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13/01/2022 | FRANCE | N°21BX00476

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 13 janvier 2022, 21BX00476


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 10 décembre 2019 par lequel la préfète de l'Ariège a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination

Par un jugement n° 2003292 du 7 janvier 2021, le tribunal administratif de Toulouse a fait droit à sa demande et a annulé l'arrêté du 10 décembre 2019.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 8 février

2021, la préfète de l'Ariège demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administrati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 10 décembre 2019 par lequel la préfète de l'Ariège a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination

Par un jugement n° 2003292 du 7 janvier 2021, le tribunal administratif de Toulouse a fait droit à sa demande et a annulé l'arrêté du 10 décembre 2019.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 8 février 2021, la préfète de l'Ariège demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 7 janvier 2021 ;

2°) de rejeter la demande de M. A... ;

Elle soutient que le jugement est entaché d'erreur de droit, dès lors que la souscription de la déclaration prévue à l'article 22 de la convention Schengen est une condition de la régularité de l'entrée en France de l'étranger soumis à l'obligation de visa long séjour et en provenance directe d'un État partie à cette convention qui été admis à entrer ou à séjourner sur son territoire.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 novembre 2021, M. A..., représenté par Me Francos, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'État au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que le moyen de la requête n'est pas fondé.

Par une décision du 18 novembre 2021, du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Bordeaux, M. A... bénéficie du maintien de plein droit de son aide juridique prononcée par la décision du 19 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-347 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., ressortissant albanais, est entré en France une première fois en 2016, pour y demander l'asile. Sa demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 22 mars 2017, confirmée le 29 août 2017 par la Cour nationale du droit d'asile. Il est entré une nouvelle fois dans l'espace Schengen le 10 juin 2018 en Slovénie, sous couvert d'un visa touristique implicite de trois mois dont bénéficient les ressortissants albanais, et, le 13 novembre 2019, il a sollicité auprès de la préfète de l'Ariège la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint de Français, du fait de son mariage le 5 octobre 2019. Par l'arrêté litigieux du 10 décembre 2019, la préfète de l'Ariège a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. La préfète de l'Ariège relève appel du jugement du 7 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté.

Sur le motif retenu par les premiers juges :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ( ...) ". Aux termes de l'article L. 211-2-1 du même code : " (...) le visa de long séjour ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public. Le visa de long séjour est délivré de plein droit au conjoint de Français qui remplit les conditions prévues au présent article. (...) Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour ".

3. En vertu de ces dispositions, il appartient à l'étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant français et séjournant en France depuis plus de six mois avec son conjoint, de présenter une demande de visa de long séjour à la préfecture de son domicile. Il incombe alors au préfet, saisi d'une demande de titre de séjour en qualité de conjoint de français, d'examiner si le demandeur remplit les conditions fixées par cet article pour se voir délivrer un visa de long séjour.

4. D'autre part, aux termes de l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 : " I- Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des Parties contractantes sont tenus de se déclarer, dans des conditions fixées par chaque Partie contractante, aux autorités de la Partie contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent (...) ". L'article R. 211-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que la déclaration obligatoire mentionnée à l'article 22 de la convention de Schengen est souscrite à l'entrée sur le territoire métropolitain par l'étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne et qui est en provenance directe d'un Etat partie à la convention d'application de l'accord de Schengen. Sont toutefois dispensés de cette formalité, en vertu de l'article R. 212-6 du même code, les étrangers qui ne sont pas astreints à l'obligation de visa pour un séjour inférieur à trois mois.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré dans l'espace Schengen le 10 juin 2018 au poste frontière de Stapod en Slovénie, comme en atteste le timbre humide apposé sur son passeport, et qu'il disposait alors, les ressortissants albanais n'étant pas astreints à l'obligation de visa pour un séjour inférieur à trois mois, du droit de séjourner pendant ce délai dans cet espace. Il ressort de ces mêmes pièces du dossier, et notamment de l'attestation du camping du lac de Foix, affirmant que l'intéressé a séjourné avec sa compagne dans ce camping de juin à août 2018, qu'il est entré en France dans le délai de trois mois suivant son entrée sur le territoire Schengen. Si la préfète soutient que son entrée sur le territoire français était irrégulière, faute de s'être déclaré aux autorités lors de son entrée en France, il résulte des dispositions de l'article R. 212-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que les étrangers qui ne sont pas astreints à l'obligation de visa pour un séjour inférieur à trois mois sont dispensés de cette obligation.

Par suite, M. A... étant entré régulièrement en France, la préfète ne pouvait, pour lui refuser la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint de Français, se fonder sur l'absence de visa de long séjour.

6. Il résulte de ce qui précède que la préfète de l'Ariège n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 10 décembre 2019. En conséquence, il y a lieu de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la préfète de l'Ariège est rejetée.

Article 2 : L'État versera à M. A... la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. C... A.... Une copie en sera adressée à la préfète de l'Ariège.

Délibéré après l'audience du 16 décembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,

Mme Nathalie Gay, première conseillère.

Rendu public après mise à disposition au greffe le 13 janvier 2022.

La rapporteure,

Frédérique B...Le président

Éric Rey-Bèthbéder

La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

4

N° 21BX00476


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 21BX00476
Date de la décision : 13/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : FRANCOS

Origine de la décision
Date de l'import : 25/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-01-13;21bx00476 ?
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