits réclamés, est suffisamment motivée pour permettre à la société de formuler utilement ses observations, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales.

Sur le bien-fondé des impositions :

4. D'une part, aux termes de l'article 44 quaterdecies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " I.- Les bénéfices des entreprises provenant d'exploitations situées en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte ou à La Réunion peuvent faire l'objet d'un abattement dans les conditions prévues aux II ou III lorsque ces entreprises respectent les conditions suivantes : / (...) / 2° L'activité principale de l'exploitation relève de l'un des secteurs d'activité éligibles à la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B ou correspond à l'une des activités suivantes : comptabilité, conseil aux entreprises, ingénierie ou études techniques à destination des entreprises ; (...) ". L'article 199 undecies B du même code dispose que : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...) dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34. / (...) / Toutefois, n'ouvrent pas droit à la réduction d'impôt les investissements réalisés, dans les secteurs d'activité suivants : / a) Commerce ; / (...) / i) Les services fournis aux entreprises, à l'exception de la maintenance (...) ". Enfin, aux termes de l'article 302 nonies du même code : " Les allégements d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés prévus aux articles (...) 44 quaterdecies (...) ne s'appliquent pas lorsqu'une ou des déclarations de chiffre d'affaires se rapportant à l'exercice concerné n'ont pas été souscrites dans les délais et qu'il s'agit de la deuxième omission successive. ". Il résulte de ces dispositions combinées que le bénéfice de l'abattement prévu au I de l'article 44 quaterdecies du code général des impôts est soumis, notamment, à la condition que l'exploitation concernée exerce à titre principal, soit une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34 du même code et éligible à la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B, soit une activité de comptabilité, de conseil aux entreprises ou d'ingénierie ou d'études techniques à destination des entreprises.

5. D'autre part, aux termes de l'article 287 du code général des impôts : " 1. Tout redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est tenu de remettre au service des impôts dont il dépend et dans le délai fixé par arrêté une déclaration conforme au modèle prescrit par l'administration. / 2. Les redevables soumis au régime réel normal d'imposition déposent mensuellement la déclaration visée au 1 indiquant, d'une part, le montant total des opérations réalisées, d'autre part, le détail des opérations taxables. La taxe exigible est acquittée tous les mois. / (...) / Lorsque la taxe exigible annuellement est inférieure à 4 000 €, ils sont admis à déposer leurs déclarations par trimestre civil. / 3. Les redevables placés sous le régime simplifié d'imposition prévu à l'article 302 septies A, à l'exception de ceux mentionnés au 3 bis, déposent au titre de chaque exercice une déclaration qui détermine la taxe due au titre de la période et le montant des acomptes semestriels pour la période ultérieure. (...) ".

6. Il résulte de l'instruction, notamment des termes de la proposition de rectification du 23 avril 2018, que pour remettre en cause l'abattement sur les bénéfices réalisés en zone franche d'activité prévu à l'article 44 quaterdecies du code général des impôts, appliqué par la SARL IDS au titre de l'exercice clos en 2016, l'administration a estimé, d'une part, que son activité principale consistait en la vente en l'état de fournitures, relevant du secteur d'activité du commerce, exclu du bénéfice de l'avantage fiscal en application des dispositions combinées des articles 44 quaterdecies et 199 undecies B du code général des impôts. D'autre part, en application des dispositions précitées de l'article 302 nonies du code général des impôts, le service a relevé que la SARL n'avait pas rempli ses obligations déclaratives en matière de chiffre d'affaires dès lors que des déclarations de taxe sur la valeur ajoutée annuelles ont été déposées, en lieu et place de déclarations mensuelles ou trimestrielles.

7. En premier lieu, la SARL IDS soutient qu'en tant qu'entreprise spécialisée dans le domaine de la réparation, de la maintenance et de l'installation de moteurs de bateau, employant pour ce faire des salariés possédant une formation de mécanicien, son activité ne relève pas principalement du secteur d'activité du commerce, qui comprend les activités ayant pour objet d'acheter, en vue de les revendre, sans leur avoir fait subir de transformation susceptible d'en modifier l'usage, toutes matières premières et tous produits fabriqués. Toutefois, il résulte de l'instruction qu'au titre de l'exercice clos en 2016, la société a déclaré, au titre de la taxe sur la valeur ajoutée, des opérations exonérées de taxe pour un montant de 1 255 969 euros correspondant, selon les affirmations non contestées de l'administration, à des ventes en l'état de marchandises, exonérées en application des dispositions du 5° de l'article 295 du code général des impôts, et des opérations imposables au taux de 8,5 %, correspondant à des prestations de services, pour un montant de 304 894 euros. Si la société produit huit factures établies entre les mois d'octobre et décembre 2014, desquelles il résulterait que la société étudie au cas par cas les besoins de ses clients pour leur apporter des solutions techniques individualisées et choisir ensuite les assemblages appropriés, il en ressort, à l'inverse, que la vente en l'état de pièces, tels que des moteurs ou des pompes de circulation, présente généralement un caractère prépondérant et la main d'œuvre un caractère accessoire. Au demeurant, ces seules factures, qui concernent une période d'activité de trois mois en 2014, ne sauraient, à elles seules, refléter l'activité réelle de la société au titre de l'ensemble de l'exercice clos en 2016 qui, en ce qui concerne le présent chef de rehaussement, est seul en litige. Par ailleurs, le tableau de répartition entre le chiffre d'affaires " pièces " et le chiffre d'affaires " entretien-réparation " de l'exercice clos en 2018, produit en première instance, établi par les propres soins de la requérante, pour un exercice postérieur à celui d'imposition et qui n'est assorti d'aucune pièce justificative, ne présente pas un caractère probant. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a regardé la société IDS comme exerçant, à titre principal, une activité de vente en l'état de produits fabriqués, relevant du secteur d'activité du commerce au sens des dispositions précitées du a) du I de l'article 199 undecies B du code général des impôts, et, pour ce premier motif, lui a refusé le bénéfice de l'abattement fiscal prévu par les dispositions de l'article 44 quaterdecies du même code.

8. En second lieu, il résulte de l'instruction qu'à compter de l'année 2013, le chiffre d'affaires réalisé par la SARL IDS a dépassé les limites du régime simplifié d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée prévu à l'article 302 septies A du code général des impôts. En application des dispositions précitées du 2 de l'article 287 du même code, elle était ainsi soumise au dépôt mensuel ou trimestriel, selon le montant de la taxe exigible annuellement, de ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée et ne pouvait, ainsi qu'elle l'a fait, se borner au dépôt d'une déclaration annuelle de la taxe due au titre des exercices clos en 2015 et 2016. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le service a considéré que la société avait omis à deux reprises de satisfaire à ses obligations déclaratives et a remis en cause, pour ce second motif, l'avantage fiscal dont elle s'est prévalue au titre de l'exercice clos en 2016 sur le fondement de l'article 44 quaterdecies du code général des impôts. A cet égard, l'appelante ne peut utilement se prévaloir de ce qu'elle n'a pas fait l'objet de rappels de taxe sur la valeur ajoutée s'agissant des deux exercices en cause dès lors qu'ainsi que le fait valoir l'administration, la condition posée par l'article 302 nonies du code général des impôts tient aux seules obligations déclaratives du contribuable, à l'exclusion des montants déclarés.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL IDS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande. Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Inboard Diesel Service est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Inboard Diesel Service et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal Sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 22 mars 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 avril 2022.

Le rapporteur,

Michaël Kauffmann La présidente,

Evelyne BalzamoLa greffière,

Véronique Epinette

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 20BX004482


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX00448
Date de la décision : 19/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-09 Contributions et taxes. - Incitations fiscales à l'investissement.


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Michaël KAUFFMANN
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : SCP NATAF et PLANCHAT

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-04-19;20bx00448 ?
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