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25/02/2021 | FRANCE | N°18BX02919

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 25 février 2021, 18BX02919


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Agence du Bâtiment (ADB), la société à responsabilité limitée Société de travaux publics et privés (STPP) et la société à responsabilité limitée Société caribéenne de revêtement d'étanchéité (SOCARE) ont demandé au tribunal administratif de la Martinique, d'une part, que soit constatée la prolongation du délai d'exécution du marché au 20 mars 2012, de prononcer la réception judiciaire des travaux ainsi que la résiliation aux torts exclusifs du cen

tre hospitalier universitaire (CHU) de Martinique à cette même date, d'autre part, la condamnat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Agence du Bâtiment (ADB), la société à responsabilité limitée Société de travaux publics et privés (STPP) et la société à responsabilité limitée Société caribéenne de revêtement d'étanchéité (SOCARE) ont demandé au tribunal administratif de la Martinique, d'une part, que soit constatée la prolongation du délai d'exécution du marché au 20 mars 2012, de prononcer la réception judiciaire des travaux ainsi que la résiliation aux torts exclusifs du centre hospitalier universitaire (CHU) de Martinique à cette même date, d'autre part, la condamnation du CHU à payer à la société ADB la somme de 17 440,55 euros HT, à la STPP, la somme de 130 699,09 euros HT et à la société SOCARE la somme de 5 958,84 euros HT, majorées des intérêts moratoires au titre du solde dû au titre du marché établi provisoirement dans le projet de décompte final et, enfin, d'enjoindre au CHU précité de communiquer l'analyse des réclamations faites par le maître d'oeuvre et de le condamner à l'indemnisation des préjudices subis correspondant aux sommes figurant dans les réclamations des entreprises accompagnant le projet de décompte final, soit 1 204 172,62 euros HT pour l'ADB, 270 699,37 euros HT pour la STPP et 35 648,85 euros HT pour SOCARE, après application de la révision de prix prévue par le marché, majorées des intérêts moratoires courant à compter du 6 octobre 2015, ainsi qu'aux intérêts complémentaires majorés et à la capitalisation.

Par un jugement n° 1600326 du 17 mai 2018, le tribunal administratif de la Martinique a condamné le CHU de Martinique à payer à la société Agence du Bâtiment la somme de 86 238,50 euros, majorée des intérêts de retard courant à compter du 6 octobre 2015, capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts à compter du 27 mai 2016, et à chaque échéance annuelle à compter de cette date et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 juillet 2018, la société Agence du Bâtiment, la société de travaux publics et privés (STPP) et la société caribéenne de revêtement d'étanchéité (SOCARE), représentées par Me D..., demandent à la cour :

1°) d'annuler l'article 3 du jugement du 17 mai 2018 en ce qu'il a rejeté totalement ou partiellement leurs autres conclusions ;

2°) d'enjoindre au centre hospitalier universitaire (CHU) de Martinique de communiquer l'analyse du projet de décompte final des réclamations faite par le maître d'oeuvre courant octobre 2015 ;

3°) de prononcer la réception judiciaire des travaux exécutés à la date du 20 mars 2012 et la résiliation judiciaire du marché à la même date, aux torts exclusifs du CHU de Martinique ;

4°) de condamner le CHU de Martinique à payer à l'Agence du Bâtiment au titre de l'indemnisation de la résiliation la somme de 150 787 euros HT ;

5°) de condamner le CHU de Martinique à payer aux trois sociétés membres du groupement les soldes dus au titre du marché ;

6°) de condamner le CHU de Martinique à l'indemnisation intégrale des préjudices subis ;

7°) de condamner le CHU de Martinique aux versements des intérêts moratoires sur l'ensemble des sommes et indemnités accordées à compter du 6 octobre 2015, outre les intérêts complémentaires majorés et capitalisation jusqu'au paiement ;

8°) de mettre à la charge du CHU de Martinique la somme de 10 000 euros à verser à la société Agence du bâtiment, la somme de 3 000 euros à verser à la STPP et la somme de 1 000 euros à verser à la société SOCARE au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- le tribunal a considéré à tort que la réception des travaux ne peut intervenir que lorsque la totalité des travaux est achevée ; en l'espèce, le maître d'ouvrage est fautif de n'avoir jamais répondu aux sollicitations d'ADB et d'avoir de ce fait bloqué toute procédure de réception des travaux ; la réception judiciaire des travaux exécutés doit être fixée au 20 mars 2012 correspondant à la date à laquelle l'achèvement des ultimes prestations a été effectué ; les travaux exécutés dont il est demandé la réception judicaire ont fait l'objet de constats d'achèvement du maître d'oeuvre pour chaque zone (le 11 mars 2011 pour les magasins, le 18 juillet 2011 pour la zone C - USI, le 12 août 2011 pour le pôle déchets, le 30 septembre 2011 pour les passerelles - Ascenseurs, le 28 novembre 2011 pour la zone Urgences - A et B, le 17 février 2012 pour la zone Accueil Urgences - Phase 2) et de constats d'huissiers pour certains travaux ou certaines zones ;

- la résiliation judiciaire du marché au sens de l'article 48-2 du CCAG-Travaux doit être prononcée au 20 mars 2012 ; le CHU a ajourné les travaux en ne répondant pas aux divers courriers qu'elles avaient adressés ; le tribunal administratif a commis une erreur d'appréciation en se fondant sur l'ordre de service n° 25 pour leur refuser le bénéfice de l'article 48.2 du CCAG-Travaux puisqu'il ne portait que sur certaines zones et certaines prestations ;

- l'abandon du chantier, par le CHU, depuis le mois de mars 2012 justifie leur droit à résiliation du marché sur le fondement de l'article 48.2 du CCAG-Travaux;

- le solde des travaux impayés s'élève aux sommes de 6 485,71 euros HT pour l'ADB, 110 131,83 euros HT pour STPP et 4 891,85 euros HT pour SOCARE ;

- la révision de prix contractuelle reste impayée à hauteur des sommes de 1 443,66 euros HT pour l'ADB, 20 657,26 euros HT pour STPP et 1 066,99 euros HT pour SOCARE ;

- les intérêts moratoires sur les acomptes mensuels payés en retard à l'ADB au 31 août 2015 arrêtés par le projet de décompte final à 29 909,14 euros, sur lesquels le tribunal ne s'est pas prononcé, doivent être versés ; ces intérêts auraient dû être réglés dans le cadre de l'exécution du décompte général, lequel n'est jamais intervenu ;

- le CHU doit verser à la société ADB une somme de 7 955,23 euros HT au titre d'un trop-perçu de remboursement de l'avance de démarrage ;

- le montant des travaux supplémentaires réalisés sur ordre du CHU sur lequel le tribunal ne s'est pas prononcé, est de 74 802,75 euros HT ;

- un certain nombre de travaux modificatifs n'ont pas été acceptés à hauteur des prix chiffrés dans les devis ; le paiement à ADB du différentiel total sur lequel le tribunal ne s'est pas prononcé, s'élève à 11 695,96 euros HT ;

- les conséquences de l'application abusive de pénalités de retard justifient le paiement à ADB d'une somme de 23 072,08 euros représentant les frais de l'augmentation de sa ligne de découvert ainsi qu'il est justifié par les relevés OSEO ;

- l'allongement de la durée du chantier justifie l'indemnisation des trois entreprises membres du groupement dès lors que les retards dans l'exécution des travaux sont exclusivement imputables aux fautes du CHU dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction ; le délai à retenir subi par les entreprises (sans faute retenue à leur encontre) est de 42 mois (168 semaines) ou, si on exclut l'allongement de délai strictement lié aux découvertes de réseaux enterrés, comme étant de la responsabilité des entreprises en vertu du CCAP, de 40,5 mois (162 semaines) ;

- les sommes dues à ce titre s'élèvent à 1 204 172,62 euros pour l'ADB, 270 699,37 euros pour la STPP et 35 648,85 euros pour la société SOCARE.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juin 2019, le centre hospitalier universitaire de Martinique, représenté par Me A... B..., demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête de la société Agence du Bâtiment, de la société de travaux publics et privés et de la société caribéenne de revêtement d'étanchéité ;

2°) à titre subsidiaire, de rejeter les demandes de réception judiciaire et de résiliation à la date du 20 mars 2012, ainsi que les demandes des sociétés appelantes au titre des soldes du marché et des travaux supplémentaires ;

3°) s'agissant des réclamations financières, à titre principal, de constater que le retard subi par le marché signé le 17 juillet 2006 est essentiellement imputable aux entreprises appelantes et de rejeter leurs demandes indemnitaires, et à titre subsidiaire, de limiter la responsabilité du CHU à un retard de 46 semaines et à l'indemnisation du préjudice de l'ADB à une somme de 86 268,50 euros et, enfin de rejeter les demandes indemnitaires des sociétés STTP et SOCARE ;

4°) de mettre à la charge de la société Agence du bâtiment, de la société de travaux publics et privés et de la société caribéenne de revêtement d'étanchéité, solidairement, la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- certaines demandes indemnitaires sont irrecevables faute de figurer dans le mémoire de réclamation des entreprises requérantes ;

- les moyens soulevés par la société Agence du Bâtiment, la société de travaux publics et privés et la société caribéenne de revêtement d'étanchéité ne sont pas fondés.

La société Agence du Bâtiment, la société de travaux publics et privés (STPP) et la société caribéenne de revêtement d'étanchéité (SOCARE), ont produit une note en délibéré enregistrée le 2 février 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

-le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E... F...,

- les conclusions de Mme Aurélie Chauvin, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., représentant l'Agence du Bâtiment, la société de travaux publics et privés et la société caribéenne de revêtement d'étanchéité, et de Me C..., substituant Me A... B..., représentant le centre hospitalier universitaire de Martinique.

Considérant ce qui suit :

1. Par acte d'engagement du 10 avril 2006, le centre hospitalier Louis Doumergue de la Trinité, aujourd'hui centre hospitalier universitaire (CHU) de Martinique à la suite de la fusion de cet établissement avec les centres hospitaliers de Fort-de-France et du Lamentin, a confié l'exécution des travaux de restructuration des services urgence, bloc opératoire, stérilisation et morgue au groupement constitué de la société Agence du bâtiment (ADB), mandataire, de la Société des travaux publics et privés (STPP) et de la Société caribéenne de revêtement d'étanchéité (SOCARE), et des sociétés Somag, EEM et Otis. La SODEM est intervenue comme mandataire du maître d'ouvrage et la maîtrise d'oeuvre a été confiée au cabinet CETE Ingénierie. L'article 6 de l'acte d'engagement ainsi que l'article 4.2.2 du CCAP fixaient le délai global d'exécution des travaux à 22 mois, avec une période de préparation de 3 mois. Par ordre de service n° 3 du 11 octobre 2006, le démarrage de l'ensemble des travaux du marché a été fixé au 16 octobre 2006. Par un avenant n° 2 en date du 18 février 2011, les parties au marché, prenant acte des différents événements ayant affecté le déroulement du chantier, dont notamment la découverte d'ouvrages enterrés au cours de l'année 2007, le séisme ayant touché la Martinique en novembre 2007 et la découverte d'ouvrages amiantés au cours de l'année 2010, ont prolongé le délai d'exécution jusqu'au 30 juin 2011 au lieu du 16 août 2008. Par ordre de service n° 148, le délai d'exécution des travaux du groupement d'entreprises a été prolongé jusqu'au 29 février 2012 pour tenir compte des travaux prescrits par ordre de service n° 147 en date du 4 janvier 2012 modifiant la prestation prévue au marché relative à la pose de garde-corps au droit de l'aire de retournement et du pôle déchets. Aucune décision de réception de travaux n'a été prise. Par courriers du 17 juin 2013 et du 25 avril 2014, restés sans réponse, le mandataire du groupement a sollicité la résiliation du marché pour faute. Le 16 septembre 2015, le mandataire a adressé au maître d'ouvrage un projet de décompte final du groupement, accompagné d'un mémoire de réclamation, resté sans réponse. Par courrier en date du 19 novembre 2015, la société Agence du Bâtiment a mis en demeure le maître d'ouvrage d'établir le décompte général du marché et a réitéré sa réclamation, par un nouveau courrier en date du 12 février 2016, également resté sans réponse.

2. Les sociétés ADB, STPP et SOCARE, membres du groupement, ont saisi le tribunal administratif de la Martinique d'une demande tendant, d'une part, à voir constater la prolongation du délai d'exécution du marché au 20 mars 2012, prononcer la réception judiciaire des travaux ainsi que la résiliation aux torts exclusifs du CHU de Martinique à cette même date, d'autre part, à la condamnation du CHU à payer le solde dû au titre du marché établi provisoirement dans le projet de décompte final et à l'indemnisation des préjudices subis à l'occasion de l'exécution du marché. Par un jugement du 17 mai 2018, le tribunal administratif de la Martinique a condamné le centre hospitalier universitaire de Martinique à payer à la société ADB la somme de 86 238,50 euros majorée des intérêts de retard courant à compter du 6 octobre 2015, capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts à compter du 27 mai 2016, et à chaque échéance annuelle à compter de cette date et a rejeté le surplus des conclusions des parties. Les trois sociétés membres du groupement relèvent appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande.

Sur les conclusions tendant au prononcé de la réception judiciaire des travaux :

3. La réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage, avec ou sans réserve, et prend possession de cet ouvrage. Le juge du contrat peut prononcer la réception en cas de refus de la personne responsable du marché d'y procéder et fixe alors la date de l'achèvement des travaux.

4. En vertu de l'article 41-1, al. 1 du CCAG alors applicable, l'initiative de la procédure de réception appartient à l'entrepreneur. " L'entrepreneur avise à la fois le maître de l'ouvrage et le maître d'oeuvre ", par écrit, de la date à laquelle il estime que les travaux ont été achevés ou le seront. Une fois l'avis d'achèvement des travaux reçu, en vertu de l'alinéa 2 du même article : " le maître d'oeuvre procède, l'entrepreneur ayant été convoqué, aux opérations préalables à la réception des ouvrages dans un délai qui, sauf stipulation différente du CCAP, est de vingt jours à compter de la date de la réception de l'avis mentionné ci-dessus ou de la date indiquée dans cet avis pour l'achèvement des travaux, si cette dernière date est postérieure ".

5. Aux termes de l'article 9.2 du cahier des clauses administratives particulières du marché : " Par dérogation à l'article 41.1 à 3 du CCAG : la réception a lieu à l'achèvement de l'ensemble des travaux relevant des lots considérés ; elle prend effet à la date de cet achèvement ; l'entrepreneur chargé d'aviser la personne responsable des marchés et le maître d'oeuvre de la date à laquelle ces travaux sont ou seront considérés comme achevés est l'entrepreneur titulaire du lot n° 5 (gros oeuvre ). Le délai maximal dans lequel le maître d'oeuvre procède aux opérations préalables à la réception des ouvrages est fixé à vingt et un jours à compter de la date de réception de la lettre de l'entrepreneur l'avisant de l'achèvement des travaux ".

6. Le marché conclu le 10 avril 2006 pour les travaux de restructuration des services urgence, bloc opératoire, stérilisation et morgue du centre hospitalier Louis Doumergue de la Trinité, se référait au cahier des clauses administratives générales annexé au décret du 21 janvier 1976. L'article 9-2 du cahier des clauses administratives particulières prévoyait une réception unique à l'achèvement complet de l'ensemble des travaux relevant des lots considérés dans les conditions prévues à l'article 41 du cahier des clauses administratives générales. Il résulte de ces stipulations que la réception des travaux, qui doit être réalisée simultanément pour tous les lots considérés, doit être entendue comme la date de réception de l'ouvrage dans son ensemble. Contrairement à ce que soutiennent les appelantes, la réception des travaux ne peut intervenir que lorsque la totalité des travaux est achevée.

7. Les constats d'achèvement établis le 11 mars 2011 pour les magasins, le 18 juillet 2011 pour la zone C - USI, au demeurant non signé par le maître d'oeuvre, le 12 août 2011 pour le pôle déchets, le 30 septembre 2011 pour les passerelles - ascenseurs, le 28 novembre 2011 pour la zone urgences - A et B, le 17 février 2012 pour la zone accueil urgences - Phase 2, produits par les appelantes, qui font état de nombreux travaux non exécutés, ne permettent pas de regarder les travaux comme achevés à la date du 20 mars 2012. En conséquence, à cette date l'ouvrage ne pouvait être regardé comme en état de fonctionnement conforme aux prescriptions du marché. Il suit de là qu'il n'y a pas lieu de prononcer la réception des travaux au 20 mars 2012.

8. En outre et en l'espèce, il ne résulte pas de l'instruction que le groupement ait adressé au maître d'oeuvre une lettre l'avisant de l'achèvement des travaux et mis en demeure le centre hospitalier de prononcer la réception des ouvrages. Ainsi, les courriers du 17 juin 2013 et du 25 avril 2014 invoqués par les sociétés appelantes se bornent à revendiquer " un droit à résiliation du marché " et à demander la convocation aux opérations de constatation des ouvrages ou parties d'ouvrages exécutés, procédure prévue par l'article 46.2 du cahier des clauses administratives générales qui fixe les conséquences d'une décision de résiliation du marché, dont les appelantes ne peuvent utilement se prévaloir pour obtenir la réception des prestations exécutées dès lors qu'aucune décision de résiliation n'avait été prise par le CHU de Martinique.

9. Il résulte de ce qui précède qu'en l'absence d'achèvement des travaux et de démarche de l'entrepreneur tendant à la réception des travaux, la demande des sociétés appelantes tendant à la réception judiciaire des travaux doit être rejetée.

Sur les conclusions à fin de résiliation judiciaire du marché :

10. Aux termes de l'article 48.2 du cahier des clauses administratives générales : " Si, par suite d'un ajournement ou de plusieurs ajournements successifs, les travaux ont été interrompus pendant plus d'une année, l'entrepreneur a le droit d'obtenir la résiliation du marché, sauf si, informé par écrit d'une durée d'ajournement conduisant au dépassement de la durée d'un an indiquée ci-dessus, il n'a pas, dans un délai de quinze jours, demandé la résiliation (...) ".

11. Les sociétés appelantes ne peuvent se prévaloir des stipulations de l'article 48.2 du cahier des clauses administratives générales, dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'un ajournement des travaux pendant plus d'un an, suivi d'une demande du groupement d'entreprises de résiliation du marché, faisant obligation au maître d'ouvrage de prononcer la résiliation, aurait été expressément décidé. À cet égard, la seule absence de réponse aux divers courriers que les sociétés membres du groupement avaient adressés au CHU au mois de janvier 2012 afin de demander la résiliation du marché ne saurait s'analyser en une décision d'ajournement ouvrant à l'entrepreneur la possibilité de demander une résiliation judiciaire sur le fondement de l'article 48.2 du CCAG. Il suit de là que les entreprises appelantes ne peuvent se prévaloir d'un droit à résiliation du marché en application de ces stipulations.

12. Si les sociétés appelantes soutiennent, de plus, que la résiliation doit leur être accordée en raison de manquements graves du CHU à ses obligations résultant de l'abandon du chantier depuis mars 2012, de telles conclusions tendant à la résiliation judiciaire du marché pour faute du maître d'ouvrage, qui se fondent sur une cause juridique distincte de la demande initiale sur le fondement de l'article 48.2 du CCAG, sont irrecevables en l'absence d'une réclamation préalable. Au demeurant, il ne résulte pas de l'instruction qu'à la date du 20 mars 2012, l'exécution du marché aurait été abandonnée par le CHU de Martinique. D'ailleurs, par courrier du 14 janvier 2012, la société ADB a sollicité du maître d'oeuvre une prolongation du délai d'exécution des travaux à la suite de la réception de l'ordre de service n° 147 du 4 janvier 2012 notifiant aux entreprises l'exécution des travaux de fourniture et de pose des garde-corps au droit de l'aire de retournement et du pôle déchets, dont il n'est d'ailleurs pas établi qu'elles les aient exécutés.

13. Il résulte de ce qui précède que la demande de résiliation judiciaire du marché à la date du 20 mars 2012 doit être rejetée.

Sur les conclusions tendant au paiement d'une somme d'argent :

Au titre du solde du marché :

14. Il résulte de l'instruction, en particulier de l'acompte n° 51 payé le 28 septembre 2012 duquel il ressort que la révision de prix contractuelle a été versée, que le maître d'ouvrage avait payé à cette date aux entreprises membres du groupement une somme de 7 192 518,30 euros TTC. Les sociétés appelantes ne justifient pas de ce que la révision de prix contractuelle resterait impayée à hauteur de 1 443,66 euros pour ADB, 20 657,26 euros pour STPP et 1 066,99 euros pour SOCARE. Ces demandes ne peuvent en conséquence être accueillies.

15. Si les appelantes soutiennent qu'un certain nombre de travaux n'auraient pas été payés et que le solde de ces travaux impayés s'élèverait à 6 485,71 euros HT pour ADB, 110 131,83 euros HT pour STPP et de 4 891,85 euros HT pour SOCARE, elles n'établissent davantage en appel qu'en première instance ni la nature desdits travaux, ni que ces sommes n'auraient pas été payées.

16. La société ADB revendique, en outre, en appel, une créance de 7 955,23 euros HT, et non plus de 9 511,18 euros HT, comme demandé en première instance, au titre d'un excès de remboursement de l'avance accordée au démarrage des travaux. Il résulte de l'instruction et notamment des propres écritures du CHU que l'avance avait été entièrement remboursée par prélèvement sur les acomptes n° 46 et n° 47. Or, il résulte également de l'instruction que des prélèvements relatifs au remboursement de cette avance ont été, de plus, opérés sur les acomptes n° 49 et n° 50. Par suite, la société ADB est fondée à demander le paiement de la somme de 7 955,23 euros au CHU de Martinique.

Au titre des travaux supplémentaires :

17. Dans le cadre d'un marché à prix global et forfaitaire, l'entreprise titulaire dudit marché n'est fondée à réclamer un supplément de prix au maître d'ouvrage que pour autant qu'elle justifie qu'elle a effectué des travaux non prévus au marché, sur ordre de service, ou que ces travaux présentent un caractère indispensable à la réalisation de l'ouvrage. Le caractère global et forfaitaire du prix du marché ne fait pas obstacle à ce que l'entreprise cocontractante sollicite une indemnisation au titre de travaux supplémentaires effectués, même sans ordre de service, dès lors que ces travaux étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art.

18. Les sociétés appelantes exposent avoir réalisé des travaux supplémentaires dont le coût total s'élève à 74 802,75 euros. Il ne résulte toutefois pas de l'instruction que les travaux correspondant au déplacement et au stockage en toiture des magasins des éléments de charpente métalliques, la réfection de la passerelle provisoire desservant les archives, la réalisation d'un traçage de chantier piéton, le rétablissement de l'évacuation des eaux pluviales de la toiture terrasse, le déplacement d'un container, le débroussaillage de la charpente métallique stockée, l' " installation chantier ", puis la réalisation d'une nouvelle " installation chantier ", la réalisation d'un choc thermique, les travaux d'assèchement et de réparation des ascenseurs, la fabrication et la livraison de pièces de charpente métalliques disparues après mise à disposition du chantier, dont les coûts respectifs s'élèvent à 2 683 euros, 360 euros, 1 740 euros, 700 euros, 3 625 euros, 610 euros, 7 890 euros, 1650 euros, 2 112, 50 euros, 3 580 euros et 5 748, 23 euros aient fait suite à des ordres de service. Les sociétés appelantes n'apportent, en outre, aucun élément de nature à établir que ces travaux résulteraient d'une demande du maître d'ouvrage ou qu'il s'agirait de travaux présentant un caractère indispensable. De plus, les travaux " déplacement CTA " pour un montant de 11 948,86 euros et le prix de la " mobilisation des équipes pour l'achèvement des travaux des urgences " à hauteur de 8 975 euros, étaient prévus dans les missions confiées et faisaient partie du forfait. Elles ne démontrent davantage ni que le déplacement de containers pour travaux sur le caniveau technique, ordonné par ordre de service n° 42, n'était pas inclus dans le forfait, ni que le montant de 9 485 euros pour la mise en conformité de la clôture de chantier présente le caractère de travaux rendus nécessaires par le redémarrage des travaux de la zone CT2. Enfin, le devis n° 94 d'un montant de 1 435 euros, pour lequel aucun ordre de service n'est produit, ne permet pas à lui seul de justifier le caractère indispensable de ces travaux. Il résulte de ce qui précède qu'aucune indemnité ne peut être allouée au titre de ces travaux qui n'ont pas le caractère de travaux supplémentaires indemnisables.

Au titre de " différence de paiement ", de " ligne de découvert " et de paiement des " intérêts moratoires sur les acomptes " :

19. En premier lieu, la demande de paiement à ADB d'un différentiel de 11 695,96 euros pour un " certain nombre de travaux modificatifs " qui n'auraient pas été acceptés à hauteur des prix chiffrés dans les devis, doit être écartée en l'absence de toute démonstration de ces différences de paiement et de prix.

20. En deuxième lieu, l'ADB soutient qu'elle a été contrainte de mettre en place et de maintenir une ligne de découvert auprès de l'organisme Oseo pour faire face aux pénalités de retard qui avaient été appliquées par le CHU de Martinique et sollicite à ce titre une somme de 23 072,08 euros. Toutefois, les relevés Oseo produits qui ne font référence ni au marché conclu avec le CHU ni à fortiori au montant de pénalités de retard, qui au demeurant n'ont en définitive pas été appliquées, ne permettent pas d'établir que ces lignes complémentaires auraient été spécifiquement souscrites pour faire face auxdites pénalités de retard envisagées par le CHU de Martinique.

21. En troisième lieu, la demande de paiement des intérêts moratoires sur les acomptes mensuels payés hors délai à l'ADB au 31 août 2015 arrêtés par le projet de décompte final à 29 909,14 euros n'est pas justifiée et doit, dès lors, être rejetée.

Au titre des fautes du maître d'ouvrage :

22. Les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés ont eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l'estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en oeuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics.

23. Le tribunal administratif a jugé que le centre hospitalier Louis Doumergue, aux droits duquel vient le CHU de Martinique, a commis des fautes dans la conception et la direction du chantier du fait de l'insuffisance des repérages préalables des matériaux et zones amiantés (point 14), de la conduite erratique de l'exécution des travaux caractérisée par de très nombreuses interruptions (point 19), de la prescription d'importantes modifications des travaux du fait de la désorganisation du chantier résultant des retards pris et de la nécessité de réaliser les travaux en zone occupée (point 20), du retard dans la mise à disposition de la zone CT2 (point 20) ainsi que du retard dans la prise de décision de démarrage des travaux modificatifs de la zone USI (point 21).

24. En particulier, pour retenir la responsabilité du maître d'ouvrage dans la découverte d'ouvrages amiantés en 2010, les premiers juges ont relevé, au point 14, qu'il n'était pas allégué que le centre hospitalier Louis Doumergue aurait procédé, préalablement à la passation du marché, à la réalisation des diagnostics amiante qui lui incombait, et qu'il aurait effectué un repérage de la localisation d'ouvrages ou de matériaux amiantés, commettant ainsi une faute. Si le CHU de Martinique conteste sa responsabilité sur ce point, la circonstance que seuls 40 % de la zone USI étaient concernés par le désamiantage et que les différentes zones étaient strictement confinées l'une par rapport à l'autre, n'est pas de nature à remettre en cause les éléments retenus par les premiers juges permettant de retenir une faute du maître d'ouvrage du fait de l'insuffisance de repérage de la localisation d'ouvrages ou de matériaux amiantés.

25. De même, la circonstance que la réalisation du caniveau technique à la suite de l'incident sur le réseau EDF provoqué par le groupement, n'aurait eu pour seule conséquence que de modifier les dispositifs de raccordement aux réseaux de fluides des urgences, n'est pas de nature à remettre en cause la matérialité de l'ensemble des fautes dans l'exercice du pouvoir de contrôle et de direction du marché commises par le maître d'ouvrage et énumérées au point 19 du jugement.

26. Enfin, le CHU n'établit pas que l'interruption des travaux, le 6 juillet 2007, par OS n° 7, en raison notamment de " manquements relatifs à la sécurité des ouvriers travaillant en hauteur ", démontrant, selon lui, que le chantier aurait été réalisé dans des conditions non conformes aux règles applicables en matière de travaux publics, aurait été à l'origine du retard lui étant imputable, retenu par le tribunal au point 21, dans l'ordre de réaliser les travaux modificatifs de la zone USI prescrits par OS n° 120 du 7 octobre 2010. En se bornant à indiquer " que cette zone USI qui devait être opérationnelle dès le 12 août 2011 selon la maîtrise d'oeuvre et pour laquelle des dispositifs techniques manquaient, interdisant la mise en service pour des raisons de sécurité ou d'hygiène avant plusieurs mois ", le CHU ne justifie pas que ce retard ne lui serait pas imputable.

27. Il résulte des points 24 à 26 que le CHU de Martinique n'est pas fondé à soutenir en appel qu'il n'aurait commis aucune faute dans l'exécution du marché.

En ce qui concerne l'évaluation de la durée des retards dans l'exécution du chantier :

28. Les sociétés appelantes soutiennent qu'en dépit de l'ensemble des fautes du maître d'ouvrage, le tribunal a sous-évalué la durée du retard de chantier en résultant imputable au maître d'ouvrage. Elles font valoir que le délai à retenir est de 42 mois (168 semaines) ou au minimum de 40,5 mois si on exclut l'allongement de délai lié aux découvertes de réseaux enterrés, comparé au délai initial contractuel de 22 mois.

29. Le titulaire du marché a droit à l'indemnisation intégrale du préjudice qu'il a subi du fait de retards dans l'exécution du marché imputables au maître de l'ouvrage ou à ses autres cocontractants et distincts de l'allongement de la durée du chantier due à la réalisation des travaux supplémentaires, dès lors que ce préjudice apparaît certain et présente avec ces retards un lien de causalité directe.

30. Ainsi qu'il a été dit au point 1, par un avenant en date du 18 février 2011, les parties au marché ont prolongé le délai d'exécution jusqu'au 30 juin 2011, puis, par ordre de service n° 148, jusqu'au 29 février 2012, pour tenir compte des travaux prescrits le 4 janvier 2012 modifiant la prestation prévue au marché relative à la pose de garde-corps au droit de l'aire de retournement et du pôle déchets. Alors même que l'entreprise mandataire du groupement a signé l'avenant du 18 février 2011, qui réservait la question des conséquences " quant aux fait ou responsabilité éventuelles du maître d'ouvrage, du titulaire et/ou de tous autres intervenants ", et l'ordre de service du 4 janvier 2012 prolongeant les délais d'exécution jusqu'au 29 février 2012, les entreprises membres du groupement ne sauraient cependant être regardées comme ayant renoncé à demander la réparation des préjudices subis.

31. Ainsi que l'a relevé le tribunal, la circonstance, à la supposer établie, que les travaux aient été exécutés jusqu'au 20 mars 2012, au-delà du terme du marché initialement fixé au 16 août 2008, ne résulte pas seulement de fautes imputables au maître d'ouvrage. Les appelantes, qui ne reprennent d'ailleurs pas en appel l'invocation des défaillances non retenues par le tribunal pour fonder la responsabilité du maître d'ouvrage, ne sont dès lors pas fondées à imputer à ce dernier un retard de 42 mois dans l'exécution du marché.

32. En outre, il résulte de l'instruction, en particulier de la note préliminaire adressée au CHU par la SODEM, maître d'ouvrage délégué ; que les retards impactant le déroulement du chantier susceptibles d'être exclusivement imputés au maître d'ouvrage contractuellement peuvent être estimés à 10 semaines liées à la neutralisation du chantier du fait des intempéries, 14 semaines pour des faits de grève, 6 semaines liées aux modifications de programme résultant du séisme de novembre 2007, 7 semaines liées à la découverte d'amiante, 3 semaines résultant des adaptations des travaux aux exigences particulières du milieu hospitalier, et 6 semaines en conséquences des modifications de planning liées aux modifications de programme consécutives au retard pris, soit un total de 46 semaines. Ces éléments ont été corroborés par une analyse de la société Guez Caraïbes à partir de l'étude critique des documents transmis en juillet 2009 et en décembre 2010 par le maître d'oeuvre d'opération, le bureau CETE ingénierie, qui concluait d'ailleurs à un ordre de grandeur de la responsabilité du maître d'ouvrage sur le retard de l'opération de seulement 27 semaines.

33. En se bornant à citer à titre d'exemple, les OS n° 21, n° 25, n° 53, n° 101 pour " les magasins " et les OS n° 25, n° 111, n° 117, et n° 121 pour la " passerelle " pour contester le délai de 6 semaines de retard retenu par le tribunal susceptible d'être exclusivement imputé au maître d'ouvrage, lié aux modifications du programme résultant du séisme de novembre 2007, les appelantes ne contestent pas utilement le délai de retard retenu par le tribunal imputable au maître d'ouvrage. De même, en se fondant sur des extraits de compte-rendus de chantier de 2007 et des OS n° 91 et n° 123, elles n'établissent pas davantage que le retard de 7 semaines retenu par le tribunal susceptible d'être exclusivement imputé au maître d'ouvrage, lié à la découverte de l'amiante, aurait été sous-évalué, nonobstant la circonstance que les éléments d'estimation des retards aient été analysés par le maître d'ouvrage délégué.

34. Il résulte de ce qui précède que les sociétés appelantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Martinique a fixé à 46 semaines la durée des retards dans l'exécution du marché imputable au maître de l'ouvrage au titre de laquelle les sociétés appelantes peuvent solliciter une indemnisation.

En ce qui concerne les demandes indemnitaires :

35. En premier lieu, ainsi qu'il a été dit aux points 11 et 12, en l'absence de résiliation imputable au maître d'ouvrage et de nature à ouvrir droit à indemnité au profit de l'entrepreneur, la société ADB n'est pas fondée à soutenir qu'elle a un droit à être indemnisée des frais généraux qu'elle a engagés en vue de l'exécution du marché, ou du bénéfice qu'elle était en droit d'attendre si le marché avait été entièrement exécuté. La demande d'indemnisation de la société ADB à hauteur des sommes respectives de 346 810,56 euros et de 150 787 euros doit dès lors être rejetée.

36. En second lieu, ainsi qu'il a été dit aux points 28 à 33, la durée des retards dans l'exécution du chantier imputables au maître d'ouvrage est fixée à 46 semaines. Par suite, les demandes des sociétés appelantes au titre des préjudices résultant de l'allongement des délais imputable au maître d'ouvrage fondées sur un retard imputable au maître d'ouvrage de 168 semaines, et sollicitées à hauteur des sommes de 1 094 601,84 euros pour la société ADB, augmentée de la révision de prix à hauteur de 158 727,97 euros, de 270 699,37 euros pour STPP et de 35 648,85 euros pour la société SOCARE sont rejetées.

En ce qui concerne l'évaluation des préjudices par le tribunal :

37. En premier lieu, s'agissant des demandes de la société ADB, l'évaluation du coût de la direction des travaux à 7 045 euros mensuels (point 26 du jugement) par les premiers juges n'est pas contestée. Eu égard à la durée du retard de 46 semaines retenue pour déterminer le retard imputable au maître de l'ouvrage, il convient donc de retenir la somme de 81 017,50 euros, à laquelle s'ajoutent les frais de caution bancaire liés à la retenue de garantie, évalués par le tribunal à la somme de 5 221 euros (également point 26) et dont le principe et le mode de calcul ne sont pas contestés par le CHU.

38. En deuxième lieu, pour rejeter la demande indemnitaire de la société ADB relative au coût de la mission de conduite des travaux (point 27), les premiers juges ont estimé qu'à défaut de production des justificatifs de dépenses, ce chef de préjudices, évalués par la société dans son mémoire de réclamation, à 6 % des frais généraux, soit 7 066 euros mensuels, par une attestation du gérant de la société totalisant les coûts de fonctionnement annuels exposés par l'entreprise pour l'exercice de cette fonction ne pouvait être accueilli. Ils ont également relevé que la demande d'indemnisation du coût du maintien des installations de chantier et des frais afférents, tels que les coûts résultant de la consommation d'électricité, de la location de bungalows, de bennes de chantier et de quatre conteneurs de stockage des matériaux, évalué à une somme de 51 085 euros, n'est justifiée par la production d'aucune facture, de même que la demande d'indemnisation des frais financiers exposés pour compenser la perte d'amortissement par le chiffre d'affaires des frais généraux n'est justifiée par aucune pièce, ainsi que la demande de paiement des frais de mandataire et risques à hauteur de 56 413,25 euros. À l'appui de sa requête d'appel, la société ADB reprend les arguments invoqués en première instance sans remettre en cause les éléments retenus par les premiers juges et ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance. Par suite, il y a lieu de rejeter par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges l'ensemble de ces demandes.

39. Les sociétés STPP et SOCARE ne produisent pas davantage en appel qu'en première instance d'éléments permettant d'évaluer leur préjudice au regard du retard dans l'exécution de chantier. Leurs demandes présentées par le groupement à hauteur, respectivement, de 270 699,37 euros et de 35 648,85 euros, dépourvues de toute justification, doivent dès lors être rejetées.

40. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'enjoindre au CHU de Martinique de communiquer l'analyse du projet de décompte final faite par le maître d'oeuvre en octobre 2015, les sociétés appelantes sont seulement fondées à demander que le montant des sommes que le tribunal administratif de la Martinique a condamné le CHU de la Martinique à verser à la société ADB soit porté de 86 238,50 euros à 94 193,73 euros.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

41. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les conclusions des parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le centre hospitalier universitaire de Martinique est condamné à verser à la société Agence du Bâtiment la somme de 94 193,73 euros.

Article 2 : le jugement n° 1600326 du 17 mai 2018 est réformé en tant qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions des sociétés Agence du Bâtiment, Société de travaux publics et privés et Société caribéenne de revêtement d'étanchéité est rejeté.

Article 4 : La demande du CHU de Martinique au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejetée.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Agence du bâtiment, à la société Société de travaux publics et privés (STPP), à la société Société caribéenne de revêtement d'étanchéité (SOCARE) et au centre hospitalier universitaire de Martinique.

Délibéré après l'audience du 28 janvier 2021 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme G..., présidente-assesseure,

Mme E... F..., premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 février 2021.

Le président de chambre,

Éric Rey-Bèthbéder

La République mande et ordonne au préfet de la Martinique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

13

N° 18BX02919


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX02919
Date de la décision : 25/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : GESCAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-02-25;18bx02919 ?
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