Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 pour un montant de 993 701 euros.
Par un jugement n° 1505661 du 26 février 2019, le tribunal administratif de Toulouse a réduit les bases d'imposition de M. B... aux contributions sociales au titre des années 2011 et 2012 du montant correspondant à la majoration de 25 % prévue au 2° du 7 de l'article 158 du code général des impôts, a déchargé en conséquence M. B... des cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquelles il avait été assujetti au titre de ces mêmes années et des pénalités correspondantes, et a rejeté le surplus de la requête.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 17 avril 2019, et un mémoire, enregistré le 18 novembre 2019, M. B..., représenté par Me Gasquet, doit être regardé comme demandant à la cour :
1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 26 février 2019 en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à ses demandes ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il demeure assujetti au titre des années 2011 et 2012 ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les chèques encaissés à son profit pour un montant de 9 440 euros correspondent au remboursement de factures réglées par la société Sevic dont il est le gérant et l'associé unique en raison des difficultés de la société Sabal Management Conseil (SMC) ;
- les sommes portées au crédit de son compte courant d'associé et de ceux des autres associés de la société SMC correspondent à des prêts émis par des tiers au profit de la société SMC, ce qui ne correspond pas à une dissimulation de bénéfices et aurait seulement dû faire l'objet d'une régularisation comptable, laquelle n'entraîne pas de variation de l'actif net au sens de l'article 38-2 du code général des impôts ; les sommes inscrites au compte courant d'associé ne peuvent être regardées comme ayant été mises à sa disposition dès lors qu'il n'a pu opérer aucun prélèvement au vu de la situation de la trésorerie de la société ; le seul fait qu'il soit gérant de la société SMC ne permet pas de considérer qu'il avait connaissance des écritures comptables de la société ; les écritures comptables au crédit du compte courant d'associé sont fictives dès lors qu'il n'a apporté à la SMC aucune de ces sommes ;
- l'application de la majoration de 40 % pour manquement délibéré n'est pas justifiée.
Par deux mémoires, enregistrés le 2 octobre 2019 et 26 octobre 2021, ce dernier n'ayant pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Nathalie Gay,
- et les conclusions de Mme Florence Madelaigue, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. La société Sabal Management Conseil (SMC), dont son gérant, M. B..., détient 25 % des parts, est une holding active dont l'activité consiste également à rendre des services administratifs à sa filiale, la société Toulouse dépôt, qui exerce pour sa part une activité de transport public routier de marchandises, commissionnaire de transport, entreposage, stockage, redistribution et courtage de transport de marchandises. La société SMC a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration lui a notifié, par une proposition de rectification du 24 juillet 2014, des rehaussements d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2011 et 2012. Par une proposition de rectification du 8 octobre 2014 adressée à M. B..., l'administration a tiré les conséquences de cette vérification de comptabilité et a assujetti ce dernier à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2011 et 2012 pour un montant total de 993 701 euros. Par un jugement du 26 février 2019, le tribunal administratif de Toulouse a réduit les bases d'imposition de M. B... aux contributions sociales au titre des années 2011 et 2012 du montant correspondant à la majoration de 25 % prévue au 2° du 7 de l'article 158 du code général des impôts, a déchargé en conséquence M. B... des cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquelles il avait été assujetti au titre de ces mêmes années et a rejeté le surplus de la requête. M. B... relève appel de ce jugement en tant que le tribunal administratif de Toulouse n'a pas entièrement fait droit à sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012.
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
2. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré (...) ".
3. En l'espèce, il est constant que les cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales en litige résultent d'une procédure de rectification contradictoire mais que l'appelant n'a présenté aucune observation en réponse à la proposition de rectification qui lui a été adressée et doit, dès lors, être regardé comme ayant tacitement accepté les rectifications. Par suite, en application des dispositions précitées de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, il lui appartient d'établir le caractère exagéré des impositions auxquelles il a été assujetti.
En ce qui concerne la somme de 9 440 euros (année 2011) :
4. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ".
5. Il résulte de l'instruction que des chèques d'un montant total de 9 440 euros ont été émis par la SARL SMC, libellés au nom de M. B..., et ont été affectés en comptabilité au règlement du fournisseur Ocon par inscription au débit du compte 401 " entreprise de maçonnerie Ocon ". Si M. B... fait valoir que, faute de trésorerie disponible, les factures émises par l'entreprise Ocon n'ont pu être payées par la SARL SMC et que ces sommes ont été réglées par la SARL Sevic dont il était le gérant et l'associé unique, il ne critique pas utilement la réponse apportée par les premiers juges quant à l'absence de lien entre les retraits effectués par la SARL Sevic sur son compte bancaire et le paiement des factures enregistrées par la SARL SMC sur le compte fournisseur 401. Par ailleurs, M. B... ne peut utilement se prévaloir de la liquidation de la société Sevic et de ce que le paiement des dettes par la société SMC lui revenait au titre du boni de liquidation dès lors qu'il ne peut y avoir confusion de patrimoine entre la SARL Sevic et son associé unique M. B.... Au demeurant, il n'est pas contesté que des chèques ont été libellés au nom de M. B... alors même que la SARL Sevic n'était pas radiée. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que ces sommes d'un montant total de 9 440 euros ne pouvaient être regardées comme des revenus distribués au sens du c de l'article 111 du code général des impôts.
En ce qui concerne les sommes de 50 172 euros (année 2011) et 575 184 euros (année 2012) créditées au compte courant d'associé de M. B... :
6. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices (...) ". Les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés sont, sauf preuve contraire, à la disposition de cet associé, alors même que l'inscription résulterait d'une erreur comptable involontaire, et ont donc, même dans une telle hypothèse, le caractère de revenus distribués, imposables entre les mains de cet associé dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en vertu du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. Pour que l'associé échappe à cette imposition, il lui incombe de démontrer, le cas échéant, qu'il n'a pas pu avoir la disposition de ces sommes ou que ces sommes ne correspondent pas à la mise à disposition d'un revenu.
7. En outre, aux termes de l'article 156 du même code : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé eu égard aux propriétés et aux capitaux que possèdent les membres du foyer fiscal désignés aux 1 et 3 de l'article 6, aux professions qu'ils exercent, aux traitements, salaires, pensions et rentes viagères dont ils jouissent ainsi qu'aux bénéfices de toutes opérations lucratives auxquelles ils se livrent (...) ". En application des dispositions du 3 de l'article 158 de ce code : " 1° Les revenus de capitaux mobiliers comprennent tous les revenus visés au VII de la 1ère sous-section de la présente section, à l'exception des revenus expressément affranchis de l'impôt en vertu de l'article 157 et des revenus ayant supporté le prélèvement visé à l'article 125 A. / Lorsqu'ils sont payables en espèces les revenus visés au premier alinéa sont soumis à l'impôt sur le revenu au titre de l'année soit de leur paiement en espèces ou par chèques, soit de leur inscription au crédit d'un compte ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que les sommes à retenir, au titre d'une année déterminée, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu, sont celles qui, au cours de cette année, ont été mises à la disposition du contribuable, soit par voie de paiement, soit par voie d'inscription à un compte courant sur lequel l'intéressé a opéré, ou aurait pu, en droit ou en fait, opérer un prélèvement au plus tard le 31 décembre.
8. D'une part, il résulte de l'instruction que les sommes de 9 600 euros au titre de l'année 2011 et 29 144 euros au titre de l'année 2012, inscrites au crédit du compte courant d'associé de M. B... n'étaient pas justifiées. D'autre part, il est constant que les sommes de 40 572 euros au titre de 2011 et 546 040 euros au titre de 2012, également inscrites au compte courant d'associé de M. B..., ne proviennent pas de fonds apportés par ce dernier mais correspondent à des sommes versées par des tiers. Si M. B... prétend justifier ces inscriptions à son compte courant par le fait que des tiers ont consenti des avances à la SARL SMC afin de pallier les difficultés de trésorerie de la société, il n'apporte aucun commencement de preuve permettant d'établir la réalité des prêts souscrits par la société auprès de tiers.
9. En premier lieu, il résulte du 2 de l'article 38 du code général des impôts que l'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. M. B... ne peut se prévaloir de l'absence de variation de l'actif net dès lors qu'en l'absence de preuve de l'existence d'une dette de la société envers les tiers qui auraient consenti des avances, la suppression d'une dette inscrite au bilan d'ouverture d'un exercice, résultant de la constatation de l'absence d'apports de M. B... en dépit des sommes inscrites au crédit de son compte courant d'associé, implique une variation d'actif net et donc un profit imposable.
10. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction et ainsi que l'ont dit les premiers juges, que l'appelant, qui supporte la charge de la preuve, n'établit pas que la trésorerie de la société SMC ne lui aurait pas permis d'appréhender les sommes litigieuses en se bornant à invoquer les soldes de la trésorerie de cette société au 31 décembre 2011 et 2012, sans démontrer qu'il était dans l'impossibilité matérielle d'en retirer le montant au cours de ces deux années, alors que les sommes portées au crédit de son compte courant ont été inscrites de manière échelonnées au cours desdites années dont s'agit et que le compte bancaire de la SARL SMC présentait, notamment, au 13 décembre 2012, un solde créditeur de 119 168 euros et que M. B... n'établit pas qu'une demande de remboursement de son compte courant d'associé aurait été, en l'espèce, nécessairement regardée comme abusive ou qu'elle aurait mise, en elle-même en péril la société dont la comptabilité a été rejetée comme non probante.
11. En troisième lieu, si M. B... se prévaut du caractère fictif des écritures comptables au crédit de son compte courant d'associé dès lors qu'il admet n'avoir procédé à aucun apport au profit de la société, il résulte de l'instruction que ces écritures, si elles sont erronées en ce qu'elles inscrivent les sommes en cause au crédit du compte courant d'associé de M. B..., traduisent des mouvements de fonds réels, ainsi que l'ont indiqué à bon droit les premiers juges. Ainsi qu'il a été exposé au point 7, alors même que l'inscription des sommes de 50 172 euros au titre de l'année 2011 et de 575 184 euros au titre de l'année 2012, inscrites au crédit d'un compte courant d'associé de M. B... résulterait d'une erreur comptable, elles doivent être regardées comme mises à la disposition de l'intéressé au titre des années en cause dès lors que M. B..., qui, en sa qualité de gérant, était présumé, sauf preuve contraire qu'il n'apporte pas, connaître la situation comptable de la société, ne démontre pas qu'il n'a pas pu avoir la disposition de ces sommes ou que ces sommes ne correspondent pas à la mise à disposition d'un revenu.
En ce qui concerne les sommes de 181 700 euros (année 2011) et 152 500 euros (année 2012) créditées sur les comptes courants des trois autres associés :
12. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ".
13. D'une part, il résulte de l'instruction que les sommes inscrites aux comptes courants des trois autres associés de M. B... ne résultent d'aucun apport de leur part. Si ce dernier fait valoir que ces sommes proviennent d'avances de tiers pour pallier les difficultés de trésorerie de la SARL SMC, il n'apporte aucun commencement de preuve permettant d'établir la réalité des prêts souscrits par la société auprès de tiers.
14. D'autre part, il résulte de l'instruction que des chèques émis par la SARL SMC, libellés au nom de M. B..., ont été inscrits au débit du compte courant de deux autres associés de la société, qu'un chèque d'un montant de 93 000 euros émis par un tiers a été déposé sur le compte bancaire professionnel de la SARL SMC puis a été comptablement réparti entre ses quatre associés, que seule la signature de M. B... a été portée sur les documents sociaux et que M. B... a admis en cours de contrôle avoir lui-même sollicité des tiers le versement des sommes comptabilisées au crédit des différents comptes courants. Ainsi, eu égard à sa maîtrise des écritures sur les comptes courants des autres associés, M. B... doit être regardé comme ayant appréhendé ces revenus distribués.
15. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 10 et 12, M. B... ne peut se prévaloir ni de l'absence de variation de l'actif net de la société ni du caractère fictif des écritures comptables.
16. Il résulte de ce qui a été dit aux points 14 à 16 que l'inscription de ces sommes au crédit des comptes courants des autres associés, sans justifier d'aucune contrepartie pour la société, constitue un avantage occulte taxable entre les mains de M. B... dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en application du c de l'article 111 précisé du même code.
Sur les pénalités :
17. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ".
18. Il résulte de ce qui a été exposé précédemment que l'appelant ne pouvait ignorer que les sommes versées par des tiers à son instigation étaient irrégulièrement inscrites au crédit des comptes courants d'associés dont il avait seul la disposition. Dans ces conditions, eu égard à l'importance et au caractère répété de ces inscriptions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'intention délibérée de M. B... de se soustraire à l'impôt et, par suite, du bien-fondé de la majoration qu'elle a appliquée sur le fondement du a) de l'article 1729 du code général des impôts.
19. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont seulement prononcé la décharge des contributions sociales supplémentaires résultant de la réduction des bases d'imposition de M. B... aux contributions sociales au titre des années 2011 et 2012 du montant correspondant à la majoration de 25 % prévue au 2° du 7 de l'article 158 du code général des impôts et ont rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012. Par suite la requête doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Ouest.
Délibéré après l'audience du 2 décembre 2021 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,
Mme Nathalie Gay, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 décembre 2021.
La rapporteure,
Nathalie Gay
Le président,
Éric Rey-BèthbéderLa greffière,
Angélique Bonkoungou
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°19BX01530