La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/10/2020 | FRANCE | N°20BX01163

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 08 octobre 2020, 20BX01163


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2019 par lequel le préfet de la Gironde a décidé son transfert aux autorités allemandes, responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1905484 du 20 novembre 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 mars 2020, M. A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annu

ler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 20 novembre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2019 par lequel le préfet de la Gironde a décidé son transfert aux autorités allemandes, responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1905484 du 20 novembre 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 mars 2020, M. A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 20 novembre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2019 du préfet de la Gironde décidant son transfert aux autorités allemandes ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui remettre une attestation de demande d'asile et un formulaire de demande d'asile destiné à l'Office de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), et à défaut de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 72 heures, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au bénéfice de son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué méconnaît les articles 3.2 et 17 du règlement 604/2013/UE du 26 juin 2013, le préfet ayant commis une erreur manifeste dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire et dans l'appréciation de sa situation dès lors qu'en cas de remise aux autorités allemandes, il encourt un risque d'éloignement à destination de son pays d'origine sans examen de sa demande d'asile ou à tout le moins sans examen dans des conditions conformes aux garanties applicables aux demandeurs d'asile dans l'Union européenne ;

- il méconnaît également l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 27 février 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- les règlements (CE) n° 1560/2003 du 2 septembre 2003 et (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant nigérian né le 10 octobre 1986, a déclaré être entré en France le 28 avril 2019. Le 17 mai 2019, il a déposé une demande d'asile auprès du préfet de la Gironde. Le relevé de ses empreintes décadactylaires ayant révélé qu'il avait introduit une première demande d'asile en Allemagne le 28 novembre 2013, les autorités allemandes ont été saisies le 5 juillet 2019 d'une demande de reprise en charge de l'intéressé sur le fondement de l'article 18-1 b) du règlement (UE) n° 604/2013. Elles ont accepté explicitement cette reprise en charge le 15 juillet 2019 sur le fondement de l'article 18-1 d) du même règlement UE n° 604/2013. Par un arrêté du 29 octobre 2019, le préfet de la Gironde a décidé le transfert de M. A... aux autorités allemandes en application des dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. A... relève appel du jugement du 20 novembre 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Tant l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne stipulent : " Nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Par ailleurs, selon l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 : " 1. Les États membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux, y compris à la frontière ou dans une zone de transit. La demande est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable. 2. Lorsqu'aucun État membre responsable ne peut être désigné sur la base des critères énumérés dans le présent règlement, le premier État membre auprès duquel la demande de protection internationale a été introduite est responsable de l'examen. / Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. / Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un État membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier État membre auprès duquel la demande a été introduite, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable devient l'État membre responsable. ". L'article 17 de ce même règlement (UE) n° 604/2013 précise : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. (...) ". La faculté laissée à chaque Etat membre, par les dispositions précitées, de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le même règlement, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.

3. M. A... soutient que le préfet de la Gironde a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation en ne faisant pas usage de son pouvoir discrétionnaire et en décidant de le transférer aux autorités allemandes responsables de sa demande d'asile dès lors qu'en cas de remise auxdites autorités il encourt un risque d'éloignement à destination de son pays d'origine sans examen de sa demande d'asile ou à tout le moins sans examen dans des conditions conformes aux garanties applicables aux demandeurs d'asile dans l'Union européenne. Toutefois, la République fédérale d'Allemagne, Etat membre de l'Union européenne, est partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. M. A... ne produit aucun élément de nature à établir qu'il existerait des raisons sérieuses de croire à l'existence de défaillances systémiques en Allemagne dans la procédure d'asile ou que les juridictions allemandes n'auraient pas traité sa demande d'asile dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. En outre, si M. A... soutient, d'ailleurs sans autre précision, qu'il est malade, il n'établit pas, par la seule production d'une attestation de médecins du monde du 7 novembre 2019 mentionnant l'existence de consultations psychiatriques entre juin et novembre 2019, l'impossibilité dans laquelle il se trouverait de bénéficier d'un suivi médical en Allemagne.

4. Dès lors, c'est à bon droit que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a écarté les moyens tirés par l'appelant de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ainsi que des articles 3 et 17 du règlement UE n° 604/2013 du 26 juin 2013, le préfet n'ayant pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 octobre 2019 du préfet de la Gironde. Par voie de conséquence il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 7 septembre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

Mme D... C..., présidente-assesseure,

Mme Sylvie Cherrier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 octobre 2020.

Le rapporteur,

Karine C...Le président,

Pierre Larroumec

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20BX01163


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX01163
Date de la décision : 08/10/2020
Type d'affaire : Administrative

Analyses

095-02-03-03-01


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: Mme Karine BUTERI
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : DUTEN

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-10-08;20bx01163 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award