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28/09/2021 | FRANCE | N°21BX01314

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 28 septembre 2021, 21BX01314


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... E... a demandé au tribunal administratif de C... d'annuler l'arrêté du 11 juin 2020 par lequel la préfète de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2001897 du 10 décembre 2020, tribunal administratif de C... a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 mars 2021, M. B... E..., représen

té par Me Desroches, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de C.....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... E... a demandé au tribunal administratif de C... d'annuler l'arrêté du 11 juin 2020 par lequel la préfète de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2001897 du 10 décembre 2020, tribunal administratif de C... a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 mars 2021, M. B... E..., représenté par Me Desroches, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de C... du 10 décembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 juin 2020 de la préfète de la Vienne ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Vienne de lui délivrer une carte de séjour d'une durée d'un an, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail sur le fondement des dispositions de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, dans les mêmes conditions d'astreinte et de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délais et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à Me Desrosches sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou à lui-même sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au cas où l'aide juridictionnelle ne lui serait pas accordée.

Il soutient que :

- la compétence du signataire de l'acte n'est pas établie faute pour la préfète d'avoir produit la publication de l'arrêté de délégation ;

- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée et révèle un défaut d'examen approfondi de sa situation ;

- c'est à tort que le tribunal a considéré que sa demande de titre de séjour ne comportait pas de demande d'admission exceptionnelle au séjour en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la préfète s'est estimée à tort en situation de compétence liée au motif qu'il ne disposait pas d'un visa long séjour ;

- la préfète qui n'était pas liée par l'appréciation des juridictions judicaires, ne pouvait exclure toute régularisation au seul motif de l'absence de justification de l'état-civil ; la préfète n'a procédé à aucune vérification de l'authenticité du passeport délivré par les autorités consulaires ni justifié avoir saisi les autorités camerounaises pour conforter ses doutes sur son état civil ;

- la décision contestée est entachée d'erreur d'appréciation quant à son état civil ; la brigade des fraudes n'a pas retenu le caractère frauduleux de l'acte de naissance mais a émis un avis défavorable au regard des seules fautes d'orthographe contenues dans l'acte de naissance qui ne peuvent suffire à remettre en cause son authenticité ; il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète aurait pris la même décision si elle ne s'était pas fondée sur l'absence de justificatif d'état civil ;

- elle méconnaît les dispositions des articles L. 313-14 et R. 313-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que l'absence de visa de long séjour ne pouvait lui être opposée alors qu'il demandait une admission exceptionnelle au séjour ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors qu'elle aurait dû être précédée d'un avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ;

- elle méconnait les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait les dispositions des articles 2, 3, 8 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle est insuffisamment motivée

- elle méconnait les dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 juin 2021 la préfète de la Vienne conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.

M. B... E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 mars 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... E..., ressortissant camerounais, qui déclare être né le 17 mai 2001, est entré en France le 23 mars 2017. Le 8 juin 2017, il a fait l'objet d'un refus de prise en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance, confirmé par jugement du 30 octobre 2017 du tribunal pour enfants F... C... et par décision du 22 juin 2018 de la cour d'appel de C..., au motif que les documents d'état-civil présentés n'étaient pas authentiques et que sa maturité et son apparence physique n'étaient pas celles d'un mineur. Le 5 août 2019, il a déposé une demande de titre de séjour en qualité de travailleur temporaire " afin de poursuivre ses études en 2ème année de CAP cuisine ". Par un arrêté du 11 juin 2020, la préfète de la Vienne a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... E... relève appel du jugement du 10 décembre 2020, par lequel le tribunal administratif de C... a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur l'arrêté pris dans son ensemble :

2. La préfète de la Vienne a, par un arrêté du 3 février 2020 régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture de ce département, donné délégation à M. Emile Soumbo, secrétaire général de la préfecture de la Vienne, à l'effet de signer l'ensemble des décisions entrant dans le champ du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La circonstance que la préfète n'aurait pas produit en défense un document attestant de la publicité de cette délégation ne peut utilement être invoquée alors que le recueil des actes administratifs est consultable par toute personne au guichet d'accueil de la préfecture ou sur le site internet dont les références étaient au demeurant indiquées dans le mémoire en défense devant le tribunal administratif. Le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué doit donc être écarté.

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, la décision attaquée vise les textes dont elle fait application, notamment les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles L. 313-10 (2°) et L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur la base desquels sont respectivement délivrés les titres de séjour " travailleur temporaire " et " étudiant ". Elle indique que l'intéressé ne peut se voir délivrer un titre de séjour dès lors qu'il n'a pas justifié de son état-civil comme l'exige l'article R. 311-2-2 du même code, que la direction du travail et de l'emploi n'a pu se prononcer sur la demande d'autorisation de travail dès lors que l'employeur avait renoncé à le recruter pour des raisons économiques et que M. B... E..., qui avait essayé de se faire passer pour mineur lors de son entrée en France, détournait la procédure alors qu'il ne bénéficie pas du visa long séjour permettant la délivrance d'un titre de séjour étudiant. Le requérant fait valoir, d'une part, que la préfète, se bornant à étudier sa demande au titre des articles L. 313-10 (2°) et L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile non visés dans sa demande aurait, à tort, omis d'examiner sa demande au titre de son pouvoir de régularisation prévue à L. 313-14 du même code, et, d'autre part, que la décision attaquée souffre d'un défaut de motivation au regard de ces mêmes dispositions révélant un défaut d'examen approfondi de sa situation. Toutefois, contrairement à ce qu'il soutient, il ne ressort ni de sa demande en date du 5 août 2019 ni de son courrier du 3 mars 2020 qu'il se serait prévalu de l'article L. 313-14 du code, ou aurait fait état de considérations humanitaires ou de circonstances exceptionnelles. Il ne saurait, dès lors, utilement invoquer, à l'encontre de la décision attaquée, l'absence de motivation au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou l'absence d'examen de sa situation au regard de ces dispositions. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et de l'absence d'examen approfondi de la situation du requérant ne peuvent qu'être écartés.

4. En deuxième lieu, il résulte de l'article L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur que, sauf exceptions, la première délivrance de la carte de séjour temporaire est subordonnée à la production par l'étranger d'un visa de long séjour. Il est constant ainsi que l'a jugé le tribunal, que M. B... E... n'était pas titulaire d'un tel visa, ce qui était de nature à justifier le rejet de ses demandes de titre de séjour " travailleur temporaire " ou " étudiant ". Il ne ressort toutefois nullement des termes de l'arrêté que la préfète se serait estimée en situation de compétence liée pour lui refuser de ce seul fait la délivrance d'un titre de séjour.

5. En troisième lieu, aux termes des dispositions alors codifiées à l'article R. 311-2-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui demande la délivrance (...) d'un titre de séjour présente les documents justifiant de son état civil et de sa nationalité (...) ". Aux termes de l'article L. 111-6 de ce code : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil (...) des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. ".

6. Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger et rédigé dans les formes usitées dans le pays concerné peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.

7. Pour refuser de délivrer le titre de séjour sollicité par M. B... E..., la préfète de la Vienne a considéré que l'intéressé ne justifiait pas de son état civil et que par ailleurs il n'a pas été reconnu mineur et ne peut justifier d'un visa de long séjour.

8. Pour considérer que l'état civil de M. B... E... ne pouvait être regardé comme établi, la préfète de la Vienne s'est fondée sur le rapport de la direction générale de la police nationale-direction zonale sud-ouest qui a émis un avis défavorable sur l'authenticité de l'acte de naissance produit par l'intéressé. La préfète s'est également fondée sur le jugement du 30 octobre 2017 du tribunal pour enfants F... C... ayant refusé la demande de placement à l'ASE de l'intéressé ainsi que sur la décision du 22 juin 2018 de la cour d'appel de C... qui a relevé que l'acte de naissance comporte de façon inexplicable deux tampons de deux autorités différentes dont l'une d'une autorité judiciaire qui n'a aucune compétence en la matière, ainsi que de nombreuses fautes d'orthographe sur les caractères préimprimés du formulaire diffusé nationalement sans que l'attestation de justifications d'erreurs et l'attestation d'existence de souche produites par le requérant qui comportaient elles-mêmes des irrégularités et incohérences, n'expliquent de telles erreurs. Si M. B... se prévaut également d'une carte consulaire délivrée le 13 septembre 2017 et d'un passeport camerounais valable du 10 juillet 2019 au 10 juillet 2024, il ressort des pièces du dossier que ces derniers documents qui sont des pièces d'identité et non pas des actes d'état civil reprennent le même état civil que celui qui a été dénoncé par les décisions de justice précitées. Ces éléments étaient suffisants pour renverser la présomption d'authenticité de l'article 47 du code civil sans que la préfète ne soit tenue de saisir les autorités étrangères compétentes. Dans ces conditions, la préfète de la Gironde a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, estimer que les documents présentés par M. B... E... à l'appui de sa demande de titre de séjour n'étaient pas authentiques et ne lui permettaient pas de justifier de son identité dans des conditions prévues par les dispositions de l'article R. 311-2-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, la préfète pouvait, pour ce seul motif, refuser à l'intéressé de lui délivrer un titre de séjour.

9. En troisième lieu, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé. Ainsi, il appartient à l'étranger qui entend être admis exceptionnellement au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile de se prévaloir de cet article, ou au moins de faire valoir les " circonstances humanitaires " ou les " motifs exceptionnels " justifiant que lui soit octroyé un titre de séjour. En l'espèce ainsi qu'il a été dit au point 2, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... E... aurait fait valoir de tels motifs. Dès lors le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 et R. 313-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

10. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est porteur d'une malformation au niveau de son bras pour laquelle il bénéficie d'un accompagnement spécialisé auprès de la maison départementale des personnes handicapées et qu'en outre il souffre d'une pathologie cancéreuse rare nécessitant un suivi dans un centre spécialisé. Toutefois, il ne ressort pas des documents médicaux établis postérieurement à la décision attaquée, le 17 juillet 2020 par un médecin généraliste et le 31 décembre 2020 par le professeur du pôle de cancérologie du centre hospitalier universitaire de C..., eu égard notamment aux termes dans lesquels ils sont rédigés, que l'intéressé, qui a bénéficié d'une exérèse chirurgicale le 21 février 2020 et dont l'état de santé ne nécessite qu'un suivi, ne pourrait bénéficier d'une prise en charge appropriée dans son pays d'origine. Par ailleurs, si le certificat du 17 juillet 2020, établi par le même médecin généraliste, mentionne que M. B... E... présente un risque de décompensation psychique en cas d'expulsion du territoire français susceptible d'induire un risque de passage à l'acte suicidaire, ces éléments peu circonstanciés et évoqués en des termes seulement hypothétiques alors qu'il n'est pas soutenu ni même allégué que le requérant bénéficierait d'un suivi psychologique, ne sauraient suffire pour permettre d'estimer que l'état de santé du requérant nécessiterait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il serait dans l'impossibilité de bénéficier dans son pays d'origine de soins adaptés à son état de santé. En outre, si le requérant fait valoir son parcours scolaire et le sérieux de ses études en CAP cuisine ainsi que sa situation d'isolement dans son pays d'origine, il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard à ce qu'il vient d'être dit, que la préfète aurait commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de la décision attaquée sur la santé et la situation personnelle du requérant.

11. En dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales aux termes desquelles : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

12. Il ressort des pièces du dossier que M. B... E... n'est présent sur le territoire français que depuis mai 2017 et qu'il a tenté de bénéficier d'une prise en charge en qualité de mineur étranger isolé sur la base d'actes d'état civil dont l'authenticité a été remise en cause. Célibataire et sans enfant à charge, il ne justifie pas d'attaches familiales ou personnelles stables sur le territoire français. Il n'est pas isolé, en revanche, dans son pays d'origine, où vit notamment sa sœur. Ainsi qu'il a été dit, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ne pourrait bénéficier de soins effectifs et appropriés à son état de santé au Cameroun. Dans ces conditions et alors même que le requérant justifie du sérieux de ses études, en prenant la décision en litige, la préfète n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

13. Il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour.

14. A l'appui des moyens tirés du vice de procédure résultant de l'absence de saisine du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et de la méconnaissance du 10 ° de l'article L. 511-4 de l'article du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur, le requérant ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de droit ou de fait nouveau par rapport à son argumentation devant le tribunal. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

15. Aux termes de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi (...) ". Aux termes de l'article 3 de cette convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Enfin, aux termes de l'article 14 de la même convention : " La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ".

16. Si M. B... E... soutient que la mesure d'éloignement méconnaît les stipulations des articles 2, 3, 8 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il ne pourrait bénéficier de manière effective de soins indispensables à sa pathologie au Cameroun, comme il a été dit au point 10, les pièces du dossier ne permettent pas d'estimer que son état de santé nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni qu'il ne pourrait bénéficier d'un suivi dans son pays d'origine. En outre, ainsi qu'il a été dit au point 12, le requérant entré récemment en France, ne justifie pas d'attaches familiales ou personnelles stables sur le territoire français et n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine. Dans ces conditions, c'est donc sans méconnaitre les articles 2, 3, et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme sur le droit au respect de la vie privée et à la santé que le préfet a pu décider de son éloignement.

17. Enfin, M. B... E..., qui n'assortit d'aucune précision le moyen tiré de l'atteinte portée au principe de non-discrimination, garanti à l'article 14 de la même convention, ne met pas la cour en mesure d'en apprécier son bien-fondé.

Sur la décision fixant le pays de destination :

18. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi est privée de base légale en raison des illégalités entachant la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

19. A l'appui des moyens tirés du défaut de motivation et de la méconnaissance des dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le requérant ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de droit ou de fait nouveau par rapport à son argumentation devant le tribunal. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

20. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de C... a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 juin 2020 pris à son encontre. Par suite, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... E... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée à la préfète de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 31 août 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

M. Frédéric Faïck, président assesseur,

Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2021.

La rapporteure,

Birsen D...La présidente,

Elisabeth JayatLa greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

8

N° 21BX001314


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01314
Date de la décision : 28/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Birsen SARAC-DELEIGNE
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : DESROCHES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-09-28;21bx01314 ?
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