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28/02/2022 | FRANCE | N°21BX02083

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 28 février 2022, 21BX02083


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 10 juin 2020 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2004359 du 27 janvier 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 mai 2021, M. A..., représen

té par Me Autef, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 janvier 2021 du tribunal admi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 10 juin 2020 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2004359 du 27 janvier 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 mai 2021, M. A..., représenté par Me Autef, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 janvier 2021 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté du 10 juin 2020 de la préfète de Gironde ;

3°) d'enjoindre à la préfète de Gironde de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 11° ou de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou à tout le moins, d'enjoindre à la préfète de réexaminer sa demande et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans les mêmes conditions de délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- sa requête est recevable dès lors que la décision sur sa demande d'aide juridictionnelle, déposée le 25 février 2021, lui a été notifiée par la voie postale en lettre simple à une date indéterminée ;

- le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité dès lors, d'une part, qu'il a omis de se prononcer sur l'irrégularité de l'avis émis le 31 décembre 2019 au regard de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016, que, d'autre part, il a considéré à tort qu'il pourrait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine pour ses deux pathologies, révélant une dénaturation des pièces communiquées et qu'enfin, s'agissant de son admission exceptionnelle au séjour, il a insuffisamment motivé son jugement sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le tribunal a également omis de se prononcer sur le moyen tiré du défaut de motivation de l'avis de l'OFII ;

- la décision portant refus de titre de séjour a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière au regard de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 dès lors que l'avis du 31 décembre 2019 ne permet pas de s'assurer que l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) s'est prononcé sur les deux pathologies dont il souffre, que cet avis dont certaines cases relatives à la procédure d'élaboration ne sont pas remplies est incomplet et qu'il ne contient aucune motivation ;

- la préfète s'est estimée à tort liée par l'avis rendu par le collège de médecin de l'OFII ;

- cette décision méconnaît l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne peut bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine, lequel a au demeurant évolué ;

- elle méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il justifie de circonstances exceptionnelles pour son admission au séjour ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale ;

- elle méconnaît l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 septembre 2021, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que :

- la requête est tardive ;

- elle s'en remet à son mémoire de première instance.

Par une décision du 1er avril 2021, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Birsen Sarac-Deleigne,

- et les observations de Me Autef, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant camerounais né le 17 mai 1974, est entré sur le territoire français en décembre 2014 selon ses déclarations et a obtenu un premier titre de séjour à raison de son état de santé, valable un an du 30 novembre 2016 au 29 novembre 2017. Sa demande de renouvellement a toutefois été rejetée par un arrêté du 25 février 2019. Par un jugement du 27 mai 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé cet arrêté et enjoint à la préfète de la Gironde de procéder au réexamen de sa demande. Par un arrêté du 10 juin 2020, la préfète de la Gironde a, une seconde fois, rejeté sa demande de renouvellement de titre de séjour. M. A... relève appel du jugement du 27 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, si M. A... soutient que les premiers juges ont considéré à tort, au vu des pièces produites, qu'il pouvait bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine, la contestation de cette appréciation relève non pas de la régularité du jugement mais de son bien-fondé.

3. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, les premiers juges ont suffisamment motivé, au point 9 du jugement, leur réponse au moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. En troisième lieu, il ressort des écritures de première instance et notamment du mémoire complémentaire présenté le 6 novembre 2020, que le requérant a soulevé à l'encontre du refus de titre de séjour un moyen nouveau tiré de l'irrégularité de l'avis de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) au regard de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016, faute pour le collège des médecins de l'OFII d'avoir renseigné les cases relatives à la procédure d'élaboration. Le tribunal ne s'est pas prononcé sur ce moyen, qui n'était pas inopérant. Par suite, M. A... est fondé à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier dans cette mesure et à en demander l'annulation en tant seulement qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour.

5. Il y a lieu de se prononcer immédiatement par la voire de l'évocation sur les conclusions de M. A... dirigées contre la décision portant refus de titre de séjour et, par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur le surplus de la requête.

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

6. En premier lieu, la préfète de la Gironde a, par un arrêté du 12 novembre 2019 régulièrement publié le 14 novembre 2019 au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Gironde n° 33-2019-176 et librement accessible, donné délégation à M. Thierry Suquet, secrétaire général de la préfecture de la Gironde à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, requêtes, mémoires, correspondances et documents concernant les attributions de l'État dans le département de la Gironde, à l'exception de trois matières au nombre desquelles ne figurent pas les mesures relatives au séjour et à l'éloignement des étrangers. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée doit être écarté.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ". Selon l'article R. 313-22 de ce code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé. ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...) ". L'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313 22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

8. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le certificat médical établi le 23 août 2019 par le médecin traitant du requérant et transmis au collège des médecins de l'OFII pour permettre d'établir le rapport médical visé à l'article R. 313-22 du code de l'entrée de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a fait état des deux pathologies dont souffre M. A.... Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le collège de médecins de l'OFII ne se serait pas prononcé au vu de ces deux pathologies.

9. D'autre part, il ne résulte d'aucune des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 de ce code, ni d'aucun principe, que l'avis du collège de médecins de l'OFII devrait porter mention du nom du médecin qui a établi le rapport médical, prévu par l'article R. 313-22, qui est transmis au collège de médecins de l'Office.

10. Il ressort des pièces du dossier, notamment du bordereau de transmission rédigé par le directeur général de l'OFII, que le rapport médical établi le 6 décembre 2019 par un médecin du service médical de la direction territoriale de l'OFII de Bordeaux a été transmis au collège de médecins de l'OFII le même jour. Il ressort des mentions de l'avis rendu par le collège que le médecin ayant établi le rapport médical n'a pas siégé au sein du collège de médecins ayant examiné le dossier de M. A... conformément aux dispositions précitées de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

11. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier qu'en l'espèce, dans l'avis du 6 août 2018, le collège des médecins n'a pas explicitement précisé, en cochant l'une des cases " réalisée : oui / non ", si le requérant avait été ou non, au stade de l'élaboration du rapport et de l'avis, convoqué pour examen, si des examens complémentaires avaient été ou non demandés et s'il avait, le cas échéant, justifié de son identité à l'occasion d'un examen. Il n'a donc pas intégralement mentionné les éléments de procédure propres à l'examen de la situation de M. A..., en méconnaissance des dispositions de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016.

12. Toutefois, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.

13. En l'espèce, M. A... n'allègue ni n'établit qu'il aurait été, au stade de l'élaboration de l'avis, convoqué par le collège des médecins, que des examens complémentaires lui auraient été demandés ou qu'il aurait été invité à justifier de son identité. Dès lors, l'absence de mention explicite dans l'avis du collège des médecins, de la circonstance qu'il n'a pas fait l'objet d'une convocation, d'une demande d'examens complémentaires ou d'une demande de justification de son identité n'a pu, dans les circonstances de l'espèce, priver l'intéressé d'une quelconque garantie, ni avoir eu une influence sur le sens de la décision intervenue ultérieurement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 doit être écarté.

14. En troisième lieu, M. A... ne saurait utilement soutenir que l'avis de l'OFII serait insuffisamment motivé dès lors que le respect du secret médical interdit aux médecins de donner à l'administration, de manière directe ou indirecte, aucune information sur la nature des pathologies dont souffre l'étranger.

15. En quatrième lieu, si la préfète de la Gironde s'est appropriée les termes de l'avis du collège de médecins de l'OFII du 31 décembre 2019, il ressort de la motivation de la décision attaquée qu'elle a par ailleurs examiné l'ensemble des pièces portées à sa connaissance notamment par M. A..., pour rejeter la demande de titre de séjour qui lui était présentée et qu'elle a effectué un examen de sa situation pour retenir que l'intéressé ne remplissait pas les conditions d'octroi de titre de séjour sollicité. Dès lors, le moyen tiré de ce que la préfète de la Gironde se serait estimée liée par l'avis du collège des médecins de l'OFII doit être écarté.

16. En cinquième lieu, le collège de médecins de l'OFII a considéré dans son avis du 31 décembre 2019 que si l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale et que l'absence de traitement aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine.

17. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'OFII qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

18. Il ressort des pièces du dossier que M. A... souffre de troubles psychiatriques sévères qui seraient en lien avec les violences dont il aurait été victime durant son parcours migratoire et qu'il est également atteint de drépanocytose. Pour contester l'appréciation de la préfète, M. A... fait valoir qu'il ne pourra accéder aux soins qui lui sont indispensables au Cameroun, notamment dès lors que les molécules correspondant aux traitements qui lui sont prescrits n'y seraient pas disponibles ou qu'il ne pourrait bénéficier d'une prise en charge par la caisse nationale de la prévoyance sociale de son pays d'origine alors qu'il ne dispose pas de revenus suffisants. Toutefois, l'intéressé ne produit à l'appui de ces affirmations qu'une liste nationale des médicaments essentiels au Cameroun, d'origine indéterminée, et des certificats médicaux non circonstanciés, alors qu'il est constant qu'il n'est entré que récemment sur le territoire français à l'âge de 40 ans et a vécu la majeure partie de son existence dans son pays d'origine tout en souffrant déjà de drépanocytose. La production du rapport de l'association Drepavie traitant de la difficulté d'accès aux soins et de celui de l'Organisation mondiale de la santé du 30 juillet 2020 relatif aux progrès réalisés dans la mise en œuvre de la stratégie de lutte contre la drépanocytose dans la région africaine 2010-2020 ne permettent pas davantage de remettre en cause cette appréciation. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

19. En sixième lieu, il est constant que M. A... a conclu deux contrats de travail à durée indéterminée le 26 décembre 2017 et le 4 janvier 2018, pour exercer à temps partiel les emplois de coiffeur et d'agent d'entretien et a ensuite occupé plusieurs emplois en qualité d'agent de service et de vendangeur et a, en dernier lieu conclut un nouveau contrat à durée indéterminée le 6 août 2019. Si ces éléments démontrent, comme il le soutient, un effort pour son intégration professionnelle afin de subvenir aux besoins, notamment médicaux, de sa famille restée dans son pays d'origine, ils ne sont pas de nature à traduire des considérations humanitaires ou des circonstances exceptionnelles. Dès lors, en refusant de le faire bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la préfète n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire national et fixant le pays de destination :

20. En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi, M. A..., en reprenant dans des termes identiques devant la cour, les moyens tels qu'énoncés dans les visas, n'apporte en appel aucun élément de fait ou de droit nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation des premiers juges qui y ont pertinemment répondu. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Bordeaux.

21. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation dirigées contre la décision portant refus de titre de séjour, présentées par M. A... devant le tribunal administratif de Bordeaux, doivent être rejetées. M. A... n'est par ailleurs pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par le requérant à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2004359 du 27 janvier 2021 du tribunal administratif de Bordeaux est annulé en tant qu'il statue sur la décision de la préfète de la Gironde du 10 juin 2020 portant refus de titre de séjour.

Article 2 : La demande présentée par M. A... au tribunal administratif de Bordeaux, en tant qu'elle tend à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour prise par la préfète de la Gironde le 10 juin 2020, ainsi que le surplus de ses conclusions d'appel, sont rejetés

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 22 février 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère,

Mme Laury Michel, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 février 2022.

La rapporteure,

Birsen Sarac-DeleigneLa présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX02083


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX02083
Date de la décision : 28/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Birsen SARAC-DELEIGNE
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : AUTEF

Origine de la décision
Date de l'import : 08/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-02-28;21bx02083 ?
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