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28/02/2022 | FRANCE | N°19BX04507

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 28 février 2022, 19BX04507


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux :

1°) de condamner solidairement la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand et l'Etat à lui verser la somme de 1 264 876, 20 euros en réparation de son manque à gagner et la somme de 167 030,38 euros au titre de son préjudice matériel, assorties des intérêts au taux légal majoré de 4 points à compter du 1er juin 2012 ou de la date de réception des demandes indemnitaires préalables, la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice mo

ral, ainsi que la somme de 20 000 euros en réparation de la perte de jouissance de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux :

1°) de condamner solidairement la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand et l'Etat à lui verser la somme de 1 264 876, 20 euros en réparation de son manque à gagner et la somme de 167 030,38 euros au titre de son préjudice matériel, assorties des intérêts au taux légal majoré de 4 points à compter du 1er juin 2012 ou de la date de réception des demandes indemnitaires préalables, la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice moral, ainsi que la somme de 20 000 euros en réparation de la perte de jouissance de ses biens immobiliers et du préjudice moral subis pour la période de juin 2016 à septembre 2017, assortie des intérêts au taux légal majoré de 4 points à compter du 1er juin 2012 ou de la date de réception des demandes indemnitaires préalables ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 741-2 du code de justice administrative ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand et de l'Etat, chacun la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1801392 du 26 septembre 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné l'Etat à verser à M. B... la somme de 7 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 23 novembre 2016 et a rejeté le surplus de ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 novembre 2019 et des mémoires enregistrés les 7 janvier 2022, 4 février 2022 et 15 février 2022, M. B..., représenté par Me Fouchet, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 26 septembre 2019 ;

2°) d'écarter des débats la production n°14 de la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand pour le lien de parenté entre l'auteur de l'attestation et la défenderesse ;

3°) de condamner in solidum la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand et l'Etat à lui verser la somme de 247 534,14 euros au titre du préjudice matériel subi, la somme à parfaire de 1 241 399 euros au titre de son manque à gagner, assortie des intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2012, date de la signature des baux d'habitation, ou, à défaut, à compter de la réception des demandes préalables indemnitaires ;

4°) de condamner in solidum la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand et l'Etat à lui verser la somme à parfaire de 10 000 euros au titre de son préjudice moral ;

5°) de condamner l'Etat et la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand à lui verser la somme de 20 000 euros au titre de la perte de jouissance de ses biens immobiliers et du préjudice moral, pour la période allant de juin 2016 à septembre 2017, assortie des intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2012, date de la signature des baux d'habitation, ou, à défaut, à compter de la réception des demandes indemnitaires préalables ;

6°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand et de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la minute du jugement ne comporte pas les signatures requises par l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- le tribunal a omis de statuer sur sa demande tendant à écarter des débats la production n° 14 de la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand pour le lien de parenté, nié frauduleusement, entre le maire de la commune et l'auteure de l'attestation qui a reconnu finalement être la belle-sœur par alliance du maire ; il appartenait au tribunal d'écarter cette attestation pour violation de l'article 202 du code de procédure civile et de l'article 441-7 du code pénal ;

- en éludant les certificats opérationnels positifs obtenus avant les deux remembrements et qui n'avaient pas été produits lors du premier recours indemnitaire jugé par la cour, le tribunal a insuffisamment motivé son jugement ; le tribunal a omis de répondre aux moyens tirés de l'illégalité des permis de construire délivrés aux époux A... et D..., soulevé dans le mémoire en réplique n°3, de l'absence illégale de retrait du permis de construire par le maire, ainsi que de l'absence illégale de déféré préfectoral contre les deux permis de construire ; le tribunal a omis de prendre en compte la pièce n°93 ; le tribunal a omis de se prononcer sur la connaissance acquise du maire de la contestation des remembrements ;

- la délivrance des permis de construire aux époux A... et D... est illégale et fautive ; le maire qui avait connaissance du caractère constructible des parcelles remembrées, reconnu par ses propres certificats d'urbanisme, et qui constitue un motif certain d'annulation des deux décisions de remembrement, aurait dû à tout le moins émettre une réserve quant à la procédure de remembrement et de contestation de celle-ci ;

- le refus du maire de proroger les autorisations d'urbanisme qui lui ont été délivrées est constitutif d'une illégalité fautive dès lors que leur validité a nécessairement été interrompue du fait de l'administration qui a délivré des permis de construire et du fait de tiers ayant construit sur des terrains ne leur appartenant pas ; ce refus a compromis la réalisation de ses projets alors qu'il n'a désormais plus la capacité financière de viabiliser et de construire les terrains ; en outre, aucun constructeur ne pouvait commencer les travaux d'aménagement sans la réalisation préalable de la voirie et des réseaux prévus au niveau de la clôture et de la haie des époux D... ;

- l'absence de retrait des permis de construire délivrés aux époux A... et D... postérieurement aux conclusions d'annulation du rapporteur public du tribunal administratif et alors que l'ouverture du chantier a été déclarée au 17 mai 2001 pour les époux D... et le 20 août 2002 pour les époux A..., soit postérieurement au jugement d'annulation d'avril 2001, est constitutive d'une faute ; en tout état de cause, le permis de construire délivré aux époux A... et les ouvertures de chantier transmises au préfet sont postérieures au jugement d'annulation du 12 avril 2001 ; cette faute du maire est doublée d'une absence de déféré préfectoral ;

- la commune a porté atteinte à maintes reprises à son droit de propriété tel que garanti par l'article 1 §1 du premier protocole additionnel de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et par l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, alors qu'elle avait été informée de ses réclamations portant sur le remembrement ;

- le maire et ses adjoins se sont illégalement opposés au concours de la force publique pour exécuter une décision de justice définitive ;

- la demande indemnitaire était suffisamment précise pour lier le contentieux quant au refus illégal du maire d'autoriser le rejet des effluents dans le fossé de la voie communale ; cette opposition de principe du maire du 30 janvier 2014 pour ménager les occupants sans titre et indirectement, sa belle-sœur, est illégale et fautive ;

- le tribunal a omis de prendre en compte le rôle prépondérant du maire et de ses adjoints dans la procédure de remembrement ; le maire de la commune qui était membre de la commission communale de remembrement et président de l'association foncière de remembrement en 1998, avait connaissance acquise de la contestation des remembrements et le tribunal a omis de se prononcer sur ce point ; la commune ne peut prétendre n'avoir eu connaissance de cette contestation qu'à compter du 2 juillet 2001, alors que deux réclamations quant au projet de remembrement ont été portées par ses soins sur les registres tenus en mairie en août 1997 et en février 1998, qu'il a réitéré sa réclamation en insistant sur la constructibilité de ses parcelles par courriers des 21 août 1998 et 17 juin 1998 et que son ancien conseil a informé le maire des réclamations le 12 février 1999, et demandé le rétablissement des parcelles lui appartenant par courrier du 19 février 1999, que la commission communale de remembrement, composée du maire, lui a confirmé le 5 juillet 1999 la réception de sa réclamation et des trois certificats d'urbanisme positifs, qu'une réunion s'est tenue en mairie le 15 juillet 1999 portant sur sa réclamation et que la commission communale d'aménagement foncier (CCAF) était informée des décisions de la commission départementale d'aménagement foncier (CDAF) ;

- le maire, de par ses liens familiaux, était intéressé aux opérations de remembrement et a eu une influence effective quant à l'attribution des terrains à sa belle-sœur, à la non restitution intégrale des parcelles et à l'opposition à la démolition de la maison de sa nièce par alliance ; l'irrégularité de la composition de la CCAF comportant le maire en tant qu'autorité administrative non autonome et indépendante, est constitutive d'une illégalité fautive ; le cumul des fonctions du maire rend la procédure de remembrement, de tentative de règlement et de restitution irrégulière et partiale ;

- le défaut d'indépendance et d'impartialité de l'association foncière de remembrement, de la CCAF et de la CDAF est contraire à l'article 6.1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les décisions de remembrement et de restitution, y compris de la commission départementale, sont fautives ;

- la responsabilité in solidum pour faute de l'Etat et de la commune au regard de la composition des commissions, doit être engagée ;

- la non-exécution d'un jugement définitif créant à son profit un intérêt patrimonial relevant de la notion de " bien " constitue une violation de son droit de propreté tel que garanti par l'article 1 §1 du protocole additionnel de la convention européenne des droits de l'homme ;

- la restitution tardive de ses parcelles et l'inaction de l'Etat pendant 13 ans pour faire démolir les maisons illégalement construites sont constitutives d'une faute ;

- le refus du préfet de prêter le concours de la force publique engage tant la responsabilité pour faute que la responsabilité sans faute de l'Etat ; contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le concours de la force publique n'a pas été sollicité seulement en mars 2014 mais aussi en 2012 ; la simple présence d'un fusil de chasse dans la maison d'un des occupants et la promesse d'une opposition franche du maire à l'exécution d'une décision de justice ne justifiaient pas la sauvegarde d'un trouble à l'ordre public ; il n'a été indemnisé de son préjudice qu'à hauteur de 60 000 euros au titre de la perte de jouissance et de son préjudice moral, sans recevoir aucune indemnité au titre de son préjudice matériel et de la perte de jouissance depuis l'arrêt de la cour du 16 mai 2016, alors que les époux F... qui avaient connaissance du contentieux de remembrement, ont été indemnisés à hauteur de 552 000 euros au titre de leur préjudice financier et de 10 000 euros au titre de leur préjudice moral ;

- il y a lieu de porter l'indemnité due au titre de la perte de jouissance de ses biens immobiliers et de son préjudice moral pour la période allant de juin 2016 à septembre 2017 à la somme 20 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2012, date de la signature des baux d'habitation ou, à défaut, de la réception des demandes préalables indemnitaires ;

- les fautes successives de l'Etat et de la commune ont entraîné la saisie immobilière des parcelles restituées, une inscription au fichier de la Banque de France et de nombreux procès contre sa banque pour régler ses difficultés financières consécutifs au prêt immobilier souscrit en acceptant d'hypothéquer ses parcelles ;

- l'opération de remembrement n'a donné lieu à aucune compensation à son profit en termes d'ouverture à l'urbanisation ;

- il a démontré son intention certaine de réaliser les constructions projetées par la production de devis validés, de factures, des autorisations d'urbanisme obtenues et la souscription d'un prêt immobilier qui n'était pas imprudent compte tenu de la restitution de ses parcelles actée définitivement par la CDAF en 2006 et de la démolition des maisons décidée par le juge judiciaire en 2008, de sorte que la perte de chance de percevoir les revenus correspondants tels qu'évalués par l'expert immobilier est réelle ;

- il a subi un manque à gagner résultant de la non réalisation de son programme immobilier de 10 logements qui s'élève à la somme de 1 250 032 euros dont 764 799 euros au titre des loyers et 476 000 euros au titre de la valeur vénale des maisons, diminuée du coût de la construction ; ayant obtenu un accord de principe pour la location de sa future maison individuelle pour un loyer de 680 euros par mois dès la fin de l'année 2014, la perte de chance de louer cette maison s'élève à 57 120 euros ; les attestations établies le 19 juillet 2011 et 10 août 2011 par une agence immobilière confirment la possibilité d'une location immédiate des maisons projetées compte tenu de l'insuffisance de l'offre au prix de 600 euros par mois ;

- le montant du préjudice matériel d'ores et déjà subi s'élève à la somme de 247 534,14 euros comprenant 89 799,68 euros au titre des frais bancaires, 33 508,6 euros au titre des frais de géomètre et d'accès au terrain, 43 722 euros au titre des paiements effectués auprès du constructeur, 105 121,07 euros au titre de ses frais de justice, 2 450 euros au titre des frais d'expertise immobilière et 4 476 ,05 euros au titre des frais d'huissiers ;

- la poursuite du paiement de son crédit immobilier et des honoraires et la privation de la réalisation de ses projets lui causent un préjudice moral qui doit être indemnisé à hauteur d'une somme de 10 000 euros ;

- le lien de causalité entre la faute de l'Etat et les préjudices subis est établi.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 novembre 2020, la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand, représentée par le cabinet Noyer-Cazcarra Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions indemnitaires fondées sur l'illégalité des permis de construire délivrés aux familles D... et A... sont irrecevables en l'absence de demande indemnitaire préalable fondée sur cette cause juridique ; la seconde réclamation préalable adressée le 13 août 2019 à la commune et reçue par celle-ci le 27 août 2019, postérieurement au jugement attaqué, n'a pu régulariser l'absence de liaison du contentieux ; en tout état de cause, le maire n'a commis aucune illégalité fautive en délivrant les permis de construire sollicités par les époux D... et A... ;

- la demande indemnitaire fondée sur l'illégalité fautive résultant de la décision du 30 janvier 2014 par laquelle le maire de Saint-Sauveur-de-Puynormand a refusé d'autoriser le rejet d'effluents dans le fossé de la voie communale n° 14 est irrecevable en l'absence de demande indemnitaire préalable fondée sur cette cause juridique ;

- le lien de causalité direct entre les préjudices invoqués et les fautes prétendument commises n'est pas établi ;

- aucun des autres moyens de la requête n'est fondé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 janvier 2022, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun moyen de la requête de M. B... n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution et son Préambule ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code monétaire et financier ;

- le code de procédure civile ;

- le code des procédures civiles d'exécution ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Birsen Sarac-Deleigne,

- les conclusions de M. Stéphane Gueguein, rapporteur public,

- et les observations de Me Fouchet, représentant M. B..., et de Me Cordier, représentant la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... est propriétaire des parcelles cadastrées section ZD n°199, 201, 210, 211, 212 et 215, anciennement cadastrées AB 543 et 545, situées au lieudit " La Mouillère " à Saint-Sauveur-de-Puynormand. Dans le cadre d'une opération de remembrement rural de la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand, par décision du 21 août 1998, la commission communale d'aménagement foncier (CCAF) a attribué à Mme E... la parcelle anciennement cadastrée AB 543 appartenant à M. B.... Par jugements des 12 avril 2001 et 16 octobre 2003, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé successivement la décision implicite par laquelle la commission départementale d'aménagement foncier du département (CDAF) de la Gironde a rejeté la réclamation formée par M. B... le 21 août 1998 tendant à la réattribution de la partie de la parcelle anciennement cadastrée AB n° 543 attribuée à Mme E... et la décision du 12 avril 2002 de la commission procédant à la réattribution partielle des parcelles à M. B.... La CDAF a décidé, le 16 juin 2004, de réattribuer l'intégralité de la parcelle AB 543 à M. B.... Cependant, entre 2001 et 2004, Mme E..., désignée propriétaire de la parcelle AB 543 dans le cadre de l'opération de remembrement rural, l'a divisée en deux lots à bâtir et a cédé un premier lot aux époux D... et le second lot aux époux A..., lesquels y ont construit leurs maisons d'habitation. Par un jugement du 20 mars 2008 le tribunal de grande instance de Libourne, confirmé par la cour d'appel de Bordeaux le 12 mai 2012, M. B... a obtenu la démolition des habitations édifiées par les consorts A... et D... sur son fond. Par arrêt du 16 juin 2016, la cour administrative d'appel de Bordeaux a condamné l'Etat à verser à M. B... la somme de 60 000 euros en réparation des préjudices résultant des fautes commises par l'administration au cours des opérations de remembrement rural qui se sont déroulées en 1998. M. B... a formé des réclamations préalables indemnitaires le 15 novembre 2016 auprès de la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand et de l'Etat, lesquelles ont été implicitement rejetées. Par un jugement du 26 septembre 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné l'Etat à verser à M. B... une somme de 7 000 euros, assortie des intérêts au taux légal en réparation des préjudices résultant de l'illégalité fautive des décisions de la CDAF pour la période du 17 juin 2016 au 10 août 2017 ainsi que des refus de concours de la force publique opposés par l'Etat et a rejeté le surplus de ses demandes. M. B... relève appel de ce jugement et demande à la cour de condamner solidairement l'Etat et la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand à lui verser la somme totale de 1 518 933,14 euros.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".

3. Il ressort de la minute du jugement attaqué, produite au dossier, que celui-ci comporte les signatures du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience, requises par l'article R. 741-7 du code de justice administrative. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.

4. En deuxième lieu, il ne ressort pas des motifs du jugement attaqué que les premiers juges auraient rejeté les conclusions indemnitaires de M. B... sur le fondement de l'attestation prétendument frauduleuse de Mme E... faute pour celle-ci d'avoir déclaré son lien de parenté avec le maire de la commune. Au surplus, il n'appartient pas au juge administratif de faire application des dispositions des codes de procédure pénale et civile. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le tribunal a entaché d'irrégularité son jugement en n'écartant pas cette pièce des débats en application de l'article 202 du code de procédure civile et de l'article 441-7 du code pénal.

5. En troisième lieu, contrairement à ce que soutient M. B..., il ne ressort pas des termes du jugement attaqué que le tribunal n'aurait pas tenu compte des certificats d'urbanisme opérationnels obtenus avant les décisions de remembrement, ni de la pièce 93 relative à la réquisition de la force publique en date du 15 juin 2012, le jugement y faisant expressément référence au point 14. Au surplus, de telles omissions, à les supposer établies, seraient sans incidence sur la régularité du jugement.

6. En dernier lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, le tribunal qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments, a répondu de manière circonstanciée à l'ensemble de ses moyens et notamment au moyen tiré l'illégalité fautive de la délivrance des permis de construire aux époux D... et A..., au point 7 de son jugement. Le tribunal qui a jugé que le maire n'avait commis aucune illégalité fautive en délivrant les permis de construire aux époux D... et A..., a implicitement mais nécessairement considéré que l'absence de retrait de ces permis et l'absence d'exercice d'un déféré par le préfet à l'encontre des permis de construire ne présentaient pas davantage de caractère fautif.

7. Il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de l'irrégularité du jugement attaqué doivent être écartés.

Sur la responsabilité pour faute de la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand :

8. En premier lieu, si le requérant se prévaut de l'illégalité fautive résultant de la décision du 30 janvier 2014 par laquelle le maire de Saint-Sauveur-de-Puynormand a refusé d'autoriser le rejet des effluents dans le fossé de la voie communale n° 14 pour les parcelles cadastrées section ZD n° 199 et 201, qui révélerait une opposition de principe du maire de la commune à ses projets, il s'agit d'un fait générateur nouveau, différent de ceux invoqués dans la demande préalable du 15 novembre 2016. Si le requérant a, par la suite, adressé à la commune et à l'Etat, en cours de première instance, le 13 août 2019, une seconde réclamation indemnitaire reprenant ce fait générateur, aucune décision de régularisation n'est intervenue avant que le juge de première instance ne statue, le 26 septembre 2019. La commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand est, dans ces conditions, fondée à soutenir que ce moyen est irrecevable en cause d'appel.

9. En deuxième lieu, il est constant que M. B... a porté deux réclamations sur les registres tenus en mairie et adressé plusieurs courriers au maire de la commune ainsi qu'à la CCAF au cours des années 1997 et 1998 pour faire état de son opposition au projet de remembrement concernant les parcelles cadastrées section AB 543 et 545 au motif de leur constructibilité. Toutefois, la connaissance par le maire de la commune, et par ailleurs membre de la CCAF, de l'existence de ce différend, ne lui permettait pas de s'opposer à la délivrance des permis de construire sollicités par les consorts D... et A... respectivement le 19 mars 2001 et 23 avril 2002, en l'absence d'annulation juridictionnelle définitive des décisions de la CDAF, laquelle est intervenue le 16 octobre 2003, soit postérieurement à la date de délivrance desdits permis. Si par un premier jugement du 12 avril 2001, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé la décision implicite de rejet de la CDAF de la Gironde sur la réclamation de M. B..., l'exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux de 2001 a conduit la CDAF de la Gironde à réattribuer, le 12 avril 2002, à M. B... une portion seulement de la parcelle AB 543. Ainsi que l'a jugé le tribunal, la seule circonstance que la légalité des opérations de remembrement de la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand était contestée devant le juge administratif ne pouvait faire obstacle à la délivrance par le maire des permis de construire sollicités par M. D... et M. A..., lesquels étaient propriétaires de leurs terrains respectifs à la date des permis en cause. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le maire aurait commis une illégalité fautive en délivrant des permis de construire aux époux D... et A... ou en ne procédant pas à leur retrait alors en outre que ce fait générateur n'avait pas été invoqué dans la réclamation préalable du 15 novembre 2016.

10. En troisième lieu, M. B... ne démontre pas, dans la présente instance, la faute qu'aurait commise le maire de Saint-Sauveur-de-Puynormand en refusant de proroger les délais de validité des autorisations d'urbanisme qui lui ont été délivrées en 2011 et 2012 en se bornant à renvoyer sans autre précision aux pièces jointes à sa requête. En outre, ainsi que l'a jugé la cour par les arrêts n°s 19BX04512, 19BX04513, 19BX4514, 19BX04515 et 19BX04616 du 8 février 2022, la seule production d'une facture non datée comportant des mentions manuscrites précisant que des travaux de terrassement concernant cinq lots à bâtir au lieudit " La Mouillère " et onze lots à bâtir au lieudit " Le Maine du Pont ", ont été effectués sur la période 2014/2015 ne permet pas de tenir pour établi que des travaux significatifs ont été entrepris pour permettre d'interrompre ou proroger la durée de validité du permis d'aménager du 3 décembre 2012 délivré en vue de la création de onze lots à bâtir sur la parcelle cadastrée section ZC n° 29 située au lieudit " Le Maine du Pont ". Le courrier du maire daté du 28 janvier 2016, intervenu postérieurement à l'expiration du délai de validité dudit permis, n'a pas davantage pu interrompre ou proroger ce délai. S'agissant du permis d'aménager n° PA 033 472 12 F 0002 du 3 décembre 2012, des permis de construire n° PC 033 472 12 F 0007 et PC 033 472 11 F 0008 du 14 février 2012 et de la décision de non-opposition à la déclaration préalable n° DP 033 472 11 F0010 du 14 avril 2011, il ne résulte pas de l'instruction et notamment du constat d'huissier versé au dossier, que les ouvrages édifiés sur les parcelles des époux A... et D... auraient constitué un obstacle insurmontable à l'accès au terrain d'assiette des autorisations en litige ni qu'ils auraient empêché le commencement des travaux. Par ailleurs, la durée de validité du permis de construire délivré au requérant le 18 juillet 2011 sur la parcelle 543 en vue de l'édification d'une maison d'habitation a été prorogée pour une durée de 3 ans à compter du 1er septembre 2017 pour tenir compte de l'occupation irrégulière du terrain d'assiette de son projet. Il suit de là que M. B... n'est pas fondé à se prévaloir d'une illégalité fautive du maire à raison du refus de proroger les autorisations d'urbanisme en cause ou d'une opposition systématique de celui-ci à son projet de construction.

11. Enfin, M. B... ne saurait utilement invoquer la faute de la commune du fait des décisions illégales de la CDAF et de l'opposition du maire et d'une partie du conseil municipal à l'exécution des décisions de justice ordonnant la restitution des parcelles dès lors que les décisions prises dans le cadre des opérations de remembrement et le refus du concours de la force publique ne relèvent pas de la compétence de la commune. Si M. B... estime que l'action du maire en sa qualité de membre de la CCAF et de l'association foncière de remembrement serait pénalement répréhensible du fait de ses liens familiaux avec les bénéficiaires du remembrement, il lui appartient s'il y croit fondé, d'engager des poursuites devant le juge judiciaire.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la responsabilité de la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand n'est pas engagée vis-à-vis de M. B....

Sur la responsabilité de l'Etat :

13. Ainsi que l'a jugé le tribunal, les décisions de la CDAF de la Gironde, annulées pour excès de pouvoir à la demande de M. B..., sont entachées d'une illégalité constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat. Il résulte de l'instruction que si par décision du 20 mars 2008, confirmée par la cour d'appel de Bordeaux le 11 mai 2012, le tribunal de grande instance de Libourne a ordonné la démolition des habitations des consorts D... et A..., M. B... n'a retrouvé la pleine jouissance de son terrain dans son état initial qu'en août 2017. Si, par un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux n° 14BX01013 en date du 16 juin 2016, l'Etat a été condamné à verser à M. B... une indemnité de 10 000 euros au titre de son préjudice moral et une indemnité de 50 000 euros au titre de la perte de jouissance de son bien pour la période du 1er avril 1999 au 16 juin 2016 à raison des décisions illégales de la CDAF de la Gironde, le requérant qui a subi, ainsi qu'il le soutient, une atteinte à son droit de propriété garanti par l'article 1 §1 du protocole additionnel de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, est fondé à rechercher la responsabilité de l'Etat pour la période du 17 juin 2016 au 10 août 2017, postérieure à celle qui a donné lieu à l'indemnisation décidée par l'arrêt du 16 juin 2016.

14. En revanche, eu égard à leurs attributions, ni la CDAF statuant sur une réclamation portant sur une modification parcellaire, ni la CCAF, ni l'association foncière de remembrement ne sauraient être regardées comme un tribunal décidant des contestations sur des droits et obligations en matière civile ou du bien-fondé d'une accusation en matière pénale. Il suit de là que M. B... ne saurait utilement invoquer une illégalité fautive résultant de l'irrégularité de la composition de ces dernières au regard des stipulations de l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

15. Par ailleurs, compte tenu de la légalité des permis de construire délivrés aux époux A... et D..., M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une illégalité fautive en ne les déférant pas au tribunal administratif

16. Enfin, aux termes de l'article L. 153-1 du code des procédures civiles d'exécution : " L'Etat est tenu de prêter son concours à l'exécution des jugements et des autres titres exécutoires. Le refus de l'Etat de prêter son concours ouvre droit à réparation. ". Il résulte des articles L. 153-2, L. 122-1 et L. 122-2 du même code que l'huissier de justice chargé de l'exécution peut requérir le concours de la force publique, qu'il peut procéder à l'exécution forcée et qu'il a la responsabilité de la conduite des opérations d'exécution. Aux termes de l'article R. 153-1 du même code : " Si l'huissier de justice est dans l'obligation de requérir le concours de la force publique, il s'adresse au préfet. / La réquisition (...) est accompagnée d'un exposé des diligences auxquelles l'huissier de justice a procédé et des difficultés d'exécution (...) Le défaut de réponse dans un délai de deux mois équivaut à un refus. ".

17. S'il résulte des dispositions de l'article L. 153-1 du code des procédures civiles que toute décision de justice ayant force exécutoire peut donner lieu à une exécution forcée, la force publique devant, si elle est requise, prêter main forte à cette exécution, des considérations impérieuses tenant à la sauvegarde de l'ordre public peuvent toutefois légalement justifier le refus de prêter le concours de la force publique.

18. M. B... s'est vu refuser implicitement le concours de la force publique par le sous-préfet de Libourne à la suite du premier réquisitoire présentée par huissier le 15 juin 2012 pour exécuter l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 11 mai 2012 autorisant M. B... à procéder à la démolition des immeubles édifiés sur son terrain section AB n° 543, puis une seconde fois par le préfet de la Gironde à la suite du réquisitoire du 20 octobre 2016 sollicitant la démolition des clôtures et murets empiétant sur ses parcelles. Toutefois, il résulte de l'instruction, et notamment du procès-verbal de renseignement administratif établi le 27 janvier 2017 par la compagnie de gendarmerie nationale de Libourne et adressé au sous-préfet, que le concours de la force publique présentait un fort risque de trouble à l'ordre public, une opposition physique à l'exécution étant annoncée de la part des deux familles, du conseil municipal et d'une partie des habitants de la commune, que les familles D... et A... avaient manifesté leur hostilité, que certains membres de ces familles avaient déjà eu des échanges violents avec M. B... impliquant un fusil de chasse et que la situation était source d'une forte tension au sein de la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand. Si le requérant invoque une restitution anormalement tardive de ses parcelles, des considérations impérieuses tenant à la sauvegarde de l'ordre public ont justifié le refus de concours de la force publique et le préfet n'a donc commis aucune faute. Cependant, le refus du préfet engage, comme l'a estimé le tribunal, la responsabilité sans faute de l'Etat.

19. Il résulte de ce qui précède que le requérant est seulement fondé à rechercher la responsabilité de l'Etat pour faute à raison des décisions illégales de la CDAF de la Gironde ainsi que sa responsabilité sans faute à raison du refus de concours de la force publique.

Sur les préjudices subis :

20. En premier lieu, le requérant se prévaut de la perte d'une chance sérieuse de réaliser l'opération de promotion immobilière consistant en la construction puis en la location de dix maisons d'habitation et demande à être indemnisé du manque à gagner consécutif à l'abandon de cette opération immobilière. Toutefois, ainsi que l'a jugé le tribunal, la perte de bénéfices ou le manque à gagner découlant de l'impossibilité de réaliser une opération immobilière en raison d'une décision administrative illégale revêt un caractère éventuel et ne peut, dès lors, en principe, ouvrir droit à réparation. Il en va toutefois autrement si le requérant justifie de circonstances particulières, tels que des engagements souscrits par de futurs acquéreurs ou l'état avancé des négociations commerciales avec ces derniers, permettant de faire regarder ce préjudice comme présentant, en l'espèce, un caractère direct et certain. Si M. B... demande une indemnisation correspondant à la valeur vénale de dix logements et aux loyers qu'il aurait perçus, les documents et attestations produits et notamment le courrier non daté et peu circonstancié d'une personne se disant intéressée par la location d'une maison à construire pour un loyer de 680 euros par mois, les attestations datés du mois juillet 2011 relatifs à l'évaluation du prix de location et de la valeur vénale d'une maison sur le territoire de la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand, ainsi que l'attestation locative du mois d'août 2011 ne peuvent être regardés comme des éléments de nature à établir des négociations avancées en vue de louer les logements qu'il envisageait de construire. Par ailleurs, les documents produits ne permettent pas d'établir que le refus des époux D... de démolir la haie et la clôture longeant le terrain d'assiette du projet de lotissement aurait constitué un obstacle insurmontable au commencement des travaux du seul fait du passage envisagé de la voirie interne et des réseaux sous cette clôture. Dans ces conditions, le préjudice allégué, purement éventuel, ne peut ouvrir droit à réparation.

21. Eu égard à ce qui vient d'être dit, en l'absence de préjudice indemnisable du fait de l'abandon de son programme immobilier, M. B... n'est pas fondé à demander le remboursement des frais d'expertise immobilière d'un montant de 2 450 euros exposés pour son évaluation.

22. Aucun élément de l'instruction ne permet de tenir pour établi un lien direct entre, d'une part, l'illégalité fautive des décisions de la CDAF ou le refus du concours de la force publique et, d'autre part, l'obligation dans laquelle s'est trouvé M. B... de rembourser le prêt immobilier d'un montant de 80 000 euros qu'il a souscrit en octobre 2011 pour l'édification de plusieurs maisons et de négocier un protocole d'accord transactionnel avec sa banque pour surmonter ses difficultés financières. Il en va de même des frais de géomètres et d'accès aux terrains d'un montant de 33 508 euros.

23. Ainsi que l'a jugé le tribunal, si M. B... justifie avoir versé une somme de 43 722 euros en 2011 à une entreprise de construction, l'objet de ce paiement n'est pas justifié et il ne résulte pas de l'instruction que les travaux que l'entreprise était chargée de réaliser concernaient le terrain qui se trouvait enclavé par l'effet des opérations illégales de division foncière, alors que ni la référence du lot ni la surface de la construction mentionnées sur le devis ne correspondent au permis de construire du 18 juillet 2011, lequel n'a fait l'objet d'aucune déclaration de travaux. En outre, si M. B... soutient qu'il aurait versé les sommes réclamées par le constructeur en l'absence de tout commencement de chantier, ces allégations sont contredites par les clauses mentionnant qu'aucun paiement d'acompte ne sera effectué avant la réalisation des travaux. Par suite, la demande de remboursement de la somme de 43 722 réclamée à ce titre doit être rejetée.

24. Les frais de justice exposés devant le juge administratif en conséquence directe d'une faute de l'administration sont susceptibles d'être pris en compte dans le préjudice résultant de la faute imputable à celle-ci. Toutefois, lorsque l'intéressé avait, comme en l'espèce, qualité de partie à l'instance, la part de son préjudice correspondant à des frais non compris dans les dépens est réputée intégralement réparée par la décision que prend le juge dans l'instance en cause. Par ailleurs, les frais d'avocats non compris dans les dépens exposés devant le juge judiciaire ne constituent pas un préjudice réparable et ne peuvent être remboursées que sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Ainsi, M. B... ne peut demander à être indemnisé des frais d'avocat qu'il a exposés à l'occasion des différentes instances auxquelles il a été partie devant les juridictions administratives et judiciaires. S'agissant des frais d'avocats de M. B... qui ne se rattachent à aucune procédure juridictionnelle proprement dite, les factures produites ne comportent aucune indication permettant d'apprécier leur utilité et, par suite, d'établir l'existence d'un lien de causalité direct entre les faits générateurs retenus ci-dessus et les dépenses ainsi engagées.

25. Si M. B... sollicite l'indemnisation de frais d'huissiers à hauteur de 4 476,05 euros, il n'établit pas davantage l'utilité des différentes prestations détaillées dans la facture versée au dossier.

26. En revanche, il résulte de l'instruction que M. B... n'a pu librement disposer de son bien, notamment en vue d'y édifier des constructions, alors qu'il avait obtenu le 18 juillet 2011 un permis de construire pour un projet à réaliser sur la parcelle litigieuse. Toutefois, il n'apporte en appel aucun élément permettant d'estimer que le tribunal aurait fait une insuffisante évaluation de son préjudice de jouissance et de son préjudice moral, résultant du refus du concours de la force publique sur la période du 17 juin 2016 au 10 août 2017, en les indemnisant à hauteur de 7 000 euros.

27. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander la réformation du jugement attaqué.

Sur les frais liés au litige :

28. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat et de la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. B... une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : M. B... versera à la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à la commune de Saint-Sauveur-de-Puynormand, au ministre de l'agriculture et de l'alimentation et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 22 février 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente assesseure,

Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 février 2022.

La rapporteure,

Birsen Sarac-DeleigneLa présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de l'alimentation et au ministre de l'intérieur chacun en ce qui les concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX04507


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX04507
Date de la décision : 28/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Agriculture et forêts - Remembrement foncier agricole.

Responsabilité de la puissance publique - Réparation.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Birsen SARAC-DELEIGNE
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : SCP CORNILLE - POUYANNE-FOUCHET

Origine de la décision
Date de l'import : 08/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-02-28;19bx04507 ?
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