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28/02/2022 | FRANCE | N°19BX04844

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 28 février 2022, 19BX04844


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) Arcadie Sud-Ouest, a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la réduction de la cotisation foncière des entreprises et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie dans les rôles de la commune de Sainte-Radegonde (Aveyron) au titre des années 2015 et 2016.

Par un jugement n° 1701932 et 1801509 du 22 octobre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

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Par une requête, enregistrée le 9 décembre 2019, la société Arcadie Sud-Ouest, représe...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) Arcadie Sud-Ouest, a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la réduction de la cotisation foncière des entreprises et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie dans les rôles de la commune de Sainte-Radegonde (Aveyron) au titre des années 2015 et 2016.

Par un jugement n° 1701932 et 1801509 du 22 octobre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 décembre 2019, la société Arcadie Sud-Ouest, représentée par la SCP RGM avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 22 octobre 2019 ;

2°) de prononcer la réduction de la cotisation foncière des entreprises et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2015 et 2016 ;

3°) de joindre la présente instance avec celles portant les n° 18BX01107, 18BX01109 et 18BX01110 ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle entend développer les mêmes moyens que ceux présentés à l'appui de sa contestation relative à la contribution foncière des entreprises des années 2010 à 2014 et produit, en annexe, à sa requête d'appel, une copie de ses écritures relatives à l'instance n° 18BX01110 exposant les moyens tirés de ce que :

- les panneaux isothermes et les équipements de quai constituent des biens situés en dehors du champ d'application de la taxe foncière sur les propriétés bâties tels que définis par les articles 1380 et 1381 du code général des impôts ; le tribunal administratif de Toulouse a omis de rechercher si les immobilisations en litige pouvaient être regardées comme des " ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions " compte tenu des trois critères jurisprudentiels et de doctrine administrative relatifs à leur nature, leur importance et leur fixité au sol et ce faisant, a entaché son jugement d'erreur de droit ; les panneaux isothermes et les équipements de quai qui sont démontables et déplaçables ne font pas corps avec le bâtiment et n'ont donc pas vocation à rester incorporés à l'établissement industriel ;

- à titre subsidiaire, les immobilisations en litige peuvent bénéficier de l'exonération prévue au 11° de l'article 1382 du code général des impôts, laquelle n'est subordonnée qu'à une condition d'ordre fonctionnel ; le recours au critère de la dissociabilité est contraire à la volonté du législateur qui a entendu exonérer l'ensemble de l'outillage qu'il soit fixe ou non ; en retenant un critère non prévu par le 11° de l'article 1382, le tribunal a commis une erreur de droit ;

- les éléments en litige bénéficient d'une exonération en vertu de la doctrine exprimée sous les références BOI-IF-TFB-10-10-10, n° 120, 150 et 160 ;

- l'interprétation retenue de l'article 1382 du code général des impôts crée une rupture d'égalité par rapport aux propriétaires de locaux commerciaux dès lors que ces derniers ne sont pas imposés sur les installations et moyens matériels d'exploitation généralement financés par les locataires exploitants.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 juin 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Birsen Sarac-Deleigne,

- et les conclusions de M. Stéphane Gueguein, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Arcadie Sud-Ouest est propriétaire, sur le territoire de la commune de Sainte-Radegonde (Aveyron), d'un établissement où elle exerce une activité d'abattage et de découpe de viande de boucherie. Elle a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la réduction de la cotisation foncière des entreprises et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2015 et 2016 à hauteur de la somme correspondant à l'inclusion dans ses bases d'imposition de panneaux isothermes et d'éléments de quai équipant son établissement. La société requérante relève appel du jugement du 22 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé des impositions :

2. D'une part, l'article 1380 du code général des impôts dispose : " La taxe foncière est établie annuellement sur les propriétés bâties sises en France à l'exception de celles qui en sont expressément exonérées par les dispositions du présent code ". Selon l'article 1381 du même code : " Sont également soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties : / 1° Les installations destinées à abriter des personnes ou des biens ou à stocker des produits ainsi que les ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions tels que, notamment, les cheminées d'usine, les réfrigérants atmosphériques, les formes de radoub, les ouvrages servant de support aux moyens matériels d'exploitation ; / 2° Les ouvrages d'art et les voies de communication (...) ". Selon l'article 1382 du code général des impôts : " Sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties : / (...) / 11° Les outillages et autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels à l'exclusion de ceux visés aux 1° et 2° de l'article 1381 (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article 1495 de ce code : " Chaque propriété ou fraction de propriété est appréciée d'après sa consistance, son affectation, sa situation et son état, à la date de l'évaluation ". Aux termes du II de l'article 324 B de l'annexe III au même code : " Pour l'appréciation de la consistance il est tenu compte de tous les travaux équipements ou éléments d'équipement existant au jour de l'évaluation ".

3. Pour apprécier, en application de l'article 1495 du code général des impôts et de l'article 324 B de son annexe III, la consistance des propriétés qui entrent, en vertu de ses articles 1380 et 1381, dans le champ de la taxe foncière sur les propriétés bâties, il est tenu compte, non seulement de tous les éléments d'assiette mentionnés par ces deux derniers articles mais également des biens faisant corps avec eux. Sont toutefois exonérés de cette taxe, en application du 11° de l'article 1382 du même code, ceux de ces biens qui font partie des outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation d'un établissement industriel, c'est-à-dire ceux de ces biens qui relèvent d'un établissement qualifié d'industriel au sens de l'article 1499, qui sont spécifiquement adaptés aux activités susceptibles d'être exercées dans un tel établissement et qui ne sont pas au nombre des éléments mentionnés aux 1° et 2° de l'article 1381.

4. D'autre part, aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu des 11° et 12° et 13° de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de ceux qui ont été détruits ou cédés au cours de la même période. (...) ".

5. Il résulte des dispositions citées au point précédent que les biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu du 11° de l'article 1382 du code général des impôts ne sont pas compris dans les bases de la cotisation foncière des entreprises.

6. Il n'est pas contesté que l'établissement situé sur le territoire de la commune de Sainte-Radegonde dont la société Arcadie Sud-Ouest est propriétaire est un établissement industriel au sens de l'article 1499 du code général des impôts.

7. Il résulte de l'instruction et notamment des écritures de première instance que les immobilisations en cause qui ont été comptabilisées par la société au poste " 2131 " Bâtiments " sont constitués, pour la première, de panneaux isothermes thermique et, pour la seconde, d'un quai niveleur Dagard.

8. Il résulte de l'instruction que le quai est constitué d'une part, d'une jupe d'étanchéité, ou abri de quai dont la fonction est de compenser la différence de hauteur entre le sol du local et le seuil de chargement du camion et d'assurer la liaison étanche entre la remorque du camion et le mur de l'entrepôt pour minimiser les pertes calorifiques et protéger le personnel et les marchandises des intempéries, et d'autre part, d'un système anti-chute protégeant également les personnes contre le risque d'écrasement entre le niveleur et le camion. Eu égard à ses caractéristiques, il ne résulte pas de l'instruction que cet équipement aurait vocation à être dissocié du bâtiment avec lequel il fait corps. Il entre ainsi dans le champ d'application de la taxe foncière sur les propriétés bâties. Toutefois, au vu des éléments de l'instruction, un tel bien est spécifiquement adapté aux activités susceptibles d'être exercées dans un établissement industriel au sens de l'article 1499 du code général des impôts et il n'est pas au nombre des installations et ouvrages mentionnés aux 1° et 2° de l'article 1381 du code général des impôts. Ce quai est, ainsi, exonéré de taxe foncière en application du 11° de l'article 1382 du code général des impôts et, par suite, doit être exclu de la base de la cotisation foncière des entreprises de la société requérante.

9. Il ne résulte pas de l'instruction qu'eu égard à leurs caractéristiques, les panneaux isothermes équipant les locaux de la société Arcadie Sud-Ouest seraient dissociables du bâti. Ils doivent ainsi être regardés comme entrant dans le champ d'application de la taxe foncière sur les propriétés bâties. Toutefois, compte tenu de leurs propriétés thermiques, les panneaux isothermes, qui participent à la régulation des conditions de conservation des produits travaillés, doivent être regardés comme des moyens techniques spécifiquement adaptés aux activités susceptibles d'être exercées dans un établissement industriel au sens de l'article 1499 du code général des impôts. Ces biens n'étant par ailleurs pas au nombre des équipements et ouvrages mentionnés aux 1° et 2° de l'article 1381 du code général des impôts, ils sont également exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties et, par suite, doivent être exclus de la base de la cotisation foncière des entreprises de la société Arcadie Sud-Ouest.

10. Par suite, la société requérante est fondée à demander la réduction des cotisations foncière des entreprises et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2015 et 2016 à raison de son établissement, à hauteur de la somme correspondant à l'exclusion de ses bases d'imposition de l'équipement de quai Dagard et des panneaux isothermes en application du 11° de l'article 1382 du code général des impôts.

11. Il résulte de tout ce qui ce qui précède que la société Arcadie Sud-Ouest est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 22 octobre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses conclusions tendant à la réduction de la cotisation foncière des entreprises et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2015 et 2016.

Sur les frais liés à l'instance :

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à la société Arcadie Sud-Ouest au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 22 octobre 2019 est annulé.

Article 2 : La société Arcadie Sud-Ouest est déchargée de la cotisation foncière des entreprises et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie dans les rôles de la commune de Sainte-Radegonde (Aveyron) au titre des années 2015 et 2016 à hauteur de la somme correspondant à l'exclusion de ses bases d'imposition de l'équipement de quai Dagard et des panneaux isothermes.

Article 3 : L'Etat versera à la société Arcadie Sud-Ouest une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Arcadie Sud-Ouest et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie sera adressée à la direction des vérifications nationales et internationales et à la direction de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 22 février 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère,

Mme Laury Michel, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 février 2022.

La rapporteure,

Birsen Sarac-DeleigneLa présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne de l'économie, des finances et de la relance ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX04844


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX04844
Date de la décision : 28/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-01-02 Contributions et taxes. - Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. - Questions communes. - Valeur locative des biens.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Birsen SARAC-DELEIGNE
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : CABINET D'AVOCAT RGM (ROUME-GUTTON-MOAYED)

Origine de la décision
Date de l'import : 08/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-02-28;19bx04844 ?
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