Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Solar Electric Martinique a demandé au tribunal administratif de la Martinique de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour les périodes courant du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009 et du 1er au 30 avril 2016 ainsi que la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée dont elle s'est acquittée pour la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2017 au titre de prestations de vente de panneaux photovoltaïques et de chauffe-eaux solaires.
Par un jugement n° 1800407 du 5 décembre 2019, le tribunal administratif de la Martinique, d'une part, a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la société Solar Electric Martinique tendant à obtenir la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée dont elle s'est acquittée pour la période courant du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017, d'autre part, a déchargé la société des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période courant du 1er au 30 avril 2016, pour un montant de 3 420 euros, enfin, a rejeté le surplus des conclusions.
Procédure devant la cour administrative d'appel :
Par une requête, enregistrée le 4 février 2020, la société Solar Electric Martinique, représentée par la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1800407 du tribunal administratif de la Martinique du 5 décembre 2019, en ce qu'il rejette le surplus de sa demande ;
2°) de prononcer, d'une part, la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été notifiés au titre de la période courant du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009, d'autre part, la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée dont elle s'est acquittée pour la période courant du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2014 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier en ce qu'il a regardé les conclusions tendant à la décharge ou à la restitution des impositions demeurant en litige à hauteur d'appel comme tardives ; en effet, il résulte de l'application combinée des dispositions des article L. 190 et R. 196 du livre des procédures fiscales que seuls les décisions et avis rendus par le Conseil d'État expressément énumérés par les troisième et cinquième alinéas de l'article L.190 du livre des procédures fiscales sont, par eux-mêmes, insusceptibles de constituer un événement au sens du c) de l'article R. 196-1 du même livre ; en revanche, la décision prononçant la décharge d'une imposition peut constituer un tel évènement ; en l'espèce, la décision du Conseil d'Etat du 12 janvier 2018 la déchargeant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés à raison de prestations de vente et d'installation similaires à celles qui ont fait l'objet de la présente demande constituait un évènement nouveau rouvrant à son profit un nouveau délai de réclamation ;
- elle est en droit de bénéficier d'une exonération de taxe sur la valeur ajoutée pour ses prestations de vente de panneaux photovoltaïques et de chauffe-eaux solaires, conformément aux dispositions combinées des dispositions du a. et b. du 5° du 1 de l'article 295 du code général des impôts et de l'article 50 duodecies de l'annexe IV audit code ;
- la décharge des rappels et des droits de taxe sur la valeur ajoutée en litige ne peut être conditionnée à la rectification de l'ensemble des factures émises entre le 1er janvier 2008 et le 31 décembre 2014.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 septembre 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête en faisant valoir que, comme l'ont jugé à bon droit les premiers juges, les conclusions de la requérante, demeurant en litige à hauteur d'appel, étaient irrecevables et qu'en tout état de cause, les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Michaël Kauffmann,
- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. La société Solar Electric Martinique a vendu et installé des panneaux photovoltaïques en vue de la production d'électricité ainsi que des chauffe-eaux solaires. Elle n'a soumis à la taxe sur la valeur ajoutée que le coût de l'installation des équipements. A la suite d'une vérification ponctuelle portant sur la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007, l'administration a estimé que la société avait procédé à des travaux immobiliers et a rectifié l'assiette imposable de ces opérations en y incluant le coût des équipements. Par une décision du 12 janvier 2018, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi présenté par la société, prononcé la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007. La société a alors saisi l'administration fiscale d'une réclamation du 20 février 2018 tendant à la décharge de rappels de taxe sur la valeur ajoutée ou à la restitution des droits de taxe dont elle s'était acquittée au titre de périodes postérieures, courant du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2017. Elle relève appel du jugement du 5 décembre 2019 du tribunal administratif de la Martinique en tant que celui-ci a rejeté comme irrecevables ses conclusions tendant à la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été notifiés au titre de la période courant du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009 et à la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée dont elle s'est acquittée pour la période courant du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2014.
2. Aux termes de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts, doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : a) De la mise en recouvrement du rôle ou de la notification d'un avis de mise en recouvrement ; b) Du versement de l'impôt contesté lorsque cet impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement ; c) De la réalisation de l'événement qui motive la réclamation. (...) ". Seuls doivent être regardés comme constituant le point de départ du délai prévu au c) de cet article les événements qui ont une incidence directe sur le principe même de l'imposition, son régime ou son mode de calcul.
3. Il est constant que le délai de réclamation de droit commun, prévu aux a) et b) de l'article R. 196-1 du code général des impôts, relatif aux droits de taxe sur la valeur ajoutée demeurant en litige à hauteur d'appel, était expiré à la date de présentation de la réclamation préalable de la société Solar Electric Martinique, le 20 février 2018. Cette dernière soutient néanmoins que la décision du 12 janvier 2018 du Conseil d'Etat, jugeant que les équipements vendus et installés en Martinique ne peuvent être qualifiés de travaux immobiliers au sens des articles 256 et 266 du code général des impôts et imposés en tant que tels, a constitué un évènement au sens du c) de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales, de nature à rouvrir le délai de réclamation dont elle disposait. Toutefois, ladite décision du Conseil d'Etat, qui ne statue que sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la société au titre de la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007 à la suite d'une appréciation de fait portée sur la nature des prestations de vente et d'installation réalisées par la société au cours de cette période, n'a eu aucune incidence directe sur le principe, le régime ou le mode de calcul des impositions litigieuses, portant sur une période postérieure. Dès lors, l'intervention de cette décision n'a pas constitué un événement de nature à rouvrir le délai de réclamation dont disposait la société et cette dernière n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Martinique a regardé le surplus de ses conclusions comme tardif et, par suite, irrecevable. Il s'ensuit que la société Solar Electric Martinique ne peut utilement soutenir en appel qu'elle est en droit de bénéficier d'une exonération de taxe sur la valeur ajoutée pour ses prestations de vente de panneaux photovoltaïques et de chauffe-eaux solaires.
4. Les dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la société Solar Electric Martinique demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Solar Electric Martinique est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Solar Electric Martinique et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal Sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 18 janvier 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Evelyne Balzamo, présidente,
M. Nicolas Normand, premier conseiller,
M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2022.
Le rapporteur,
Michaël Kauffmann La présidente,
Evelyne BalzamoLe greffier,
Christophe Pelletier
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 20BX00422
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