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07/04/2021 | FRANCE | N°18BX01519

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 07 avril 2021, 18BX01519


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux l'annulation du titre de perception émis le 20 février 2014 par le ministre de la défense mettant à sa charge une somme de 3 158 euros pour un trop-perçu d'indemnité de sujétions pour services à l'étranger, l'annulation de la décision du 24 mars 2016 confirmant le montant de cette créance et de la décision implicite du ministre de la défense rejetant sa réclamation présentée devant la commission des recours des militaires le 14 mai 2016 e

t, par voie de conséquence, la décharge des sommes réclamées.

Par un jugement...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux l'annulation du titre de perception émis le 20 février 2014 par le ministre de la défense mettant à sa charge une somme de 3 158 euros pour un trop-perçu d'indemnité de sujétions pour services à l'étranger, l'annulation de la décision du 24 mars 2016 confirmant le montant de cette créance et de la décision implicite du ministre de la défense rejetant sa réclamation présentée devant la commission des recours des militaires le 14 mai 2016 et, par voie de conséquence, la décharge des sommes réclamées.

Par un jugement n° 1604080 du 26 février 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 avril 2018, M. E..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler le titre de perception émis le 20 février 2014 par le ministre de la défense mettant à sa charge une somme de 3 158 euros pour un trop-perçu d'indemnité de sujétions pour services à l'étranger ;

3°) d'annuler la décision du 24 mars 2016 par laquelle le ministre de la défense lui a confirmé son obligation de rembourser un trop-perçu de 3 158 euros, et la décision implicite de rejet née le 14 mai 2016 du silence gardé sur son recours devant la commission des recours des militaires ;

4°) de le décharger de l'obligation de payer la somme de 3 158 euros ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la créance de l'Etat est prescrite en application de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000, dès lors que la décision du 24 mars 2016 par laquelle l'administration lui a fourni des explications sur le bien-fondé de sa créance, à la suite de sa demande en date du 14 avril 2014, est intervenue plus de deux ans après le dernier acte interruptif de prescription, constitué par le titre exécutoire du 20 février 2014 ;

- la créance n'est pas fondée dès lors que l'administration n'établit pas la réalité du trop-perçu au titre de l'indemnité de sujétions pour services à l'étranger, dont la charge de la preuve lui incombe, dont elle a effectué la répétition ; le trop-perçu réclamé résulterait d'une erreur de l'administration qui la justifie par le dysfonctionnement du logiciel " Louvois ", sans autre précision ;

- il établit, par les bulletins de solde produits, qu'il n'a perçu que la somme de 6 495,61 euros au titre des opérations extérieures effectuées du 15 février 2012 au 13 juin 2012, et non pas, comme l'affirme l'administration, la somme de 11 663,72 euros ;

- le courrier du 24 mars 2016 ne lui permettait pas de vérifier utilement le bien-fondé de la somme qui lui a été réclamée de sorte que les décisions contestées doivent être annulées ;

- il doit être déchargé de la somme de 3 158 euros mise à sa charge.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 octobre 2019, le ministre des armées conclut au rejet de la requête de M. E....

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés.

Par courrier du 2 mars 2021, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions tendant, d'une part, à l'annulation du titre de perception émis le 20 février 2014, de la décision du 24 mars 2016 du directeur du service du commissariat des armées rejetant la réclamation formée par M. E... contre ce titre et de la décision implicite du ministre de la défense rejetant implicitement son recours formé le 14 mai 2016 et, d'autre part, à la décharge de la somme de 3 158 euros, faute d'avoir été précédées de la réclamation prévue par les dispositions de l'article 118 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de la défense ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le décret n° 97-901 du 1er octobre 1997 ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... A...,

- et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. E... a servi sous contrat comme engagé volontaire dans l'armée de terre à compter du 5 avril 2005, jusqu'à sa radiation des contrôles le 5 avril 2013. Le 10 décembre 2013, le commandant du centre expert des ressources humaines et de la solde de Nancy l'a informé de son intention de recouvrer une somme de 3 157,87 euros, correspondant à des trop-versés d'indemnité de sujétions pour services à l'étranger, en émettant un titre de perception à son encontre. Le ministre de la défense a émis, le 20 février 2014, un titre de perception afin de recouvrer un trop perçu d'indemnité de sujétions pour services à l'étranger concernant la période du 1er octobre 2011 au 31 mai 2012. M. E... a demandé des explications sur ce titre de perception par lettre du 14 avril 2014 envoyée au service exécutant de la solde unique du ministère de la défense qui lui en a accusé réception par lettre du 30 avril 2014. Le 24 mars 2016, le directeur de ce service lui a adressé un courrier lui apportant les précisions demandées, confirmant qu'il restait redevable de la somme de 3 158 euros. M. E... a alors introduit un recours administratif préalable devant la commission des recours des militaires le 14 mai 2016. M. E... relève appel du jugement du 26 février 2018 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de perception émis le 20 février 2014 par le ministre de la défense mettant à sa charge la somme de 3 158 euros euros pour un trop-perçu d'indemnité de sujétions pour services à l'étranger, l'annulation de la décision du 24 mars 2016 confirmant le montant de cette créance, ainsi que d'une décision implicite du ministre de la défense rejetant sa réclamation du 18 mai 2016 et tendant, par voie de conséquence, à la décharge de la somme réclamée.

Sur les conclusions aux fins d'annulation et de décharge :

2. D'une part, aux termes de l'article R. 4125-1 du code de la défense : " I. Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédée d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux. / Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense (...) / III. Les dispositions de la présente section ne sont pas applicables aux recours contentieux formés à l'encontre d'actes ou de décisions : / (...) 2° (...) qui relèvent de la procédure organisée par les articles 112 à 124 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 117 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, qui, comme les articles reproduits ci-dessous, figure dans le titre II relatif à la gestion budgétaire et comptable de l'Etat : " Les titres de perception émis en application de l'article L. 252 A du livre des procédures fiscales peuvent faire l'objet de la part des redevables: / 1° Soit d'une opposition à l'exécution en cas de contestation de l'existence de la créance, de son montant ou de son exigibilité ; / 2° Soit d'une opposition à poursuites en cas de contestation de la régularité de la forme d'un acte de poursuite. / L'opposition à l'exécution et l'opposition à poursuites ont pour effet de suspendre le recouvrement de la créance ". Aux termes de l'article 118 du même décret : " Avant de saisir la juridiction compétente, le redevable doit adresser une réclamation appuyée de toutes justifications utiles au comptable chargé du recouvrement de l'ordre de recouvrer. L'autorité compétente délivre un reçu de la réclamation, précisant la date de réception de cette réclamation (...). Elle statue dans un délai de six mois dans le cas prévu au 1° et dans un délai de deux mois dans le cas prévu au 2°. À défaut d'une décision notifiée dans ces délais, la réclamation est considérée comme rejetée. ". Enfin l'article 119 dudit décret dispose que : " Le débiteur peut saisir la juridiction compétente dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de la décision prise sur sa réclamation ou, à défaut de cette notification, dans un délai de deux mois à compter de la date d'expiration des délais prévus à l'article 118. ".

4. Enfin, aux termes de l'article 20 la loi du 12 avril 2000 susvisée : " Lorsqu'une demande est adressée à une autorité administrative incompétente, cette dernière la transmet à l'autorité administrative compétente et en avise l'intéressé (...) ". L'article 18 de la même loi précise que les dispositions de l'article 20 " (...) ne s'appliquent pas aux relations entre les autorités administratives et leurs agents ".

5. Il résulte de ces dispositions qu'en cas de notification au militaire d'un titre de perception, l'opposition à ce titre, émis en application des dispositions de l'article 117 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, doit être précédée, conformément aux dispositions du 2° du III de l'article R. 4125-1 du code de la défense, d'une réclamation au comptable chargé du recouvrement de l'ordre de recouvrer, et non d'un recours devant la commission des recours des militaires.

6. Le titre de perception émis le 20 février 2014 mentionne expressément les voies et délais de recours ouverts à son encontre et comporte également la référence aux articles 117 et 118 précités du décret du 7 novembre 2012 en ce qui concerne l'obligation de présenter une réclamation préalable devant l'agent comptable dans le délai de deux mois qui suit la notification du titre. Si M. E... se prévaut de la lettre adressée au ministre de la défense le 14 avril 2014, dans laquelle il sollicite des explications sur le montant des sommes réclamées, ce courrier ne saurait être regardé comme la réclamation préalable obligatoire prévue par les dispositions citées dès lors qu'il n'a pas été adressé au comptable chargé du recouvrement et que son destinataire, les services du ministère de la défense, n'était pas tenu de la transmettre à l'autorité compétente, les dispositions précitées de l'article 20 de la loi du 12 avril 2000 n'étant pas applicable à un litige intéressant les relations entre les administrations et leurs agents à l'instar du présent litige, relatif à un trop-perçu de rémunération versé à M. E... en tant que militaire et alors même que l'intéressé avait perdu cette qualité lors de la présentation de son recours gracieux. Faute d'avoir été précédée de la réclamation prévue par les dispositions de l'article 118 du décret précité, la demande de première instance était irrecevable en tant qu'elle est dirigée contre le titre de perception émis le 20 février 2014. Par voie de conséquence, M. E... n'est pas recevable à demander l'annulation de la décision expresse du 24 mars 2016 du directeur du service du commissariat des armées exécutant de la solde unique rejetant sa réclamation formée contre ce titre, de la décision implicite du ministre de la défense rejetant son recours formé le 18 mai 2016, ni par suite à être déchargé de l'obligation de payer la somme de 3 158 euros.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur les frais d'instance :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante, la somme que demande M. E... au titre de ses frais d'instance.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E... et au ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2021, à laquelle siégeaient :

M. Didier Artus, président,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,

Mme B... A..., première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 avril 2021.

Le président,

Didier ARTUS

La République mande et ordonne au ministre des armées et au directeur départemental des finances publiques des Pyrénées-Atlantiques en ce qui les concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 18BX01519


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX01519
Date de la décision : 07/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Introduction de l'instance - Liaison de l'instance - Recours administratif préalable.

Procédure - Pouvoirs et devoirs du juge - Questions générales - Moyens - Exception d'illégalité - Irrecevabilité.


Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: Mme Agnès BOURJOL
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : CABINET ALQUIE

Origine de la décision
Date de l'import : 13/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-04-07;18bx01519 ?
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