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13/01/2022 | FRANCE | N°20BX02888

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 13 janvier 2022, 20BX02888


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) L'Entrepôt a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015, et du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016.

Par un jugement n° 1804963 du 26 juin 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a reje

té sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 31 août 2020, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) L'Entrepôt a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015, et du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016.

Par un jugement n° 1804963 du 26 juin 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 31 août 2020, l'EURL L'Entrepôt, représentée par Me Siriez, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 26 juin 2020 ;

2°) de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015 et du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016.

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- s'agissant des factures Isobox, elle a produit les éléments attestant de la présence de la société Isobox au Togo, qui assure des prestations au profit de l'EURL L'Entrepôt et de la société Platéro, facturées aux sociétés françaises, et qui ont consisté, pour la période 2014-2015, en une mission de cession du fonds de commerce, une mission comptable à la suite de l'absence pour maladie de Mme A... et en la réalisation de travaux sur le bâtiment, M. B... ayant des compétences particulières en matière de BTP ; c'est à tort que le tribunal administratif a validé le rejet des factures au motif que la réalité de la prestation n'était pas établie, alors qu'il est courant que le chef d'entreprise puisse avoir recours à un expert-comptable, des intermédiaires en cession de fonds de commerce et des entreprises de travaux publics, sans obligatoirement disposer d'un devis accepté préalablement ;

- s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée, la taxe déductible de 16 039,57 euros est afférente à des travaux réalisés par la SCI Platero pour le compte de son locataire ;

- s'agissant du résultat taxable à l'impôt sur les sociétés,

- la facture du 31 décembre 2014 établie par Isobox, pour un montant de 20 000 euros, intitulée " prestation de suivi de rentabilité en vue de la vente du fonds de commerce " correspond à une prestation de mise en valeur et de présentation du fonds de commerce dans le but d'envisager sa cession ;

- la facture Isobox du 31 décembre 2015 de 10 000 euros, intitulée " travaux de comptabilité Bilan 2015 " correspond à des travaux de comptabilité en l'absence de Mme A... ;

- la facture du 23 Juin 2015 intitulée " prestations de main d'œuvre dans travaux d'entretien ", de 30 000 euros, correspond bien à des prestations, et l'administration a admis la refacturation de ces travaux à la SCI Platero pour un montant de 68 900 euros ;

- s'agissant des pénalités, elles sont disproportionnées et injustifiées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 mars 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête, et fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 24 juin 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 27 septembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Frédérique Munoz-Pauziès,

- et les conclusions de Mme Florence Madelaigue.

Considérant ce qui suit :

1. L'EURL L'Entrepôt exerçait l'activité de location de boxes de stockage appartenant à la société Platero, M. C... B... étant le gérant des deux sociétés et l'associé majoritaire de la société Platero. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016, à l'issue de laquelle le service lui a notifié une proposition de rectification du 20 septembre 2017 portant, en matière d'impôt sur les sociétés, sur les années 2014 et 2015 et, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016. Elle relève appel du jugement du 26 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui trouvent leur origine dans le contrôle précité.

Sur la taxe sur la valeur ajoutée déductible de 2016 :

2. Aux termes du 2 de l'article 269 du code général des impôts : " La taxe est exigible : (...) c) Pour les prestations de services (...), lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération (...) ". Aux termes de l'article 271 du même code : " I. - 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. (...) ".

3. En vertu de ces dispositions, s'agissant des prestations de services, la taxe sur la valeur ajoutée acquittée par l'acheteur est, en principe, déductible lors de l'encaissement du prix par le prestataire.

4. Il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification du 20 septembre 2017, que lors de la vérification de comptabilité dont la société requérante a fait l'objet, le service a relevé, au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2015, que l'EURL L'Entrepôt avait comptabilisé de la taxe déductible sur immobilisations, pour un montant total de 16 039,57 euros, soit 1 702,57 euros le 2 septembre 2015, 10 377 euros le 11 septembre 2015 et 3 960 euros le 28 décembre 2015, mais qu'elle ne produisait aucune facture, mais des devis des sociétés CS Aquitaine, SFET Aquitaine et Silesiabat, et ne présentait aucune preuve du règlement des travaux sur la période. Le service a alors procédé à un rappel de 16 039,57 euros au titre de 2015.

5. Au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2016, le service a constaté que, le 1er janvier 2016, l'EURL avait enregistré au débit du compte 44562 " TVA déductible sur immobilisations ", le même montant de 16 039,57 euros, à l'occasion de l'enregistrement d'une facture établie par la société Platero, propriétaire des locaux abritant les boxes de stockage. La comptabilisation de cette facture a également donné lieu à l'enregistrement, au débit du poste d'immobilisations 2181 " Aménagement - agencements ", de la somme de 80 197,86 euros HT, et au crédit, non pas d'un poste fournisseur, mais du poste 4551 " compte-courant Ludovic B... ", M. B... étant également l'associé majoritaire et dirigeant de la société Platero, du montant de 96 237,43 euros TTC. Faute pour la société de justifier de l'opération constatée au crédit du compte-courant de M. B... et, par suite, du règlement effectif de la facture Platero, le service a conclu que la naissance du droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux prestations facturées n'était pas intervenue au 31 décembre 2016 et a procédé à un rappel de 16 040 euros au titre de 2016.

6. En réponse à la proposition de rectification, la société a indiqué avoir régularisé, en 2016, la déduction opérée en 2015, en créditant le poste de TVA déductible d'un montant de 16 039 euros. Le service a validé cette observation mais a toutefois relevé que les postes de TVA déductible " 44562 " et " 445661 " présentaient, au 31 décembre 2016, date de clôture de la période vérifiée, un solde créditeur ressortant, respectivement, à 2 802 euros et 7 085 euros. Estimant que cette situation traduisait la déduction, par la société, sur les déclarations souscrites, d'un montant total de taxe supérieur à celui comptabilisé en débit sur la base de ses factures fournisseurs, le service a estimé que le rappel pour 2016 devait être maintenu à concurrence de 9 887 euros.

7. L'EURL l'Entrepôt soutient que la SCI Platero a réalisé les travaux pour le compte de son locataire, ce qui n'est pas contesté par le ministre, qu'elle lui a payé ces travaux et qu'elle est donc en droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée de 16 037,49 euros figurant sur la facture. Toutefois, et alors que l'administration n'a relevé pendant la vérification de comptabilité aucun flux financier concernant cette opération, l'EURL L'Entrepôt n'établit pas que le paiement de cette facture est intervenu au cours de la période du 1er janvier au 31 décembre 2016. Par suite, elle ne pouvait déduire la taxe sur la valeur ajoutée afférente à cette facture sur cette période.

Sur l'impôt sur les sociétés :

8. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code: " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges (...) ". Il appartient au contribuable de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité.

En ce qui concerne la facture Isobox de 20 000 euros au titre de l'année 2014 :

9. Il résulte de l'instruction et notamment de la proposition de rectification du 20 septembre 2017, que lors de la vérification de comptabilité le service a constaté que, le 31 décembre 2014, l'EURL L'Entrepôt avait comptabilisé une charge de 20 000 euros au crédit du compte fournisseur " Fresh ", ce dernier étant lui-même débité de ce même montant par le crédit du compte-courant d'associé de M. B..., pour une " prestation de suivi de rentabilité en vue de la vente du fonds de commerce ". Estimant que la réalité de cette prestation n'était pas établie, le vérificateur a réintégré cette charge au résultat de l'exercice 2014.

10. L'EURL L'Entrepôt soutient qu'il s'agit du règlement d'une prestation réalisée par Isobox, dénomination sous laquelle M. B... dispose au Togo, où il vit, d'un numéro d'opérateur économique, pour une activité individuelle de vente de produits surgelés, de commerce général et d'import-export. En se bornant à produire un devis Isobox du 17 août 2014, portant sur une somme totale de 20 000 euros, et prévoyant plusieurs prestations, parmi lesquelles une " étude de rentabilité de l'entreprise dans le cadre d'une vente ", elle ne justifie pas de la réalité de la prestation payée à son gérant.

En ce qui concerne les factures Isobox des 25 juin et 31 décembre 2015 :

11. Lors de la première intervention du vérificateur, l'EURL L'Entrepôt a fait valoir qu'elle avait omis de comptabiliser en charges deux factures Isobox, pour les montants de 10 000 euros et de 30 000 euros, portant pour la première sur des travaux de comptabilité, et pour la seconde sur des travaux d'entretien dans les boxes (déplacement cloison, entretien toiture, désherbage général, évacuation des gravats ...). Estimant qu'elle ne justifiait pas de la réalité de ces prestations, le service a refusé leur prise en compte dans la détermination du résultat de l'exercice.

12. S'agissant de la charge de 10 000 euros, l'EURL L'Entrepôt fait valoir que, si au cours de l'année 2014, elle a chargé Mme A..., de la structure Assigesta, de tenir sa comptabilité, elle a dû, en raison de l'arrêt maladie de Mme A..., recourir aux services d'Isobox, entreprise individuelle de M. B..., par ailleurs gérant de l'EURL. Toutefois, en se bornant à produire une facture Assigesta, qui, au demeurant, ne porte pas sur une prestation de comptabilité, et un devis Isobox du 23 février 2015, elle ne justifie pas de la réalité de la prestation payée à son gérant.

13. S'agissant de la charge de 30 000 euros, la requérante se borne à produire le devis Isobox du 23 juin 2015. Si elle soutient que les travaux ont été refacturés à la SCI Platero, propriétaire des boxes et dont M. B... est associé majoritaire et gérant, pour un montant de 68 900 euros, elle ne produit aucun élément de nature à justifier que la charge en cause est en lien avec ce produit et ne justifie pas de la réalité de la prestation payée à son gérant.

Sur les pénalités :

14. L'EURL L'Entrepôt reprend en appel, sans l'assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, le moyen tiré de ce que la majoration pour manquement délibéré serait disproportionnée et injustifiée. Il convient d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

15. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à une partie des conclusions de la requête, que l'EURL L'Entrepôt n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'EURL L'Entrepôt est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'EURL L'Entrepôt et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Une copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Ouest.

Délibéré après l'audience du 16 décembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente assesseure,

Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 janvier 2022.

La présidente-assesseure,

Frédérique Munoz-Pauziès Le président,

Éric Rey-Bèthbéder

La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

4

N° 20BX02888


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 20BX02888
Date de la décision : 13/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06 Contributions et taxes. - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : CABINET SIRIEZ - ADVEO AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 25/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-01-13;20bx02888 ?
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