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14/12/2020 | FRANCE | N°18BX03976

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 14 décembre 2020, 18BX03976


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2017 par lequel le maire de Puymoyen a rejeté sa demande d'imputabilité au service de la pathologie dont elle souffre et de " condamner la commune de Puymoyen pour faute du fait de l'illégalité de l'arrêté contesté ".

Par un jugement n° 1702926 du 13 septembre 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté la demande de Mme B....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregis

trée le 19 novembre 2018, et un mémoire en réplique, enregistré le 21 janvier 2020, Mme B..., ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2017 par lequel le maire de Puymoyen a rejeté sa demande d'imputabilité au service de la pathologie dont elle souffre et de " condamner la commune de Puymoyen pour faute du fait de l'illégalité de l'arrêté contesté ".

Par un jugement n° 1702926 du 13 septembre 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté la demande de Mme B....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 novembre 2018, et un mémoire en réplique, enregistré le 21 janvier 2020, Mme B..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 13 septembre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2017 par lequel le maire de Puymoyen a rejeté sa demande d'imputabilité au service de la pathologie dont elle souffre ;

3°) de " condamner la commune de Puymoyen pour faute du fait de l'illégalité de l'arrêté contesté " ;

4°) d'enjoindre à la commune de Puymoyen de déclarer ses arrêts maladie depuis le 31 mars 2014 comme imputables au service et de procéder à la reconstitution de sa carrière ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Puymoyen, outre les entiers dépens, la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé, en violation de l'article L. 9 du code de justice administrative ;

- le délai de saisine de la commission de réforme a été anormalement long, soit trois ans et demi ; en ne respectant pas les délais impartis, la commune a violé l'arrêté du 4 août 2004 et le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; dans l'attente de l'avis de cette instance, l'agent doit être maintenu à plein traitement ; en réalité, la commune a délibérément refusé de saisir la commission de réforme, alors qu'elle était en possession de son dossier de demande dès le 1er juillet 2016, en violation de l'article 16 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; tout a été fait pour retarder l'examen de son dossier ; en outre, le rapport hiérarchique de saisine et le rapport de la médecine de prévention ne lui ont pas été transmis et n'ont pas été produits, en violation des articles 18 et 34 du décret du 14 mars 1986, ainsi que des articles 9 et 16 du décret du 30 juillet 1987 ; enfin, le procès-verbal de la séance du 14 septembre 2017 n'indique pas l'identité du " médecin spécialiste de l'affection ", en violation de l'article 19 du décret du 14 mars 1986, puisqu'il est ainsi impossible de vérifier s'il s'agissait bien d'un psychiatre ; le procès-verbal ne précise pas non plus si le médecin spécialiste a donné un avis et lequel ; il s'agit de formalités substantielles, qui n'ont pas été respectées ;

- l'obligation de reclassement prévue à l'article 17 du décret du 30 juillet 1987 a été méconnue ; à la suite de l'avis d'inaptitude à reprendre son service rendu par le comité médical, la commune aurait dû chercher à la reclasser, solution qui lui était plus favorable que la mise en disponibilité, dès lors qu'elle n'avait pas été déclarée définitivement inapte ; en cas d'indisponibilité de poste, l'ordonnance du 19 janvier 2017 impose à l'administration de placer l'agent en situation de préparation de reclassement pour une période d'un an à plein traitement ; or, cela n'a jamais été le cas en l'espèce ;

- elle a été illégalement placée en disponibilité d'office pour une durée anormalement longue, soit 18 mois ; en outre, l'arrêté a été pris avec effet rétroactif, ce qui lui a retiré le bénéfice de son congé de longue maladie ; l'arrêté attaqué est de toutes façons entaché d'erreur manifeste d'appréciation de son état de santé ; il n'existe aucun autre facteur médical extérieur expliquant l'origine de sa pathologie ; la dégradation de son état de santé est directement imputable à ses conditions de travail, caractérisées par un véritable harcèlement moral à son encontre, qui a d'ailleurs continué pendant ses arrêts-maladie ; en vertu de l'article 21 bis, introduit dans la loi du 13 juillet 1983 par l'ordonnance du 19 janvier 2017, le syndrome dépressif réactionnel dont elle souffre doit être reconnu imputable au service ; tous les certificats médicaux qu'elle produit établissent ce lien ; ce syndrome est bien apparu en mai 2014 alors qu'elle était en service ; la commune ne fournit aucun élément permettant d'écarter les éléments médicaux ;

- l'arrêté contesté est entaché de détournement de pouvoir ; il s'inscrit dans un contexte de harcèlement moral ; la commune a usé de mauvaise foi dans la gestion de sa carrière et a entendu l'exclure de ses services par tout moyen ; elle s'est acharné contre elle, en édictant un arrêté de mise en disponibilité de 18 mois, en ne transmettant pas son dossier à la commission de réforme et en ne cherchant pas à la reclasser ;

- la commune devra être condamnée pour faute, en raison de l'illégalité de l'arrêté contesté, qui lui a causé un préjudice de carrière, financier et moral.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 février 2019, la commune de Puymoyen, représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme B... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête d'appel est irrecevable pour tardiveté, faute pour la requérante de produire l'accusé de réception indiquant la date à laquelle le jugement lui a été notifié ;

- tous les moyens soulevés par Mme B... doivent être écartés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

- l'arrêté du 4 août 2004 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F...,

- les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant la commune de Puymoyen.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... B... était secrétaire générale de la commune de Puymoyen (Charente) depuis 1997 et a été promue au grade d'attaché principal en 2007. Le 31 mars 2014, elle a été placée en congé de maladie ordinaire pour troubles anxio-dépressifs par des arrêts de travail successifs. Elle a ensuite été placée rétroactivement, à compter du 31 mars 2014, en congé de longue maladie, initialement pour une durée d'un an, à la suite de l'avis donné en ce sens, le 27 novembre 2014 par le comité médical départemental. Cependant, par un arrêté du 1er mars 2017, le maire l'a placée rétroactivement, à compter du 31 mars 2016, en disponibilité d'office pour raisons de santé, pour une durée de 18 mois, à la suite de l'avis émis en ce sens le 16 février 2017 par le comité départemental, qui s'est conformé à l'avis émis par le comité médical supérieur du 15 novembre 2016, que la commune avait saisi. Par un jugement du 13 septembre 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté le recours formé par Mme B... contre l'arrêté du 1er mars 2017. Le 10 mars 2017, Mme B... a sollicité l'imputabilité au service de sa pathologie. La commission de réforme, réunie le 11 mai 2017, a rendu un avis favorable, mais sa composition ayant été irrégulière, en particulier en raison de l'absence d'un médecin spécialiste, la commune a sollicité une nouvelle réunion, qui s'est tenue le 14 septembre 2017. A la suite de cette séance, au cours de laquelle les membres de la commission ont rendu un avis constitué de deux voix en faveur d'une reconnaissance de l'imputabilité, deux voix en défaveur, et deux abstentions, le maire a, le 17 octobre 2017, pris un arrêté refusant à Mme B... la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie. Celle-ci fait appel du jugement du tribunal administratif de Poitiers du 13 septembre 2018, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 octobre 2017 et à la condamnation de la commune " pour faute du fait de l'illégalité de l'arrêté contesté ".

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L.9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. Le jugement attaqué répond à tous les moyens de la requérante, en exposant les raisons pour lesquelles il rejette ses moyens. Il vise et analyse les mémoires produits, les textes applicables, en particulier la loi du 13 juillet 1983, ainsi que l'ensemble des pièces du dossier. Si Mme B... fait valoir qu'il n'explique pas " en quoi il a pu (...) exclure l'application du texte du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ", il ressort des termes du recours de première instance que la requérante n'a invoqué ce texte qu'à l'appui de son moyen tiré d'un défaut de recherche de reclassement, moyen jugé inopérant par le tribunal administratif, et non à l'appui de son moyen d'irrégularité de procédure tiré du défaut de production du rapport du médecin de prévention. Enfin, si Mme B... estime que les premiers juges ont adopté des motifs erronés, ce moyen ressortit au bien-fondé du jugement et non à sa motivation.

4. Dans ces conditions, le jugement attaqué n'est entaché ni d'un défaut de motivation, ni d'omission à statuer.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la légalité externe :

5. En premier lieu, aux termes de l'article 13 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " La demande d'inscription à l'ordre du jour de la commission est adressée au secrétariat de celle-ci par l'employeur de l'agent concerné. / L'agent concerné peut également adresser une demande de saisine de la commission à son employeur, qui doit la transmettre au secrétariat de celle-ci dans un délai de trois semaines ; le secrétariat accuse réception de cette transmission à l'agent concerné et à son employeur ; passé le délai de trois semaines, l'agent concerné peut faire parvenir directement au secrétariat de la commission un double de sa demande par lettre recommandée avec accusé de réception ; cette transmission vaut saisine de la commission./ La commission doit examiner le dossier dans le délai d'un mois à compter de la réception de la demande d'inscription à l'ordre du jour par son secrétariat. Ce délai est porté à deux mois lorsqu'il est fait application de la procédure prévue au deuxième alinéa de l'article 16. Dans ce cas, le secrétariat de la commission notifie à l'intéressé et à son employeur la date prévisible d'examen de ce dossier./ Le traitement auquel l'agent avait droit, avant épuisement des délais en cours à la date de saisie de la commission de réforme, lui est maintenu durant les délais mentionnés et en tout état de cause jusqu'à l'issue de la procédure justifiant la saisie de la commission de réforme. ".

6. La commission de réforme, dont l'avis contribue à la garantie que la décision prise le sera de façon éclairée quand bien même cet avis n'est que consultatif, doit obligatoirement être consultée dans tous les cas où un fonctionnaire demande le bénéfice du 2ème alinéa du 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984.

7. Mme B... fait valoir que la commune lui a opposé un refus illégal de saisir la commission de réforme et que cette instance n'a statué sur sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de sa dépression qu'à l'issue d'un délai anormalement long, soit trois ans et demi après son arrêt-maladie initial du 31 mars 2014, en violation des dispositions précitées de l'article 13 de l'arrêté du 4 août 2004.

8. Il ressort en effet des pièces du dossier que, par un courrier en date du 1er juillet 2016, Mme B... a demandé à la commune " la reconnaissance de l'imputabilité au service de la pathologie à l'origine de mon placement en congé de maladie, à compter du 31 mars 2014 " et que, par un courrier en date du 4 août 2016, la commune lui a répondu en lui rappelant qu'un recours devant le comité médical supérieur étant en cours concernant le maintien de sa position en congé de longue maladie, il convenait d'attendre cet avis et qu'il ne lui appartenait " en aucun cas de me prononcer sur les origines de votre pathologie ". Cependant, à supposer que cette réponse de la commune puisse être regardée comme un refus de saisir la commission de réforme à la suite de la demande de reconnaissance d'imputabilité effectuée par Mme B..., et alors au surplus qu'elle pouvait, sur le fondement de l'article 13 de l'arrêté du 4 août 2004, faire parvenir directement au secrétariat de la commission un double de sa demande passé le délai de 3 semaines, il ressort également des pièces du dossier qu'elle a, par un courrier du 10 mars 2017, à nouveau sollicité la reconnaissance de l'imputabilité de sa pathologie, que le 11 avril 2017, le président de la commission de réforme l'a informée de ce qu'il avait bien reçu son dossier, transmis par la commune, et que la commission s'est réunie le 11 mai 2017 pour statuer sur sa demande. La commune, ayant constaté une irrégularité dans la composition de la commission, du fait de l'absence d'un médecin spécialiste et d'un représentant du personnel, ce qui privait l'intéressé de ces garanties, a sollicité une nouvelle réunion de cette instance, qui a eu lieu le 14 septembre 2017.

9. Par suite, d'une part, alors que la décision de refus de reconnaissance de l'imputabilité contestée fait suite à la seconde demande de Mme B..., à la suite de laquelle la commune a aussitôt saisi la commission de réforme, le moyen tiré d'une irrégularité de procédure fondée sur un refus de la commune de saisir la commission de réforme à la suite de la demande du 1er juillet 2016, est inopérant à l'encontre de la décision attaquée.

10. D'autre part, à la suite de la demande du 10 mars 2017, la commission de réforme a statué dans le délai prescrit par l'article 13 de l'arrêté du 4 août 2004. Par suite, le moyen tiré de ce que cette instance se serait prononcée sur la demande dans un délai excessif de trois ans et demi doit également être rejeté.

11. En deuxième lieu, le moyen tiré de ce que Mme B... aurait dû être maintenue à plein traitement dans l'attente de l'avis de la commission de réforme est inopérant à l'encontre de la décision de refus d'imputabilité attaquée. Au demeurant, si la commission de réforme doit obligatoirement être consultée dans tous les cas où un fonctionnaire demande la reconnaissance de l'imputabilité au service d'une pathologie, l'administration n'est tenue de placer, à titre conservatoire, le fonctionnaire en position de congé maladie à plein traitement qu'à l'expiration du délai dans lequel la commission de réforme doit se prononcer, délai ordinairement de deux mois, porté à trois en cas d'application par la commission de la procédure prévue au deuxième alinéa de l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004 susvisé.

12. En troisième lieu, si Mme B... invoque le défaut de transmission ou de production d'un " rapport hiérarchique " de saisine de la commission de réforme, aucun texte ne prévoit la transmission d'un tel rapport lorsqu'un agent sollicite l'imputabilité au service d'une maladie sur le fondement du 2ème alinéa du 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, la procédure de saisine de cette instance étant, comme indiqué à l'article 13 précité de l'arrêté du 4 août 2004, soit une demande adressée par l'agent lui-même à son employeur, qui la transmet ensuite au secrétariat de la commission, soit, comme cela a déjà été indiqué au point 8 ci-dessus, une demande adressée directement par l'agent à la commission.

13. En quatrième lieu, aux termes de l'article 18 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires : " Le médecin chargé de la prévention attaché au service auquel appartient le fonctionnaire dont le cas est soumis au comité médical ou à la commission de réforme est informé de la réunion et de son objet. Il peut obtenir, s'il le demande, communication du dossier de l'intéressé. Il peut présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion ; il remet obligatoirement un rapport écrit dans les cas prévus aux articles 26, 32, 34 et 43 ci-dessous (...) ". Aux termes de l'article 9 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux : "Le médecin du service de médecine préventive prévu à l'article 108-2 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée compétent à l'égard du fonctionnaire dont le cas est soumis au comité médical est informé de la réunion et de son objet. Il peut obtenir s'il le demande communication du dossier de l'intéressé. Il peut présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion. Il remet obligatoirement un rapport écrit dans les cas prévus aux articles 16, 23, 24 et 33 ci-dessous ". Aux termes de l'article 16 du même décret : " Sous réserve du deuxième alinéa du présent article, la commission de réforme prévue par le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 modifié relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales est obligatoirement consultée dans tous les cas où un fonctionnaire demande le bénéfice des dispositions de l'article 57 (2°, 2è alinéa) de la loi du 26 janvier 1984 susvisée. Le dossier qui lui est soumis doit comprendre un rapport écrit du médecin du service de médecine préventive compétent à l'égard du fonctionnaire concerné (...) ".

14. Mme B... invoque le défaut de transmission ou de production du rapport du médecin de prévention, tel que prévu à l'article 18 du décret du 14 mars 1986 ou encore aux articles 9 et 16 du décret du 30 juillet 1987. Cependant, la requérante a elle-même produit à l'instance le rapport du médecin de prévention, le Dr Roblet, en date du 10 avril 2017, qui a été soumis à la commission de réforme du 11 mai 2017 comme à celle du 14 septembre 2017. En outre, les procès-verbaux de ces deux séances attestent de la présence de ce médecin, qui a ainsi pu faire état de son avis. Par suite, le moyen tiré d'une violation des articles cités au point précédent doit être écarté comme manquant en fait. Enfin, Mme B... ne peut utilement invoquer une violation de l'article 34 du décret du 14 mars 1986, inopérante dès lors que cet article concerne la procédure, non de demande d'imputabilité, mais de congé de longue maladie.

15. En cinquième et dernier lieu, aux termes de l'article 19 du décret du 14 mars 1986 : " La commission de réforme ne peut délibérer valablement que si la majorité absolue des membres en exercice assiste à la séance ; un praticien de médecine générale ou le spécialiste compétent pour l'affection considérée doit participer à la délibération (...) ".

16. Comme il a été dit au point 8 ci-dessus, la commission de réforme du 11 mai 2017 ne comportant pas de médecin spécialiste, la commune a demandé une nouvelle réunion de cette instance, afin qu'elle s'adjoigne l'expertise d'un tel médecin. Il ressort du procès-verbal de la séance du 14 septembre 2017 qu'un médecin spécialiste était présent et qu'il a pris part au vote, la feuille d'émargement produite par la commune établissant l'identité dudit médecin, à savoir le Dr Savary, psychiatre. Par suite, le moyen tiré de la violation de l'article 19 précité, au motif que ne seraient établi ni la présence ni l'identité d'un médecin spécialiste doit être écarté comme manquant en fait.

17. Dans ces conditions, la procédure devant la commission de réforme n'est pas entachée des irrégularités alléguées.

En ce qui concerne la légalité interne :

18. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable à la date des décisions en litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ".

19. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. Il appartient au juge d'apprécier si les conditions de travail du fonctionnaire peuvent, même en l'absence de volonté délibérée de nuire à l'agent, être regardées comme étant directement à l'origine de la maladie dont la reconnaissance comme maladie professionnelle est demandée et, dans le cas où sont en cause des troubles psychiques, de prendre en considération l'ensemble des éléments du dossier permettant d'établir que ces troubles sont imputables à un fait précis ou à des circonstances particulières de service.

20. En premier lieu, comme l'ont déjà relevé à bon droit les premiers juges, le moyen tiré de ce que la commune aurait méconnu le droit de Mme B... à être reclassée est sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué qui se borne à refuser de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de l'intéressée.

21. En deuxième lieu, Mme B... soutient que son état anxio-dépressif est en relation directe avec ses fonctions de secrétaire générale auprès de la commune de Puymoyen, et qu'en particulier, la dégradation de son état de santé est issue du harcèlement moral qu'elle dit avoir subi de la part de la nouvelle équipe municipale, à la suite des élections du printemps 2014. Elle s'appuie notamment sur le certificat du Dr Villéger, psychiatre, du 5 avril 2016 et les expertises du Dr Coquiaud, psychiatre, du 6 novembre 2014 et du 23 avril 2015, qui attestent tous d'un " état dépressif majeur ". Cependant, si ces avis médicaux évoquent un épuisement professionnel, dû à un conteste de stress et de dévalorisation personnelle dans le cadre de ses fonctions, ils ne font que relayer à cet égard le ressenti de l'intéressée, alors en outre que si Mme B... invoque des relations conflictuelles avec la nouvelles équipe municipale, voire une situation de harcèlement, il est constant que cette équipe est issue du second tour des municipales, le 30 mars 2014, que l'intéressée a été placée en arrêt-maladie dès le 31 mars au matin et qu'elle n'a jamais repris son service auprès de la commune. En outre, le premier rapport du Dr Coquiaud évoque également des difficultés personnelles graves et des soucis de santé importants qu'a connus Mme B..., respectivement à partir de 2005 et de 2007. Dans ces conditions, les pièces du dossier ne permettent pas d'établir que les troubles psychiques dont souffre la requérante seraient en lien direct avec les fonctions qu'elle a exercées auprès de la commune de Puymoyen avant le 31 mars 2014. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté le moyen tiré de ce que le maire, en refusant de reconnaître l'imputabilité au service de son affection, aurait commis une erreur d'appréciation.

22. En dernier lieu, si Mme B... fait notamment valoir que la commune aurait tardé à saisir la commission de réforme, qu'elle a fait appel de l'avis du comité médical départemental auprès du comité médical supérieur ce qui lui a permis de la placer rétroactivement en disponibilité d'office en lieu et place d'un congé de longue maladie ou encore qu'elle a refusé de reconnaître sa pathologie psychique comme imputable au service, ni ces circonstances ni les pièces du dossier ne permettent d'établir l'existence du détournement de pouvoir allégué.

Sur les conclusions à fins de condamnation de la commune de Puymoyen :

23. Les conclusions de Mme B... tendant à l'annulation de l'arrêté contesté doivent être rejetées. Par voie de conséquence, ses conclusions indemnitaires, à supposer qu'elles doivent être regardées comme telles, doivent également être rejetées, sans qu'il soit besoin d'examiner leur recevabilité.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

24. Les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme B... doivent également être rejetées, par voie de conséquence du rejet de ses conclusions à fin d'annulation.

25. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Puymoyen, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

26. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des parties présentées sur ce fondement.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Puymoyen présentées le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et à la commune de Puymoyen.

Délibéré après l'audience du 16 novembre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Dominique Naves, président,

Mme Karine Butéri, président-assesseur,

Mme F..., premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 décembre 2020.

Le rapporteur,

F...Le président,

Dominique Naves

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au préfet de la Charente, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX03976


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX03976
Date de la décision : 14/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : MAZZA

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-12-14;18bx03976 ?
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