La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/12/2020 | FRANCE | N°18BX03535

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 03 décembre 2020, 18BX03535


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) Inaer Helicopter France a demandé au tribunal administratif de Saint-Martin d'annuler ou, à titre subsidiaire de résilier le marché public conclu le 2 février 2016 entre le centre hospitalier Louis Constant Fleming de Saint-Martin et la société Flydom NV relatif aux prestations de transports aériens d'urgence des patients et des équipes médicales, au départ de Saint-Martin, de jour ou de nuit, vers la Guadeloupe et la Martinique.

Par un jugement n° 1600024 du 26 juillet

2018, le tribunal administratif de Saint-Martin a rejeté sa demande.

Procédure d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) Inaer Helicopter France a demandé au tribunal administratif de Saint-Martin d'annuler ou, à titre subsidiaire de résilier le marché public conclu le 2 février 2016 entre le centre hospitalier Louis Constant Fleming de Saint-Martin et la société Flydom NV relatif aux prestations de transports aériens d'urgence des patients et des équipes médicales, au départ de Saint-Martin, de jour ou de nuit, vers la Guadeloupe et la Martinique.

Par un jugement n° 1600024 du 26 juillet 2018, le tribunal administratif de Saint-Martin a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 septembre 2018, la société Babcock mission critical services (MCS) France, anciennement dénommée société Inaer Helicopter France, représentée par la SELARL Parme Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Saint-Martin du 26 juillet 2018 ;

2°) d'annuler le marché public conclu le 2 février 2016 entre le centre hospitalier Louis Constant Fleming de Saint-Martin et la société Flydom NV ;

3°) à titre subsidiaire, de résilier ce marché public ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier Louis Constant Fleming la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le pouvoir adjudicateur a manqué à ses obligations de publicité et de mise en concurrence en utilisant des critères et sous-critères qui n'ont pas été publiés, en contradiction avec l'article 53 du code des marchés publics ; la grille d'analyse traduit l'utilisation de nombreux sous-critères pondérés, que l'on peut qualifier de sous-critères occultes dès lors qu'ils n'ont pas été annoncés dans les documents de la consultation et qu'ils ont exercé une influence déterminante dans la sélection des offres ;

- le nombre d'éléments d'appréciation a eu pour effet de modifier la pondération des critères ;

- le pouvoir adjudicateur a insuffisamment précisé les critères d'analyse des offres : les critères " moyens humains ", " moyens matériels ", " délai d'intervention et organisation " sont trop imprécis et le critère " politique sociale et environnementale " est insuffisamment défini ; si l'on considère que ces éléments ne constituent pas des critères occultes, mais de simples éléments d'appréciation, en tout état de cause cela signifie que le pouvoir adjudicateur a mis en oeuvre une méthode de notation différente de celle dont les candidats avaient été informés et que le pouvoir adjudicateur était pourtant tenu de respecter ;

- les besoins du pouvoir adjudicateur sont insuffisamment définis en méconnaissance de l'article 5 du code des marchés publics ; il ressort de la grille financière du pouvoir adjudicateur que les trajets vers Pointe-à-Pitre ont été cotés à 74,8 % et les trajets vers Fort-de-France à 25,2 %, ce qui implique que la destination vers Pointe-à-Pitre constitue la destination prépondérante du marché ; cet élément essentiel du besoin du pouvoir adjudicateur n'a cependant pas été indiqué dans les documents de la consultation, ce qui ne pouvait permettre une réponse adaptée par les candidats entrants ;

- l'imprécision des besoins a empêché la comparaison équitable des offres en prenant en compte un temps de vol purement estimatif laissé à l'appréciation des candidats ; en effet, à la suite de la réponse du pouvoir adjudicateur autorisant les candidats à proposer le mode de facturation qui leur serait le plus adéquat, elle a proposé un mode de facturation à l'heure de vol indiquant une estimation du temps de vol nécessaire pour réaliser les missions types et le centre hospitalier a pris en compte un temps de vol purement estimatif indiqué par la société Inaer Helicopter France pour établir le coût des vols aller-retour et donc l'analyse financière de son offre, ce qui l'a lésée ;

- le centre hospitalier a procédé à plusieurs grossières erreurs d'appréciation des offres des candidats à son détriment ; l'erreur manifeste d'appréciation des offres se traduit en ce qui concerne les moyens humains : (" nombre d'années Expérience Evasan ", " nombre d'années d'existence de la société ", " langage nature des pilotes " ), les délais d'intervention et organisation, les moyens matériels ( nombre d'heures total des appareils, présence d'un hangar de maintenance, appareil de remplacement), la politique sociale et environnementale ( émission CO 2), ce qui entache la validité du marché.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 avril 2019, la société Flydom NV (nom commercial JetBudget), représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la société Babcock MCS France le paiement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Elle soutient que la requête est irrecevable à défaut de critiques du jugement et que les moyens soulevés par la société Babcock MCS France sont soit inopérants soit non fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 septembre 2019, le centre hospitalier Louis Constant Fleming, représenté par la Selarl GZB, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la société Babcock MCS France le paiement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par la société sont soit inopérants soit non fondés.

Par une ordonnance du 11 décembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 28 janvier 2020 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E... F...,

- les conclusions de Mme Aurélie Chauvin, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant la société Babcock Mission Critical Services France (MCS), Me A..., représentant le centre hospitalier Louis Constant Fleming de Saint-Martin et Me D..., substituant Me B..., représentant la société Flydom NV.

Considérant ce qui suit :

1. Le centre hospitalier Louis Constant Fleming a lancé, le 10 septembre 2015, une procédure d'appel d'offre ouvert en vue de la passation d'un marché public à bon de commande relatif aux prestations de transports aériens d'urgence des patients et des équipes médicales. Le marché a été conclu le 2 février 2016 entre le centre hospitalier Louis Constant Fleming de Saint-Martin et la société Flydom NV, qui exerce sous l'enseigne Jetbudget. La société Inaer Helicopter France, classée en deuxième position, et dont l'offre avait été rejetée par notification de rejet le 29 décembre 2015, a demandé au tribunal administratif de Saint-Martin de prononcer, à titre principal, la nullité du marché public conclu le 2 février 2016 entre le centre hospitalier Louis Constant Fleming de Saint-Martin et la société Flydom NV ou, à titre subsidiaire, la résiliation dudit marché public. La société Babcock mission critical services (MCS) France, anciennement dénommée Inaer Helicopter France relève appel du jugement du 26 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Saint-Martin a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l'excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d'un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. Le tiers agissant en qualité de concurrent évincé de la conclusion d'un contrat administratif ne peut ainsi, à l'appui d'un recours contestant la validité de ce contrat, utilement invoquer, outre les vices d'ordre public, que les manquements aux règles applicables à la passation de ce contrat qui sont en rapport direct avec son éviction.

En ce qui concerne l'imprécision de la nature et de l'étendue des besoins à satisfaire :

3. Aux termes de l'article 5 du code des marchés publics : " La nature et l'étendue des besoins à satisfaire sont déterminés avec précision avant tout appel à la concurrence (...) ". Le pouvoir adjudicateur doit ainsi définir ses besoins avec suffisamment de précision pour permettre aux candidats de présenter une offre adaptée aux prestations attendues, compte tenu des moyens nécessaires pour les réaliser.

4. La société Babcock MCS France soutient que la nature et l'étendue des besoins à satisfaire n'ont pas été définies de manière précise, ce qui a donné un avantage compétitif à l'entreprise en place en méconnaissance des principes d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures.

5. L'avis d'appel public à la concurrence indique que le marché porte sur des " Prestations de transports sanitaires aériens des patients et des équipes médicales ". Selon l'article 1er du cahier des clauses techniques particulières (CCTP), le marché " a pour objet : prestations de transports aériens d'urgence des patients et des équipes médicales, au départ de Saint Martin, de jour ou de nuit, vers la Guadeloupe, ou la Martinique, pour le compte du centre Hospitalier Louis Constant Fleming ". L'article 3 du CCTP évalue à 250 le nombre de missions à réaliser annuellement. Les articles 3 à 6 du CCTP décrivent les moyens à mettre en oeuvre et notamment la fourniture d'un appareil mono moteur pressurisé et climatisé (les variantes étant autorisées en application de l'article 7 du règlement de consultation permettant ainsi de proposer une variante bi-moteurs), une disponibilité des équipements et du personnel 24h/24 tous les jours de l'année et les modalités de détermination du prix comprenant une part fixe d'immobilisation du matériel et du personnel dont l'intervention peut être sollicitée 24h/24 et tous les jours de l'année, et un montant forfaitaire des différents trajets aller et aller-retour, de jour ou de nuit, selon la destination. L'article 8 détaille les conditions d'exécution des prestations en précisant les modalités du déclenchement des interventions, les obligations du titulaire, le délai de prise en charge, les prescriptions particulières pour les patients contagieux et obèses et les articles 9 à 12 détaillent les caractéristiques de l'appareil, et notamment les conditions d'exploitation, les règles d'accessibilité, les caractéristiques de la cabine, les équipements de transmission et les équipements de sécurité, l'avitaillement de l'appareil et sa maintenance, les exigences en matière de personnels, celles pour le matériel embarqué et enfin l'obligation de formation du personnel médical. Le moyen tiré de ce que les besoins du pouvoir adjudicateur sont insuffisamment définis, en méconnaissance de l'article 5 du code des marchés publics, doit donc être écarté.

6. La société Babcock MCS France soutient également que l'absence de précisions du pouvoir adjudicateur sur la répartition des trajets Saint-Martin/Pointe-à-Pitre et Saint-Martin/Fort-de-France l'a lésée au stade de la présentation des offres en l'empêchant d'optimiser les prix proposés. Elle ajoute qu'aucun élément du cahier des charges ne permettait d'anticiper une telle répartition, le choix entre ces deux destinations y ayant été décrit comme dépendant uniquement d'impératifs médicaux qu'elle n'était pas en mesure d'identifier.

7. Il résulte du tableau d'analyses des offres que le pouvoir adjudicateur, qui n'était pas tenu de faire figurer une estimation de la répartition des vols selon leur destination et leur tranche horaire, a réalisé une comparaison identique pour chaque offre en terme d'activité à savoir, sur un total estimé EVASAN de 250 missions à réaliser annuellement, une évaluation des trajets Saint-Martin/Point-à-Pitre fixée à 74,8% et une évaluation des trajets Saint-Martin/Fort-de-France fixée à 25,2%.

8. Il ne résulte toutefois pas de l'instruction que l'absence d'indication dans les documents de la consultation de la répartition des vols ait empêché une réponse adaptée des candidats dits " entrants " au seul bénéfice du candidat dit " sortant " compte tenu de sa connaissance de la répartition moyenne des vols. Il résulte en effet notamment du tableau d'analyse financière des offres, que l'offre de la société attributaire a été faite à un prix supérieur à celui proposé par un autre candidat dit " entrant ". En outre, dans un courriel du 26 novembre 2015, la personne à contacter au sujet de ce marché a précisé à la société appelante qu'elle pouvait proposer le mode de facturation qui lui serait le plus adéquat en précisant " frais forfaitaire fixe mensuel ou trimestriel + frais forfaitaire à la mission en fonction du trajet (Saint-Martin/Point-à-Pitre évaluée ou Saint-Martin/Fort-de-France, aller simple et aller-retour). Si l'appelante a ensuite fait le choix de transmettre un bordereau de prix unitaire en faisant figurer une part fixe de 163 000 euros HT par mois et, s'agissant des vols, en proposant un coût horaire HT assorti du temps de vol qu'elle estime nécessaire pour chaque trajet, le pouvoir adjudicateur était tenu de prendre en compte ces éléments pour évaluer le prix de la prestation proposée et pouvoir la comparer aux autres. Par suite, la société Babcock MCS France ne démontre pas en quoi l'utilisation de la grille d'analyse financière décrite au point précédent l'aurait lésée, ni au demeurant, en quoi la prise en compte du temps de vol estimatif qu'elle a indiqué pour établir l'analyse financière de son offre lui aurait été préjudiciable.

9. Les prestations attendues étaient dès lors suffisamment décrites. Le moyen tiré de la rupture d'égalité de traitement des candidats compte tenu de l'imprécision de l'étendue des besoins à satisfaire doit, par conséquent, être écarté.

En ce qui concerne le défaut d'information quant aux critères retenus par l'acheteur public pour sélectionner les offres :

10. Aux termes du I de l'article 53 du code des marchés publics, alors en vigueur : " I.- Pour attribuer le marché au candidat qui a présenté l'offre économiquement la plus avantageuse, le pouvoir adjudicateur se fonde : / 1° Soit sur une pluralité de critères non discriminatoires et liés à l'objet du marché, notamment la qualité, le prix, la valeur technique, le caractère esthétique et fonctionnel, les performances en matière de protection de l'environnement, les performances en matière de développement des approvisionnements directs de produits de l'agriculture, les performances en matière d'insertion professionnelle des publics en difficulté, le coût global d'utilisation, les coûts tout au long du cycle de vie, la rentabilité, le caractère innovant, le service après-vente et l'assistance technique, la date de livraison, le délai de livraison ou d'exécution, la sécurité d'approvisionnement, l'interopérabilité et les caractéristiques opérationnelles. D'autres critères peuvent être pris en compte s'ils sont justifiés par l'objet du marché ; (...) 2° Soit, compte tenu de l'objet du marché, sur un seul critère, qui est celui du prix ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au pouvoir adjudicateur de déterminer l'offre économiquement la plus avantageuse en se fondant sur des critères permettant d'apprécier la performance globale des offres au regard de ses besoins. Ces critères doivent être liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution, être définis avec suffisamment de précision pour ne pas laisser une marge de choix indéterminée et ne pas créer de rupture d'égalité entre les candidats. Le pouvoir adjudicateur détermine librement la pondération des critères de choix des offres. Toutefois, il ne peut légalement retenir une pondération, en particulier pour le critère du prix ou du coût, qui ne permettrait manifestement pas, eu égard aux caractéristiques du marché, de retenir l'offre économiquement la plus avantageuse.

11. Le règlement de la consultation prévoyait que les offres seraient appréciées au regard de cinq critères pondérés, les moyens matériels, les moyens humains (effectifs et compétences), le délai d'intervention et organisation, le prix et la politique sociale et environnementale poursuivie par la société, les trois premiers critères entrant pour 23 pour cent dans la pondération, le prix, pour 18 pour cent et la politique sociale et environnementale pour 5 pour cent.

12. D'une part, il résulte de l'instruction que le pouvoir adjudicateur a porté à la connaissance des candidats les cinq critères de sélection des offres avec leur pondération. Contrairement à ce que soutient la société appelante, ces critères étaient définis de manière suffisamment précise et notamment leur contenu pouvait être aisément déduit du cahier des clauses techniques particulières. Le règlement de consultation précise également dans son article 4-1 la nécessité de produire notamment un mémoire technique, les qualifications professionnelles des membres du personnel avec copie de leurs diplômes et la politique de l'entreprise en matière d'insertion professionnelle des publics en difficultés. Si le centre hospitalier a fait usage d'éléments d'appréciation classés en 100 items, ces derniers ne révèlent pas que le pouvoir adjudicateur aurait cherché à satisfaire d'autres besoins et il ne résulte pas de l'instruction que ces éléments constituaient des critères à part entière d'appréciation des offres qui auraient dû être portés à la connaissance des candidats. En tout état de cause, la société Babcock MCS France n'établit pas qu'ils auraient pu influencer la préparation de son offre s'ils avaient été connus ou qu'ils ont eu un effet discriminatoire envers elle et qu'elle aurait ainsi été susceptible d'être lésée par ce manquement.

13. D'autre part, si elle soutient que ces cinq critères sont en fait complétés par des sous-critères parfaitement autonomes et érigés en critères de sélection, il résulte du tableau d'analyse des offres que les notes des candidats ont été obtenues en affectant à chacune des caractéristiques (items) des critères " moyens matériels ", " moyens humains, " délais d'intervention et organisation " et " politique sociale et environnementale " décrites par le cahier des clauses techniques particulières une cotation comprise entre 0 et 10. Si la société appelante soutient que ces items auraient dû figurer comme sous-critères des offres, la seule circonstance qu'ils aient été nécessaires à l'appréciation des offres ne suffit pas à établir qu'eu égard à leur importance ils auraient dû être regardés comme des sous-critères. Ces éléments d'appréciation n'étant ni hiérarchisés ni pondérés, la circonstance que le document de consultation ne précisait pas leur importance respective dans l'appréciation de la valeur technique de l'offre est sans incidence sur la régularité de la procédure de passation du marché. Dès lors, la société appelante n'est pas fondée à soutenir que son offre aurait été analysée selon des sous-critères qui n'auraient pas été portés à sa connaissance ou qui auraient été érigés en critères de sélection sans qu'elle en ait été préalablement informée, en méconnaissance de l'article 53 du code des marchés publics.

14. Enfin, contrairement à ce que soutient l'appelante, l'importance de ces éléments d'appréciation n'a pas eu pour effet de modifier la pondération des cinq critères prévus par le règlement de la consultation dès lors que chacun des éléments d'appréciation a été utilisé pour porter une appréciation globale sur les critères, à égalité avec les autres éléments d'appréciation.

15. Il résulte de ce qui précède que les dispositions de l'article 53 du code des marchés publics imposant au pouvoir adjudicateur d'informer les candidats des critères de sélection des offres ainsi que de leur pondération ou hiérarchisation n'ont pas été méconnues.

En ce qui concerne l'erreur manifeste dans l'appréciation de son offre :

16. Ainsi qu'il a été dit au point 12 du présent arrêt, il résulte des documents de la consultation et du rapport d'analyse des offres que le centre hospitalier Louis Constant Fleming a utilisé 100 items permettant d'apprécier de manière objective les offres de chaque candidat. L'appréciation des différents items est fondée sur des notes allant de 2 (nul ou sans réponse) à 10 (très satisfaisant). La société appelante soutient que le pouvoir adjudicateur a commis plusieurs erreurs manifestes d'appréciation sur un certain nombre d'items totalisant cent vingt points sans lesquelles son offre serait arrivée en tête.

17. Il résulte de l'instruction que s'agissant de l'item " langage naturel des pilotes " la société Babcock MCS France s'est vu attribuer la note de 8, inférieure de deux points à celle de 10 attribuée à la société attributaire, l'offre de cette dernière ayant été davantage valorisée notamment parce qu'elle privilégiait des pilotes ayant le français comme langue maternelle. La société Babcock MCS France se borne ensuite à contester l'appréciation portée par le centre hospitalier sur le nombre d'heures de vol que totalisait son aéronef au regard du nombre d'heures de vol que totaliserait l'aéronef de la société attributaire alors que la société attributaire dispose de deux appareils dont un très récent qui explique l'écart de deux points entre les deux appréciations. En ce qui concerne plus spécifiquement l'item " maintien des compétences des équipes médicales ", il a été considéré que les pièces produites, qui ont trait aux compétences dans le domaine du pilotage, ne permettaient pas d'apprécier cet élément. Dans ces conditions, l'évaluation des offres de la Babcock MCS France et de la société attributaire, affectées d'une différence totale de huit points, n'apparaît pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

18. Il résulte de l'instruction que s'agissant des items " nombre d'années d'expérience Evasan " et " nombre d'années d'existence de la compagnie " du critère " moyens humains " et de l'item " solutions de remplacement " du critère " moyens matériels " et des items " niveau assurances responsabilité civile " et " niveau assurances pour équipe médicale ", la société a obtenu la note maximale de 10 sur 10, tout comme la société attributaire.

19. Enfin, à supposer même que des erreurs aient pu affecter la notation mise en oeuvre s'agissant des items " anti collision teas ", " système anticollision terrain " et " radeau de survie " du critère " moyens matériels ", pour lesquels la société Babcock MCS France s'est vu attribuer, à chaque fois, la note de 2, inférieure de huit points à celle de 10 donnée à la société attributaire, ces erreurs, qui n'auraient donc pu concerner que 24 points au total, alors que l'écart entre l'offre de l'appelante et celle du candidat retenu s'établissait à 114 points, n'auraient pas conduit, au regard de l'ensemble des critères pondérés, à ce que l'offre économiquement la plus avantageuse ne soit pas choisie. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation des offres doit être écarté.

20. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la société Flydon NV, que la société Babcock MCS France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Saint-Martin a rejeté sa demande tendant à l'annulation du marché conclu le 2 février 2016 entre le centre hospitalier Louis Constant Fleming de Saint-Martin et la société Flydom NV.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier Louis Constant Fleming et de la société Flydom NV, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que la société Babcock MCS France demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société Babcock MCS France une somme de 1 500 euros à verser au centre hospitalier Louis Constant Fleming et une somme de 1 500 euros à verser à la société Flydom NV sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Babcock MCS France est rejetée.

Article 2 : La société Babcock MCS France versera au centre hospitalier Louis Constant Fleming et à la société Flydom NV la somme de 1 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Babcock MCS France, au centre hospitalier Louis Constant Fleming et à la société Flydom NV.

Copie en sera adressée au préfet de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy.

Délibéré après l'audience du 29 octobre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme G..., présidente-assesseure,

Mme E... F..., premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 décembre 2020.

Le président,

Éric Rey-Bèthbéder

La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au préfet de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

8

N° 18BX03535


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX03535
Date de la décision : 03/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : CABINET PARME

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-12-03;18bx03535 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award