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07/10/2021 | FRANCE | N°21BX00440

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 07 octobre 2021, 21BX00440


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux recours distincts, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'une part, d'annuler l'arrêté du 25 mai 2020 du préfet de la Haute-Garonne portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de renvoi, et, d'autre part, d'enjoindre audit préfet, sous astreinte, de lui délivrer un titre de séjour mention " salarié " ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation en lui délivrant, dans l'attente, une aut

orisation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 2002436-2002561 du 31 août...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux recours distincts, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'une part, d'annuler l'arrêté du 25 mai 2020 du préfet de la Haute-Garonne portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de renvoi, et, d'autre part, d'enjoindre audit préfet, sous astreinte, de lui délivrer un titre de séjour mention " salarié " ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation en lui délivrant, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 2002436-2002561 du 31 août 2020, le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulouse a joint les deux recours et les a rejetés.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 février 2021, M. B..., représenté par Me Brel, demande à la cour

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Toulouse du 31 août 2020.

2°) d'annuler l'arrêté du 25 mai 2020 du préfet de la Haute-Garonne portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de l'admettre au séjour dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à tout le moins, de procéder au réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'État, outre les entiers dépens, la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision de refus de séjour :

-elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegardes des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles de l'article L. 313-14 du même code, et elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la mesure d'éloignement :

-elle est privée de base légale en raison de l'illégalité du refus de séjour ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

-elle viole l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en raison des risques qu'il encourt en cas de retour dans son pays d'origine.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 juillet 2021, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Par une décision du 14 janvier 2021, l'aide juridictionnelle totale a été accordée à M. B....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant nigérian né le 9 juin 1994 à Benin City (Nigéria), est entré en France le 17 octobre 2016, selon ses déclarations. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA), le 28 décembre 2017, et le recours formé contre cette décision a été également rejeté par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 9 novembre 2018. Le 26 avril 2019, l'intéressé a introduit une demande d'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 25 mai 2020, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. B... fait appel du jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Toulouse du 31 août 2020, qui a rejeté ses demandes, présentées par deux recours distincts, tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de séjour :

2. D'une part, aux termes du 7° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. M. B... fait valoir qu'il est présent en France depuis quatre ans, qu'il y a des attaches personnelles dès lors qu'il vit en concubinage avec une ressortissante de nationalité nigériane en séjour régulier, qu'il a procédé à une reconnaissance anticipée de l'enfant qu'elle porte, que cette compagne, bénéficiaire de la protection subsidiaire, encourrait des risques en cas de retour au Nigéria, ainsi que lui-même, si bien que la cellule familiale ne pourrait se reconstituer dans ce pays, et enfin qu'il dispose d'une promesse d'embauche en qualité d'agent d'entretien en contrat à durée indéterminée et à temps complet. Cependant, il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré en France à une date indéterminée et s'y est maintenu le temps nécessaire à l'examen de sa demande d'asile. S'il se prévaut d'un concubinage avec une ressortissante de nationalité nigériane et résidant en France sous couvert d'une carte de séjour pluriannuelle en cours de validité, ni la communauté de vie ni l'ancienneté de ce concubinage ne sont établies par les pièces du dossier, alors, en outre, qu'à la date de la décision attaquée l'enfant qu'a reconnu le requérant n'était pas encore né. À l'exception de sa sœur, M. B... n'établit ni même n'allègue bénéficier d'autres attaches personnelles ou familiales en France. Par ailleurs, M. B... n'allègue ni n'établit être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, où il a vécu la majeure partie de sa vie. Enfin, s'il se prévaut également d'une intégration professionnelle en France par la détention d'une promesse d'embauche en tant qu'agent d'entretien pour un contrat à durée indéterminée pour le compte de la société Crystal, cette allégation n'est corroborée par aucun élément du dossier et n'est pas de nature à caractériser, en tout état de cause, une véritable intégration professionnelle sur le territoire national. Dans ces conditions, en refusant de l'admettre au séjour, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'a pas non plus commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de M. B....

4. D'autre part, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 ".

5. En se prévalant des éléments et circonstances exposés au point 3, M. B... n'établit pas que son admission au séjour répondrait à des considérations humanitaires ou se justifierait au regard de motifs exceptionnels au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, en ayant refusé de lui délivrer un titre " salarié " ou " vie privée et familiale " sur le fondement de ces dispositions, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas non plus commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de M. B....

En ce qui concerne la mesure d'éloignement :

6. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la décision de refus de séjour n'étant pas entachée d'illégalité, la mesure d'éloignement ne se trouve pas privée de base légale.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

7. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".

8. M. B... fait valoir qu'il encourt des risques personnels en cas de retour dans son pays d'origine où il serait exposé à des traitements inhumains et dégradants en raison de son refus de rejoindre la " confrérie de la Hache noire " dite " Black Axe Confraternity ". Toutefois, pas plus en appel qu'en première instance, il ne produit le moindre élément à l'appui de ses allégations, alors que sa demande d'asile a été rejetée par l'OFPRA, puis par la CNDA, laquelle a estimé, aux termes de sa décision du 9 novembre 2018, que les déclarations de l'intéressé étaient " imprécises et confuses ", ne permettaient pas de " regarder comme avérées " ses déclarations, qu'il est " demeuré flou et confus sur son recours aux autorités " et que " l'absence de menaces durant les deux années qui ont suivi son départ du pays interroge sur la résurgence soudaine de celles-ci en 2018 ". Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée méconnaîtrait les stipulations précitées.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, les conclusions de M. B... aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles tendant à l'application des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 9 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,

Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 octobre 2021.

La rapporteure,

Florence Rey-Gabriac

Le président,

Éric Rey-Bèthbéder

La greffière,

Angélique Boukoungou

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 21BX00440


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 21BX00440
Date de la décision : 07/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : DIALEKTIK AVOCATS AARPI

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-10-07;21bx00440 ?
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