La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/12/2021 | FRANCE | N°20BX00202

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 02 décembre 2021, 20BX00202


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par action simplifiée (SAS) Financière Lubersac a demandé au tribunal administratif de Limoges de prononcer la décharge du complément de taxe sur les salaires qui lui a été réclamé au titre des années 2012 à 2014 à concurrence de 25 718 euros.

Par un jugement n° 1700136 du 19 septembre 2019, le tribunal administratif de Limoges a déchargé la société Financière Lubersac du complément de taxe sur les salaires qui lui a été réclamé au titre des années 2012 à 2014 à concur

rence de 25 718 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par action simplifiée (SAS) Financière Lubersac a demandé au tribunal administratif de Limoges de prononcer la décharge du complément de taxe sur les salaires qui lui a été réclamé au titre des années 2012 à 2014 à concurrence de 25 718 euros.

Par un jugement n° 1700136 du 19 septembre 2019, le tribunal administratif de Limoges a déchargé la société Financière Lubersac du complément de taxe sur les salaires qui lui a été réclamé au titre des années 2012 à 2014 à concurrence de 25 718 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 14 janvier 2020, 10 juillet 2020 et 22 octobre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 19 septembre 2019 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société Lubersac devant le tribunal administratif de Limoges.

Il soutient que :

- en l'absence de secteurs distincts d'activité au sens de l'article 209 de l'annexe II du code général des impôts, ou d'affectation de personnels de manière permanente et exclusive à un secteur, il y a lieu de calculer la taxe sur les salaires en appliquant à l'ensemble des rémunérations le rapport d'assujettissement général ;

- la directrice administrative et financière, simple salariée dépourvue de mandat social, intervient dans la gestion financière de l'entreprise selon le référentiel des métiers cadres de la finance d'entreprise et de la comptabilité de l'APEC ; la société n'apporte pas la preuve de ce que les fonctions de directrice administrative et financière dévolues à Mme B... ne comportent aucune compétence en ce qui concerne les activités financières.

Par deux mémoires, enregistrés les 14 avril et 23 octobre 2020, la société par action simplifiée (SAS) Financière Lubersac, représentée par le cabinet Accense Conseil, conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens développés par le ministre ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Nathalie Gay;

- les conclusions de Mme Madelaigue, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Goumy pour la société Financière Lubersac

Considérant ce qui suit :

1. La société par action simplifiée (SAS) Financière Lubersac a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2012, 2013 et 2014 à l'issue de laquelle l'administration l'a informée, par une proposition de rectification du 28 octobre 2015, des rappels envisagés à la suite de l'imposition à la taxe sur les salaires au titre de l'année 2012 et de la rectification du taux appliqué en 2013 et 2014. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel du jugement du 19 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Limoges a prononcé la décharge du complément de taxe sur les salaires qui a été réclamé à la société Financière Lubersac au titre des années 2012 à 2014 à concurrence de 25 718 euros, correspondant à la taxe assise sur les rémunérations versées à Mme B..., directrice administrative et financière de la société.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 231 du code général des impôts : " Les sommes payées à titre de rémunérations sont soumises à une taxe sur les salaires égale à 4,25 % de leur montant, évalué selon les règles prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale (...) qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations. L'assiette de la taxe due par ces personnes ou organismes est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée en totalité ou sur 90 p. 100 au moins de son montant, ainsi que le chiffre d'affaires total mentionné au dénominateur du rapport s'entendent du total des recettes et autres produits, y compris ceux correspondant à des opérations qui n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée mentionné au numérateur du rapport s'entend du total des recettes et autres produits qui n'ont pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (...) ".

3. Pour prononcer la décharge des rappels de taxe sur les salaires auxquels la SAS Financière Lubersac avait été assujettie au titre des années 2012 à 2014, le tribunal administratif de Limoges a jugé que les pouvoirs de contrôle et de responsabilité financière étaient exercés par le comité de surveillance de la société, que le président ne pouvait prendre aucune décision ni aucune mesure sans avoir obtenu au préalable l'accord de ce comité et que Mme B..., directrice administrative et financière, était dépourvue de toute attribution dans le secteur financier dès lors qu'elle exerçait ses fonctions sous le contrôle du président de la société, dont la rémunération avait par ailleurs été regardée par l'administration fiscale comme placée hors du champ de la taxe sur les salaires. Toutefois, la seule circonstance que Mme B... exerçait ses fonctions sous le contrôle du président de la société, alors même que le pouvoir de décision en matière financière ne relevait pas des attributions de ce dernier, ne suffit pas à exclure sa participation à des activités du secteur financier. Si la société intimée fait valoir que l'intégralité de sa rémunération était refacturée aux filiales sous forme de prestations de services soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, elle n'apporte aucun élément permettant de justifier ses allégations. Dès lors que les fonctions de directeur administratif et financier confèrent, en principe, à leur titulaire des pouvoirs qui s'étendent au secteur financier d'une société holding et en l'absence de clause contractuelle contraire, c'est par une exacte application des dispositions du 1 de l'article 231 du code général des impôts que l'administration a inclus la rémunération de la directrice administrative et financière dans la base imposable de la SAS Financière Lubersac Holding à la taxe sur les salaires. Par suite, le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour décharger la société Financière Lubersac du complément de taxe sur les salaires litigieux, le tribunal a retenu le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 231 du code général des impôts.

4. Il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par la SAS Financière Lubersac devant le tribunal administratif et devant la cour.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

5. Dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une entreprise a été effectuée soit, comme il est de règle, dans ses propres locaux, c'est au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat. Il résulte de l'instruction qu'à la suite d'un avis de vérification de comptabilité du 21 juillet 2015, le service a effectué une première intervention dans les locaux de la SAS Financière Lubersac le 30 juillet 2015, en présence de M. Belin, président, et il n'est pas contesté que, lors de l'intervention du 4 septembre 2015, Mme B... a été informée d'une erreur dont étaient entachées les déclarations relatives à la taxe sur les salaires souscrites en 2013 et 2014. La circonstance que la vérificatrice s'est adressée à une autre employée de la société, Mme A..., alors que la société avait mandaté conjointement cette dernière et Mme B... pour représenter la société au cours des opérations de vérification ne permet pas de tenir pour établi que la vérificatrice se serait refusée à tout échange de vues sur la taxe sur les salaires. Par suite, la société n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de ce qu'elle a été privée d'un débat oral et contradictoire avec la vérificatrice.

Sur le bien-fondé des impositions :

6. Aux termes de l'article 209 de l'annexe II du code général des impôts : " I. Les opérations situées hors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée et les opérations imposables doivent être comptabilisées dans des comptes distincts pour l'application du droit à déduction. / Il en va de même pour les secteurs d'activité qui ne sont pas soumis à des dispositions identiques au regard de la taxe sur la valeur ajoutée (...) ". Lorsque les activités d'une entreprise sont, pour l'exercice de ses droits à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, réparties en plusieurs secteurs distincts au sens de l'article 209 de l'annexe II au code général des impôts alors en vigueur, la taxe sur les salaires doit être déterminée par secteur, en appliquant aux rémunérations des salariés affectés spécifiquement à chaque secteur le rapport d'assujettissement propre à ce secteur. Toutefois, la taxe sur les salaires des personnels concurremment affectés à plusieurs secteurs doit être établie en appliquant à leurs rémunérations le rapport existant pour l'entreprise dans son ensemble entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total.

7. Il résulte de l'instruction que la société Financière Lubersac n'a pas constitué de secteurs distincts d'activité au sens de l'article 209 de l'annexe II du code général des impôts. L'activité d'une entreprise peut être répartie en secteurs distincts si les services de l'entreprise peuvent être utilisés indépendamment les uns des autres, s'ils comportent la mise en œuvre de techniques et de moyens de production séparés et s'ils font l'objet d'une comptabilisation distincte. Si la SAS Financière Lubersac invoque le bénéfice rétroactif de la constitution de secteurs distincts d'activité, elle ne donne aucune indication, notamment sur la nature de ses activités et ses moyens d'exploitation, permettant d'établir qu'elle aurait été en droit, même rétroactivement, de sectoriser son activité. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a appliqué aux rémunérations le rapport existant pour l'entreprise dans son ensemble entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total.

8. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a déchargé la société Financière Lubersac du complément de taxe sur les salaires qui lui a été réclamé au titre des années 2012 à 2014.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1700136 du 19 septembre 2019 du tribunal administratif de Limoges est annulé.

Article 2 : Les conclusions présentées par la SAS Financière Lubersac tendant à la décharge du complément de taxe sur les salaires qui lui a été réclamé au titre des années 2012 à 2014 et ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Financière Lubersac et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 4 novembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,

Mme Nathalie Gay, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 décembre 2021.

La rapporteure,

Nathalie GayLe président,

Éric Rey-Bèthbéder

La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 20BX00202


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 20BX00202
Date de la décision : 02/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-05-01 Contributions et taxes. - Impôts assis sur les salaires ou les honoraires versés. - Versement forfaitaire de 5 p. 100 sur les salaires et taxe sur les salaires.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : CABINET ACCENSE CONSEILS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-12-02;20bx00202 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award