La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/06/2021 | FRANCE | N°19BX00878

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2eme chambre (formation a 3), 15 juin 2021, 19BX00878


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune d'Oloron Sainte-Marie, représentée par son maire M. A... P..., lequel agit également en qualité de président du conseil de surveillance de l'établissement de santé, M. G... K... et Mme H... L..., conseillers municipaux, et Mme C... F... et Mme O... N..., en qualité d'usagères de la maternité, ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 18 octobre 2017 par lequel l'Agence régionale de santé (ARS) de Nouvelle-Aquitaine a refusé de renouveler l'autorisation d'exercer l

'activité de soins de gynécologie-obstétrique dont le centre hospitalier d'Olo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune d'Oloron Sainte-Marie, représentée par son maire M. A... P..., lequel agit également en qualité de président du conseil de surveillance de l'établissement de santé, M. G... K... et Mme H... L..., conseillers municipaux, et Mme C... F... et Mme O... N..., en qualité d'usagères de la maternité, ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 18 octobre 2017 par lequel l'Agence régionale de santé (ARS) de Nouvelle-Aquitaine a refusé de renouveler l'autorisation d'exercer l'activité de soins de gynécologie-obstétrique dont le centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie était titulaire.

Par un jugement nos 1702500 et 1702503 du 20 décembre 2018, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 février 2019 et le 28 mai 2021, la commune d'Oloron Sainte-Marie, M. P..., M. K..., Mme L..., Mme F... et Mme N..., représentés par Me M..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 octobre 2017 du directeur de l'ARS de Nouvelle-Aquitaine ;

3°) d'enjoindre à l'ARS de Nouvelle-Aquitaine de procéder dans les plus brefs délais au réexamen du dossier de renouvellement de l'autorisation d'activité de gynécologie-obstétrique du centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie, sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'ARS de Nouvelle-Aquitaine une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le signataire du mémoire en défense produit par le ministre des solidarités et de la santé ne justifie pas disposer d'une délégation de signature ;

- le jugement méconnaît l'article L. 9 du code de justice administrative dès lors que les premiers juges ne se sont pas prononcés sur l'ensemble des moyens qu'ils ont soulevés devant eux ;

- il est également irrégulier dès lors que les premiers juges se sont fondés sur des éléments qui ne ressortaient pas des échanges entre les parties ;

- le jugement a été rendu en méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative dès lors qu'il ne revêt pas les signatures du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience ;

- l'arrêté du 12 décembre 2016 portant fixation pour l'année 2017 des périodes de dépôt des demandes d'autorisation et des demandes de renouvellement d'autorisation présentées au titre de l'article R. 6122-27 du code de la santé publique a été signé par une autorité incompétente dès lors qu'il n'est pas justifié de l'absence ou de l'empêchement du directeur général et de la directrice générale adjointe de l'ARS de Nouvelle-Aquitaine ; cet arrêté du 12 décembre 2016 est également illégal en tant qu'il a fixé quatre périodes pour la réception des demandes présentées au titre de l'article R. 6122-28 du code de la santé publique, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 6122-29 du même code qui limite ce nombre de périodes à trois par année civile ; l'arrêté litigieux du 18 octobre 2017 a ainsi été pris au terme d'une procédure irrégulière et est, par voie de conséquence, lui-même entaché d'une illégalité justifiant son annulation ;

- la demande de compléter son dossier de demande de renouvellement de son autorisation adressée par le directeur de l'ARS au centre hospitalier d'Oloron-Sainte-Marie le 21 décembre 2016 ne pouvait intervenir sans que le centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie procède préalablement à l'évaluation prévue par les dispositions de l'article L. 6122-5 du code de la santé publique ; l'arrêté litigieux ne fait pas état de la réalisation d'un telle évaluation et à supposer qu'il y ait été procédé, elle a été réalisée sur une période inférieure aux cinq années prévues par les dispositions de l'article R. 6122-23 du code de la santé publique ; l'arrêté litigieux a ainsi été édicté au terme d'une procédure irrégulière ; c'est à tort que le tribunal a refusé de tirer les conséquences de cette irrégularité en faisant peser sur les requérants la charge de la preuve de son incidence sur l'appréciation de l'ARS ;

- compte tenu des conséquences de l'arrêté litigieux, qui prive les parturientes proches du centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie d'un lieu pour accoucher en toute sécurité et permettant une gestion du risque optimale, le conseil de surveillance de l'établissement aurait dû être consulté pour avis ainsi que le prévoient les dispositions de l'article L. 6143-1 du code de la santé publique ; cet avis, qui n'est pas visé par l'arrêté, n'a pas été recueilli, ce qui entache l'arrêté de l'ARS d'un vice de procédure ;

- la procédure d'autorisation prévue par l'article L. 6122-1 du code de la santé publique pour la création d'un centre périnatal de proximité à Oloron Sainte-Marie ne semble pas avoir été respectée, du moins l'arrêté litigieux n'en fait pas mention ;

- la commission spécialisée de la conférence régionale de santé et de l'autonomie compétente pour le secteur sanitaire n'a donné un avis que sur la demande de renouvellement des activités de soins de gynécologie-obstétrique présentée par le centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie et non sur le transfert de cette activité au centre hospitalier de Pau et sur la création d'un centre de périnatalité de proximité, en méconnaissance des dispositions du 3ème alinéa de l'article L. 6122-8 du code de la santé publique et de l'article R. 6122-35 du code de la santé publique ;

- l'arrêté litigieux est entaché d'une erreur d'appréciation au vu de l'orientation n° 2 du plan stratégique régional de santé qui vise à " faciliter un accès équitable et pertinent aux soins et aux prises en charge médico-sociales " et du schéma régional d'organisation des soins de la région Aquitaine pour la période 2012-2016 et applicable jusqu'en 2018, qui promeut l'égalité devant la santé, implique une vigilance particulière quant à la répartition de l'offre de soins par territoire et prévoit de garantir la continuité et la permanence des soins au sein des maternités ainsi que la nécessité de rechercher des solutions pour pallier la fragilité de la démographie médicale ; la population du département des Pyrénées-Atlantiques, d'une densité de 23 habitants au kilomètre carré, connaît une moyenne annuelle de 4 000 naissances et la mortalité infantile la plus élevée de la région ; le centre hospitalier de Pau n'est accessible par la route qu'après une heure de trajet et le climat hivernal complique souvent son accessibilité ; le maintien de l'activité de soins de gynécologie-obstétrique au centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie est indispensable pour proposer une offre de prise en charge dans un délai adapté aux parturientes et prévenir une discrimination, prohibée par l'article L. 1110-3 du code de la santé publique, au détriment de la population de ce territoire isolé ; les parturientes doivent avoir la possibilité d'accoucher dans un établissement accessible à moins de 45 minutes ou 30 minutes pour les grossesses à risque ; l'arrêté méconnaît les articles L. 1110-1 et L. 1110-5 du code de la santé publique qui prévoient le droit de recevoir des soins appropriés sur l'ensemble du territoire et l'égal accès aux soins ; il méconnaît également le principe d'égalité devant les charges publiques ; l'ensemble de ces éléments doit conduire à faire jouer l'exception prévue par l'article R. 6123-50 du code de la santé publique permettant de renouveler exceptionnellement l'autorisation d'obstétrique quand bien même le nombre d'accouchements moyen annuel n'est que de 300, et le tribunal ne pouvait mettre à leur charge la preuve qu'une partie significative des parturientes était exposée à un risque ;

- l'arrêté méconnaît également l'article L. 1110-8 du code de la santé publique en ce qu'il obère le libre choix par la parturiente de son praticien et de son établissement de santé ;

- le centre hospitalier de Pau n'est pas en mesure d'accueillir les 300 accouchements annuels qui étaient en moyenne pris en charge par le centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie, et la maternité d'Orthez a fermé à la suite d'un accident d'anesthésie ;

- le bien-fondé du motif de l'arrêté litigieux selon lequel les démarches de recrutement du centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie afin de former des équipes complètes sont restées infructueuses peut être interrogé dès lors qu'il n'est justifié d'aucune candidature, que dans le même temps la fermeture de la maternité était d'ores et déjà annoncée et que les démarches de la commune qui a mandaté un cabinet de conseil pour rechercher des gynécologues et pédiatres se sont avérées fructueuses bien qu'elles se soient heurtées ensuite aux réticences de l'ARS ;

- les rumeurs diffusées pour accompagner la fermeture de la maternité du centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie, selon lesquelles y aurait été recensé un nombre anormalement élevé d'évènements indésirables graves, sont infondées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2021, le ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête.

Il indique renvoyer à ses écritures de première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le décret n° 2005-580 du 27 juillet 2005 ;

- le décret du 24 octobre 2018 portant nomination du directeur des ressources humaines au secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... J...,

- les conclusions de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Le centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie était titulaire d'une autorisation d'exercer l'activité de soins de gynécologie-obstétrique qui a été renouvelée par une décision du 20 décembre 2012 de l'ARS d'Aquitaine. Par une décision du 1er mars 2016, l'ARS a autorisé le transfert de cette activité du site de Saint-Pée vers celui de Légugnon afin de rapprocher le bloc obstétrical du plateau technique d'imagerie et du service des urgences de cet établissement de santé. Le renouvellement de l'autorisation d'exercer l'activité de soins de gynécologie-obstétrique demandé par le centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie le 28 avril 2017 a été refusé, après un avis défavorable émis à l'unanimité par la commission spécialisée de l'organisation des soins de la conférence régionale de la santé et de l'autonomie le 7 juillet 2017, par une décision du directeur général de l'ARS de Nouvelle-Aquitaine du 18 octobre 2017. La commune d'Oloron Sainte-Marie, représentée alors par son maire M. A... P..., lequel agit également en qualité de président du conseil de surveillance de l'établissement de santé, M. K... et Mme L..., conseillers municipaux, et Mme F... et Mme N..., qui se présentaient comme potentielles usagères de la maternité, relèvent appel du jugement du 20 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la recevabilité du mémoire en défense :

2. Aux termes de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement : " A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d'Etat et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : / 1° Les secrétaires généraux des ministères, les directeurs d'administration centrale, les chefs des services à compétence nationale mentionnés au premier alinéa de l'article 2 du décret du 9 mai 1997 susvisé et les chefs des services que le décret d'organisation du ministère rattache directement au ministre ou au secrétaire d'Etat ; (...) ".

3. Par un décret du 24 octobre 2018, M. E... I... a été nommé directeur des ressources humaines au secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales à compter du 26 novembre 2018 et pouvait, ainsi que le prévoient les dispositions précitées, signer au nom du ministre des solidarités et de la santé le mémoire en défense produit devant la cour. Par un arrêté du 23 juin 2020, régulièrement publié au Journal officiel de la République française du 25 juin 2020, M. I... a donné délégation à M. D..., chef du département " Contentieux et précontentieux ", pour signer notamment les mémoires présentés devant les cours administratives d'appel. Dans ces conditions, la fin de non-recevoir opposée par les requérants au mémoire en défense produit par l'administration ne peut qu'être écartée.

Sur la régularité du jugement :

4. Les requérants soutiennent que le jugement attaqué est entaché d'un défaut de motivation et qu'il se fonde sur des éléments qui ne ressortiraient pas des échanges entre les parties. Un tel moyen ne peut qu'être écarté faute pour les intéressés de préciser le ou les moyens auxquels les premiers juges, qui ne sont pas tenus de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n'auraient pas répondu et les éléments qu'ils auraient retenus ne figurant pas au dossier.

5. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Il ressort des pièces du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué est signée par le président-rapporteur, l'assesseure la plus ancienne dans l'ordre du tableau, et par le greffier d'audience. La circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifiée aux requérants ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

6. L'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l'application du premier acte ou s'il en constitue la base légale.

7. L'arrêté litigieux du 18 octobre 2017, qui n'oppose nullement une irrecevabilité du dossier, lequel a été déposé à l'intérieur des délais prévus, n'a pas été pris pour l'application de l'arrêté du 12 décembre 2016 du directeur général de l'ARS de Nouvelle-Aquitaine portant fixation pour l'année 2017 des périodes de dépôt des demandes d'autorisation et des demandes de renouvellement d'autorisation présentées au titre de l'article R. 6122-27 du code de la santé publique et cet arrêté n'en constitue pas non plus la base légale. Par suite, les requérants ne sauraient utilement exciper d'une prétendue illégalité de cet arrêté du 12 décembre 2016 au soutien de leurs conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 octobre 2017 refusant le renouvellement de l'autorisation d'exercer l'activité de soins de gynécologie-obstétrique du centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie.

8. Si les requérants soutiennent que l'arrêté du 12 décembre 2016 fixant les périodes de dépôt des demandes de renouvellement d'autorisation aurait été pris par une autorité incompétente et qu'il méconnaîtrait l'article R. 6122-28 du code de la santé publique qui limite à trois par année civile le nombre de périodes pouvant être ouvertes pour le dépôt des dossiers, un tel arrêté ne saurait être regardé comme participant de la procédure préalable à l'édiction de la décision litigieuse du 18 octobre 2017 et le moyen tiré du vice de procédure qui l'entacherait ne peut, par suite, qu'être écarté comme inopérant.

9. Aux termes de l'article L. 6122-5 du code de la santé publique, dans sa version applicable à la date de l'arrêté litigieux : " L'autorisation mentionnée à l'article L. 6122-1 est subordonnée au respect d'engagements relatifs, d'une part, aux dépenses à la charge de l'assurance maladie ou au volume d'activité et, d'autre part, à la réalisation d'une évaluation dans des conditions fixées par décret. (...) ". L'article R. 6122-23 du même code dispose, dans sa version alors applicable : " Le titulaire de l'autorisation procède, dans les conditions prévues par la présente section, à l'évaluation mentionnée à l'article L. 6122-5. / Cette évaluation a pour objet de vérifier que la mise en oeuvre de l'autorisation a permis : / -la réalisation des objectifs du schéma d'organisation des soins ; / -la réalisation des objectifs et des engagements pris dans le cadre du contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens prévu à l'article L. 6114-1 pour cette activité de soins ou cet équipement matériel lourd ; / -le cas échéant, le respect des conditions particulières imposées dans l'intérêt de la santé publique en application de l'article L. 6122-7 ou le respect des engagements mentionnés au même article. / Cette évaluation porte sur une période qui ne peut être inférieure à cinq ans. (...) ".

10. D'une part, la circonstance que l'arrêté litigieux ne vise pas l'évaluation réalisée par le centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie en application des dispositions précitées est dépourvue d'incidence sur sa légalité. D'autre part, il ressort des termes de ce dossier d'évaluation, produit par l'ARS devant le tribunal, que celui-ci porte bien, au regard des statistiques qu'il comporte, sur une période de cinq années ainsi qu'il le précise d'ailleurs à titre liminaire, quand bien même l'essentiel du rapport est consacré à faire l'état des lieux de l'existant au moment de la demande de renouvellement de l'autorisation d'exercer l'activité de soins de gynécologie-obstétrique déposée par le centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie.

11. Aux termes de l'article L. 6143-1 du code de la santé publique : " Le conseil de surveillance se prononce sur la stratégie et exerce le contrôle permanent de la gestion de l'établissement. (...) / Il donne son avis sur : / - la politique d'amélioration continue de la qualité, de la sécurité des soins et de la gestion des risques ainsi que les conditions d'accueil et de prise en charge des usagers ; (...) ".

12. Si les requérants soutiennent que le conseil de surveillance aurait dû être consulté pour avis préalablement à l'édiction de l'arrêté litigieux compte tenu de ses conséquences sur la prise en charge des populations proches du centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie, il ressort des pièces du dossier que ce conseil a été consulté sur le nouveau projet d'établissement au cours d'une séance qui s'est tenue le 10 octobre 2017, lors de laquelle ont été abordées la question du renouvellement de l'autorisation d'exercer l'activité de soins de gynécologie-obstétrique au sein de l'établissement et l'hypothèse de la création d'un centre périnatal de proximité. Par suite, le moyen manque en fait et ne peut qu'être écarté.

13. Ainsi qu'il a été justement retenu par les premiers juges, l'arrêté en cause du 18 octobre 2017 se borne à refuser au centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie le renouvellement de son autorisation d'exercer l'activité de soins de gynécologie-obstétrique, et n'a ni pour objet ni pour effet de transférer cette activité à un autre établissement ou de créer un centre périnatal de proximité. Dès lors, les moyens tirés de ce que la procédure prévue par les dispositions de l'article L. 6122-1 du code de la santé publique pour la création d'un centre périnatal de proximité à Oloron Sainte-Marie " ne semble pas " avoir été respectée, de ce que la commission spécialisée de la conférence régionale de santé et de l'autonomie compétente pour le secteur sanitaire n'aurait donné un avis que sur la demande de renouvellement des activités de soins de gynécologie-obstétrique présentée par le centre hospitalier d'Oloron Sainte Marie et non sur le transfert de cette activité au centre hospitalier de Pau et sur la création d'un centre de périnatalité de proximité en méconnaissance des dispositions du 3ème alinéa de l'article L. 6122-8 du code de la santé publique et de ce que, s'agissant d'un transfert d'autorisation relevant des dispositions de l'article R. 6122-35 du code de la santé publique, la commission spécialisée de la conférence régionale de santé et de l'autonomie aurait dû être saisie pour avis ne peuvent qu'être écartés comme inopérants.

14. Aux termes de l'article L. 1110-1 du code de la santé publique : " Le droit fondamental à la protection de la santé doit être mis en oeuvre par tous moyens disponibles au bénéfice de toute personne. Les professionnels, les établissements et réseaux de santé, les organismes d'assurance maladie ou tous autres organismes participant à la prévention et aux soins, et les autorités sanitaires contribuent, avec les usagers, à développer la prévention, garantir l'égal accès de chaque personne aux soins nécessités par son état de santé et assurer la continuité des soins et la meilleure sécurité sanitaire possible. " L'article L. 1110-3 du même code prévoit : " Aucune personne ne peut faire l'objet de discriminations dans l'accès à la prévention ou aux soins. (...) ". Aux termes de l'article L. 1110-5 du code de la santé publique : " Toute personne a, compte tenu de son état de santé et de l'urgence des interventions que celui-ci requiert, le droit de recevoir les soins les plus appropriés et de bénéficier des thérapeutiques dont l'efficacité est reconnue et qui garantissent la meilleure sécurité sanitaire au regard des connaissances médicales avérées. (...) ". L'article L. 1110-8 du même code prévoit : " Le droit du malade au libre choix de son praticien et de son établissement de santé et de son mode de prise en charge, sous forme ambulatoire ou à domicile, en particulier lorsqu'il relève de soins palliatifs au sens de l'article L. 1110-10, est un principe fondamental de la législation sanitaire. / Les limitations apportées à ce principe par les différents régimes de protection sociale ne peuvent être introduites qu'en considération des capacités techniques des établissements, de leur mode de tarification et des critères de l'autorisation à dispenser des soins remboursables aux assurés sociaux. "

15. Aux termes de l'article L. 6122-1 du code de la santé publique : " Sont soumis à l'autorisation de l'agence régionale de santé les projets relatifs à la création de tout établissement de santé, la création, la conversion et le regroupement des activités de soins, y compris sous la forme d'alternatives à l'hospitalisation ou d'hospitalisation à domicile, et l'installation des équipements matériels lourds. / La liste des activités de soins et des équipements matériels lourds soumis à autorisation est fixée par décret en Conseil d'Etat. " L'article L. 6122-2 du même code dispose, dans sa version applicable à l'arrêté en cause : " L'autorisation est accordée lorsque le projet : / 1° Répond aux besoins de santé de la population identifiés par les schémas mentionnés aux articles L. 1434-2 et L. 1434-6 ; / 2° Est compatible avec les objectifs fixés par ce schéma ; / 3° Satisfait à des conditions d'implantation et à des conditions techniques de fonctionnement. / Des autorisations dérogeant aux 1° et 2° peuvent être accordées à titre exceptionnel et dans l'intérêt de la santé publique après avis de la commission spécialisée de la conférence régionale de la santé et de l'autonomie compétente pour le secteur sanitaire. (...) ". Aux termes de l'article L. 6124-1 du même code : " Les conditions techniques de fonctionnement applicables aux établissements de santé sont fixées par décret. " Aux termes de l'article R. 6122-34 du même code, dans sa version applicable au litige : " Une décision de refus d'autorisation ou, lorsqu'il est fait application des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 6122-10, de refus de renouvellement d'autorisation ne peut être prise que pour l'un ou plusieurs des motifs suivants : (...) / 4° Lorsque le projet n'est pas conforme aux conditions d'implantation des activités de soins et des équipements matériels lourds prises en application de l'article L. 6123-1 et aux conditions techniques de fonctionnement fixées en application de l'article L. 6124-1 ; (...) ". Aux termes de l'article R. 6123-40 du même code : " Afin de contribuer à l'amélioration de la sécurité de la grossesse, de la naissance et de l'environnement périnatal de la mère et de l'enfant, les établissements de santé pratiquant l'obstétrique : / 1° Participent à la prise en charge des grossesses et à l'identification, en cours de grossesse, des facteurs de risques pour la mère et pour l'enfant, afin d'orienter la mère avant l'accouchement vers une structure adaptée ; / 2° Assurent l'accouchement et les soins de la mère et du nouveau-né, ainsi que les actes de chirurgie abdomino-pelvienne liés à la grossesse ou à l'accouchement, dans des conditions visant à réduire les risques et permettant de faire face aux conséquences de leur éventuelle survenance ; / 3° Assurent le suivi postnatal immédiat de la mère et de l'enfant dans des conditions médicales, psychologiques et sociales appropriées. " L'article R. 6123-43 du même code dispose : " L'unité d'obstétrique assure, tous les jours de l'année, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, les accouchements ainsi que les actes de chirurgie abdomino-pelvienne liés à la grossesse, à l'accouchement et à la délivrance. Elle participe également au dépistage des facteurs de risques durant la grossesse, notamment dans le cadre des consultations prénatales. Elle assure les soins suivant l'accouchement pour la mère et les enfants nouveau-nés dont la naissance est intervenue dans l'établissement. Si l'établissement dans lequel est né l'enfant ne peut assurer sa prise en charge adaptée, il organise son transfert vers un autre établissement apte à délivrer les soins appropriés ". Aux termes de l'article R. 6123-50 du code de la santé publique : " L'autorisation d'obstétrique ne peut être accordée ou renouvelée, en application des articles L. 6122-1 et L. 6122-2 que si l'établissement justifie d'une activité minimale annuelle constatée, ou prévisionnelle en cas de demande de création, de 300 accouchements. / Toutefois, elle peut exceptionnellement être accordée à titre dérogatoire lorsque l'éloignement des établissements pratiquant l'obstétrique impose des temps de trajet excessifs à une partie significative de la population. / Les établissements qui ne sont plus autorisés à pratiquer l'obstétrique peuvent continuer à exercer des activités prénatales et postnatales sous l'appellation de centre périnatal de proximité, en bénéficiant par convention du concours d'un établissement de santé pratiquant l'obstétrique. (...) ".

16. Aux termes de l'article D. 6124-44 du code de la santé publique : " Le personnel intervenant dans le secteur de naissance ne peut être inférieur, à tout instant, aux effectifs suivants : / 1° En ce qui concerne les sages-femmes : / a) Pour toute unité d'obstétrique réalisant moins de 1 000 naissances par an, une sage-femme est présente et affectée en permanence dans le secteur de naissance ; (...) / Les sages-femmes affectées au secteur de naissance ne peuvent avoir d'autres tâches concomitantes dans un autre secteur ou une autre unité. Toutefois, si l'unité d'obstétrique réalise moins de 500 naissances par an, la sage-femme peut également, en l'absence de parturiente dans le secteur de naissance, assurer les soins aux mères et aux nouveau-nés en secteur de soins et d'hébergement ; (...) / 2° En ce qui concerne les médecins : / Quel que soit le nombre de naissances constatées dans un établissement de santé, celui-ci organise la continuité obstétricale et chirurgicale des soins tous les jours de l'année, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, dans l'unité d'obstétrique. Cette continuité est assurée : / - soit par un gynécologue-obstétricien ayant la qualification chirurgicale ; / - soit, lorsque l'établissement ne peut disposer que d'un praticien ayant seulement une compétence obstétricale, à la fois par cet obstétricien et par un praticien de chirurgie générale ou viscérale de l'établissement. / a) Pour les unités réalisant moins de 1 500 naissances par an, la présence des médecins spécialistes est assurée par : / - un gynécologue-obstétricien, sur place ou en astreinte opérationnelle exclusive, tous les jours de l'année, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, pour l'unité ou les unités d'obstétrique du même site. / Le gynécologue-obstétricien intervient, sur appel, en cas de situation à risque pour la mère ou l'enfant dans des délais compatibles avec l'impératif de sécurité ; / - un anesthésiste-réanimateur, sur place ou d'astreinte opérationnelle permanente et exclusive pour le site dont le délai d'arrivée est compatible avec l'impératif de sécurité ; / - un pédiatre présent dans l'établissement de santé ou disponible tous les jours de l'année, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, dont le délai d'arrivée est compatible avec l'impératif de sécurité. / 3° En ce qui concerne les autres catégories de personnel, dans toute unité, le personnel paramédical est affecté au secteur de naissance et ne peut jamais être inférieur à une aide-soignante ou une auxiliaire de puériculture, présente en permanence. Si l'unité réalise moins de 500 naissances par an, les conditions de présence du personnel paramédical dans le secteur de naissance sont les mêmes que pour la sage-femme. "

17. Pour refuser au centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie le renouvellement de son autorisation d'exercer l'activité de soins de gynécologie-obstétrique, l'ARS de Nouvelle-Aquitaine s'est notamment fondée sur la circonstance que le personnel de cet établissement de santé était insuffisamment nombreux pour assurer la continuité des soins par des équipes complètes. Il ressort des pièces du dossier que le centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie ne dispose plus d'un pédiatre titulaire depuis l'année 2015, ce poste n'étant depuis lors pourvu que par des intérimaires, qu'aucun gynécologue obstétricien n'a pu être rattaché à cet établissement de santé depuis le 31 décembre 2017, date à compter de laquelle ont cessé les gardes obstétricales et que, faute d'équipes complètes, la continuité des soins obstétricaux et chirurgicaux a dû être interrompue durant dix-huit jours cumulés sur le total de l'année 2017. Si les requérants font valoir que le recrutement par la commune d'un cabinet de conseil en ressources humaines a permis de trouver onze médecins, pédiatres ou gynécologues-obstétriciens, qui ont postulé à un recrutement par le centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces recrutements, quand bien même ils se seraient concrétisés, auraient été de nature à permettre de constituer des équipes complètes conformément aux dispositions précitées de l'article D. 6124-44 du code de la santé publique. Par suite, le service de gynécologie-obstétrique du centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie n'étant plus en mesure d'assurer tous les jours de l'année et vingt-quatre heures sur vingt-quatre, la présence d'une équipe complète susceptible d'assurer les accouchements ainsi que les actes de chirurgie qui y sont liés et le suivi des nouveau-nés, c'est à bon droit que l'ARS de Nouvelle-Aquitaine a pu, pour ce seul motif, refuser de renouveler l'autorisation d'exercer l'activité de soins de gynécologie-obstétrique dont le centre hospitalier d'Oloron Sainte-Marie était titulaire. Par suite, alors au surplus qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une partie significative de la population serait contrainte à des temps de trajets excessifs pour rejoindre des établissements pratiquant l'obstétrique, l'arrêté en cause ne méconnaît ni les orientations du plan stratégique régional de santé, ni le schéma régional d'organisation sanitaire de la région Aquitaine ni les dispositions précitées du code de la santé publique ni, en tout état de cause, le principe d'égalité devant les charges publiques.

18. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du directeur de l'ARS de Nouvelle-Aquitaine du 18 octobre 2017. Par suite, leur requête ne peut qu'être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles à fin d'injonction et présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune d'Oloron Sainte-Marie, de M. P..., de M. K..., de Mme L..., de Mme F... et de Mme N... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Oloron Sainte-Marie, à M. A... P..., à M. G... K..., à Mme H... L..., à Mme C... F..., à Mme O... N... et au ministre des solidarités et de la santé.

Copie en sera adressée au directeur de l'Agence régionale de santé de Nouvelle-Aquitaine.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, présidente,

Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,

Mme B... J..., conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 juin 2021.

La rapporteure,

Kolia J...

La présidente,

Catherine Girault

La greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX00878


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2eme chambre (formation a 3)
Numéro d'arrêt : 19BX00878
Date de la décision : 15/06/2021
Type d'affaire : Administrative

Analyses

61-06 Santé publique. Établissements publics de santé.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Kolia GALLIER
Rapporteur public ?: Mme BEUVE-DUPUY
Avocat(s) : HERRMANN

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-06-15;19bx00878 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award