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03/12/2020 | FRANCE | N°18BX00531

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 03 décembre 2020, 18BX00531


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... D... et Mme C... B..., épouse D..., ont demandé au tribunal administratif de Pau la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été soumis au titre des années 2010 et 2011.

Par un jugement n° 1600676 du 7 décembre 2017, le tribunal administratif de Pau a constaté l'existence d'un non-lieu à statuer à hauteur du montant du dégrèvement prononcé en cours d'instance et a rejeté le surplus de leur demande.

Procédu

re devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 6 février 2018 et le 15 o...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... D... et Mme C... B..., épouse D..., ont demandé au tribunal administratif de Pau la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été soumis au titre des années 2010 et 2011.

Par un jugement n° 1600676 du 7 décembre 2017, le tribunal administratif de Pau a constaté l'existence d'un non-lieu à statuer à hauteur du montant du dégrèvement prononcé en cours d'instance et a rejeté le surplus de leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 6 février 2018 et le 15 octobre 2020, M. et Mme D..., représentés par Me A..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 7 décembre 2017 ;

2°) à titre principal, de leur accorder la décharge des suppléments d'impositions litigieux ;

3°) de prononcer le sursis à exécution du jugement attaqué ;

4°) à titre subsidiaire, de réduire les suppléments d'impositions en litige à concurrence, d'une part, de la prise en compte de la situation d'invalidité de Mme D... et, d'autre part, de la décharge des majorations pour manquement délibéré ;

5°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la procédure d'imposition est irrégulière en ce qu'elle a méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, aucune mention de l'origine des rectifications n'ayant été effectuée par le service ; de plus, les documents ayant servi à ces rectifications n'ont pas été communiqués en temps utile à M. D... ;

- la procédure est également irrégulière en raison de ce que l'administration n'a pas informé M. D... des motifs du redressement notifié à la société, alors qu'elle entend l'imposer sur le fondement du 1 du I de l'article 109 du code général des impôts ;

- s'agissant du bien-fondé des suppléments d'impositions litigieux, les sommes regardées par le service comme constituant la rémunération de M. D... en tant que gérant correspondent en réalité aux montants perçus en tant que loueur de fonds, déclarés en tant que tels ;

- par ailleurs, l'administration n'établit pas que certaines sommes figurant au débit du compte 471 auraient été désinvesties à son profit ;

- en ce qui concerne les revenus fonciers, seuls sont imposables les loyers de 500 euros mensuels qui ont été perçus effectivement deux fois ;

- en outre, il convient, à titre subsidiaire, de tenir compte des réductions d'impôt auxquelles ouvre droit la situation d'invalidité de Mme D... ;

- enfin, les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas justifiées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 août 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions de la requête relatives aux impositions assises sur la rémunération de gérant et les bénéfices industriels et commerciaux de M. D... sont irrecevables en l'absence de moyens ;

- les autres moyens soulevés par M. et Mme D... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rey-Bèthbéder, président-rapporteur,

- les conclusions de Mme Aurélie Chauvin, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. À la suite de la vérification de comptabilité de la société AFUR, dont M. D... est le gérant, M. et Mme D... ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces au titre des années 2010 et 2011, à l'issue duquel leur a été adressée, le 13 juin 2013, selon la procédure de redressement contradictoire, une proposition de rectification portant à leur connaissance l'intention du service de procéder à des rehaussements d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant de rectifications en matière de traitements et salaires, de bénéfices industriels et commerciaux, de revenus fonciers et de revenus distribués, réintégrant notamment dans leurs revenus imposables des sommes regardées comme leur ayant été distribuées par la société AFUR.

2. M. et Mme D... relèvent appel du jugement du 7 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Pau, après avoir constaté l'existence d'un non-lieu à statuer au titre de l'année 2011 à concurrence de la somme de 24 294 euros s'agissant du supplément d'impôt sur le revenu et de celle de 10 972 euros en ce qui concerne les suppléments de contributions sociales, a rejeté le surplus de leur demande.

Sur la régularité de la procédure :

3. À l'appui de leurs moyens tirés de l'insuffisante motivation de la proposition de rectification qui leur a été adressée, en ce qu'elle n'indiquait pas les motifs des rectifications apportées au résultat de la société AFUR, et de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, les appelants ne se prévalent devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas utilement la réponse apportée par le tribunal administratif. Par suite, il y a lieu de rejeter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.

Sur le bien-fondé des suppléments d'impositions en litige :

En ce qui concerne les revenus regardés comme distribués :

4. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. Les sommes imposables sont déterminées pour chaque période retenue pour l'établissement de l'impôt sur les sociétés par la comparaison des bilans de clôture de ladite période et de la période précédente ". Aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : a. sauf preuve contraire, les sommes mises à disposition des associés directement ou par des personnes ou sociétés interposées à titre d'avances de prêts ou d'acomptes... ". Et aux termes du 3° de l'article 120 du même code, sont considérées comme des revenus " les répartitions faites aux associés, aux actionnaires et aux porteurs de parts de fondateur des mêmes sociétés, à un titre autre que celui de remboursement d'apports ou de primes d'émission ".

5. Il résulte de l'instruction qu'une somme de 144 000 € a été comptabilisée, au cours de l'exercice 2011, par la société AFUR au débit d'un compte fournisseur (401) au nom de M. D..., en sa qualité de loueur de fonds, et au crédit du compte Banque 512. Le 31 décembre 2011, ce compte fournisseur a été crédité, notamment, d'une somme de 38 945,87 € inscrite en débit d'un compte d'attente (471), lequel s'est retrouvé débiteur du même montant. Au cours du contrôle dont elle a fait l'objet, la société AFUR a indiqué que cette somme était une avance sur le prix de vente du fonds de commerce appartenant à M. D..., réalisée le 31 décembre 2012. Puis, par lettre du 1er août 2013, en réponse à la proposition de rectifications, les époux D... ont également affirmé que la somme de 38 945,87 € correspondait à un paiement partiel ayant vocation à s'imputer sur la première échéance du prix de vente dudit fonds de commerce. Dans sa réponse aux observations des contribuables, l'administration a pris acte de cette information et en a tiré les conséquences en considérant que cette somme avait été mise à disposition de M. D... à titre d'avance imposable en vertu des dispositions du a) de l'article 111 du code général des impôts.

6. Si les appelants soutiennent que cette somme ne saurait être regardée comme ayant été distribuée à M. D..., en raison de ce qu'elle provient d'un compte d'attente, qu'elle n'a pas été désinvestie de la société AFUR et qu'elle s'analyse en un paiement anticipé du prix de cession du fonds à la société, il résulte de l'inscription de cette somme dans un compte de dette ouvert au nom de M. D..., que, comme l'a jugé le tribunal, elle doit être regardée comme ayant été mise à disposition de ce dernier, aucun élément de l'instruction ne suggérant que la société n'était pas en mesure de se libérer de cette dette compte tenu notamment de l'état de ses moyens de paiement. Est sans aucune influence à cet égard la circonstance qu'elle ait transité par un compte d'attente. En outre, l'acte de cession du fonds de commerce signé le 31 décembre 2012 entre M. D... et cette société ne prévoyait aucune échéance de paiement avant cette date si bien que le fondement contractuel allégué de cette avance ne peut être retenu. Ainsi, c'est en tout état de cause à bon droit que l'administration et les premiers juges ont estimé que la somme de 38 945,87 € devait être regardée comme ayant été mise à la disposition de M. D... et constituait une distribution imposable à son nom dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement du a) de l'article 111 du code général des impôts.

En ce qui concerne les traitements et salaires :

7. Il résulte de l'instruction que la société AFUR a débité le compte 641-105 (rémunération du gérant majoritaire) de 44 100 € en 2010 et de 32 000 € en 2011 et que ces sommes n'ont pas été déclarées par M. et Mme D... dans leurs déclarations n° 2042 afférentes aux années 2010 et 2011. Si les appelants prétendent que ces sommes s'analyseraient en réalité en des rémunérations de l'activité de loueur de fonds de M. D..., les déclarations n° 2031 souscrites au titre des exercices 2010 et 2011 qu'ils produisent ne corroborent pas leurs allégations. Par conséquent, c'est à bon droit que les sommes précitées ont été imposées au titre des années concernées entre les mains des appelants dans la catégorie des traitements et salaires.

En ce qui concerne les revenus fonciers :

8. Aux termes de l'article 12 du code général des impôts : " L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année ". Aux termes de l'article 14 du même code : " Sous réserve des dispositions de l'article 15, sont compris dans la catégorie des revenus fonciers, lorsqu'ils ne sont pas inclus dans les bénéfices d'une entreprise industrielle, commerciale ou artisanale, d'une exploitation agricole ou d'une profession non commerciale : 1° Les revenus des propriétés bâties, telles que maisons et usines (...) ". Enfin, aux termes de l'article 28 de ce code : " Le revenu net foncier est égal à la différence entre le revenu brut et le total des charges de la propriété ".

9. M. et Mme D... sont propriétaires d'une maison à usage d'habitation sise 3 rue du Pastou à Boucau (Pyrénées-Atlantiques). Ils n'ont pas déclaré les revenus fonciers, d'un montant de 10 200 €, provenant de la location de cette maison pendant l'année 2011, ainsi qu'ils l'ont reconnu dans une lettre du 3 avril 2013. S'ils soutiennent n'avoir perçu en réalité que deux fois la somme de 500 euros au titre de la location de cette maison, il résulte de l'instruction que ces deux derniers loyers concernent d'autres locaux, mis à la disposition de la société AFUR. Par suite, ils ne sont pas fondés à contester la réintégration des revenus fonciers relatifs à la maison d'habitation précitée au titre de l'année 2011

En ce qui concerne la prise en compte de la situation d'invalidité de Mme D... :

10. À l'appui du moyen tiré de ce que la situation d'invalidité de Mme D... n'aurait pas été prise en compte au titre de l'année 2011, les appelants ne se prévalent devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critiquent pas utilement la réponse apportée par le tribunal administratif. Par suite, il y a lieu de rejeter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.

Sur les pénalités :

11. À l'appui du moyen tiré de ce que les pénalités pour manquement délibéré qui leur ont été infligées n'étaient pas justifiées, les appelants ne se prévalent devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critiquent pas utilement la réponse apportée par le tribunal administratif. Par suite, il y a lieu de rejeter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à obtenir la décharge des suppléments d'impositions demeurant en litige. Par voie de conséquence, leurs conclusions relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent également qu'être rejetées.

Sur les conclusions relatives au sursis à exécution du jugement attaqué :

13. Le présent arrêt, qui statue au fond sur la requête en annulation présentée par M. et Mme D... à l'encontre du jugement du 7 décembre 2017, rend sans objet ses conclusions aux fins de sursis à exécution de ce jugement.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D..., à Mme C... B..., épouse D..., et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Ouest.

Délibéré après l'audience du 29 octobre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme F..., présidente-assesseure,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 décembre 2020.

Le président,

Éric Rey-Bèthbéder

La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 18BX00531


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX00531
Date de la décision : 03/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Eric REY-BETHBEDER
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : ACBC AVOCATS BAYONNE

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-12-03;18bx00531 ?
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