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14/12/2021 | FRANCE | N°19BX01717

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 14 décembre 2021, 19BX01717


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 7 mars 2017, par lequel le maire de la commune de Sadirac a fait opposition à sa déclaration préalable pour une division en deux lots à bâtir de la parcelle cadastrée section AN n° 120, située au lieu-dit Platon, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 2 juillet 2017.

Par un jugement n° 1703649 du 28 février 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Proc

édure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 avril 2019 et des mémoires enr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 7 mars 2017, par lequel le maire de la commune de Sadirac a fait opposition à sa déclaration préalable pour une division en deux lots à bâtir de la parcelle cadastrée section AN n° 120, située au lieu-dit Platon, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 2 juillet 2017.

Par un jugement n° 1703649 du 28 février 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 avril 2019 et des mémoires enregistrés les 9 octobre 2020 et 22 décembre 2020, M. C..., représenté par Me Bron, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 28 février 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 mars 2017 portant opposition à sa déclaration préalable ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre à la commune de Sadirac de prendre une décision de non opposition à la déclaration préalable déposée le 10 février 2017 ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Sadirac la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a considéré que la délégation de fonctions et de signature donnée au signataire de la décision contestée était régulière et permettait à l'adjoint de signer cette décision ;

- l'arrêté contesté est illégal par voie d'exception d'illégalité du règlement de voirie du département de la Gironde sur lequel il est exclusivement fondé ; ce règlement qui pose une interdiction générale et absolue de création d'accès nouveau sur route départementale de première et de deuxième catégories hors agglomération alors qu'une telle interdiction ne s'applique qu'aux autoroutes et routes expresses, porte atteinte à la liberté fondamentale de libre accès des riverains à la voie publique ;

- cette décision méconnaît la liberté fondamentale d'accès à la voie publique ;

- il n'est nullement démontré que la route départementale 14 est une route de 2èmecatégorie ; cette seule qualification dont on ignore d'ailleurs les caractéristiques, ne saurait suffire à établir la dangerosité de la route ; le tribunal n'a tiré aucune conséquence de l'erreur commise par le maire sur la limite de vitesse autorisée sur la portion de route en cause alors qu'un aménagement de la voirie a été effectué avec un terre-plein et un tourner à gauche peu après son terrain ;

- la décision attaquée est entachée d'erreur d'appréciation en ce que l'accès à la voie publique de la parcelle en litige n'est pas de nature à porter atteinte à la sécurité de la circulation, et n'augmente pas le risque accidentel compte tenu de l'existence d'autres accès dans le prolongement de son terrain ; l'accès avec un décroché prévu aux termes de la déclaration préalable est conforme aux prescriptions de l'article UD3 du plan local d'urbanisme, la visibilité du terrain par rapport aux voitures arrivant sur la RD14 est excellente et la vitesse est limitée à 70 km/h sur ce tronçon ;

- il appartenait au département de vérifier si des aménagements étaient possibles afin de pouvoir satisfaire au droit fondamental des riverains à avoir un accès à la voie publique ; dans le cadre du certificat d'urbanisme accordé en 2002, le département avait considéré que l'accès était possible et partant sécurisé, moyennant le retrait de toute haie ou clôture défensive à 0,5 mètre au moins ; les servitudes de visibilité sont prévues à l'article L. 114-1 du code de la voirie routière.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 23 septembre 2020 et 27 novembre 2020, la commune de Sadirac, représentée par Me Cadro conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. C... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- aucun moyen de la requête n'est fondé ;

- à titre subsidiaire, si la cour censurait le motif tiré de la dangerosité de l'accès, il y a lieu de lui substituer le motif tiré de la défense incendie au regard de l'article UD 3 du PLU.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Birsen Sarac-Deleigne,

- les conclusions de M. Stéphane Gueguein, rapporteur public,

- et les observations de Me Bron, représentant M. C..., et de Me Cadro, représentant la commune de Sadirac.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., propriétaire d'une parcelle cadastrée section AN n° 120 située au lieu-dit " Platon " sur le territoire de la commune de Sadirac, a déposé le 10 février 2017 une déclaration préalable en vue de la division de ladite parcelle en deux lots à bâtir. Par un arrêté du 7 mars 2017 et une décision implicite du 2 juillet 2017 rejetant son recours gracieux, le maire de la commune de Sadirac s'est opposé à cette déclaration préalable. M. C... relève appel du jugement du 28 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur la légalité des décisions contestées :

En ce qui concerne la légalité externe :

2. D'une part, il ressort des pièces du dossier que M. A... B..., 1er adjoint délégué à l'urbanisme, à l'assainissement et aux travaux du quotidien, signataire de l'arrêté en litige, a reçu, par arrêté du 18 février 2016, délégation du maire à l'effet de signer tous les actes, arrêtés et correspondances courantes dans les domaines de l'urbanisme, l'aménagement et les voiries et réseaux. Contrairement à ce que soutient le requérant, compte tenu des termes dans lesquels est rédigée cette délégation, la compétence de cet adjoint en matière d'urbanisme n'est pas limitée au domaine de la finance et de la gestion du personnel communal rattaché à sa délégation mais porte également sur les autorisations d'urbanisme. Par suite, le moyen tiré de ce que le champ de compétence de M. B... ne comprendrait pas les oppositions à déclaration préalable ne peut qu'être écarté.

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales : " Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement. Pour les décisions individuelles, cette transmission intervient dans un délai de quinze jours à compter de leur signature. (...) Le maire certifie, sous sa responsabilité, le caractère exécutoire de ces actes. (...) ". L'article L. 2131-2 de ce code dispose que : " Sont soumis aux dispositions de l'article L. 2131-1 les actes suivants : (...) 3° Les actes à caractère réglementaire pris par les autorités communales dans tous les autres domaines qui relèvent de leur compétence en application de la loi (...). ". L'article L. 2131-3 du même code ajoute que : " Les actes pris au nom de la commune autres que ceux mentionnés à l'article L. 2131-2 sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés. ". L'article L. 2122-29 du code général des collectivités territoriales dispose que : " (...) Dans les communes de 3 500 habitants et plus, les arrêtés municipaux à caractère réglementaire sont publiés dans un recueil des actes administratifs dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État ". Toutefois, ces dernières dispositions n'ont pas dérogé au principe selon lequel la formalité de publicité qui conditionne l'entrée en vigueur des actes réglementaires du maire peut être soit la publication, soit l'affichage.

4. En l'espèce, il ressort des mentions portées sur l'exemplaire produit de l'arrêté de délégation de signature du 18 février 2016 qu'il a été transmis au contrôle de légalité le 19 février 2016 et que le maire a certifié, sous sa responsabilité, le caractère exécutoire de cet acte, comme il peut le faire en vertu de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales, mentions qui font foi jusqu'à preuve du contraire. Les seules affirmations du requérant ne peuvent être regardées comme apportant la preuve requise de l'inexactitude des mentions certifiées. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité interne :

5. En premier lieu, si M. C... invoque l'illégalité, par voie d'exception, de l'article 21 du règlement départemental de voirie de la Gironde adopté en mars 2010, contrairement à ce qu'il soutient, pour prendre l'arrêté attaqué du 7 mars 2017, le maire de la commune qui s'est approprié l'avis du centre routier départemental pour caractériser le risque pour la sécurité de la circulation, ainsi qu'il lui était loisible de faire, ne s'est pas fondé sur ces dispositions mais sur l'article UD3 du règlement du plan local d'urbanisme. M. C... ne saurait dès lors, utilement contester la légalité du règlement départemental de voirie de Gironde, qui ne constitue pas la base légale de l'arrêté litigieux, lequel n'a pas davantage été pris pour son application.

6. En deuxième lieu, sauf dispositions législatives contraires, les riverains d'une voie publique ont le droit d'accéder librement à leur propriété, et notamment d'entrer et de sortir des immeubles à pied ou avec un véhicule. L'autorité domaniale, le cas échéant consultée par l'autorité saisie d'une demande d'autorisation d'urbanisme, ne peut refuser d'accorder un tel accès, qui constitue un accessoire du droit de propriété, que pour des motifs tirés de la conservation et de la protection du domaine public ou de la sécurité de la circulation sur la voie publique.

7. Il est toutefois loisible au plan local d'urbanisme, qui peut, en vertu de l'article L. 151-39 du code de l'urbanisme, fixer les conditions de desserte des terrains susceptibles de recevoir des constructions ou de faire l'objet d'aménagements, de préciser, dans le respect du principe énoncé au point précédent, les conditions de l'accès à ces terrains par les voies publiques.

8. En l'espèce, les dispositions de l'article UD 3 du plan local d'urbanisme de Sadirac prévoient que : " 1/ Accès : Pour être constructible, un terrain doit comporter un accès automobile à une voie publique ou privée, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un passage aménagé sur fonds voisin (...). Les accès doivent être adaptés à l'opération et présenter les caractéristiques permettant de satisfaire aux exigences de sécurité et de défense incendie. En règle générale, ils ne doivent pas avoir une largeur inférieure à 4,00 m ni comporter de passage sous porche de hauteur inférieur à 3,50m (...) ".

9. Il ressort des pièces du dossier que le projet en litige, situé en zone constructible du plan local applicable à la date de la décision contestée, prévoit pour desservir les deux lots à bâtir A et B, un accès direct sur la route départementale 14, classée en route de 2ème catégorie en application des articles R. 572-32 et suivants du code de l'environnement, et empruntée par 10 000 véhicules par jour selon le dernier recensement. Le centre routier départemental, consulté par le maire en sa qualité de gestionnaire de cette route, a émis, le 1er mars 2017, un avis défavorable au projet aux motifs que la visibilité est insuffisante du côté gauche pour un conducteur sortant de la propriété de M. C... et que le règlement départemental de voirie interdit tout nouvel accès sur les routes départementales de 1ère et 2ème catégorie. Il ressort des pièces du dossier et de cet avis que le projet de division, qui prévoit la création de deux accès sur une route départementale hors agglomération, au sortir d'une courbe légère, présente, en raison du manque de visibilité, un risque tant pour la sécurité des usagers de la route que pour les véhicules souhaitant sortir de la parcelle en litige alors même que la vitesse maximale serait limitée à 70 km/h et non à 90 km/h comme mentionné par erreur dans l'arrêté contesté. Le relevé topographique technique effectué par un cabinet de géomètre expert à la demande du requérant, ne comporte aucune indication permettant de remettre en cause le risque ainsi relevé. A cet égard, et sans qu'une étude spécifique soit nécessaire, M. C... ne saurait utilement invoquer la circonstance que l'accès à sa parcelle ne présenterait pas plus de risques que ceux des propriétés voisines alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les autorisations d'accès auraient été accordées dans les mêmes conditions de circulation et de trafic. De la même manière, il ne peut utilement invoquer l'obtention, en 2002, d'une permission de voirie pour l'alignement de sa propriété. Contrairement à ce que soutient M. C..., eu égard à la configuration des lieux, il ne ressort pas des pièces du dossier que des aménagements légers ou que la réalisation d'un décroché ou la suppression de haies tels qu'il le propose permettraient aux véhicules sortant de son terrain d'avoir une visibilité satisfaisante sur la gauche alors que la vitesse des véhicules au sortir du virage et la densité du trafic restent relativement élevés sur cette portion de route. Par suite, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que le maire de Sadirac s'est opposé à la déclaration préalable en litige alors même que l'accès à son projet remplirait les conditions de largeur prévues à l'article UD 3 du PLU et que la voie desservant son terrain répond à l'importance et à la destination des constructions envisagées.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

11. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. C..., n'implique aucune mesure particulière d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Sadirac qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. C..., au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C... le versement à la commune de Sadirac d'une somme de 1 500 euros en application de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : M. C... versera à la commune de Sadirac la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et à la commune de Sadirac.

Copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 16 novembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,

Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 décembre 2021.

La rapporteure,

Birsen Sarac-DeleigneLa présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne à la préfète de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

N° 19BX01717


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX01717
Date de la décision : 14/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-045-02 Urbanisme et aménagement du territoire. - Autorisations d`utilisation des sols diverses. - Régimes de déclaration préalable. - Déclaration de travaux exemptés de permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Birsen SARAC-DELEIGNE
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : CABINET FCA

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-12-14;19bx01717 ?
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