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16/11/2020 | FRANCE | N°19BX04457

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 16 novembre 2020, 19BX04457


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La région Réunion a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler le titre de recette émis le 21 août 2018 par le président du syndicat mixte de traitement des déchets des microrégions Sud et Ouest de La Réunion (syndicat mixte " ILEVA ") en vue du recouvrement de la contribution, fixée à 1 693 484 euros, mise à sa charge au titre des frais d'administration générale dudit syndicat mixte pour l'année 2018.

Par un jugement n° 1900068 du 26 septembre 2019, le tribunal administratif

de La Réunion a annulé le titre de recette émis le 21 août 2018 par le président du s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La région Réunion a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler le titre de recette émis le 21 août 2018 par le président du syndicat mixte de traitement des déchets des microrégions Sud et Ouest de La Réunion (syndicat mixte " ILEVA ") en vue du recouvrement de la contribution, fixée à 1 693 484 euros, mise à sa charge au titre des frais d'administration générale dudit syndicat mixte pour l'année 2018.

Par un jugement n° 1900068 du 26 septembre 2019, le tribunal administratif de La Réunion a annulé le titre de recette émis le 21 août 2018 par le président du syndicat mixte de traitement des déchets ILEVA en vue du recouvrement de la contribution, fixée à

1 693 484 euros, mise à la charge de la région Réunion au titre des frais d'administration générale dudit syndicat mixte pour l'année 2018.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 26 novembre 2019 et le 17 mars 2020, le syndicat mixte de traitement des déchets ILEVA, représenté par Me B... et Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du

26 septembre 2019 ;

2°) de rejeter la demande de la région Réunion ;

3°) de mettre à la charge de la région Réunion la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- le jugement est entaché d'une insuffisance de motivation en ce qu'il a énoncé qu'il était constant que, dans leur version antérieure à celle approuvée par l'arrêté préfectoral du 29 décembre 2016, les statuts ne soumettaient pas la région Réunion à l'obligation de contribuer financièrement aux frais d'administration générale de la structure ;

- il est également entaché d'une insuffisance de motivation dès lors que le tribunal n'a pas expliqué les raisons pour lesquelles il a estimé que la version antérieure des statuts ne l'autorisait pas à imposer une contribution à ses membres et notamment à la région Réunion.

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement :

- le titre de recettes ne pouvait pas être annulé " par voie de conséquence " dès lors qu'il n'a pas été pris en application de l'arrêté préfectoral du 29 décembre 2016 modifiant les statuts et pouvait être légalement émis en l'absence de cette modification statutaire et que la délibération du 22 décembre 2017 n'a pas davantage été prise en application de l'arrêté préfectoral du 29 décembre 2016 ;

- l'exception d'illégalité était irrecevable ;

- l'arrêté préfectoral du 29 décembre 2016 ne pouvait pas être annulé par le tribunal dès lors, d'une part, qu'il revêt le caractère d'un acte superfétatoire et qu'en tout état de cause, le délai de recours était expiré ; d'autre part, la suppression de la clause générale de compétence par la loi NOTRe n'a pas enlevé sa compétence à la région Réunion pour participer et contribuer au financement des frais de fonctionnement du syndicat ;

- les autres moyens soulevés en première instance sont repris.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 février 2020, la région Réunion, représentée par Me H..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge du syndicat mixte de traitement des déchets ILEVA de la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Par une ordonnance du 17 février 2020 la clôture de l'instruction a été fixée au 18 mars 2020.

Un mémoire pour la région Réunion a été enregistré le 24 septembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C... A... ;

- les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public ;

- et les observations de Me G... B..., représentant le syndicat mixte ILEVA et de Me H..., représentant la région Réunion.

Considérant ce qui suit :

1. Le syndicat mixte de traitement des déchets des microrégions Sud et Ouest de La Réunion, dénommé syndicat mixte de traitement des déchets ILEVA, a été créé par un arrêté du préfet de La Réunion du 29 janvier 2014. Ce syndicat mixte ouvert regroupait initialement la communauté intercommunale des villes solidaires (CIVIS), la communauté d'agglomération du sud (CASUD), la communauté d'agglomération du territoire de la côte ouest (TCO), la région Réunion et le département de La Réunion, et avait pour objet l'exercice de la compétence " traitement des déchets ménagers ". Par une délibération du

15 juin 2016, le comité syndical du syndicat mixte de traitement des déchets ILEVA a approuvé une modification des statuts de ce syndicat se caractérisant notamment par une redéfinition, à l'article 14.1 desdits statuts, des modalités de la contribution financière des membres le composant, la région Réunion étant nouvellement appelée à contribuer aux frais d'administration générale du syndicat mixte, avec une quote-part fixée " à hauteur de 30 % minimum ". Par un arrêté du 29 décembre 2016 portant modification des statuts du syndicat mixte ILEVA, le préfet de La Réunion a acté, à l'article 1er, le retrait du département de La Réunion de ce syndicat mixte, qui avait fait l'objet de délibérations du conseil départemental et a autorisé, à l'article 3, l'ensemble des modifications statutaires figurant dans la délibération du 15 juin 2016, y compris la nouvelle rédaction de l'article 14.1 des statuts. A la suite de cette modification statutaire, le comité syndical du syndicat mixte de traitement des déchets ILEVA, par une délibération du 22 décembre 2017, a arrêté la répartition des contributions financières des membres du syndicat pour l'année 2018 et, dans ce cadre, a mis à la charge de la région Réunion la somme de 1 693 484 euros au titre de sa contribution aux frais d'administration générale. Sur la base de cette délibération, le président du syndicat mixte a émis le 21 août 2018 un titre de recette, notifié à son destinataire le 3 décembre 2018, invitant la région Réunion à s'acquitter de la somme de 1 693 484 euros. Par un jugement du

26 septembre 2019, le tribunal administratif de la Réunion a annulé ce titre de recette. Le syndicat mixte de traitement des déchets ILEVA relève appel de ce jugement.

2. En raison des effets qui s'y attachent, l'annulation pour excès de pouvoir d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, emporte, lorsque le juge est saisi de conclusions recevables, l'annulation par voie de conséquence des décisions administratives consécutives qui n'auraient pu légalement être prises en l'absence de l'acte annulé ou qui sont, en l'espèce, intervenues en raison de l'acte annulé. Il en va ainsi, notamment, des décisions qui ont été prises en application de l'acte annulé et de celles dont l'acte annulé constitue la base légale.

3. Par un jugement du 24 juin 2019, le tribunal administratif de La Réunion a annulé l'arrêté du préfet de La Réunion du 29 décembre 2016 en tant qu'il modifie l'article 14.1 des statuts du syndicat mixte prévoyant la contribution financière de la région Réunion aux frais d'administration générale " à hauteur de 30% minimum ". Estimant par ailleurs, ainsi que le soutenait la région Réunion, que l'annulation de cet arrêté devait entraîner, par voie de conséquence, l'annulation de la délibération du comité syndical du syndicat mixte de traitement des déchets ILEVA du 22 décembre 2017 en tant qu'elle met à sa charge pour l'année 2018 une contribution pour frais d'administration générale fixée à 1 693 484 euros, le tribunal a annulé cette délibération par un jugement du 26 septembre 2019.

4. Toutefois, par un arrêt de ce jour n°s 19BX03439, 20BX00345, la cour annule le jugement du 24 juin 2019 en tant qu'il annule l'arrêté du préfet de La Réunion du

29 décembre 2016 modifiant l'article 14.1 des statuts du syndicat mixte relatif à la contribution financière de ses membres et rejette comme étant dirigées contre un acte superfétatoire et donc irrecevables les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté préfectoral du 29 décembre 2016 présentées devant le tribunal administratif de La Réunion. Par un autre arrêt de ce jour n°s 19BX04459, 20BX00347, la cour annule le jugement du 26 septembre 2019 et rejette les conclusions à fin d'annulation de la délibération du 22 décembre 2017 présentées devant le tribunal administratif de La Réunion. Dès lors, le moyen tiré par voie d'exception de l'illégalité de cet arrêté préfectoral étant inopérant et la délibération du 22 décembre 2017 n'étant pas entachée d'illégalité, le syndicat mixte de traitement des déchets ILEVA est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 26 septembre 2019, le tribunal administratif de La Réunion a annulé le titre de recette émis le 21 août 2018 par voie de conséquence de l'annulation de l'arrêté préfectoral du 29 décembre 2016 et de la délibération du comité syndical du 22 décembre 2017. Il y a lieu, pour ce motif, d'annuler le jugement contesté sans qu'il soit besoin d'examiner sa régularité.

5. Il y a lieu pour la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la région Réunion devant le tribunal administratif de La Réunion.

En ce qui concerne les autres moyens :

6. En premier lieu, contrairement à ce qu'il est soutenu par la région Réunion, l'émission du titre de recette litigieux en vue du recouvrement de la contribution mise à sa charge au titre des frais d'administration générale du syndicat mixte pour l'année 2018 ne revêt pas le caractère d'une sanction. Dès lors, le moyen tiré du défaut du caractère contradictoire de la procédure est inopérant.

7. En second lieu, le moyen tiré de ce que la somme de 1 693 484 euros constituerait une libéralité consentie par la région Réunion au profit du syndicat mixte de traitement des déchets ILEVA n'est pas assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

8. Il résulte de tout ce qui précède que le syndicat mixte de traitement des déchets ILEVA est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du

26 septembre 2019, le tribunal administratif de La Réunion a annulé le titre de recette émis le 21 août 2018 en vue du recouvrement de la contribution, fixée à 1 693 484 euros, mise à la charge de cette collectivité au titre des frais d'administration générale de ce syndicat mixte pour l'année 2018. Sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées à la demande de première instance, les conclusions tendant à l'annulation de ce titre de recette présentées par la région Réunion devant le tribunal administratif de La Réunion doivent donc être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la région Réunion le versement au syndicat mixte de traitement des déchets ILEVA de la somme de 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, ces mêmes dispositions font obstacle à ce que la somme demandée par la région Réunion au même titre soit mise à la charge du syndicat mixte de traitement des déchets ILEVA dès lors qu'il n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1900068 du tribunal administratif de La Réunion du

26 septembre 2019 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la région Réunion devant le tribunal administratif de La Réunion est rejetée.

Article 3 : La région Réunion versera au syndicat mixte de traitement des déchets ILEVA la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la région Réunion au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la région Réunion, et au syndicat mixte de traitement des déchets des microrégions Sud et Ouest de La Réunion. Copie en sera adressée au préfet de La Réunion.

Délibéré après l'audience du 5 octobre 2020 à laquelle siégeaient :

- M. Dominique Naves, président,

- Mme C... A..., présidente-assesseure,

- Mme D... F..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 16 novembre 2020.

Le rapporteur,

Karine A...Le président,

Dominique Naves

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au préfet de La Réunion, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

.

N° 19BX04457 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX04457
Date de la décision : 16/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Collectivités territoriales - Coopération - Finances des organismes de coopération - Syndicats mixtes.

Procédure - Introduction de l'instance - Décisions pouvant ou non faire l'objet d'un recours - Actes ne constituant pas des décisions susceptibles de recours.

Procédure - Pouvoirs et devoirs du juge - Questions générales - Moyens - Exception d'illégalité.


Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: Mme Karine BUTERI
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : VEIL JOURDE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-11-16;19bx04457 ?
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