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16/06/2020 | FRANCE | N°19BX04436

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 16 juin 2020, 19BX04436


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 5 août 2019 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n°1901926 du 14 novembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 novembre 2019, le préfet des Pyrén

ées-Atlantiques, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de M. D... ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 5 août 2019 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n°1901926 du 14 novembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 novembre 2019, le préfet des Pyrénées-Atlantiques, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de M. D... présentée devant le tribunal administratif de Pau ;

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le premier juge, la Cour nationale du droit d'asile a le 24 juillet 2019 lu en audience publique sa décision rejetant le recours de M. D... dirigé contre la décision du 28 septembre 2018 notifiée le 9 novembre 2018 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides rejetant sa demande d'asile.

Par ordonnance du 19 décembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 20 février 2020.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 février 2020, M. A... D..., représenté par Me H... C..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 200 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- s'agissant de la date de lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, le préfet ne produit aucun élément de nature à établir sa date, soit le 24 juillet 2019 ; par suite, il bénéficiait du droit de se maintenir sur le sol national ;

- la décision portant l'obligation de quitter le territoire français n'est pas motivée au regard de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 511-4-10° du CESEDA puisque, d'une part, l'arrêt du suivi médical étroit dont il bénéficie à la permanence d'accès aux soins de santé aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé et, d'autre part, il ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Guinée ;

- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

Par ordonnance du 19 février 2019, la clôture d'instruction a été reportée au 5 mars 2020.

Par décision du 27 février 2020 le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux a accordé à M. D... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. F... B....

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant guinéen, est entré en France le 15 décembre 2017, selon ses déclarations. Le 10 janvier 2018, il a présenté une demande d'asile rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 28 septembre 2018. Cette décision de rejet a été confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 24 juillet 2019. Le préfet des Pyrénées-Atlantiques fait appel du jugement du 14 novembre 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a annulé son arrêté du 5 août 2019 faisant obligation à M. D... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2 Pour annuler l'arrêté du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 5 août 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a accueilli le moyen tiré la méconnaissance de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en l'absence de preuve de la lecture de la décision de la Cour nationale du droit d'asile.

3. 1. Aux termes des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger (...) ". Aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent. ". Aux termes de l'article R. 733-31 du même code : " Les décisions de la cour sont lues en audience publique. Leur sens est affiché dans les locaux de la cour le jour de leur lecture. ".

4. Il résulte de ces dispositions que l'étranger qui demande l'asile a le droit de séjourner sur le territoire national à ce titre jusqu'à ce que la décision rejetant sa demande lui ait été notifiée régulièrement par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé devant elle, par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour. En l'absence d'une telle lecture, l'autorité administrative ne peut regarder l'étranger à qui l'asile a été refusé comme ne bénéficiant plus de son droit provisoire au séjour ou comme se maintenant irrégulièrement sur le territoire. En cas de contestation sur ce point, il appartient à l'autorité administrative de justifier de la date de lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile.

5. M. D... soutient que le préfet n'établit pas que la décision par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a confirmé la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 28 septembre 2018 rejetant sa demande d'asile a été lue en audience publique le 24 juillet 2019. Le préfet des Pyrénées-Atlantiques s'est borné à produire en appel le relevé des informations de la base de données " Telemofpra ", tenue par la CNDA, et relative à l'état des procédures de demandes d'asile faisant apparaître les mentions suivantes " date de la décision : 24/07/2019 ", " nature de la décision : rejet du recours ", " notifiée le :En attente ". Ces mentions ne suffisent, pas à elles seules, comme l'a estimé à juste titre le premier juge et faute de production de la décision de la CNDA malgré la mesure d'instruction prise en ce sens, à établir que la lecture en audience publique soit intervenue à la date indiquée par le relevé " Telemofpra ". Dans ces conditions, le préfet des Pyrénées-Atlantiques ne pouvait regarder M. D..., à la date de la décision en litige, comme ne bénéficiant plus de son droit au séjour.

6. Il résulte de tout ce qui précède, que le préfet des Pyrénées-Atlantiques n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a fait droit à la demande de M. D..., tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 août 2019 obligeant ce dernier à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

7. M. D... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 7611 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me C..., avocat de M. D..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à ce dernier de la somme de 1 200 euros.

DECIDE :

Article 1er : La requête du préfet des Pyrénées-Atlantiques est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à Me C... une somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. D... A... et à Me C.... Une copie en sera transmise au préfet des Pyrénées-Atlantiques.

Délibéré après l'audience du 19 mai 2020 à laquelle siégeaient :

M. F... B..., président,

Mme E... G..., présidente-assesseure,

Mme Déborah de Paz, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 16 juin 2020.

Le président,

Dominique B...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX04436


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX04436
Date de la décision : 16/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: M. Dominique NAVES
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : PATHER

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-06-16;19bx04436 ?
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