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02/07/2020 | FRANCE | N°18BX02602

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 02 juillet 2020, 18BX02602


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le Fonds pour le développement durable de la pêche a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision implicite née le 21 mai 2016 par laquelle le préfet de la région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes a refusé de lui verser l'aide prévue par la convention n° 38173/12 du 18 décembre 2012 et la décision expresse du 18 juillet 2016 par laquelle le préfet de la Région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes, direction interrégionale de la mer sud-Atlantique a mis fin à cette convention

du 18 décembre 2012 relative à l'attribution d'une aide financière au Fonds po...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le Fonds pour le développement durable de la pêche a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision implicite née le 21 mai 2016 par laquelle le préfet de la région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes a refusé de lui verser l'aide prévue par la convention n° 38173/12 du 18 décembre 2012 et la décision expresse du 18 juillet 2016 par laquelle le préfet de la Région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes, direction interrégionale de la mer sud-Atlantique a mis fin à cette convention du 18 décembre 2012 relative à l'attribution d'une aide financière au Fonds pour le développement durable de la pêche et a prononcé la déchéance de ses droits portant sur la somme de 630 000 euros et la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 253 721,58 euros correspondant à l'exécution des " contrats bleus " de l'année 2012.

Par un jugement n°s 1603017 et 1604129 du 2 mai 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné l'Etat à verser la somme de 223 120,78 euros au Fonds pour le développement durable de la pêche et a rejeté le surplus des demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 2 juillet 2018 et le 6 février 2020, le Fonds pour le développement durable de la pêche, représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n°s 1603017 et 1604129 du 2 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a limité à la somme de 223 120,78 euros l'indemnité au versement de laquelle il a condamné l'Etat en réparation du préjudice qu'il a subi ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme complémentaire de 30 603,80 euros ;

3°) de mettre la somme de 10 000 euros à la charge de l'Etat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Il soutient que :

- il a parfaitement respecté ses obligations conventionnelles ; la seule circonstance que les obligations ont été respectées pour la seule année 2012 n'autorisait pas l'Etat à le déchoir de la totalité de ses droits à subvention sur les années 2012 et 2013 ;

- le jugement a retenu à bon droit que la décision du 18 juillet 2012 est irrégulière et fautive mais a rejeté à tort la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 30 603,80 euros au titre des frais de gestion et de fonctionnement ; les pièces produites justifiaient de la réalité de frais engagés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 août 2018, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête et demande à la cour, par la voie de l'appel incident, d'annuler le jugement n°s 1603017 et 1604129 du 2 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a condamné l'Etat à verser la somme de 223 120,78 euros au Fonds pour le développement durable de la pêche et de rejeter les demandes de première instance de ce Fonds.

Il soutient que :

- le tribunal a estimé à tort devoir statuer en tant que juge du contrat ;

- le Fonds ne justifie pas des sommes demandées ;

- la décision du 18 juillet 2016 mettant fin à la convention du 18 décembre 2012 relative à l'attribution d'une aide financière au Fonds pour le développement durable de la pêche et prononçant la déchéance des droits à subvention est motivée et fondée ; aucune faute n'a été commise.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le traité sur l'Union européenne et le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- le règlement (CE, Euratom) n° 2988/95 du Conseil du 18 décembre 1995 relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes ;

- le règlement (CE) n° 1198/2006 du Conseil du 27 juillet 2006 relatif au Fonds européen pour la pêche ;

- le règlement (CE) n° 498/2007 de la Commission du 26 mars 2007 portant modalités d'exécution du règlement européen n° 1198/2006 relatif au Fonds européen pour la pêche ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le décret n° 2008-1088 du 23 octobre 2008 fixant les règles nationales d'éligibilité des dépenses du programme cofinancé par le Fonds européen de la pêche pour la période 2007-2013 ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D... C...,

- et les conclusions de Mme Sabrina Ladoire, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le Fonds pour le développement durable de la pêche, syndicat professionnel d'entrepreneurs de pêche, a conclu le 18 décembre 2012 avec l'Etat, représenté par le préfet de la Région Poitou-Charentes, une convention de subvention n° 38173/2012 pour la mise en oeuvre du projet " contrats bleus 2012 et 2013 - Sud Atlantique ", lesquels se traduisent par l'engagement d'adopter des pratiques de pêche plus contraignantes que la réglementation européenne. Le Fonds pour le développement durable de la pêche avait, à ce titre, pour mission le pilotage et le contrôle de la mise en oeuvre de diverses mesures de développement durable par les professionnels de la pêche participant à l'opération ainsi que la distribution des aides. La convention du 18 décembre 2012 prévoyait une subvention prévisionnelle pour le projet de 630 000 euros, alimentée par l'octroi d'une subvention du Fonds européen pour la pêche à hauteur de 126 000 euros et par l'octroi d'une subvention de l'Etat français de 504 000 euros. Le Fonds pour le développement durable de la pêche disposait d'un délai pour l'exécution des " contrats bleus 2012-2013 " courant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013. Par un avenant n° 1 conclu le 22 août 2014, la période d'exécution de ces contrats a été prolongée jusqu'au 31 mai 2015. Le Fonds pour le développement durable de la pêche a déposé le 30 juin 2015 un dossier de liquidation du solde des " contrats bleus " au titre de l'année 2012 pour une somme de 253 721,58 euros. Le 7 janvier 2016, le syndicat a adressé au préfet de région un courrier demandant à connaître les raisons de l'absence de paiement. Par lettre du 15 mars 2016, le préfet de la Région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes - direction interrégionale de la mer Sud-Atlantique, après avoir relevé que plusieurs des obligations prévues par la convention conclue le 18 décembre 2012 n'avaient pas été respectées, a indiqué que la liquidation ne pouvait avoir lieu et a invité le syndicat professionnel à " transmettre ses observations " avant décision définitive. Par un courrier du 16 mars 2016, le Fonds pour le développement durable de la pêche a fait part de ses remarques et demandé la liquidation de l'aide prévue par la convention pour l'année 2012. Par lettre du 18 juillet 2016, le préfet de la Région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes a décidé de " mettre fin " à la convention n° 38713/2012 du 18 décembre 2012, au motif que le Fonds pour le développement durable de la pêche n'en avait pas respecté certaines clauses, et a prononcé la déchéance des droits du bénéficiaire.

2. Par une requête enregistrée sous le n° 1603017, le Fonds pour le développement durable de la pêche a demandé au tribunal administratif de Bordeaux, d'une part, d'annuler la décision implicite née le 21 mai 2016 rejetant sa demande de liquidation et, d'autre part, de condamner l'Etat à lui payer la somme de 253 721,58 euros en application de la convention du 18 décembre 2012 ou, à défaut, de lui verser la même somme à titre de réparation du préjudice que lui a causé la résiliation unilatérale de ladite convention. Par une requête enregistrée sous le n° 1604129, le Fonds pour le développement durable de la pêche demande au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du préfet de la région du 18 juillet 2016 prononçant la déchéance des droits et d'enjoindre à l'Etat en exécution de la convention n° 38173/2012 de lui verser l'aide financière de 253 721,58 euros prévue. Par un jugement du 23 mai 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné l'Etat à verser la somme de 223 102,78 euros au Fonds pour le développement durable de la pêche et a rejeté le surplus des conclusions. Le Fonds pour le développement durable de la pêche relève appel de ce jugement et demande que l'Etat soit condamné à lui verser la somme complémentaire de 30 603,80 euros. Le ministre de l'agriculture et de l'alimentation demande, par la voie de l'appel incident, l'annulation dudit jugement et le rejet des demandes de première instance du Fonds pour le développement durable de la pêche.

Sur la régularité du jugement :

3. Une décision qui a pour objet l'attribution d'une subvention constitue un acte unilatéral qui crée des droits au profit de son bénéficiaire. De tels droits ne sont ainsi créés que dans la mesure où le bénéficiaire de la subvention respecte les conditions mises à son octroi, que ces conditions découlent des normes qui la régissent, qu'elles aient été fixées par la personne publique dans sa décision d'octroi, qu'elles aient fait l'objet d'une convention signée avec le bénéficiaire, ou encore qu'elles découlent implicitement mais nécessairement de l'objet même de la subvention.

4. Indépendamment des actions indemnitaires qui peuvent être engagées contre la personne publique, les recours relatifs à une subvention, qu'ils aient en particulier pour objet la décision même de l'octroyer, quelle qu'en soit la forme, les conditions mises à son octroi par cette décision ou par la convention conclue en application des dispositions précitées de la loi du 12 avril 2000, ou encore les décisions de la personne publique auxquelles elle est susceptible de donner lieu, notamment les décisions par lesquelles la personne publique modifie le montant ou les conditions d'octroi de la subvention, cesse de la verser ou demande le remboursement des sommes déjà versées, ne peuvent être portés que devant le juge de l'excès de pouvoir, par le bénéficiaire de la subvention ou par des tiers qui disposent d'un intérêt leur donnant qualité à agir.

5. En l'espèce, la convention du 18 décembre 2012, conclue en application des dispositions de l'article 10 de la loi du 12 avril 2000, a défini l'objet, le montant, les modalités de versement et les conditions d'utilisation de la subvention attribuée au syndicat professionnel requérant pour la mise en oeuvre de l'axe III du programme opérationnel relatif aux actions collectives, cofinancé par le Fonds européen pour la pêche pour la période 2007-2013, et en particulier la réalisation du projet portant sur les " contrats bleus 2012 et 2013 - Sud Atlantique ".

6. Par les requêtes enregistrées sous les numéros 1603017 et 1604219, le Fonds pour le développement durable de la pêche a présenté, d'une part, des conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite du 21 mai 2016 portant rejet de sa demande de versement de la subvention prévue par la convention du 18 décembre 2012 et à l'annulation de la décision du 18 juillet 2016 prononçant la déchéance des droits de ce syndicat professionnel au bénéfice de cette même subvention et, d'autre part, des conclusions indemnitaires tendant à ce que l'Etat soit condamné à l'indemniser des préjudices subis du fait de ces décisions et des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'Etat de verser la somme de 253 721,58 euros en exécution de cette convention.

7. Le tribunal administratif de Bordeaux était donc, principalement, saisi de recours en excès de pouvoir relatifs à une subvention par le bénéficiaire de la subvention et de recours de plein contentieux tendant à obtenir l'indemnisation des préjudices subis du fait de décisions refusant le versement de cette subvention. Dès lors le ministre de l'agriculture et de l'alimentation est fondé à soutenir qu'en requalifiant les demandes précitées du Fonds pour le développement durable de la pêche comme un recours de plein contentieux contestant la régularité des mesures de résiliation de la convention du 18 décembre 2012 et sollicitant la condamnation de l'Etat à l'indemniser des préjudices consécutifs à cette résiliation fautive, le tribunal administratif de Bordeaux a méconnu son office. Le jugement doit être annulé.

8. Il y a donc lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes présentées par le Fonds pour le développement durable de la pêche devant le tribunal administratif de Bordeaux.

Sur la légalité des décisions mettant fin à l'exécution de la convention du 18 décembre 2012 et prononçant la déchéance des droits en découlant :

9. Aux termes de l'article 1er du règlement (CEE, Euratom) n° 2988/95 du 18 décembre 1995 relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes : " 1. Aux fins de la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, est adoptée une réglementation générale relative à des contrôles homogènes et à des mesures et des sanctions administratives portant sur des irrégularités au regard du droit communautaire. / 2. Est constitutive d'une irrégularité toute violation d'une disposition du droit communautaire résultant d'un acte ou d'une omission d'un opérateur économique qui a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget général des Communautés ou à des budgets gérés par celles-ci, soit par la diminution ou la suppression de recettes provenant des ressources propres perçues directement pour le compte des Communautés, soit par une dépense indue ". Aux termes de l'article 2 de ce règlement : " 1. Les contrôles et les mesures et sanctions administratives sont institués dans la mesure où ils sont nécessaires pour assurer l'application correcte du droit communautaire. Ils doivent revêtir un caractère effectif, proportionné et dissuasif, afin d'assurer une protection adéquate des intérêts financiers des Communautés. (...) 4. Sous réserve du droit communautaire applicable, les procédures relatives à l'application des contrôles et des mesures et sanctions communautaires sont régies par le droit des Etats membres ". Aux termes de l'article 3 du même règlement : " 1. Le délai de prescription des poursuites est de quatre ans à partir de la réalisation de l'irrégularité visée à l'article 1er paragraphe 1 (...) ". Aux termes de l'article 4 du même règlement : " 1. Toute irrégularité entraîne, en règle générale, le retrait de l'avantage indûment obtenu : / - par l'obligation de verser les montants dus ou de rembourser les montants indument perçus (...). / 2. L'application des mesures visées au paragraphe 1 est limitée au retrait de l'avantage obtenu augmenté, si cela est prévu, d'intérêts qui peuvent être déterminés de façon forfaitaire (...). / 4. Les mesures prévues par le présent article ne sont pas considérées comme des sanctions ".

10. Aux termes de l'article 1er de la convention : " Objet de la convention : Dans le cadre du programme opérationnel du fonds européen pour la pêche (FEP) 2007-2013, Axe 3 : Mesures d'intérêt commun, 3.1, article 37 " actions collectives ", le Fonds pour le développement durable de la pêche s'engage (...) à réaliser le projet suivant " contrats bleus 2012 et 2013 - Sud-Atlantique " conformément à la demande d'aide susvisée et selon les conditions définies dans les articles suivants de la présente convention ". Aux termes de l'article 3 de cette convention du 18 décembre 2012 : " Calendrier de réalisation de l'opération : (...) b) Réalisation de l'opération : Le bénéficiaire s'engage à terminer l'opération au plus tard le 31 décembre 2013. / Si, à l'expiration de ce délai, la mise en oeuvre des mesures par les navires n'est pas achevée, le bénéficiaire devra présenter à l'administration un dossier de liquidation correspondant aux mesures effectivement mises en oeuvre et aux contrôles réalisés. La liquidation de la subvention interviendra alors sur justification des mesures effectivement mises en oeuvre par les navires et contrôlées par le bénéficiaire, ainsi que des dépenses éligibles de pilotage et de contrôle effectivement supportées par le bénéficiaire à cette date. Le montant initial de la subvention sera réduit à due proportion ". Aux termes de l'article 6 de cette convention : " La présente convention porte sur deux années de mise en oeuvre par les navires, quel que soit le nombre d'acomptes demandés, le bénéficiaire présentera obligatoirement : - un dossier de liquidation récapitulatif portant sur l'année 2012 (pour la période allant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012) ; - un dossier de liquidation récapitulatif portant sur 1'année 2013 (pour la période allant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013) (...) ". Aux termes de l'article 8 de cette convention : " Le bénéficiaire s'engage à informer régulièrement le service instructeur de l'avancement de l'opéraiton. En cas d'abandon de l'opération, le bénéficiaire s'engage à en informer le service instructeur pour permettre la clôture de l'opération ". Enfin aux termes de l'article 10 de cette convention : " En cas : • de non-respect des clauses de la présente convention et en particulier de la non-exécution totale ou partielle de l'opération, (...) le préfet décide de mettre fin à l'aide et d'exiger le reversement partiel ou total des sommes déjà versées, majoré d'intérêts de retard et éventuellement de pénalités financières, sans préjudice des autres poursuites et sanctions prévues dans les textes en vigueur ".

11. En premier lieu, la décision du 18 juillet 2016 retient que le Fonds pour le développement durable de la pêche n'avait pas satisfait aux conditions posées par les articles 1er, 3, et 6 de ladite convention qui prévoient que la convention porte sur la mise en oeuvre des " contrats bleus " sur les années 2012 et 2013 et imposent au porteur de projet de déposer des dossiers de liquidation pour les années 2012 et 2013. Elle retient également que les stipulations de l'article 8 de la convention prévoyant que le bénéficiaire de l'aide s'engageait à informer le service instructeur de l'avancement de l'opération, et le cas échéant de son abandon, avait été méconnues en ce que le porteur du projet n'avait pas " informé le service instructeur du renoncement aux engagements pris pour l'année 2013 avant le dépôt de son dossier de liquidation ". Elle indique enfin que la demande de paiement est intervenue postérieurement à la date limite prévue par les stipulations de l'article 6 de la convention. Cette décision, qui vise l'ensemble des textes applicables et expose les motifs de la décision, est par conséquent suffisamment motivée.

12. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient le Fonds pour le développement durable de la pêche, les stipulations précitées de l'article 3 de la convention ont pour unique objet de ne pas exclure totalement du dispositif les bénéficiaires ne parvenant pas à finaliser leurs opérations avant la date butoir prévue pour ce faire et ne concernent pas l'hypothèse d'un opérateur ayant volontairement cessé de satisfaire à ses obligations en cours d'exécution de la convention. Dès lors qu'il est constant que la convention en litige portait sur la réalisation des " contrats bleus " sur les années 2012 et 2013 et que les adhérents du syndicat professionnel requérant ont cessé de respecter leurs engagements dès la fin de l'année 2012, le préfet a pu estimer à bon droit que cette situation devait être qualifiée de non-exécution partielle de la convention de nature à justifier la décision de mettre fin à l'aide et à prononcer la déchéance des droits à subvention en exécution des stipulations précitées de l'article 10 de la convention du 18 juillet 2016.

13. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que le Fonds pour le développement durable de la pêche n'a pas informé le service instructeur de ce que ses adhérents ne mettaient plus en oeuvre leurs engagements sur l'année 2013, contrairement aux exigences de l'article 8 de la convention du 18 décembre 2012 prévoyant un devoir d'information, et qu'il a déposé un dossier de liquidation commun aux années 2012 et 2013 en violation des prévisions de l'article 6 de la convention prévoyant le dépôt d'un dosser pour chaque année d'exécution.

14. En dernier lieu, si l'article 2 de l'avenant n° 1 à la convention du 18 décembre 2012 prévoit que " le bénéficiaire s'engage à déposer avant le 30 juin 2015 " la demande de paiement du solde, ce même article stipule également que " toute demande de paiement ultérieure à cette date ne pourra donner lieu à liquidation ". Compte tenu du caractère ambigu de cette rédaction, le Fonds pour le développement durable de la pêche est fondé à soutenir que le préfet ne pouvait regarder la demande de liquidation déposée le 30 juin 2015 comme tardive.

15. Toutefois, il résulte de l'instruction que le préfet de la Région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charente aurait adopté la décision de déchoir le Fonds pour le développement durable de la pêche de ses droits à subvention en se fondant uniquement sur les autres motifs invoqués dans sa décision du 18 juillet 2016 et, en particulier, celui tiré de la non-exécution de l'opération sur toute l'année 2013. Le Fonds pour le développement durable de la pêche n'est donc pas fondé à demander l'annulation de la décision du 21 mai 2016 rejetant sa demande de paiement ni celle de la décision du 18 juillet 2016 mettant fin à la convention du 18 décembre 2012 et prononçant la déchéance de ses droits à subvention. Les conclusions à fin d'injonction sont rejetées par voie de conséquences.

Sur les conclusions à fin de condamnation :

16. Ainsi qu'il vient d'être dit le Fonds pour le développement durable de la pêche n'est pas fondé à soutenir que la décision née le 21 mai 2016 et celle du 18 juillet 2016 seraient irrégulières et constitutives d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat. Dès lors que le Fonds pour le développement durable de la pêche ne se prévaut, à l'appui de ses conclusions indemnitaires, d'aucune faute autre que celle résultant de l'illégalité de ces décisions ni d'aucun préjudice distinct de l'absence de versement de l'aide en litige, il y a lieu de rejeter les conclusions tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 253 721,58 euros au titre de l'exécution des " contrats bleus " de l'année 2012.

17. Il résulte de tout ce qui précède que les demandes de première instance du Fonds pour le développement durable de la pêche et ses conclusions d'appel doivent être rejetées.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

18. L'Etat n'étant pas la partie perdante, les conclusions susvisées du Fonds pour le développement durable de la pêche doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n°s 1603017 et 1604129 du 2 mai 2018 du tribunal administratif de Bordeaux est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées devant le tribunal administratif par le Fonds pour le développement durable de la pêche et la requête présentée devant la cour sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à au Fonds pour le développement durable de la pêche et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Copie en sera adressée au préfet de la région Nouvelle-Aquitaine.

Délibéré après l'audience du 4 juin 2020 à laquelle siégeaient :

Mme B... E..., présidente de la cour,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. D... C..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 2 juillet 2020.

La présidente,

Brigitte E...

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de l'alimentation en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

7

N° 18BX02602


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX02602
Date de la décision : 02/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique - Mesures d'incitation - Subventions.

Communautés européennes et Union européenne - Litiges relatifs au versement d`aides de l'Union européenne.

Procédure - Diverses sortes de recours - Recours pour excès de pouvoir - Recours ayant ce caractère.


Composition du Tribunal
Président : Mme PHEMOLANT
Rapporteur ?: M. Stéphane GUEGUEIN
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : SELARL DELSOL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-07-02;18bx02602 ?
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