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30/11/2020 | FRANCE | N°20BX02411

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 30 novembre 2020, 20BX02411


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... F... a demandé au tribunal administratif de La Guyane d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2018 par lequel le préfet de la Guyane a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1801680 du 11 juin 2020, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 jui

llet 2020, M. F..., représenté par

Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... F... a demandé au tribunal administratif de La Guyane d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2018 par lequel le préfet de la Guyane a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1801680 du 11 juin 2020, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 juillet 2020, M. F..., représenté par

Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guyane du 11 juin 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2018 par lequel le préfet de la Guyane a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Guyane de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de M. F... la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les premiers juges ont procédé à une substitution de motifs sans en respecter les conditions parmi lesquelles celle de le mettre à même de présenter ses observations ;

- l'arrêté du 5 novembre 2018 est illégal dès lors que le préfet n'a pas répondu à sa demande de communication des motifs de la décision implicite de rejet de sa demande de titre de séjour dans le délai d'un mois qui lui était imparti à cet effet ;

- cet arrêté a été notifié à son ancienne adresse ;

- il est insuffisamment motivé ;

- il a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une illégalité fautive de nature à engager la responsabilité de l'administration à son égard.

La demande d'aide juridictionnelle formée par M. F... a été rejetée par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 22 octobre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. F..., ressortissant togolais né le 10 juin 1980, est entré en France, selon ses déclarations, en 2013. Le 25 novembre 2017, il s'est marié avec une ressortissante de nationalité française. Le 12 mars 2018, il a sollicité un titre de séjour mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 4° du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile. Par un arrêté du 5 novembre 2018, le préfet de la Guyane a refusé de faire droit à cette demande, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. F... relève appel du jugement du 11 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le silence gardé pendant plus de quatre mois sur les demandes de titres de séjour vaut décision implicite de rejet. ".

3. Si le silence gardé par l'administration pendant plus de quatre mois sur une demande de titre de séjour fait naître une décision implicite de rejet qui peut être déférée au juge de l'excès de pouvoir, une décision explicite de rejet intervenue postérieurement, qu'elle fasse suite ou non à une demande de communication des motifs de la décision implicite présentée en application de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration, se substitue à la première décision. Il en résulte que les conclusions à fin d'annulation de cette première décision doivent être regardées comme dirigées contre la seconde.

4. Ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, les conclusions à fin d'annulation présentées par M. F... à l'encontre d'une décision implicite portant refus de titre de séjour devaient être regardées comme dirigées contre l'arrêté du 5 novembre 2018 par lequel le préfet de la Guyane a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Contrairement à ce que soutient l'appelant, une telle substitution ne saurait être qualifiée de substitution de motif qui n'aurait pu être opérée qu'après l'avoir mis à même de présenter ses observations. Dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que le tribunal aurait méconnu son office et entaché, pour ce motif, son jugement d'irrégularité.

Sur le bien-fondé du jugement :

5. En premier lieu, ainsi qu'il a été dit au point 4, c'est à bon droit que le tribunal a regardé les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite de refus de titre de séjour comme dirigées contre l'arrêté du 5 novembre 2018. Cet arrêté ne pouvant être utilement contesté au motif que l'administration aurait méconnu les dispositions de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration en ne communiquant pas à M. F... les motifs de sa décision implicite dans le délai d'un mois qu'elles lui impartissent, le moyen tiré de la méconnaissance par le préfet de la Guyane desdites dispositions ne peut qu'être écarté.

6. En deuxième lieu, M. F... se borne à reprendre en appel les moyens, qui ont bien été analysés par le tribunal, tirés de la notification irrégulière et de l'insuffisance de motivation de l'arrêté du 5 novembre 2018, sans critiquer utilement les motifs retenus par le tribunal pour les écarter et sans apporter d'élément de fait ou de droit nouveau. Dans ces conditions, il y a lieu, par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges, d'écarter ces moyens.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

8. A l'appui du moyen tiré de ce que le préfet de la Guyane a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels l'arrêté litigieux a été pris et a ainsi méconnu les stipulations précitées, M. F... soutient être présent en France depuis 2013, être marié depuis le mois de novembre 2017 avec une ressortissante française qui présente un état anxio-dépressif dans le cadre de diverses pathologies parmi lesquelles une discopathie dégénérative, et devoir assurer l'accompagnement médical de son beau-fils atteint d'un retard de développement. Si M. F... justifie de sa présence sur le territoire français depuis l'année 2013 par la production, notamment, de récépissés constatant le dépôt d'une demande d'asile, de factures ainsi que de documents médicaux et qu'il est constant qu'il est marié avec une ressortissante française depuis le 25 novembre 2017, il n'établit pas l'existence d'une vie commune antérieure à son mariage récent à la date de l'arrêté contesté. En se bornant à produire une attestation du 13 avril 2018 indiquant qu'il accompagne son beau-fils au cabinet d'orthophonie en l'absence de sa mère et les pièces médicales décrivant les pathologies de cette dernière, il n'apporte pas suffisamment d'éléments susceptibles d'établir la nécessité de sa présence à leurs côtés. Dans ces conditions et eu égard notamment aux conditions de séjour de M. F... en France, alors même que ce dernier a été embauché dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er novembre 2018, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

9. En quatrième lieu, l'arrêté du 5 novembre 2018 n'étant entaché d'aucune illégalité fautive, la responsabilité de l'Etat ne saurait être engagée.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 novembre 2018 du préfet de la Guyane. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise au préfet de la Guyane.

Délibéré après l'audience du 2 novembre 2020 à laquelle siégeaient :

- M. Dominique Naves, président,

- Mme C... B..., présidente-assesseure,

- Mme D... E..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 novembre 2020.

Le rapporteur,

Karine B...Le président,

Dominique Naves

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 20BX02411 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX02411
Date de la décision : 30/11/2020
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: Mme Karine BUTERI
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : BALIMA CHRIST ERIC

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-11-30;20bx02411 ?
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