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25/02/2021 | FRANCE | N°20BX02248

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 25 février 2021, 20BX02248


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 15 février 2020 par lequel la préfète de la Charente l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le revenir sur le territoire français pour une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2000671 du 23 juin 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 juillet 2020, e

t un mémoire, enregistré le 20 janvier 2021, M. C..., représenté par Me B..., demande à la cour :...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 15 février 2020 par lequel la préfète de la Charente l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le revenir sur le territoire français pour une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2000671 du 23 juin 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 juillet 2020, et un mémoire, enregistré le 20 janvier 2021, M. C..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 23 juin 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 15 février 2020 par lequel la préfète de la Charente l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit de revenir sur le territoire français pour une durée de trois ans ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros à verser à son conseil, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le signataire de l'arrêté litigieux ne disposait pas d'une délégation de signature et que cet arrêté est insuffisamment motivé ;

- cet arrêté a méconnu les dispositions de l'article L. 511-1 et du 10° de l'article L 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cet arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 08 octobre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. D....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant géorgien né le 11 septembre 1984, déclare être entré en France le 30 novembre 2016, en provenance d'Espagne, pays où il était rentré sous couvert d'un visa Schengen délivré par les autorités néerlandaises et valide du 10 novembre 2016 au 25 décembre 2016. Sa demande d'asile a été définitivement rejetée par un arrêt de la Cour nationale du droit d'asile du 18 janvier 2018. Par un arrêté du 10 juillet 2018, le préfet des Deux-Sèvres a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de 30 jours. Après le rejet du recours juridictionnel qu'il a formé contre cet arrêté, il a été éloigné du territoire le 27 décembre 2018. Le 15 février 2020, M. C... a été entendu par des gendarmes après sa mise en cause en qualité d'auteur pour des faits de vols à l'étalage. Par un arrêté du même jour, la préfète de la Charente lui a fait obligation de quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit de revenir en France pendant une durée de trois ans. M. C... relève appel du jugement du 23 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, par un arrêté du 9 janvier 2020, publié au recueil des actes administratifs du département, la préfète de la Charente a donné délégation à Mme Delphine Balsa, secrétaire générale de la préfecture, pour signer notamment les décisions portant obligation de quitter le territoire et fixation du pays de destination. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté litigieux doit être écarté.

3. En deuxième lieu, cet arrêté comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. En outre, les arguments invoqués par M. C... à l'appui du moyen tiré de l'insuffisante motivation de cet arrêté ont trait à son bien-fondé et non à sa motivation.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ".

5. M. C... soutient que son état de santé nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait avoir des conséquences d'une extrême gravité et qui n'est pas disponible dans son pays d'origine. À l'appui de cette allégation, il produit deux attestations établies par un praticien hospitalier les 17 février et 9 juin 2020 dont il ressort qu'il souffre d'une hépatite B bien contrôlée par un traitement, dont il n'est pas soutenu qu'il ne serait pas disponible en Géorgie, et d'une hépatite C " en échappement thérapeutique " pour laquelle il devait bénéficier d'un traitement antiviral dont les spécifications ne sont pas précisées et qui n'avait toujours pas débuté le 9 juin 2020. En outre, si l'appelant entend se prévaloir, en cause d'appel, de deux nouvelles attestations médicales établies les 19 octobre 2020 et 11 janvier 2021, il ressort uniquement de la première de ces attestations que l'hépatite C dont il est atteint est dorénavant traitée par interféron et que l'administration de ce traitement requiert " une stabilité émotionnelle relationnelle " compte tenu de ses effets secondaires et de la seconde, établie près d'un an après l'arrêté litigieux, que le traitement de l'hépatite B ne serait dorénavant pas disponible en Géorgie. Au vu de ces seuls éléments, l'appelant ne peut être regardé comme établissant ni que son état de santé nécessitait, à la date de cette arrêté, une prise en charge dont le défaut pourrait avoir des conséquences d'une extrême gravité ni, de surcroît, que cette prise en charge n'était pas disponible dans son pays d'origine. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué aurait, pour ce seul motif, méconnu les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et qu'il serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle.

6. En quatrième et dernier lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III (...) [est décidée] par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".

7. Pour prendre la décision attaquée, la préfète a relevé que M. C... avait fait l'objet d'une mesure d'éloignement contraint le 27 décembre 2018 et qu'il était à nouveau rentré irrégulièrement sur le territoire en février 2019, selon ses propres déclarations. De plus, il ne dispose pas d'une résidence effective et permanente et n'offre donc pas de garanties de représentation suffisantes. En outre, il a fait l'objet de neuf mises en cause et d'une interpellation pour des faits de vols entre septembre 2017 et décembre 2019, outre une condamnation, pour les mêmes faits, à une peine de deux mois d'emprisonnement par le tribunal correctionnel de Limoges le 15 novembre 2018. Enfin, il résulte de ce qui a été dit précédemment que l'appelant ne peut pas se prévaloir de circonstances humanitaires à raison de son état de santé. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant interdiction de revenir sur le territoire national pendant une durée de trois ans serait entachée d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions précitées du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que ce soit dans son principe ou dans sa durée.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 février 2020 par lequel la préfète de la Charente lui a fait obligation de quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit de revenir sur le territoire français pendant une durée de trois ans. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de la Charente.

Délibéré après l'audience du 28 janvier 2021 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme E..., présidente-assesseure,

M. Manuel D..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 février 2021.

Le président de chambre,

Éric Rey-Bèthbéder

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 20BX02248 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 20BX02248
Date de la décision : 25/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : BONNEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-02-25;20bx02248 ?
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