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07/10/2021 | FRANCE | N°19BX03302

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 07 octobre 2021, 19BX03302


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers, d'une part, d'annuler la décision du 20 mars 2017 par laquelle le maire de Saint-Palais-sur-Mer l'a informé du non renouvellement de son contrat à durée déterminée arrivant à expiration le 30 juin 2017 et, d'autre part, de condamner la commune précitée à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Par un jugement n° 1701903 du 12 juin 2019, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté la demande de M. A...

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Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 8 août 2019 et trois ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers, d'une part, d'annuler la décision du 20 mars 2017 par laquelle le maire de Saint-Palais-sur-Mer l'a informé du non renouvellement de son contrat à durée déterminée arrivant à expiration le 30 juin 2017 et, d'autre part, de condamner la commune précitée à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Par un jugement n° 1701903 du 12 juin 2019, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté la demande de M. A....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 8 août 2019 et trois mémoires en réplique enregistrés les 27 novembre 2020, 30 décembre 2020 et 25 janvier 2021, M. A..., représenté par Me Araguas, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 12 juin 2019 ;

2°) d'annuler la décision du 20 mars 2017 par laquelle le maire de Saint-Palais-sur-Mer l'a informé du non renouvellement de son contrat à durée déterminée arrivant à expiration le 30 juin 2017 ;

3°) de condamner la commune précitée à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

4°) de mettre à la charge de la commune la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif n'a que fort peu motivé le rejet du moyen tiré d'une sanction disciplinaire déguisée et de la violation de ses droits à défense.

-toute sanction disciplinaire à l'égard d'un salarié doit être précédée, en vertu du code du travail, d'un entretien préalable au cours duquel il peut être assisté par un membre du personnel ; ce principe général du droit, qui doit s'appliquer également aux agents du secteur public, a été méconnu ;

-la procédure administrative préalable obligatoire consistant à entendre le destinataire d'une décision individuelle défavorable, préalablement à son édiction, n'a pas été respectée ; il a ainsi été privé d'une garantie fondamentale, en violation de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne ;

-si un agent public contractuel n'a pas un droit acquis au renouvellement de son contrat, dans les cas où la décision revêt un caractère disciplinaire, elle ne peut légalement intervenir que si l'intéressé a été mis à même de prendre connaissance de son dossier et a pu être entendu ; il s'agit là encore d'un principe général du droit ; ses droits à défense n'ont donc pas été respectés ;

- le non-renouvellement de son contrat était une sanction disciplinaire déguisée ; en effet, le 20 février 2017 a été prise une mesure disciplinaire de suspension de son contrat, suivie un mois plus tard d'une décision de non-renouvellement de celui-ci ; en outre, les faits qui sous-tendent le non-renouvellement de son contrat ne sont pas établis ;

-si la commune invoque des nécessités de service, à savoir le recrutement d'un agent titulaire, la création du poste est intervenue le lendemain de la décision attaquée ; par ailleurs, la commune a volontairement fait traîner les choses pour qu'il y ait, à la suite de sa plainte en diffamation, prescription de l'action publique ; cette décision est ainsi entachée de détournement de pouvoir ;

-la décision attaquée a été pour lui vexatoire et constitue une atteinte à l'intégrité de son travail et de sa personne ; pour cela, il demande la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 7 décembre 2020 et le 26 janvier 2021, la commune de Saint-Palais-sur-Mer, représentée par Me Sainte-Marie Pricot, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. A... le paiement de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 4 janvier 2021, la clôture de l'instruction a été reportée au 29 janvier 2021.

M. A... a présenté un nouveau mémoire en réplique, enregistré le 21 avril 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la charte européenne des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac,

- les conclusions de Mme Florence Madelaigue, rapporteure publique,

- et les observations de Me Araguas pour M. A... et de Me Sainte-Marie Pricot, pour la commune de Saint-Palais-sur-Mer.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A... a été recruté à compter du 16 janvier 2015 par différents contrats à durée déterminée par la commune de Saint-Palais-sur-Mer (Charente-Maritime) sur un emploi non permanent et, en dernier lieu, par contrat du 1er janvier 2017 au 30 juin 2017 sur l'emploi permanent de directeur des services techniques. Il fait appel du jugement du tribunal administratif de Poitiers du 12 juin 2019, qui a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 20 mars 2017 par laquelle le maire l'a informé du non renouvellement de ce dernier contrat arrivant à expiration le 30 juin 2017 et à la réparation du préjudice qu'il estime avoir subi.

Sur la régularité du jugement :

2. Par l'article 4 du jugement attaqué, les premiers juges ont notamment indiqué qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier qu'en ne procédant pas au renouvellement du contrat de M. A... arrivant à échéance le 30 juin 2017, le maire de Saint-Palais-sur-Mer avait commis une erreur manifeste d'appréciation ou s'était fondé sur des faits matériellement inexacts ou sur un motif étranger à l'intérêt du service, cette décision ne présentant pas le caractère d'une sanction disciplinaire, si bien que l'intéressé ne pouvait utilement se prévaloir de la méconnaissance du principe général des droits de la défense. Ce faisant, le tribunal administratif a suffisamment motivé la raison pour laquelle il a considéré que la décision attaquée ne constituait pas une sanction disciplinaire.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. D'une part, aux termes de l'article 3-2 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, alors en vigueur : " Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée et pour les besoins de continuité du service, les emplois permanents des collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 de la présente loi peuvent être occupés par des agents contractuels pour faire face à une vacance temporaire d'emploi dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire. / Le contrat est conclu pour une durée déterminée qui ne peut excéder un an. Il ne peut l'être que lorsque la communication requise à l'article 41 a été effectuée. / Sa durée peut être prolongée, dans la limite d'une durée totale de deux ans, lorsque, au terme de la durée fixée au deuxième alinéa du présent article, la procédure de recrutement pour pourvoir l'emploi par un fonctionnaire n'a pu aboutir ".

4. D'autre part, aux termes de l'article 38 du décret du 15 février 1988 : " Lorsqu'un agent non titulaire a été engagé pour une durée déterminée susceptible d'être reconduite, l'administration lui notifie son intention de renouveler ou non l'engagement au plus tard (...) 2° Au début du mois précédant le terme de l'engagement pour l'agent recruté pour une durée égale ou supérieure à six mois et inférieure à deux ans. (...) La notification de la décision finale doit être précédée d'un entretien lorsque le contrat est susceptible d'être reconduit pour une durée indéterminée ou lorsque la durée du contrat ou de l'ensemble des contrats conclus sur emploi permanent conformément à l'article 3-3 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée est supérieure ou égale à trois ans ".

5. Un agent public qui a été recruté par un contrat à durée déterminée ne bénéficie ni d'un droit au renouvellement de son contrat ni, à plus forte raison, d'un droit au maintien de ses clauses si l'administration envisage de procéder à son renouvellement. Toutefois, l'administration ne peut légalement décider, au terme de son contrat, de ne pas le renouveler ou de proposer à l'agent, sans son accord, un nouveau contrat substantiellement différent du précédent, que pour un motif tiré de l'intérêt du service. Un tel motif s'apprécie au regard des besoins du service ou de considérations tenant à la personne de l'agent. Dès lors qu'elles sont de nature à caractériser un intérêt du service justifiant le non renouvellement du contrat, la circonstance que des considérations relatives à la personne de l'agent soient par ailleurs susceptibles de justifier une sanction disciplinaire ne fait pas obstacle, par elle-même, à ce qu'une décision de non renouvellement du contrat soit légalement prise, pourvu que l'intéressé ait alors été mis à même de faire valoir ses observations.

6. M. A... soutient que le non renouvellement de son contrat constitue en réalité une sanction disciplinaire déguisée, en invoquant un arrêté du 20 février 2017, prononçant sa suspension de fonctions, en raison du comportement inapproprié qu'il aurait eu vis-à-vis d'une collègue, grief dont la matérialité n'est, selon lui, pas établie.

7. Il est constant que le dernier contrat par lequel M. A... a été recruté sur l'emploi permanent de directeur des services techniques a été conclu le 21 décembre 2016 avec un terme prévu au 30 juin 2017, soit pour une durée à peine supérieure à six mois. L'article 1er de ce contrat, intitulé " Objet et durée du contrat " stipule : " Considérant que le bon fonctionnement des services implique le recrutement d'un agent contractuel pour assurer la vacance temporaire d'un emploi de catégorie A ". À cet égard, la commune fait valoir que, dès 2016, elle a cherché à pourvoir ce poste par un agent titulaire. Il ressort en effet des pièces du dossier que, dès le 18 octobre 2016, elle a publié une vacance de poste pour l'emploi de directeur des services techniques, indiquant une date à pourvoir au 1er janvier 2017 et mentionnant comme motif : " fin de contrat sur emploi permanent ". Par une décision du 20 mars 2017, qui est la décision attaquée, la commune a fait savoir à M. A... qu'elle ne renouvellerait pas son contrat à durée déterminée à son échéance au 30 juin 2017, en exposant, après avoir visé l'article 38 du décret du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984, que, conformément à l'article 1er de son contrat, l'emploi permanent de directeur des services techniques qu'il occupait ayant vocation à être occupé par un fonctionnaire, elle avait procédé au recrutement d'un agent titulaire au grade d'ingénieur territorial.

8. Dans ces conditions, et alors en outre qu'il est constant que toute poursuite disciplinaire a été abandonnée à l'égard de l'intéressé et que celui-ci a perçu l'intégralité de son traitement jusqu'à la fin de son contrat, la commune doit être regardée comme ayant décidé du non renouvellement de son contrat pour des besoins liés au service, lesquels avaient été déterminés bien avant l'édiction de l'arrêté de suspension du 20 février 2017.

9. Il s'ensuit que les moyens tirés de ce que la procédure disciplinaire aurait été irrégulière, en particulier du fait de la méconnaissance des droits de la défense, du droit de l'intéressé à être entendu et du principe du contradictoire, sont inopérants.

10. Il résulte également de ce qui vient d'être dit que le moyen tiré d'un détournement de pouvoir, lequel n'est pas établi par les pièces du dossier, doit être écarté.

Sur les conclusions indemnitaires :

11. En l'absence d'illégalité fautive de la part de la commune de Saint-Palais-sur-Mer, les conclusions de M. A... tendant à la condamnation de celle-ci à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral doivent, en tout état de cause, être rejetées.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Sur les frais de l'instance :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Saint-Palais-sur-Mer, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. A... sur ce fondement. En revanche et sur le fondement des mêmes dispositions, il y a lieu de mettre à la charge de ce dernier une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera à la commune de Saint-Palais-sur-Mer la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Saint-Palais-sur-Mer.

Délibéré après l'audience du 9 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente assesseure,

Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 octobre 2021.

La rapporteure,

Florence Rey-Gabriac

Le président,

Éric Rey-Bèthbéder

La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX03302


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 19BX03302
Date de la décision : 07/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-12-03-02 Fonctionnaires et agents publics. - Agents contractuels et temporaires. - Fin du contrat. - Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: M. Olivier COTTE
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : ARAGUAS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-10-07;19bx03302 ?
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