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10/02/2022 | FRANCE | N°21BX01624

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 10 février 2022, 21BX01624


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers, d'une part d'annuler l'arrêté du 11 janvier 2021 par lequel le préfet des Deux-Sèvres a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai avec interdiction de retour d'une durée de trois ans et a fixé le pays de destination et, d'autre part d'enjoindre audit préfet, sous astreinte, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale

" d'une durée d'un an, ou, à titre subsidiaire, réexaminer sa situation.

Par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers, d'une part d'annuler l'arrêté du 11 janvier 2021 par lequel le préfet des Deux-Sèvres a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai avec interdiction de retour d'une durée de trois ans et a fixé le pays de destination et, d'autre part d'enjoindre audit préfet, sous astreinte, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, ou, à titre subsidiaire, réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 2100221 du 9 mars 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 avril 2021, M. B..., représenté par Me Ormillien, demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement du 9 mars 2021 du tribunal administratif de Poitiers en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire contenus dans l'arrêté du 11 janvier 2021 ;

3°) d'annuler les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français prises à son encontre le 11 janvier 2021 par le préfet des Deux-Sèvres ;

4°) d'enjoindre au préfet des Deux-Sèvres de réexaminer sa demande dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de celles de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la compétence de la signataire de l'arrêté n'est pas établie, dès lors que la délégation de signature n'est pas produite ;

- cet arrêté est insuffisamment motivé au regard des dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

- la décision de refus de séjour est entachée d'une erreur d'appréciation, car il entretient une relation affective ancienne, stable et régulière avec son fils et participe à son entretien et à son éducation ;

- les décisions portant refus de séjour et éloignement violent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 313-11-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par une décision en date du 20 mai 2021, l'aide juridictionnelle totale a été accordée à M. B....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant tunisien né en 1987, est entré en France, selon ses déclarations en 2008. Il a fait l'objet, le 10 avril 2017, d'un premier arrêté du préfet du Val-de-Marne portant obligation de quitter le territoire puis, le 18 janvier 2019, d'une deuxième mesure de même nature assortie d'une interdiction de retour d'une durée d'un an prise par le préfet des Hauts-de-Seine. Par courrier du 4 novembre 2019, l'intéressé a sollicité auprès de la préfecture des Deux-Sèvres la délivrance d'un titre de séjour en qualité de parent d'un enfant de nationalité française. Par un arrêté du 11 janvier 2021, le préfet des Deux-Sèvres a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité et lui a fait obligation de quitter le territoire sans délai avec interdiction de retour d'une durée de trois ans. M. B... fait appel du jugement du tribunal administratif de Poitiers du 9 mars 2021 en ce qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions portant refus de séjour et mesure d'éloignement, contenues dans l'arrêté du 11 janvier 2021.

Sur la demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle :

2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'application des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée (...) par la juridiction compétente ou son président (...) ".

3. Par une décision du 20 mai 2021, M. B... a bénéficié de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, les conclusions tendant à l'admission provisoire du requérant au bénéfice de l'aide juridictionnelle étant devenues sans objet, il n'y a pas lieu d'y statuer.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'arrêté pris dans son ensemble :

4. En premier lieu, par un arrêté du 24 juin 2020, publié le même jour au recueil des actes administratifs spécial n° 79-20202-074 du département, le préfet des Deux-Sèvres a donné délégation à Mme Anne Baretaud, secrétaire générale de la préfecture, pour signer tous les actes dans la limite de ses attributions, à l'exception de certains actes parmi lesquels ne figurent pas la décision contestée. Contrairement à ce que fait valoir le requérant en appel, le préfet ne s'est en tout état de cause pas borné à renvoyer à la consultation du site internet de la préfecture, mais a produit cet arrêté en première instance. Ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté manque en fait et doit être écarté.

5. En second lieu, comme l'ont déjà relevé les premiers juges par un motif qu'il y a lieu d'adopter, l'arrêté attaqué est suffisamment motivé. Par suite, il ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.

En ce qui concerne le refus de séjour :

6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 6° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ".

7. Pour refuser la délivrance à M. B... du titre de séjour sollicité sur le fondement des dispositions précitées, le préfet des Deux-Sèvres a estimé que celui-ci ne justifiait pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant de nationalité française né le 5 novembre 2012 et qu'il a reconnu de manière anticipée le 5 octobre 2012. Dès lors que le requérant n'apporte en appel aucun élément nouveau de nature à infirmer le motif retenu par les premiers juges au point 6 de leur jugement, il y a lieu d'adopter ledit motif, qui les a conduit à bon droit à estimer que les éléments produits par l'intéressé n'étaient pas de nature à démontrer qu'il contribuait effectivement à l'entretien de son fils dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans à la date de la décision attaquée et que, par suite, c'était sans erreur d'appréciation que le préfet des Deux-Sèvres avait considéré que M. B... ne remplissait pas les conditions auxquelles les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile subordonnent la délivrance de la carte de séjour " vie privée et familiale " aux parents d'enfants de nationalité française.

8. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure (...) nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre (...) ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit (...) 7° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". L'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité, l'intensité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

9. M. B... n'apportant là non plus en appel aucun élément nouveau, il y a lieu d'adopter le motif pertinemment retenu par les premiers juges au point 8 de leur jugement. Par suite, en refusant de délivrer à M. B... un titre de séjour, le préfet des Deux-Sèvres n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel cette décision a été prise, et n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne la mesure d'éloignement :

10. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8 du présent arrêt, cette décision n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande en tant qu'elle tendait à l'annulation du refus de séjour et de la mesure d'éloignement prises à son encontre par le préfet des Deux-Sèvres.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

12. Le présent arrêt rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B.... Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent être accueillies.

Sur les frais de l'instance :

13. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. B... sur ces fondements.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions présentées par M. B... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire.

Article 2 : La requête de M. B... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise pour information au préfet des Deux-Sèvres.

Délibéré après l'audience du 13 janvier 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente,

Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère,

Mme Nathalie Gay, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 février 2022.

La rapporteure,

Florence C...

La présidente,

Frédérique Munoz-PauzièsLa greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX01624


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 21BX01624
Date de la décision : 10/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : ORMILLIEN

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-02-10;21bx01624 ?
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