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12/05/2020 | FRANCE | N°18BX00500

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 12 mai 2020, 18BX00500


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Pau, à titre principal, de dire et juger que son contrat de travail sera transformé en un contrat de travail à durée indéterminée et, à titre subsidiaire, de condamner le centre hospitalier de Mont-de-Marsan à lui verser une indemnité de 25 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis.

Par un jugement n° 1501841 du 1er décembre 2017, le tribunal administratif de Pau a rejeté la requête de Mme A....

Procédure dev

ant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 février 2018, Mme A..., représentée par Me...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Pau, à titre principal, de dire et juger que son contrat de travail sera transformé en un contrat de travail à durée indéterminée et, à titre subsidiaire, de condamner le centre hospitalier de Mont-de-Marsan à lui verser une indemnité de 25 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis.

Par un jugement n° 1501841 du 1er décembre 2017, le tribunal administratif de Pau a rejeté la requête de Mme A....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 février 2018, Mme A..., représentée par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Pau du 1er décembre 2017 ;

2°) à titre principal, de dire et juger que son contrat de travail sera transformé en un contrat de travail à durée indéterminée ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner le centre hospitalier de Mont-de-Marsan à lui verser une indemnité de 25 000 euros en réparation des préjudices matériel et moral qu'elle estime avoir subis ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Mont-de-Marsan le paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- aucun de ses 14 contrats ne fait expressément référence aux dispositions des articles 9 et 9-1 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- concernant ses contrats de travail à durée déterminée (CDD) ayant pour motif un " remplacement maladie " : un tel motif ne correspond pas exactement à l'expression utilisée par l'article 9-1 de la loi du 9 janvier 1986 qui parle très précisément de " congé de maladie, de grave ou de longue maladie " ; la pratique de l'établissement est de recourir à cette formule de remplacement maladie pour remplacer à l'avance un ou plusieurs fonctionnaires susceptibles d'être absents pour cause de maladie ; le dernier alinéa de l'article 9-1 I a été méconnu dès lors que la durée de ses CDD pour remplacement maladie ne correspond pas exactement aux durées des absences des agents à remplacer, qui ne sont pas mentionnés sur ces CDD ;

- concernant ses CDD ayant pour motif un " renfort d'activité " : la terminologie " renfort d'activité " n'est pas expressément prévue par les articles 9 et 9-1 ; elle a été recrutée sur ce motif sur une période de 13 mois consécutifs soit du 1er octobre 2012 au 30 novembre 2013, et ce à l'intérieur d'une période qui, elle-même, couvre une période continue globale de quatre années, ce qui méconnaît l'article 9-1 III qui prévoit une durée maximale de douze mois sur une période de dix-huit mois consécutifs ;

- concernant les CDD visant à un remplacement momentané de titulaires ou d'un non titulaire : ces contrats visent à recruter une personne qui va remplacer successivement, à l'intérieur du même contrat, divers agents titulaires ou non, alors que cela est contraire à l'esprit de l'article 9-1 I qui prévoit un remplacement par un agent contractuel d'un agent absent, poste par poste ;

- le centre hospitalier de Mont-de-Marsan a commis un détournement de procédure dès lors que, d'une part, il a mis volontairement un terme à ses fonctions d'agent contractuel afin de ne pas la recruter en contrat à durée indéterminée, alors que ses premières appréciations étaient bonnes et que, d'autre part, il s'agit d'une pratique systématique de l'établissement consistant à ne pas titulariser les agents contractuels qu'il recrute ;

- à titre subsidiaire, elle a subi un préjudice tenant notamment à la souscription d'un prêt de 1 500 euros pour faire face à ses frais de déménagement et à la dégressivité des allocations chômage de Pôle emploi qu'elle perçoit ;

- c'est à tort que le tribunal n'a pas retenu l'illégalité de ces contrats de travail et, à tout le moins, n'a pas fait droit à ses demandes indemnitaires.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 avril 2018, le centre hospitalier de Mont-de-Marsan, représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de Mme A... le paiement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

- Mme A... ne justifie pas de la réalité des préjudices qu'elle invoque.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B... ;

- et les conclusions de Mme Chauvin, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... a été recrutée par le centre hospitalier de Mont-de-Marsan, à compter du 1er août 2012, en qualité d'auxiliaire de puériculture, dans le cadre de plusieurs contrats à durée déterminée successifs jusqu'au 31 décembre 2014. Par une décision du 16 décembre 2014, le centre hospitalier de Mont-de-Marsan a informé l'intéressée que son contrat ne serait pas renouvelé à compter du 1er janvier 2015. Mme A... relève appel du jugement du 1er décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa requête tendant, à titre principal, à ce que son contrat de travail soit transformé en un contrat de travail à durée indéterminée et, à titre subsidiaire, à la condamnation du centre hospitalier de Mont-de-Marsan à lui verser une indemnité de 25 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis.

Sur les conclusions principales de la requête de Mme A... :

2. Ainsi que l'a justement relevé le tribunal, le juge administratif ne peut être saisi directement de conclusions tendant à requalifier un contrat de travail, de sorte que les conclusions de Mme A... présentées en ce sens ne sont pas recevables. Sa demande doit, dès lors, être regardée, dans le cadre de son recours de plein contentieux, comme tendant à l'indemnisation des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison des irrégularités dont seraient entachés les contrats dont elle a bénéficié au sein du centre hospitalier de Mont-de-Marsan.

Sur la responsabilité du centre hospitalier de Mont-de-Marsan :

3. Aux termes de l'article 9 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Par dérogation à l'article 3 du titre Ier du statut général, les emplois permanents mentionnés au premier alinéa de l'article 2 peuvent être occupés par des agents contractuels lorsque la nature des fonctions ou les besoins du service le justifient, notamment lorsqu'il n'existe pas de corps de fonctionnaires hospitaliers susceptibles d'assurer ces fonctions ou lorsqu'il s'agit de fonctions nouvellement prises en charge par l'administration ou nécessitant des connaissances techniques hautement spécialisées ". En vertu de l'article 9-1 de la même loi, les établissements peuvent recruter des agents contractuels pour assurer le remplacement momentané de fonctionnaires indisponibles ou autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel et notamment de ceux qui sont indisponibles en raison d'un congé de maladie, pour faire face à une vacance temporaire d'emploi dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire ou encore pour faire face à un accroissement temporaire d'activité lorsque celui-ci ne peut être assuré par des fonctionnaires. Un agent public qui a été recruté par un contrat à durée déterminée ne bénéficie d'aucun droit au renouvellement de son contrat. Toutefois, l'administration ne peut légalement décider, au terme de son contrat, de ne pas le renouveler que pour un motif tiré de l'intérêt du service.

4. En premier lieu, si les contrats à durée déterminée de Mme A... visent les dispositions de l'article 9 de la loi du 9 janvier 1986, les contrats dont les motifs sont intitulés " remplacement maladie " et " remplacement de titulaires ou d'un non titulaire ", et conclus pour les périodes comprises entre le 1er août 2012 et le 30 septembre 2012 et du 1er décembre 2013 au 31 décembre 2014, ont eu pour objet, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, d'assurer le remplacement momentané de fonctionnaires ou d'agents contractuels indisponibles, de sorte qu'ils doivent être regardés comme étant fondés sur le I de l'article 9-1 de cette loi. Par ailleurs, les contrats dont le motif est intitulé " renfort d'activité ", et conclus pour la période comprise entre le 1er octobre 2012 et le 30 novembre 2013, doivent être regardés comme ayant été pris sur le fondement du III de l'article 9-1 de cette même loi en vue de faire face à un accroissement temporaire de l'activité du service concerné. Dès lors et comme l'a à bon droit relevé le tribunal, la seule circonstance que les contrats de travail de Mme A..., qui visent la loi du 9 janvier 1986 et précisent leur objet, ne mentionnent pas expressément qu'ils ont été pris sur le fondement de l'article 9-1 de cette loi, ne suffit pas à les entacher du défaut de base légale allégué dans la mesure où ils ont effectivement été conclus sur le fondement de cet article.

5. En deuxième lieu, si Mme A... persiste à soutenir que les dispositions du dernier alinéa du I de l'article 9-1 ont été méconnues dès lors que la durée de ses contrats de travail à durée déterminée conclus pour remplacer des agents en congé maladie ou maternité ne correspond pas exactement aux durées des absences de ces derniers, il résulte de l'instruction, d'une part, que ces contrats sont systématiquement justifiés par le remplacement d'agents du centre hospitalier de Mont-de-Marsan en congé maladie ou maternité, et, d'autre part, que si le terme de ces contrats de travail était postérieur, pour trois d'entre eux, de quelques jours au terme des arrêts de travail des agents concernés, afin notamment de permettre de solder les droits à congés, cette irrégularité ne saurait, en toute hypothèse, avoir pour conséquence, contrairement à ce que la requérante soutient, de justifier la requalification des contrats dont elle a bénéficié en un contrat à durée indéterminée.

6. En troisième lieu, Mme A... continue de soutenir que les dispositions du III de l'article 9-1 de la loi du 9 janvier 1986 ont été méconnues dès lors qu'elle a été recrutée au titre de contrats de travail fondés sur un renfort d'activité sur une période de 13 mois consécutifs à l'intérieur d'une période qui elle-même couvre une période continue globale de quatre années, alors que ces dispositions prévoient une durée maximale de douze mois sur une période de dix-huit mois consécutifs. Mais, comme l'ont justement relevé les premiers juges, une telle irrégularité portant sur un mois de dépassement de la durée de ce contrat ne saurait davantage avoir pour conséquence, contrairement à ce qu'elle a soutenu, de requalifier les contrats dont elle a été titulaire en un contrat à durée indéterminée.

7. En quatrième lieu, si Mme A... soutient que ses contrats de travail à durée déterminée destinés à remplacer des agents titulaires ou un agent non titulaire ont méconnu les dispositions du I de l'article 9-1 de la loi du 9 janvier 1986 dans la mesure où ils ont été conclus en vue de remplacer successivement, à l'intérieur du même contrat, divers agents titulaires ou non, le centre hospitalier a justifié que ces contrats ont été conclus pour remplacer un seul et même agent entre le 1er juin 2014 et le 31 décembre 2014 au titre de son congé parental. Au demeurant, aucune disposition n'interdit à un établissement de recruter un même agent aux fins d'assurer le remplacement successif ou simultané de plusieurs agents temporairement absents.

8. En cinquième lieu, si Mme A... persiste à soutenir que le centre hospitalier de Mont-de-Marsan a mis un terme à ses fonctions d'agent contractuel afin de ne pas la recruter en contrat à durée indéterminée, elle n'apporte aucun élément nouveau en appel aux fins de contester le motif pertinemment retenu par les premiers juges aux fins d'écarter le moyen tiré du détournement de procédure allégué, et qu'il y a lieu d'adopter.

9. En dernier lieu, si Mme A... demande une indemnisation de 25 000 euros résultant des préjudices subis en raison des irrégularités dont sont entachés les contrats dont elle a bénéficié, elle n'établit pas que les irrégularités alléguées de certains des contrats passés seraient en lien direct avec les préjudices qu'elle invoque, tenant à la souscription d'un prêt de 1 500 euros le 16 février 2015 pour faire face à ses frais de déménagement, postérieurement au terme de son contrat, ou à la dégressivité des allocations chômage qu'elle reçoit de Pôle emploi depuis le 8 janvier 2015 dès lors, notamment, que ces irrégularités ne sont, en toute hypothèse, pas à l'origine de la fin de sa relation contractuelle avec l'établissement. A cet égard, comme l'avaient justement relevé les premiers juges, Mme A... n'a pas contesté la décision du 16 décembre 2014 lui signifiant le non renouvellement de son contrat et n'a pas excipé de son illégalité au soutien de ses conclusions indemnitaires. Au demeurant, en admettant qu'elle ait entendu soutenir que cette décision serait illégale au motif qu'elle aurait dû être recrutée par contrat à durée indéterminée, il résulte de ce qui a été dit plus haut qu'elle n'est pas fondée à critiquer le caractère limité de la durée de ses contrats à durée déterminée. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que le non-renouvellement de son contrat serait fondé sur un motif autre que l'intérêt du service.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté l'ensemble de ses demandes.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mis à la charge du centre hospitalier de Mont-de-Marsan les frais que Mme A... a exposés et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... le paiement au centre hospitalier de la somme qu'il réclame sur ce même fondement.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier de Mont-de-Marsan présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au centre hospitalier de Mont-de-Marsan.

Délibéré après l'audience du 25 février 2020 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

Mme Anne Meyer, président-assesseur,

M. Thierry B..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 mai 2020.

Le président de la 2ème chambre,

Catherine Girault

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

No 18BX00500


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX00500
Date de la décision : 12/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Agents contractuels et temporaires - Fin du contrat - Refus de renouvellement.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Thierry SORIN
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : CABINET LAFITTE-HAZA SERIZIER GRIMAUD MOULET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-05-12;18bx00500 ?
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