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02/07/2020 | FRANCE | N°18BX01721

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 02 juillet 2020, 18BX01721


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL MV Image a demandé au tribunal administratif de Pau de la décharger, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôts sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011, 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1601481 du 1er mars 2018, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, respectivement enregistrés le 30 avril 2018 et le 22 mai 2018, la société MV Image, représ

entée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Pau d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL MV Image a demandé au tribunal administratif de Pau de la décharger, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôts sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011, 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1601481 du 1er mars 2018, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, respectivement enregistrés le 30 avril 2018 et le 22 mai 2018, la société MV Image, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Pau du 1er mars 2018 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- elle remplissait toutes les conditions posées par l'article 44 sexies du code général des impôts pour bénéficier de l'exonération d'impôt sur les sociétés en faveur des entreprises nouvelles ;

- elle peut se prévaloir de la prise de position formelle de l'administration du 2 octobre 2009 ;

- la majoration pour manquement délibéré n'est pas justifiée.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 novembre 2018, le ministre de l'action et comptes publiques conclu au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par la société MV Image n'est fondé.

Par ordonnance du 9 janvier 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 20 février 2020 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... F...,

- et les conclusions de Mme Sabrina Ladoire, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société MV Image, créée le 1er avril 2008, exerce une activité d'exploitation et de gestion des droits de la personnalité de M. D... G..., son gérant, footballeur professionnel. Elle a entendu se placer, depuis sa création, sous le régime de l'article 44 sexies du code général des impôts. A l'occasion d'une vérification de comptabilité portant sur les années 2010 à 2013, l'administration fiscale a remis en cause le bénéfice de ce régime, par une proposition de rectification du 4 août 2014, et l'a assujettie à des suppléments d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013, pour une somme totale de 205 232 euros. La réclamation préalable formée par la société MV Image, le 20 avril 2015, a été rejetée par une décision du 10 novembre 2015. Cette société relève appel du jugement du 1er mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôts sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011, 2012 et 2013.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne le bénéfice de l'article 44 sexies du code général des impôts :

2. Aux termes de l'article 44 sexies du code général des impôts dans sa version applicable au présent litige : " I. Les entreprises soumises (...) à un régime réel d'imposition de leurs résultats et qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale au sens de l'article 34 sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés (...) jusqu'au terme du vingt-troisième mois suivant celui de leur création et déclarés selon les modalités prévues à l'article 53 A. (...) / Le bénéfice du présent article est réservé aux entreprises qui se créent dans les zones et durant les périodes suivantes, à la condition que le siège social ainsi que l'ensemble de l'activité et des moyens d'exploitation soient implantés dans l'une de ces zones. : / 1° A compter du 1er janvier 1995 et jusqu'au 31 décembre 2010, dans les zones de revitalisation rurale mentionnées à l'article 1465 A. (...) / Toutefois, les entreprises qui se sont créées à compter du 1er janvier 2004 jusqu'au 31 décembre 2010 dans les zones de revitalisation rurale mentionnées à l'article 1465 A, et à la condition que le siège social ainsi que l'ensemble de l'activité et des moyens d'exploitation soient implantés dans ces zones, sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés, à l'exclusion des plus-values constatées lors de la réévaluation des éléments d'actif, jusqu'au terme du cinquante-neuvième mois suivant celui de leur création et déclarés selon les modalités prévues à l'article 53 A. Ces bénéfices sont soumis à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés à hauteur de 40 %, 60 % ou 80 % de leur montant selon qu'ils sont réalisés respectivement au cours des cinq premières, des sixième et septième ou des huitième et neuvième périodes de douze mois suivant cette période d'exonération. (...) ".

3. L'implantation d'une activité dans une zone de revitalisation rurale, en l'absence de salarié, s'apprécie, pour le bénéfice de l'exonération prévue par les dispositions précitées de l'article 44 sexies du code général des impôts, au regard de tous éléments pertinents, notamment de la situation des locaux et des moyens d'exploitation utiles à cette activité, ainsi que son lieu d'exercice effectif.

4. Par ailleurs, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si le contribuable remplit les conditions légales d'une exonération.

5. La société MV Image a pour activité la gestion des droits d'image de M. D... G..., joueur de football professionnel. Son gérant et unique associé est M. G..., qui demeurait, au cours des années en litige, à Aix-en-Provence. Le siège social de la société était, durant cette période, situé au 39, rue de Pignada à Mimizan, dans des locaux appartenant à la SCI Anisacris, constituée entre M. et Mme C..., cette adresse étant également celle du siège social de la SARL Identity Sport et de la SAS CH Conseil et Managements, ayant une activité d'agent sportif et dont le gérant est M. C....

6. En premier lieu, s'il est constant que le siège social de la SARL MV Image était situé en zone éligible au cours des exercices contrôlés, il ressort des pièces du dossier que, durant cette période, M. G... ne s'y est rendu que très ponctuellement, aucune signalisation de sa société n'étant présente à cette adresse. Les deux contrats qui sont à l'origine de plus de 90 % du chiffre d'affaires de la société au cours des années 2011, 2012 et 2013 ont par ailleurs été signés par M. G... agissant en son nom personnel, la dénomination sociale et l'adresse du siège social de la SARL MV Image n'y étant pas mentionnées. Enfin, la vérificatrice a constaté que la société, qui ne compte aucun salarié, ne disposait dans les locaux de son siège social, d'aucun matériel d'exploitation, alors même qu'il ressort de sa déclaration de résultats pour 2012 qu'elle avait inscrit à son bilan du matériel informatique pour un montant de 5 000 euros.

7. La SARL MV Image fait valoir qu'elle a confié à la SARL Identity Sport, par contrat du 2 janvier 2009, d'une part une mission générale de participation à son développement stratégique, opérationnel et commercial, par tout moyen, et notamment par la présentation de clients potentiels, contre une commission équivalent à 15 % des sommes encaissées dans ce cadre par la SARL et, d'autre part, des missions spécifiques, à savoir l'assistance à la négociation et à la mise en place des contrats relevant de son activité commerciale, la tenue de la comptabilité de ses encaissements et décaissements, la tenue de son secrétariat, etc., missions pour lesquelles le contrat prévoit une rémunération forfaitaire mensuelle de 500 euros hors taxes. Elle soutient que l'ensemble de ces missions étaient réalisées à Mimizan, au lieu de son siège social. Toutefois, et outre que la société MV Image n'établit ni même n'allègue que les contrats qui lui procurent la majorité de ses revenus auraient été préparés, négociés ou signés dans les locaux de Mimizan, ou que les partenaires commerciaux ayant signé ces contrats entendaient contracter avec elle, et non pas seulement avec M. G..., intuitu personae, la circonstance qu'une partie des tâches administratives et comptables induites par son activité serait réalisée par la société Identity Sport, dans les locaux de son siège social, ne permet pas d'établir que ces locaux constitueraient le centre de direction et le lieu d'exercice effectif des activités de la requérante. Ainsi la condition d'implantation de l'activité et de l'ensemble des moyens d'exploitation de la société MV Image dans une zone de revitalisation rurale ne peut être regardée ni comme satisfaite ni comme réputée satisfaite. Dès lors que cette condition n'était pas remplie, l'intéressée ne pouvait prétendre au bénéfice de l'exonération prévue par les dispositions précitées de l'article 44 sexies du code général des impôts. Le point de savoir si l'activité de la société constitue ou non une extension d'une activité préexistante de la SARL Identity Sport, est, dès lors, indifférent pour la solution du litige.

8. En second lieu, la SARL MV Image reprend en appel le moyen, déjà invoqué devant le tribunal administratif, tiré de l'existence d'une prise de position formelle opposable à l'administration sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales. Ce moyen doit être écarté par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

En ce qui concerne les pénalités pour manquement délibéré

9. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux pénalités encore en litige : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré. (...) ".

10. En premier lieu, après avoir cité les dispositions pertinentes de l'article 1729 du code général des impôts et relevé différents éléments de faits relatifs aux conditions d'activités de la société MV Image, le vérificateur en a conclu que celle-ci était un simple véhicule juridique dépourvu d'activité économique réelle et n'avait été créée que pour permettre à M. G... de profiter de l'avantage fiscal que pouvait lui conférer la localisation de M. C... en zone de revitalisation rurale. Par suite, la décision de mettre à la charge de la société une pénalité de 40 % pour manquement délibéré est suffisamment motivée en droit et en fait.

11. En deuxième lieu, le bénéfice du régime de faveur de l'article 44 sexies du code général des impôts est réservé aux activités nouvelles, de nature industrielle et commerciale, exercées dans l'une des zones y ouvrant droit. La SARL MV Image n'établit ni même n'allègue qu'elle aurait exercé la moindre activité dans la zone de revitalisation rurale où elle a installé son siège social, à l'adresse du domicile et des sociétés que dirige M. C..., agent sportif avec lequel M. G... a signé un contrat de représentation au mois de juillet 2006, régulièrement renouvelé jusqu'en février 2014. M. G..., gérant et unique associé de la société MV Image, qui a négocié et signé en son nom propre les contrats procurant à sa société la majeure partie de ses revenus, ne pouvait de bonne foi, eu égard à la clarté de la condition de localisation de l'activité fixée par les dispositions précitées de l'article 44 sexies, et à la simplicité de son appréciation, prétendre que sa société relevait du régime de faveur prévu par ces dispositions. Par suite, l'administration doit être regardée comme établissant la mauvaise foi de la société MV Image.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL MV Image n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôts sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011, 2012 et 2013. Par voie de conséquence, ses conclusions relatives aux frais exposés et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er: La requête de la société MV Image est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société MV Image et au ministre de l'action et des comptes publiques.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 4 juin 2020 à laquelle siégeaient :

Mme E... H..., présidente,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

Mme B... F..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 2 juillet 2020.

La présidente,

Brigitte H...

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX01721


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX01721
Date de la décision : 02/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.


Composition du Tribunal
Président : Mme PHEMOLANT
Rapporteur ?: Mme Sylvie CHERRIER
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : BLUM JEAN-MARC

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-07-02;18bx01721 ?
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