Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme D... A... ont demandé au tribunal administratif de La Réunion de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012, 2013 et 2014.
Par un jugement n° 1800246 du 15 avril 2020, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 juillet 2020 et 2 novembre 2021, M. D... A..., représenté par Me Hoarau, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 15 avril 2020 ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles son foyer fiscal a été assujetti au titre des années 2012, 2013 et 2014 ;
3°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la procédure est irrégulière en l'absence de preuve de l'envoi de la réponse aux observations du contribuable du 2 mai 2016 ;
- en ce qui concerne les rectifications issues du contrôle de la SAS CAP, quant aux prélèvements sur le compte 455, le solde créditeur de 82 698,26 euros constaté au 31 décembre 2004 est intangible ; les rectifications sont infondées à concurrence de 28 289, 30 087 et 9 748,71 euros respectivement au titre des années 2012, 2013 et 2014 ;
- quant aux prélèvements sur le compte bancaire " BFC ", l'administration ne démontre pas que les espèces déposées sur ce compte ont été mises à sa disposition ;
- dès lors qu'aucun contrôle de la situation fiscale personnelle du requérant n'a été entrepris, l'administration ne démontre pas l'appréhension des charges diverses par les époux A... ;
- en ce qui concerne les pensions alimentaires versées à un ascendant, l'administration n'apporte pas la preuve du caractère disproportionné de la pension alimentaire versée en 2012 et 2013 à sa mère ;
- la réduction d'impôt au titre des salaires versés à une employée à domicile était fondée au titre des années 2012 à 2014 dès lors que Mlle B... a deux employeurs, la SCI SFMS pour un mi-temps et Mlle C... A... pour un autre mi-temps ;
- les pénalités ne sont pas justifiées.
Par deux mémoires, enregistrés les 8 janvier 2021 et 20 janvier 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens développés par l'appelant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Nathalie Gay;
- et les conclusions de Mme Madelaigue, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. La société SAS CAP, qui exerce l'activité d'achat et de vente de vêtements féminins, fait partie d'un groupe fiscalement intégré. Son capital est entièrement détenu par la holding la SARL SFOI, dont M. A... et son épouse C..., divorcés en 2017, sont les seuls associés. À l'issue d'une vérification de comptabilité de la SAS CAP portant sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, l'administration a informé M. et Mme A..., par une proposition de rectification du 21 décembre 2015, de son intention de les imposer, à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales au titre des années 2012, 2013 et 2014 à raison des revenus regardés comme distribués par la société. M. et Mme A... ont, par ailleurs, été avisés de la reprise au titre des mêmes années des pensions alimentaires versées à la mère de M. A... et du crédit d'impôt sur le revenu ouvert par les sommes versées pour l'emploi d'un salarié à domicile. M. A... relève appel du jugement du 15 avril 2020 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles son foyer a été assujetti au titre des années 2012, 2013 et 2014.
Sur la régularité de la procédure :
2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) / Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ".
3. Il résulte de l'instruction et notamment de l'accusé de réception produit par l'administration, que la réponse aux observations du contribuable du 2 mai 2016 a été présentée au domicile de M. et Mme A... le 10 mai 2016 et distribuée le 11 mai 2016. Par suite, le moyen tiré de l'absence de notification de cette lettre doit être écarté.
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne les sommes prélevées sur le compte 455 :
4. D'une part, aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ".
5. D'autre part, aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " (...) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (...) / 4 bis. Pour l'application des dispositions du 2, pour le calcul de la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice, l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit déterminé, sauf dispositions particulières, conformément aux premier, deuxième et troisième alinéas de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ne peut être corrigé des omissions ou erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci. / Les dispositions du premier alinéa ne s'appliquent pas lorsque l'entreprise apporte la preuve que ces omissions ou erreurs sont intervenues plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit. / Elles ne sont pas non plus applicables aux omissions ou erreurs qui résultent de dotations aux amortissements excessives au regard des usages mentionnés au 2° du 1 de l'article 39 déduites sur des exercices prescrits ou de la déduction au cours d'exercices prescrits de charges qui auraient dû venir en augmentation de l'actif immobilisé. (...) ".
6. Il résulte de l'instruction qu'au cours du contrôle, le service vérificateur a demandé à M. et Mme A... de justifier le solde créditeur du compte courant d'associé 455100 de M. A... enregistré au 31 décembre 2014 pour 8 487 euros. À la suite de communication de pièces et des échanges avec M. A... et son commissaire aux comptes, le vérificateur a constaté des anomalies et irrégularités graves notamment la circonstance que le compte courant créditeur au 1er avril 2004 pour 247 960,73 euros ne faisait pas partie des créances lors de la mise en redressement judiciaire de la SAS CAP le 26 mai 2004 et ne figurait donc pas au passif à apurer. Le service a ainsi considéré cette dette comme éteinte. Compte tenu des irrégularités comptables relevées et du fait que les apports justifiés n'ont pu compenser les prélèvements enregistrés entre 2005 et 2011, le compte a été considéré comme débiteur de 24 391 euros au 1er janvier 2012. Les prélèvements effectués au débit de ce compte débiteur sur la période non prescrite, soit 28 289 euros en 2012, 42 138 euros en 2013, et 19 720 euros en 2014 au bénéfice de M. A..., titulaire du compte, ont été requalifiés en avantages occultes au sens du c de l'article 111 du code général des impôts. M. A... se prévaut de l'ancienneté de la dette inscrite sur ce compte et de l'intangibilité du solde créditeur pour un montant de 82 698,26 euros du compte 455 au 31 décembre 2004 en application du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts. Par ailleurs, il affirme que le solde au 31 décembre 2014 s'établirait à -31 771,29 euros duquel il conviendrait d'enlever " le solde du prix du véhicule de M. A... " soit 21 800 euros figurant au crédit du compte 46718009. Toutefois, il n'apporte aucun élément probant ni aucune pièce comptable à l'appui de ses allégations. Ainsi que l'ont indiqué à bon droit les premiers juges, réponse qui n'est pas contestée par l'appelant, à supposer même que le solde dudit compte 455 devait être regardé comme intangible à la date du 31 décembre 2004 pour une valeur de 82 698 euros, en l'état du dossier, dès lors qu'aucun des apports, dont se prévaut l'appelant, qui auraient été effectués en 2005 et 2010 pour un total de 62 174 euros, ne sont justifiés ni dans leur principe, ni dans leur montant, il résulte du tableau produit par ses soins, qu'à raison de l'ensemble des débits enregistrés audit compte entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2011 et dont les montants sont confirmés par les services fiscaux, le solde du compte 455 au 1er janvier 2012 présentait en tout état de cause un solde débiteur de 3 799 euros. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a imposé M. et Mme A... à raison des sommes prélevées sur le compte 455 sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts.
En ce qui concerne les charges diverses
7. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...) ".
8. Il résulte de l'instruction que, lors du contrôle de la SAS CAP, le service vérificateur a relevé la comptabilisation de charges diverses, frais de déplacement, de restauration, d'achats de vêtements et d'accessoires, pour un montant de 32 432 euros en 2012 38 674 euros en 2013 et 56 392 euros en 2014, au profit de M. et Mme A..., de leurs enfants ainsi que de personnes tierces. Il est constant que la société n'a pas produit de justificatifs permettant de tenir pour établi l'engagement de ces sommes dans l'intérêt de l'entreprise. L'appelant qui ne conteste pas davantage en appel qu'en première instance, l'absence de justification ni le caractère personnel des sommes engagées, se borne à faire valoir que l'administration ne démontre pas qu'il a appréhendé ces sommes. Toutefois, il résulte de l'instruction que M. et Mme A... sont les seuls associés de la SARL SFOI qui détient l'intégralité du capital de la SAS CAP. En outre, M. A... est le représentant légal de la SAS CAP, s'occupe de la politique commerciale, des commandes et achats de marchandises des contacts avec les fournisseurs et dispose de tous les pouvoirs quant à la gestion des fonds sociaux et de la signature des comptes bancaires de la société. Ainsi, il était à même de disposer sans contrôle des biens de la société, comme s'il s'agissait de ses biens propres. Ainsi, c'est à bon droit que l'administration a imposé, au titre des années 2012 et 2014, en tant que maîtres de l'affaire M. et Mme A..., qui font l'objet d'une imposition commune et doivent être regardés comme une seule et même personne. S'agissant de l'année 2013, au cours de laquelle la société CAP était déficitaire, et eu égard au caractère personnel des dépenses concernées, déjà exposé, c'est également à bon droit que l'administration a imposé les sommes correspondantes entre leurs mains en tant que revenus distribués.
En ce qui concerne les prélèvements d'espèces versées sur le compte " BFC " :
9. Il résulte de l'instruction que l'administration a constaté, lors du contrôle de la société SAS CAP, un compte bancaire intitulé " 512500 BFC " présentant un solde de 98 301,42 euros alimenté par des " virements internes d'espèce " et dont les sommes ne figuraient plus en caisse. Si M. A... a fait valoir qu'il s'agissait d'un compte d'attente puis de l'utilisation de ce compte pour y comptabiliser les espèces nécessaires aux voyages à l'international, il n'apporte aucun commencement de preuve à l'appui de ses allégations. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a regardé ces retraits comme constituant des avantages occultes au sens du c de l'article 111 du code général des impôts et les a réintégrés dans le revenu imposable de M. et Mme A... dont il a été indiqué au point 6 qu'ils exerçaient conjointement la maîtrise de l'affaire.
En ce qui concerne les pensions alimentaires versées à la mère de M. A... :
10. En vertu du 2°) du II de l'article 156 du code général des impôts, seules sont déductibles pour la détermination du revenu net imposable les pensions alimentaires " répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211 du code civil ". Aux termes de l'article 205 du code civil, " les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin ". Enfin, aux termes de l'article 208 du même code, " les aliments ne sont accordés que dans la proportion des besoins de celui qui les réclame et de la fortune de celui qui les doit ". Il résulte de ces dispositions que, si les contribuables sont autorisés à déduire du montant total de leurs revenus, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu, les versements qu'ils font à leurs parents privés de ressources, il incombe au contribuable qui a pratiqué une telle déduction d'apporter la preuve devant le juge de l'impôt, de l'importance des aliments dont le paiement a été rendu nécessaire par le défaut de ressources suffisantes de leurs ascendants.
11. Il n'est pas contesté que la mère de M. A... percevait au titre des années 2012 et 2013 une pension de retraite. En outre, il résulte de l'instruction que l'administration a accepté de retenir le versement d'une pension alimentaire à son profit à concurrence de 19 200 euros en 2012 et 15 595 euros en 2013. M. A..., à qui incombe la charge de la preuve, se borne à soutenir que l'administration n'établirait pas le caractère disproportionné de la pension servie à sa mère au cours des années en litige alors qu'il n'apporte aucun élément démontrant que ces sommes majorées des revenus annuels de sa mère, n'étaient pas suffisantes pour répondre à ses besoins. En outre, il résulte de l'instruction que l'administration a remis en cause, au titre de l'année 2014, la déduction de la somme de 1 204 euros inscrite ligne GU au titre de la pension alimentaire versée à la mère de M. A... en raison du décès de cette dernière, survenu le 30 octobre 2013. Si M. A... se prévaut du retard dans l'encaissement d'une prestation réalisée en 2013, il n'apporte aucune pièce probante mettant la cour à même d'apprécier la réalité de ses dires. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a réintégré aux revenus imposables de M. et Mme A... les sommes déclarées au titre des pensions versées à la mère de l'appelant au titre des années 2012, 2013 et 2014.
En ce qui concerne la déductibilité des sommes engagées pour l'emploi d'un salarié à domicile :
12. Aux termes de l'article 199 sexdecies du code général des impôts : " 1. Lorsqu'elles n'entrent pas en compte pour l'évaluation des revenus des différentes catégories, ouvrent droit à une aide les sommes versées par un contribuable domicilié en France au sens de l'article 4 B pour : / a) L'emploi d'un salarié qui rend des services définis aux articles L. 7231-1 et D. 7231-1 du code du travail (...) ".
13. Il résulte de l'instruction que M. et Mme A... ont déclaré au titre des années 2012, 2013 et 2014 respectivement les sommes de 10 554 euros, 10 692 euros et 5 844 euros au titre de dépenses d'aide à domicile à Mme B.... L'administration a remis en cause la réduction d'impôt au titre du versement de ces sommes dès lors que Mme B... était l'employée de la SCI SFMS dont M. et Mme A... détenait l'intégralité des parts. Si M. A... soutient que Mme B... avait deux employeurs, la SCI SFMS pour un mi-temps et Mme C... A... pour un autre mi-temps, il n'apporte aucun élément permettant d'établir le versement d'une partie des salaires de Mme B... par Mme A.... Par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause le crédit d'impôt dont avaient bénéficié M. et Mme A... au titre des années 2012, 2013 et 2014.
Sur les pénalités :
14. S'agissant des pénalités pour manquement délibéré et manœuvres frauduleuses mises à la charge de l'intéressé sur le fondement des dispositions de l'article 1729 du code général des impôts, l'appelant ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas utilement la réponse apportée par le tribunal administratif de La Réunion. Par suite, il y a lieu de rejeter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.
15. Il résulte de tout ce qui précède que l'appelant n'est pas fondé à soutenir que, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté ses demandes.
Sur les frais liés au litige :
16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre de ces dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 27 janvier 2022 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,
Mme Nathalie Gay, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 février 2022.
La rapporteure,
Nathalie GayLe président,
Éric Rey-Bèthbéder
La greffière,
Sophie Lecarpentier
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 20BX02192