Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... G... a demandé au tribunal administratif de la Guyane, d'une part, d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2016 par lequel le président de la Collectivité Territoriale de la Guyane l'a suspendu temporairement de ses fonctions pour une durée de quatre mois à compter du 12 octobre 2016, et d'autre part, d'annuler l'arrêté du 21 février 2017 par lequel le président de la Collectivité Territoriale de Guyane a prolongé la mesure de suspension sans traitement jusqu'à l'issue de la procédure pénale et en tout état de cause jusqu'à l'expiration de son contrat.
Par un jugement n° 1600886 et 1700302 du 14 décembre 2017, le tribunal administratif de la Guyane a annulé l'arrêté du 21 février 2017 du président de la Collectivité Territoriale de la Guyane en tant qu'il fixe une date d'effet antérieure à son édiction et a rejeté le surplus des conclusions des requêtes de M. G....
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 9 mars 2018, M. G..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guyane en tant qu'il a rejeté ses requêtes ;
2°) d'annuler les arrêtés du 10 octobre 2016 et du 21 février 2017 du président de la Collectivité Territoriale de la Guyane ;
3°) d'enjoindre au président de la collectivité territoriale de la Guyane de le réintégrer juridiquement et de lui verser ses traitements pour la période postérieure au 11 février 2017 ;
4°) de mettre à la charge de la collectivité territoriale de la Guyane la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté du 10 octobre 2016 méconnaît l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration, car il ne comporte ni la qualité du signataire, ni le prénom et le nom du signataire de l'acte. L'absence du nom et prénom du signataire ne permet pas de s'assurer que l'arrêté a été signé par une autorité effectivement compétente ;
- il est entaché d'erreur de droit, car ni l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 portant droit et obligation des fonctionnaires qui prévoit la suspension de fonctions avec maintien de sa rémunération en cas de faute grave ou d'infraction de droit commun, ni aucun des textes cités au visa de l'arrêté de suspension, notamment la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, ne s'appliquent aux agents contractuels ;
- l'arrêté maintenant sa suspension méconnaît l'article 43 du décret du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'Etat dès lors qu'il ne perçoit depuis le 11 février 2017 aucune rémunération ;
- l'administration n'allègue, ni ne caractérise aucun fait constitutif d'une faute grave justifiant la décision de le suspendre de ses fonctions.
Par un mémoire enregistré le 11 décembre 2019, la Collectivité Territoriale de la Guyane, représentée par Me F..., demande à la cour de rejeter la requête de M. G... et de mettre à sa charge la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun moyen n'est fondé.
Par un courrier du 28 janvier 2020 les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrégularité partielle du jugement attaqué, faute d'avoir constaté qu'il n'y avait plus lieu à statuer sur la demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 février 2017 qui a été retiré par l'arrêté du 30 juin 2017 devenu définitif.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... A...,
- et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. G..., agent contractuel à la direction de la jeunesse, de l'enfance et de la famille a été affecté en qualité de responsable du service de l'aide sociale à l'enfance de la Vallée du Maroni pour une durée de trois ans à compter du 17 août 2015. Par un arrêté du 10 octobre 2016, le président de la Collectivité Territoriale de La Guyane l'a suspendu temporairement de ses fonctions pour une durée de quatre mois à compter du 12 octobre 2016. Par un autre arrêté du 21 février 2017, le président de la Collectivité Territoriale de la Guyane a prolongé cette mesure dans l'attente de l'issue de la procédure pénale et en tout état de cause jusqu'à la fin de son contrat. M. G... a contesté par deux requêtes distinctes ces deux arrêtés devant le tribunal administratif de la Guyane et relève appel du jugement du 14 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de la Guyane, après avoir joint ses deux requêtes, a rejeté ses demandes.
Sur la régularité du jugement :
2. Il ressort des pièces du dossier que par un arrêté du 30 juin 2017, devenu définitif, le président de la Collectivité Territoriale de la Guyane a procédé au retrait de l'arrêté du 21 février 2017 prolongeant la suspension de ses fonctions à compter du 12 février 2017. Dans ces conditions, la demande présentée par M. G... le 22 mars 2017 tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 février 2017 était devenue sans objet. Le jugement du 14 décembre 2017 du tribunal administratif de la Guyane doit être annulé partiellement en tant qu'il statue sur cette demande. Il y a lieu d'évoquer seulement les conclusions de la demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 février 2017, ainsi devenues sans objet au cours de la procédure de première instance et de constater qu'il n'y a pas lieu d'y statuer.
Sur les conclusions en annulation de l'arrêté du 10 octobre 2016 :
3. En application de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration, toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci.
4. L'arrêté attaqué ne mentionne pas, en méconnaissance de ces dispositions, le nom et le prénom du président de la Collectivité Territoriale de la Guyane. Il comporte en revanche sa qualité et sa signature. Il n'en résultait, en l'espèce, pour M. G... aucune ambiguïté quant à l'identité du signataire de cet acte.
5. La mesure de suspension attaquée a un caractère conservatoire et ne constitue pas une sanction disciplinaire. Elle n'est, par suite, pas au nombre des décisions qui doivent être motivées en vertu de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision doit être écarté.
6. Il appartient à l'autorité compétente, lorsqu'elle estime que l'intérêt du service l'exige, d'écarter provisoirement de son emploi un agent contractuel, en attendant qu'il soit statué disciplinairement sur sa situation. Une telle suspension peut être légalement prise, même sans texte, dès lors que l'administration est en mesure de faire état, à l'encontre de l'agent, de griefs ayant un caractère de vraisemblance suffisant et permettant de présumer que ce dernier a commis une faute d'une certaine gravité.
7. Il ne ressort pas de l'arrêté en litige que le président de la Collectivité Territoriale de Guyane ait, à tort, fait application de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 relative à la possibilité pour l'autorité ayant le pouvoir disciplinaire de suspendre un fonctionnaire qui a commis une faute grave. Contrairement à ce que soutient l'appelant, la circonstance que la décision contestée vise à tort la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 et la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, lesquelles ne concernent que les fonctionnaires alors qu'ainsi qu'il a été dit, l'intéressé est un agent non titulaire de la Collectivité Territoriale de la Guyane, est sans influence sur sa légalité eu égard à ce qui vient d'être dit.
8. Enfin, à la date de l'arrêté attaqué M. G... avait été mis en examen pour agression sexuelle par une personne abusant de l'autorité que lui confère sa fonction. La mesure de suspension en litige a ainsi été prise dans l'intérêt du service, dès lors que les faits reprochés à l'intéressé, passible de poursuites pénales, avaient un caractère de vraisemblance et de gravité suffisant.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de la Guyane a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 octobre 2016. Ses conclusions en injonction doivent être rejetées en conséquence.
Sur les frais d'instance :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la Collectivité Territoriale de la Guyane, qui n'a pas la qualité de partie perdante, la somme que demande M. G... au titre de ses frais d'instance. En revanche, il y a lieu de mettre à sa charge la somme de 1 500 euros à verser à la Collectivité Territoriale de la Guyane sur le fondement des dispositions précitées.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de la Guyane en date du 14 décembre 2017 est annulé en tant qu'il a statué sur les conclusions de M. G... tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 février 2017 du président de la Collectivité Territoriale de Guyane.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande présentée par M. G... tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 février 2017 du président de la Collectivité Territoriale de Guyane.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. G... est rejeté.
Article 4 : M. G... versera la somme de 1 500 euros à la Collectivité Territoriale de la Guyane en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... et à la Collectivité Territoriale de Guyane.
Délibéré après l'audience du 4 février 2020 à laquelle siégeaient :
M. Dominique Naves, président,
Mme E... H..., présidente-assesseure,
Mme D... A..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 mars 2020.
Le rapporteur,
Déborah A...Le président,
Dominique NAVESLe greffier,
Christophe PELLETIER
La République mande et ordonne au ministre de l'outre-mer en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX01028