Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la décharge de la cotisation foncière des entreprises à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2016 pour un montant de 136 euros.
Par un jugement n° 1700943 du 29 janvier 2019, le tribunal administratif de Poitiers a déchargé M. C... D... la cotisation foncière des entreprises à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2016.
Procédure devant la cour :
Par un recours et un mémoire enregistrés les 17 mai 2019 et 16 octobre 2020, le ministre de l'économie et des finances demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1700943 du tribunal administratif de Poitiers du 29 janvier 2019 ;
2°) de rétablir M. C... à la cotisation foncière des entreprises à hauteur de la décharge prononcée par le tribunal administratif de Poitiers.
Il soutient que :
- les premiers juges ont commis une erreur de droit et dénaturé la délibération de la communauté de communes de l'Ile-de-Ré du 29 septembre 2011 qui supprime l'exonération de cotisation foncière des entreprises dans certains cas, en limitant le champ de la notion de " meublés ordinaires " retenue dans ladite délibération aux logements meublés régis par la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 et en estimant que l'activité de location de chambres d'hôtes de M. C... n'était pas concernée par cette délibération et bénéficiait de l'exonération prévue à l'article 1459 du code général des impôts ;
- les conclusions tendant à la condamnation de l'Etat aux dépens sont irrecevables car dépourvues d'objet en l'absence de mesure d'expertise ou d'instruction.
Par un mémoire en défense enregistré le 14 août 2019, M. A... C..., représenté par la SELARL Konate Avocats, conclut au rejet de la requête, à la condamnation de l'Etat aux entiers dépens et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que le moyen soulevé par le ministre n'est pas fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de M. Gueguein, rapporteur public,
- et les observations de Me Bitie pour M. C....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... C... exerce une activité de location de chambres d'hôtes au sein de sa résidence personnelle à Sainte-Marie-de-Ré (Charente-Maritime), pour laquelle il a été assujetti à la cotisation foncière des entreprises au titre de l'année 2016 pour un montant de 452 euros. Il a adressé une réclamation préalable à l'administration fiscale le 6 février 2017, laquelle a été rejetée par une décision du 24 février 2017. Toutefois, il s'est vu accorder un dégrèvement de cotisation foncière des entreprises à hauteur de 316 euros le 17 mars 2017. M. C... a saisi le tribunal administratif de Poitiers d'une demande tendant à obtenir la décharge du montant de cotisation foncière des entreprises restant à sa charge, soit 136 euros. Par un jugement du 29 janvier 2019, le tribunal a prononcé la décharge de la cotisation foncière des entreprises à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2016. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article 1447 du code général des impôts : " I. - La cotisation foncière des entreprises est due chaque année par les personnes physiques ou morales, les sociétés non dotées de la personnalité morale ou les fiduciaires pour leur activité exercée en vertu d'un contrat de fiducie qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée. (...) ". Aux termes de l'article 1459 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à compter des impositions établies au titre de l'année 2016 : " Sont exonérés de la cotisation foncière des entreprises : (...) 3° Sauf délibération contraire de la commune ou de l'établissement public de coopération intercommunale doté d'une fiscalité propre : / a) (abrogé) / b) Les personnes qui louent en meublé des locaux classés dans les conditions prévues à l'article L. 324-1 du code de tourisme, lorsque ces locaux sont compris dans leur habitation personnelle ; / c) Les personnes autres que celles visées aux 1° et 2° du présent article ainsi qu'au b qui louent ou sous-louent en meublé tout ou partie de leur habitation personnelle. / Les délibérations sont prises dans les conditions prévues à l'article 1639 A bis et portent sur la totalité de la part revenant à chaque collectivité ou groupement ; elles peuvent concerner une ou plusieurs des catégories de personnes énumérées ci-dessus. ".
3. Il résulte des dispositions précitées que les délibérations des collectivités compétentes tendant à la suppression de l'exonération de cotisation foncière des entreprises dont bénéficient certaines personnes exerçant une activité de location de meublés ne peuvent concerner qu'une ou plusieurs des catégories de personnes énumérées au 3° de l'article 1459 du code général des impôts.
4. Il résulte de l'instruction que, par une délibération du 29 septembre 2011, la communauté de communes de l'Ile-de-Ré a décidé de supprimer l'exonération de cotisation foncière des entreprises dont bénéficient " les personnes qui louent leur habitation personnelle à titre de gîte rural, meublé de tourisme et meublé ordinaire ". En se référant aux catégories de " gîte rural " et de " meublé de tourisme ", la délibération a clairement entendu viser les personnes désignées à l'ancien a) du 3° de l'article 1459 du code général des impôts, lequel concernait avant son abrogation à compter du 1er janvier 2016, " Les personnes qui louent tout ou partie de leur habitation personnelle à titre de gîte rural ", et celles désignées au b) du 3° du même article, relatif aux meublés de tourisme. Dans ces conditions, la catégorie des " meublés ordinaires " mentionnée dans la délibération doit être regardée comme visant les personnes désignées au c) du 3° de l'article 1459, à savoir les personnes autres que celles désignées aux alinéas précédents de l'article qui louent en meublé tout ou partie de leur habitation personnelle. Contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, il ne résulte pas de l'instruction que la catégorie des " meublés ordinaires " se limiterait aux seuls logements meublés constituant la résidence principale du locataire définis à l'article 25-4 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986. Ainsi, en désignant chacune de ces catégories, la communauté de communes doit être regardée comme ayant entendu supprimer l'exonération de cotisation foncière des entreprises pour l'ensemble des catégories de personnes visées au 3° de l'article 1459 du code général des impôts, sans distinction. Dans ces conditions, M. C..., dont l'activité de location de chambres d'hôtes au sein de sa résidence personnelle entre dans le champ du c) du 3° de l'article 1459 du code général des impôts, ne peut prétendre, pour cette activité, à l'exonération de cotisation foncière des entreprises prévue par ces dispositions.
5. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur le fait que les " meublés ordinaires " visés par la délibération de la communauté de communes désignaient les seuls logements meublés définis à l'article 25-4 de la loi du 6 juillet 1989 et que l'activité de location de chambres d'hôtes de M. C... ne relevait pas de cette catégorie pour prononcer la décharge de l'imposition en litige.
6. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... devant le tribunal administratif de Poitiers.
7. Le requérant ne peut utilement se prévaloir, pour contester l'imposition établie et mise à sa charge conformément à la loi, de ce que la plupart des personnes exploitant des chambres d'hôtes dans le ressort de la même communauté de communes n'y seraient pas assujetties et que cette imposition serait ainsi discriminatoire.
8. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la relance est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a prononcé la décharge de la cotisation foncière des entreprises à laquelle M. C... a été assujetti au titre de l'année 2016.
Sur les frais liés au litige :
9. D'une part, aucun dépens n'ayant été exposé dans la présente instance, les conclusions de M. C... tendant à la condamnation de l'Etat aux entiers dépens ne peuvent qu'être rejetées.
10. D'autre part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 29 novembre 2019 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Poitiers est rejetée et la cotisation foncière des entreprises à laquelle M. C... a été assujetti au titre de l'année 2016 et dont il a été déchargé par le jugement du 29 novembre 2019 est remise à sa charge.
Article 3 : Les conclusions de M. C... tendant à la condamnation de l'Etat aux dépens et celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à M. A... C....
Copie en sera adressée pour information au directeur du contrôle fiscal Sud-Ouest.
Délibéré après l'audience du 28 septembre 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, présidente,
Mme Laury Michel, première conseillère,
Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 novembre 2021.
La rapporteure,
Laury B...
La présidente,
Elisabeth Jayat
La greffière,
Caroline Brunier
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX01984