Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
I. Mme L... K... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 28 septembre 2015 par laquelle la directrice des ressources humaines de la société Orange a fixé au 4 février 2014 la date de consolidation de son état de santé à la suite de l'accident du travail dont elle a été victime le 3 décembre 2013 et a considéré que ses arrêts de travail et ses soins étaient pris en charge jusqu'à cette date, ainsi que la décision implicite du 5 janvier 2016 par laquelle la société Orange a rejeté son recours gracieux contre cette décision.
Par un jugement n° 1600989 du 19 mars 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
II. Mme L... K... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux, d'une part, d'annuler la décision du 18 novembre 2015 la plaçant en disponibilité d'office du 24 février 2015 au 31 juillet 2015 et la déclarant apte à reprendre ses fonctions à temps complet à compter du 1er août 2015, ainsi que la décision implicite du 19 mars 2016 par laquelle la société Orange a rejeté son recours gracieux dirigé contre cette décision, et d'autre part, de condamner la société Orange à lui verser la somme de 1 500 euros en réparation des préjudices matériels et moraux causés par l'illégalité de ces décisions.
Par un jugement n°16002321 du 19 mars 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée sous le n°18BX02125, le 25 mai 2018, Mme K..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°1600989 du 19 mars 2018 du tribunal administratif de Bordeaux ;
2°) d'annuler la décision du 28 septembre 2015 par laquelle la directrice des ressources humaines de la société Orange a fixé au 4 février 2014 la date de consolidation de son état de santé à la suite de l'accident du travail dont elle a été victime le 3 décembre 2013, ainsi que la décision implicite du 5 janvier 2016 par laquelle la société Orange a rejeté son recours gracieux contre cette décision ;
3°) de mettre à la charge de la société Orange la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision en litige est entachée d'incompétence, dès lors que si le signataire disposait d'une délégation de signature pour signer les décisions relatives aux congés de toute nature, il n'est pas établi qu'il disposait d'une délégation de signature pour prendre des décisions de non-imputabilité au service des arrêts et soins d'un agent et pour fixer le date de consolidation d'un état de santé ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle retire illégalement la décision du 24 janvier 2014 reconnaissant imputable au service son accident du 3 décembre 2013, ainsi que toutes les décisions en vertu desquelles la société Orange a décidé chaque mois de prendre en charge ses arrêts et ses soins jusqu'au 31 juillet 2017 ;
- en outre, la société Orange ne pouvait pas remettre en cause l'imputabilité au service de son accident de service après l'expiration du délai de saisine de la commission de réforme ;
- la consultation de la commission de réforme en juillet 2015, puis la saisine du comité médical sur la disponibilité d'office pour maladie est tardive, dès lors que la commission de réforme aurait dû être obligatoirement consultée avant la décision de la société Orange reconnaissant son accident du 3 décembre 2013 comme imputable au service par application des articles 13 et 26 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- elle est entachée d'une erreur d'appréciation, car tous les arrêts médicaux produits établissent que son intervention chirurgicale est en lien avec son accident de service.
Par un mémoire enregistré le 4 juillet 2019, la société Orange, représentée par Me H..., demande à la cour :
1°) de rejeter la requête de Mme K... ;
2°) de mettre à sa charge la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la demande de première instance est irrecevable ;
- la décision en litige n'est pas entachée d'incompétence, ni d'irrégularité ;
- la décision en litige ne relève pas des actes devant faire l'objet d'une motivation et en tout état de cause, elle est suffisamment motivée ;
- la date de consolidation n'est pas entachée d'erreur d'appréciation ;
- la décision en litige n'a pas retiré illégalement le caractère d'imputabilité de son accident au service, mais fixe la date jusqu'à laquelle ses congés de maladie et ses soins sont pris en charge.
II. Par une requête enregistrée sous le n°18BX02124, le 25 mai 2018, Mme K..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°16002321 du 19 mars 2018 du tribunal administratif de Bordeaux ;
2°) d'annuler la décision du 18 novembre 2015 par laquelle la directrice des ressources humaines de la société Orange l'a placée en disponibilité d'office du 24 février 2015 au 31 juillet 2015 et l'a déclarée apte à reprendre ses fonctions à temps complet à compter du 1er août 2015, ainsi que la décision implicite du 19 mars 2016 par laquelle la société Orange a rejeté son recours gracieux dirigé contre cette décision ;
3°) de condamner la société Orange à lui verser la somme de 1 500 euros en réparation du préjudice moral qu'elle a subi du fait de l'illégalité de la décision du 18 novembre 2015 la plaçant en disponibilité d'office ;
4°) de mettre à la charge de la société Orange la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision du 18 novembre 2015 est entachée d'incompétence ;
- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision du 28 septembre 2015 ;
- l'illégalité de la décision du 18 novembre 2015 lui a causé un préjudice moral dont elle est fondée à demander réparation.
Par un mémoire enregistré le 4 juillet 2019, la société Orange, représentée par Me H..., demande à la cour :
1°) de rejeter la requête de Mme K... ;
2°) de mettre à sa charge la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- Mme A... est compétente pour signer la décision en litige ;
- la décision en litige n'est que la conséquence de la décision du 28 septembre précédent que Mme K... n'a pas contesté dans les délais impartis ;
- la décision du 28 septembre 2015 n'est pas illégale ;
- elle devait en conséquence la placer rétroactivement en disponibilité à l'expiration de ses droits statutaires à congés de maladie ;
- en l'absence d'illégalité entachant sa décision en litige, sa demande indemnitaire doit être rejetée ;
- elle ne produit aucune explication quant à la réalité et l'étendue de ses préjudices.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le décret n° 2014-107 du 4 février 2014 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme G... B...,
- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public ;
- et les observations de Me D..., représentant Mme K....
Considérant ce qui suit :
1. Mme K..., fonctionnaire de la société Orange, a été victime, le 3 décembre 2013, d'un accident de bus sur son trajet domicile-travail qui lui a causé un traumatisme du genou gauche et un hématome sur la cuisse gauche. Cet accident a été reconnu imputable au service par une décision en date du 24 janvier 2014. Par la suite, le 25 mars 2014, Mme K... a subi une intervention chirurgicale pour la pose d'une prothèse
fémoro-patellaire. Par une décision du 28 septembre 2015, la directrice des ressources humaines de la direction SCO sud-ouest de la société Orange a fixé au 4 février 2014 la date de consolidation de son état de santé lié à l'accident de trajet, suivant ainsi l'avis de la commission de réforme réunie le 10 septembre 2015 et a considéré que ses arrêts de travail et ses soins étaient pris en charge jusqu'à cette date. Puis, après avis du comité médical du 5 novembre 2015, Mme K... a été placée en disponibilité d'office du 24 février 2015 au 31 juillet 2015 et a été déclarée apte à reprendre ses fonctions à temps complet à compter du 1er août 2015 par une décision du 18 novembre 2015. Par deux requêtes distinctes, Mme K..., estimant que son état de santé était toujours lié à l'accident de trajet de décembre 2013, a demandé au tribunal administratif de Bordeaux l'annulation des décisions en date du 28 septembre et du
18 novembre 2015, ainsi que l'annulation des décisions implicites de rejet de ses recours gracieux formés contre ces décisions. Elle a également présenté des conclusions indemnitaires. Par deux jugements distincts du 19 mars 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses demandes. Par requêtes enregistrées sous les n° 18BX02124 et 18BX02125, Mme K... relève appel de ces deux jugements.
Sur la jonction :
2. Les appels formés par Mme K... ont trait à la situation d'un même agent et sont dirigés contre des décisions d'une même autorité. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.
Sur le bien-fondé des jugements :
En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée en défense par la société Orange :
3. L'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa version alors applicable, dispose que : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. ". L'article R. 421-2 du code de justice administrative, dans sa rédaction alors applicable, dispose que : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet. Toutefois, lorsqu'une décision explicite de rejet intervient avant l'expiration de cette période, elle fait à nouveau courir le délai de recours. / La date du dépôt de la demande à l'administration, constatée par tous moyens, doit être établie à l'appui de la requête ".
4. Il ressort des pièces du dossier que Mme K... a adressé le 2 novembre 2015 à la société Orange un courrier, qui a été réceptionné le 5 novembre suivant, dans lequel elle contestait formellement les conclusions des expertises, le bien-fondé de l'avis rendu par la commission de réforme et de la décision du 28 septembre 2015. Ce courrier doit être regardé comme constituant un recours gracieux dirigé contre la décision du 28 septembre 2015, recours auquel il n'a pas été expressément répondu. Par suite, le recours présenté par Mme K... devant le tribunal le 4 mars 2016, soit dans le délai de recours contentieux qui avait été prorogé, était ainsi bien recevable.
En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation de la décision du 28 septembre 2015 :
5. En premier lieu, Mme O... A..., directrice des ressources humaines de la direction SCO sud-ouest de la société Orange avait reçu une délégation de signature du 2 septembre 2014 de M. E..., directeur SCO sud-ouest de la société Orange, à l'effet de signer les décisions relatives aux congés de toute nature, dont celles relatives aux accidents de travail. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision du 28 septembre 2015 doit être écarté.
6. En deuxième lieu, la décision contestée qui mentionne l'avis de la commission de réforme et les textes applicables comporte l'exposé des considérations de droit et de fait sur lesquelles s'est fondée la société Orange pour fixer au 4 février 2014 la date de consolidation de l'état de santé de Mme K... et considérer que ses arrêts de travail et ses soins étaient pris en charge jusqu'à cette date. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision du 28 septembre 2015 doit être écarté.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...). Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ". Aux termes de l'article 13 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime des congés de maladie des fonctionnaires : " La commission de réforme est consultée notamment sur : 1.L'application des dispositions du deuxième alinéa des 2° et 3° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée 2.L'imputabilité au service de l'affection entraînant l'application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 34 (4°) de la loi du 11 janvier susvisée (...) ". Aux termes de l'article 26 de ce même décret alors en vigueur : " Sous réserve du deuxième alinéa du présent article, les commissions de réforme prévues aux articles 10 et 12 ci-dessus sont obligatoirement consultées dans tous les cas où un fonctionnaire demande le bénéfice des dispositions de l'article 34 (2°), 2° alinéa de la loi du
11 janvier 1984 susvisée. Le dossier qui leur est soumis doit comprendre un rapport écrit du médecin chargé de la prévention attaché au service auquel appartient le fonctionnaire concerné. La commission de réforme n'est toutefois pas consultée lorsque l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident est reconnue par l'administration ".
8. Il résulte des dispositions précitées du décret du 24 mars 1986, qui s'appliquent à Mme K..., dès lors qu'elle est demeurée sous statut de fonctionnaire d'Etat, que lorsqu'une administration reconnaît de sa propre initiative l'imputabilité au service d'un accident, elle ne doit pas alors obligatoirement recueillir l'avis de la commission de réforme avant de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident. Par suite, Mme K... ne peut utilement soutenir que la commission de réforme aurait dû être saisie préalablement à la décision de la société Orange du 24 janvier 2014 reconnaissant son accident de trajet comme étant imputable au service. Par ailleurs, si Mme K... fait valoir que la commission de réforme, qui a émis un avis le 10 septembre 2015 sur la date de consolidation de son état de santé, a été saisie tardivement en juillet 2015, la saisine de cette instance n'est encadrée par aucun délai. Dès lors, la décision litigieuse n'est pas intervenue au terme d'une procédure irrégulière.
9. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme K... présente une gonarthrose fémoro-patellaire antérieure à l'accident de trajet pour laquelle elle a subi une intervention chirurgicale le 25 mars 2014 consistant à la mise en place d'une prothèse
fémoro-patellaire. Il ressort des conclusions du rapport de l'expertise réalisée par le docteur Ducloux, qui a examiné Mme K... le 10 juin 2015, que ses arrêts de travail et ses soins à compter du 4 février 2014 sont en rapport avec son état de santé antérieur. L'expert a donc fixé la date de consolidation de l'accident de trajet au 4 février 2014. Si Mme K... conteste cette date, elle n'apporte pas d'éléments précis permettant de remettre en cause les conclusions de ce rapport d'expertise, lequel va dans le même sens que l'avis de la commission de réforme du 10 septembre 2015 et une première expertise médicale réalisée à la demande de la société Orange le 11 septembre 2014. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation commise par la société Orange en fixant au 4 février 2014 la date de consolidation de l'accident de service subi par Mme K... le 3 décembre 2013 doit être écarté.
10. Toutefois, Mme K... fait valoir que cette décision a illégalement retiré des décisions antérieures ayant créé à son profit des droits acquis.
11. La décision plaçant un agent en congé pour accident de service est une décision créatrice de droits au profit de l'agent. Par suite, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires, et hors le cas où il est satisfait à une demande de l'agent, l'administration ne peut retirer une telle décision, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant son adoption. Mme K... a été reconnue victime d'un accident imputable au service, survenu le 3 décembre 2013. Lors de sa séance du 10 septembre 2015, la commission de réforme n'a reconnu l'imputabilité au service que jusqu'au 4 février 2014. La société Orange pouvait, sans méconnaître le principe de non-rétroactivité des actes administratifs, qualifier, même a posteriori la situation d'un agent en vue de le placer dans une situation administrative régulière, à la condition de ne pas méconnaître les droits acquis par ce dernier. Compte tenu de sa portée, la décision du 28 septembre 2015 ne retire pas la décision du 24 janvier 2014 reconnaissant son accident de trajet comme étant imputable au service, mais détermine seulement la date au-delà de laquelle les arrêts de travail et soins ne seraient plus considérés comme directement entrainés par l'accident. Mme K... n'est donc pas fondée à soutenir que l'administration aurait par cette décision du 28 septembre 2015 retiré la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident de trajet dont elle a été victime.
12. Il ressort cependant des pièces du dossier, qu'à la suite de son accident de service du 3 décembre 2013, Mme K... a été placée en congé de maladie pour accident de service jusqu'au 31 juillet 2015, la dernière décision prolongeant son congé pour accident du travail couvrant, selon l'attestation produite par la société Orange datée du 6 octobre 2015, la période du 24 février au 31 juillet 2015. Toutefois, à la suite de la décision du 28 septembre 2015 en litige, qui a considéré que ses arrêts de travail et ses soins n'étaient plus imputables à l'accident au-delà du 4 février 2014, Mme K... a été placée rétroactivement du 24 février 2014 au 30 avril 2014 en congé ordinaire de maladie rémunéré à plein traitement, du 1er mai 2014 au 31 mai 2014, en congé ordinaire de maladie, pendant 10 jours à plein traitement et 20 jours à demi-traitement, du 1er juin au 30 juin 2014, en congé ordinaire de maladie rémunéré à demi-traitement, du 1er juillet au 31 juillet 2014, en congé ordinaire de maladie, rémunéré pendant
7 jours à plein traitement et 23 jours à demi-traitement, du 1er août au 31 août 2014, en congé ordinaire de maladie rémunéré à demi-traitement, du 1er septembre au 30 septembre 2014, en congé ordinaire de maladie rémunéré pendant 1 jour à plein traitement et pendant 29 jours à demi-traitement, du 1er au 31 octobre 2014, en congé ordinaire de maladie rémunéré pendant
5 jours à plein traitement et 25 jours à demi-traitement et du 1er novembre 2014 au
23 février 2015, en congé ordinaire de maladie rémunéré à demi-traitement. Si, ainsi qu'il a été dit au point 9, la date de consolidation retenue n'est pas entachée d'erreur d'appréciation, il n'en demeure pas moins que la société Orange ne pouvait pas retirer les décisions plaçant
Mme K... en congé de maladie pour accident de service, et celles prolongeant un tel congé, qui sont des décisions créatrices de droits que dans le délai de quatre mois suivant la prise de ces décisions. Or, ce délai était expiré à la date de la décision en litige du 28 septembre 2015, pour toutes les décisions pour lesquelles Mme K... a bénéficié d'un congé pour accident de travail postérieurement au 4 février 2014, y compris pour la dernière décision qui couvre la période du 24 février au 31 juillet 2015. Par suite, Mme K... est fondée à soutenir que la société Orange ne pouvait pas légalement par la décision contestée retirer ces décisions.
13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme K... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 1600989 du 18 mars 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a considéré que la décision en litige du 28 septembre 2015 n'avait pas eu pour effet de lui retirer des droits acquis résultant de son placement en congé de maladie pour accident de service pour la période postérieure au 4 février 2014 jusqu'au 31 juillet 2015. Mme K... est donc fondée à demander l'annulation de la décision du 28 septembre 2015 en ce qu'elle a cette portée ainsi que dans cette mesure, l'annulation de la décision implicite rejetant son recours gracieux formé contre cette décision et de l'article 1er du jugement du 18 mars 2018.
En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation de la décision du
18 novembre 2015 :
14. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 juillet 1984 : " Le fonctionnaire a droit : (...) 2° à des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence./ Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite (...) ". L'article 27 du décret du 14 mars 1986 dispose : " Lorsqu'un fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical : en cas d'avis défavorable il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme (...)".
15. Il résulte de ce qui a été dit aux points 12 et 13 que l'annulation de la décision du 28 septembre 2015 en tant qu'elle retire les décisions ayant placé Mme K... en congés de maladie pour accident de service pour la période postérieure au 4 février 2014 jusqu'au
31 juillet 2015 entraîne, par voie de conséquence, l'illégalité de la décision du 18 novembre 2015 de la directrice des ressources humaines de la direction SCO sud-ouest de la société Orange ayant placé Mme K... en disponibilité d'office pour maladie du 24 février 2015 au 31 juillet 2015. Par ailleurs, la société Orange n'a pas justifié que M. C... F..., signataire de la décision litigieuse, bénéficiait d'une délégation pour signer au nom de Mme O... A..., la directrice des ressources humaines de la direction SCO sud-ouest de la société Orange. Par suite, l'incompétence du signataire entache d'illégalité la décision du 18 novembre 2015 dans son entier.
16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme K... est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement n° 16002321 du 19 mars 2018 le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Il y a lieu d'annuler ce jugement, la décision du 18 novembre 2015 et la décision rejetant implicitement son recours gracieux.
Sur les conclusions indemnitaires dans l'instance n° 18BX02124 :
17. L'illégalité de la décision du 18 novembre 2015, notamment fondée sur un moyen de légalité interne, constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la société Orange. La faute commise par cette société a causé un préjudice moral à Mme K..., dont il sera fait une juste appréciation en l'évaluant à la somme de 1 500 euros.
Sur les frais d'instance :
18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de Mme K..., qui n'a pas la qualité de partie perdante, une somme à verser à la société Orange au titre de ses frais d'instance. Il y a lieu, en revanche, en application de ces mêmes dispositions de mettre à la charge de la société Orange la somme de 1 500 euros à verser à Mme K... au titre de ses frais d'instance.
DECIDE :
Article 1er : La décision de la directrice des ressources humaines de la direction SCO
sud-ouest de la société Orange du 28 septembre 2015 est annulée en tant qu'elle retire les décisions ayant placé Mme K... en congé de maladie pour accident de service pour la période postérieure au 4 février 2014 jusqu'au 31 juillet 2015. La décision du 5 janvier 2016 rejetant le recours gracieux de Mme K... est annulée dans la même mesure.
Article 2 : La décision de la directrice des ressources humaines de la direction SCO sud-ouest de la société Orange du 18 novembre 2015 et la décision du19 mars 2016 rejetant le recours gracieux de Mme K... sont annulées.
Article 3 : L'article 1er du jugement n° 1600989 du tribunal administratif de Bordeaux en date du 19 mars 2018 et le jugement n° 16002321 du 19 mars 2018 du tribunal administratif de Bordeaux sont annulés
Article 4 : La société Orange est condamnée à verser à Mme K... une indemnité de 1 500 euros.
Article 5 : La société Orange est condamnée à payer à Mme K... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 6: Le surplus des conclusions de la requête de Mme K... et les conclusions présentées par la société Orange au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetés.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme L... K... et à la société Orange.
Délibéré après l'audience du 2 juin 2020 à laquelle siégeaient :
Mme I... M..., présidente
Mme J... N..., présidente-assesseure,
Mme G... B..., premier conseiller,
Lu en audience publique, le 29 juillet 2020.
Le rapporteur,
Déborah B...La présidente,
Brigitte PHEMOLANTLe greffier,
Christophe PELLETIER
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX02124, 18BX02125