Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler la décision du 5 mars 2019 par laquelle le conseil départemental de la Corrèze l'a placée en congé de maladie ordinaire du 17 novembre 2018 au 4 mars 2019.
Par une ordonnance n° 1900745 du 30 septembre 2019, le président du tribunal administratif de Limoges a pris acte du désistement Mme D... de sa requête.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 octobre 2019, Mme D..., représentée par Mme E..., demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1900745 du 30 septembre 2019 du président du tribunal administratif de Limoges ;
2°) d'annuler la décision du président du conseil départemental de la Corrèze du
5 mars 2019 la plaçant en congé de maladie ordinaire du 17 novembre 2018 au 4 mars 2019 ;
3°) d'enjoindre au président du conseil départemental de la Corrèze de la placer, pour cette période, en congé imputable au service ;
4°) d'enjoindre à cette même autorité de lui proposer un emploi correspondant à son grade, le cas échéant en surnombre, sur un poste adapté, et ce, dans un délai de 15 jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge du conseil départemental de la Corrèze la somme de
2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'ordonnance attaquée est irrégulière, dès lors que sa requête en référé portait, non sur la décision du 5 mars 2019, mais sur celle du 28 février 2019, par laquelle le président du conseil départemental de la Corrèze l'avait placée en congé de maladie ordinaire à compter du 17 novembre 2018 ; par suite, le président du tribunal administratif de Limoges ne pouvait prendre acte de son désistement pour n'avoir pas fait appel d'une ordonnance de référé concernant une autre décision que celle en litige dans la présente instance ;
- la décision du 5 mars 2019 méconnaît les dispositions de la loi du 13 juillet 1983 et du décret du 14 mars 1986 ; elle devait en effet conserver l'intégralité de son traitement, ainsi que le droit au remboursement de ses frais médicaux, jusqu'à ce qu'elle soit en état de reprendre son service sur un poste adapté ou jusqu'à sa mise à la retraite.
Par une ordonnance du 2 novembre 2020 la clôture de l'instruction a été fixée au 8 décembre 2020.
Un mémoire enregistré le 21 janvier 2021 a été présenté pour le département de la Corrèze.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme F...,
- et les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... D..., adjointe administrative territoriale employée par le département de la Corrèze depuis 2011, a été placée en congé de maladie à compter du
11 janvier 2017. L'imputabilité au service de l'arrêt de travail a été reconnue. Cependant, par une décision du 28 février 2019, le président du conseil départemental de la Corrèze a décidé de la placer en congé maladie ordinaire à compter du 17 novembre 2018. Par une nouvelle décision en date du 5 mars 2019, la même autorité a décidé de la placer en congé de maladie ordinaire du 17 novembre 2018 au 4 mars 2019. Mme D... a, le 29 avril 2019, formé deux recours devant le tribunal administratif de Limoges, aux fins d'annulation de la décision du 28 février 2019 et de la décision du 5 mars 2019, par lesquelles le président du conseil départemental de la Corrèze l'a placée en congé maladie ordinaire à compter du 17 novembre 2018, puis du 17 novembre 2018 au 4 mars 2019. Le 27 juin 2019, elle a introduit une requête auprès du juges des référés, aux fins de suspension de l'exécution de la décision du 28 février 2019. Cette requête a été rejetée par une ordonnance n° 1901162 du juge des référés du 22 juillet 2019. Par une ordonnance n° 1900745 du 30 septembre 2019, le président du même tribunal a considéré qu'elle s'était désistée de son recours formé à l'encontre de la décision du 5 mars 2019. Par une ordonnance n° 1900744 du 2 décembre 2019, le même président a considéré qu'elle s'était désistée de son recours formé à l'encontre de la décision du 28 février 2019, Mme D... interjette appel de l'ordonnance du 30 septembre 2019.
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
2. D'une part, aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
" Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ces effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". Aux termes du second alinéa de l'article R. 522-1 du code de justice administrative : " À peine d'irrecevabilité, les conclusions tendant à la suspension d'une décision administrative ou de certains de ses effets doivent être présentées par requête distincte de la requête à fin d'annulation ou de réformation et accompagnées d'une copie de cette dernière ".
3. D'autre part, aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative :
" Les présidents de tribunal administratif (...) peuvent, par ordonnance : 1° Donner acte des désistements (...) ". Aux termes de l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative : " En cas de rejet d'une demande de suspension présentée sur le fondement de l'article L. 521-1 au motif qu'il n'est pas fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision, il appartient au requérant, sauf lorsqu'un pourvoi en cassation est exercé contre l'ordonnance rendue par le juge des référés, de confirmer le maintien de sa requête à fin d'annulation ou de réformation dans un délai d'un mois à compter de la notification de ce rejet. A défaut, le requérant est réputé s'être désisté. / Dans le cas prévu au premier alinéa, la notification de l'ordonnance de rejet mentionne qu'à défaut de confirmation du maintien de sa requête dans le délai d'un mois, le requérant est réputé s'être désisté. "
4. Pour regarder Mme D... comme s'étant désistée de son recours en annulation à l'encontre de la décision du 5 mars 2019, le président du tribunal administratif de Limoges a considéré qu'en dépit de la notification de l'ordonnance du juge des référés n° 1901162 du
22 juillet 2019, qui lui a été adressée en application des dispositions précitées de l'article
R. 612-5-2 du code de justice administrative, et dont elle a accusé réception le 25 juillet 2019, l'intéressée n'avait pas confirmé expressément le maintien de ses conclusions à fin d'annulation dans le délai d'un mois et que, par suite, elle devait être réputée s'être désistée de l'ensemble des conclusions de son recours.
5. Mme D... fait appel de cette ordonnance, en faisant valoir qu'elle est entachée d'irrégularité, dès lors que son recours en référé portait sur la décision du président du conseil départemental du 28 février 2019, alors que son recours au fond portait sur la décision du même président du 5 mars 2019.
6. Il ressort en effet des pièces du dossier que Mme D... a saisi le tribunal administratif de Limoges de deux recours contentieux aux fins d'obtenir l'annulation pour excès de pouvoir de deux décisions du président du conseil départemental de la Corrèze, celle du 28 février 2019 et celle du 5 mars 2019, décisions ayant un objet analogue, à savoir son placement en congé de maladie ordinaire à compter du 17 novembre 2018. Elle a également déposé une requête en référé, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, tendant à la suspension de l'exécution de la seule décision du 28 février 2019. Le juge des référés ayant, par une ordonnance n° 1901162 du 22 juillet 2019, rejeté sa demande, motif pris de ce qu'aucun des moyens soulevés par Mme D... ne paraissait, en l'état de l'instruction, de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée, l'intéressée a été rendue destinataire d'une lettre datée du 23 juillet 2019, qu'elle a réceptionnée le 25 juillet, l'informant de ce rejet et l'invitant, sur le fondement des dispositions précitées de l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative, à maintenir sa requête au fond contre la décision du 5 mars 2019 dans un délai d'un mois à compter de la notification de ce courrier, à défaut de quoi elle serait être réputée s'en être désistée. Ce faisant, le greffe du tribunal a ainsi commis une erreur matérielle, en faisant référence à l'instance au fond portant, non sur la décision du 28 février, objet de la requête en référé, mais sur celle du 5 mars, contre laquelle Mme D... n'avait pas introduit de demande de référé-suspension.
7. Or, une erreur matérielle ou une simple ambiguïté dans l'indication des voies et délais de recours, de nature à induire le requérant en erreur, est susceptible de faire obstacle à son droit à l'exercice d'un recours effectif. En l'espèce, la lettre de notification du
23 juillet 2019 comportait une ambiguïté incontestable, résultant de la mauvaise référence à l'une des procédures en cours. Par suite, c'est à juste titre que Mme D... soutient que le premier juge ne pouvait faire application des dispositions de l'article R. 612-5-2 du CJA dans l'instance portant sur la décision du 5 mars 2019.
8. Dans ces conditions, et compte-tenu des circonstances de l'espèce, il y a lieu d'annuler l'ordonnance attaquée comme entachée d'irrégularité et de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Limoges afin que Mme D... puisse bénéficier d'un double degré de juridiction.
Sur les frais de l'instance :
9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de Mme D... présentées sur ce fondement.
DECIDE :
Article 1er : L'ordonnance n° 1900745 du 30 septembre 2019 du président du tribunal administratif de Limoges est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Limoges.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme D... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au président du tribunal administratif de Limoges, à Mme B... D... et au conseil départemental de la Corrèze.
Délibéré après l'audience du 25 janvier 2021 à laquelle siégeaient :
M. Dominique Naves, président,
Mme C... A..., présidente-assesseure,
Mme F..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er mars 2021.
Le rapporteur,
F...
Le président,
Dominique Naves
Le greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au préfet de la Corrèze, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 19BX04054