Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Mayotte d'annuler l'arrêté du 27 juillet 2017 par lequel le préfet de Mayotte a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1701041 du 24 avril 2019 et un jugement n°1800320 du 29 octobre 2019, le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 27 juillet 2017 du préfet de Mayotte.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 14 juin 2019, M. B..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1701041 du 24 avril 2019 du tribunal administratif de Mayotte ;
2°) d'annuler l'arrêté du 27 juillet 2017 du préfet de Mayotte ;
3°) d'enjoindre au préfet de Mayotte de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement au profit de son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier au motif que les premiers juges ont rejeté sa requête sans tenir compte de ses écritures du 13 février 2018 ;
- la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour est insuffisamment motivée ;
- l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 20 juillet 2017 ne lui a pas été communiqué ; il n'a pas davantage été produit par le préfet en première instance ; ainsi, ce défaut de production entache la procédure d'irrégularité ;
- il n'a pu se présenter à la convocation du médecin de l'OFII, ce qui ne peut lui être reproché compte tenu des diligences qu'il a effectuées et n'a donc pu attester des problèmes de santé dont il souffre ;
- il n'a pas été mis à même de faire valoir ses observations sur l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ni les circonstances exceptionnelles dont il voulait faire état ;
- le refus de titre de séjour est entaché d'erreur de droit, le préfet s'étant estimé en situation de compétence liée ;
- la décision méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que son état de santé nécessite une prise en charge médicale et que le défaut de prise en charge médicale aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé, contrairement à ce qu'ont estimé les médecins de l'OFII et le tribunal administratif, de plus il ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié aux Comores ;
- la situation que connaît actuellement l'Union des Comores constitue des circonstances exceptionnelles qui justifient le renouvellement de son titre de séjour.
La requête a été régulièrement communiquée au préfet de Mayotte qui n'a pas défendu dans cette instance.
Par ordonnance du 9 septembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 13 novembre 2019 à 12 heures.
II. Par une requête, enregistrée le 5 novembre 2019, sous le n° 19BX04163, M. B..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°1800320 du 29 octobre 2019 du tribunal administratif de Mayotte ;
2°) d'annuler l'arrêté du 27 juillet 2017 du préfet de Mayotte ;
3°) d'enjoindre au préfet de Mayotte de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement au profit de son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- en se bornant à faire état de " l'avis défavorable " émis par le médecin, le préfet ne satisfait pas aux exigences de motivation des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;
- l'avis médical qui a pourtant été expressément sollicité par la juridiction de première instance le 25 septembre 2019 n'a jamais été communiqué ; à défaut de production de l'avis rendu par le collège des médecins, il est impossible pour la juridiction de s'assurer de la régularité de la procédure prévue par le CESEDA ;
- aucun des éléments transmis par la préfecture ne permettait aux juges de première instance de s'assurer que le médecin ayant établi le rapport médical qui doit être transmis dans un second temps à l'OFII ne siégeait pas au sein du collège de médecins qui a ensuite rendu l'avis sur lequel le préfet de Mayotte s'est notamment fondé pour prendre la décision attaquée ;
- il n'a pas été mis en mesure de formuler des observations devant les services de la préfecture de Mayotte sur l'avis défavorable pris par les médecins et sur l'existence de circonstances exceptionnelles ;
- son état de santé nécessite une prise en charge médicale ; le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ; en 2013, 2014, 2015 et 2016, le préfet avait jugé que les soins nécessaires à son état de santé étaient indisponibles aux Comores et cette situation n'a pas changé ;
- la précarité existant aux Comores et le coût extrêmement élevé de la santé l'empêcherait d'obtenir le traitement médical qu'il doit suivre.
La requête a été régulièrement communiquée au préfet de Mayotte qui n'a pas défendu dans cette instance.
Par ordonnance du 4 décembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 6 janvier 2020 à 12 heures.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant comorien né le 31 décembre 1971, a bénéficié de plusieurs titres de séjour en raison de son état de santé du 18 avril 2013 jusqu'au 17 avril 2017. Il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 27 juillet 2017, le préfet de Mayotte a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi. Par deux requêtes enregistrées sous les n° 19BX02360 et n° 19BX04163, M. B... relève appel des jugements n° 1701041 du 24 avril 2019 et n°1800320 du 29 octobre 2019, par lesquels le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. Les requêtes n° 19BX02360 et n° 19BX04163 concernent les mêmes parties, posent des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Par suite, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt.
Sur la régularité du jugement n° 1701041 :
3. M. B... soutient que les premiers juges n'ont pas pris en considération ses écritures du 13 février 2018. Toutefois, il résulte de l'instruction que la demande de M. B... dirigée contre l'arrêté du 27 juillet 2017 a été enregistrée sous deux numéros distincts par le greffe du tribunal, à savoir le n° 1701041 sans ministère d'avocat, et le n° 1800320, représenté par un conseil qui n'a pas précisé qu'il intervenait dans le dossier enregistré sous le n° 1701041, dont le greffe lui avait pourtant communiqué la procédure lorsqu'il s'est constitué. Ces deux requêtes ont donc fait l'objet de deux jugements distincts. Ainsi, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en ne prenant pas en compte ses écritures du 13 février 2018 dans le jugement n°1701041, le tribunal administratif de Mayotte, qui a bien examiné les moyens figurant dans la requête enregistrée le 13 février 2018 sous le n° 1800320, a entaché d'irrégularité son jugement n° 1701041 du 24 avril 2019.
Sur la légalité de l'arrêté du 27 juillet 2017 :
4. Il ressort des motifs mêmes de l'arrêté contesté que celui-ci, qui ne se borne pas à reproduire des formules préétablies, comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles se fonde, dans le respect du secret médical, la décision refusant d'accorder à M. B... le renouvellement de la carte de séjour temporaire qui lui avait précédemment été délivrée pour raisons de santé, en reproduisant la teneur de l'avis émis le 20 juillet 2017 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Ces motifs, qui permettent d'établir que l'autorité préfectorale a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. B..., ont ainsi mis celui-ci à même de comprendre les raisons pour lesquelles ce refus lui était opposé et de les contester utilement. Ils constituent une motivation suffisante au regard de l'exigence posée par les dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, alors même qu'ils ne font pas mention de l'intégralité des éléments permettant de caractériser la situation de l'intéressé.
5. Par ailleurs et aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : " 11° À l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. (...). ". Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. ". L'article 6 de l'arrêté susvisé du 27 décembre 2016 précise : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins (...) émet un avis, (...) précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".
6. Contrairement à ce que soutient l'appelant, l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) rendu le 20 juillet 2017, qui a été produit à l'instance d'appel et qui a pu être utilement discuté, a été signé par chacun des membres du collège. Contrairement à ce que soutient l'appelant, le collège de médecins n'était pas tenu de préciser dans cet avis si l'intéressé pouvait effectivement accéder à un traitement approprié dans son pays d'origine dès lors qu'il a estimé que la condition tenant aux conséquences d'une exceptionnelle gravité du défaut d'une prise en charge médicale n'était pas, en l'espèce, remplie. Par suite, le moyen tiré d'un vice de procédure doit être écarté.
7. Pour refuser de renouveler le titre de séjour de M. B..., le préfet de Mayotte s'est fondé sur un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, en date du 20 juillet 2017, dont il s'est approprié les termes et en vertu duquel, si l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale, le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entraîner pour lui de conséquences d'une exceptionnelle gravité. Le certificat médical établi en 2017 dont se prévaut M. B... se borne à décrire ses pathologies, relève que si la poursuite de soins spécifiques est nécessaire, son " état de santé est actuellement stabilisé " et ne peut ainsi être regardé comme de nature à remettre en cause l'appréciation portée sur son état de santé par le préfet. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être rejeté.
8. Aucune disposition ne prévoit l'obligation pour l'administration ni de recueillir l'avis du directeur général de l'ARS sur l'existence de circonstances humanitaires exceptionnelles ni d'inviter l'appelant à faire état de telles circonstances. Il ne ressort pas, au demeurant, des pièces du dossier qu'une circonstance humanitaire exceptionnelle susceptible de fonder une décision d'admission au séjour aurait exigé un avis du directeur général de l'ARS. Par suite, le moyen doit être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juillet 2017 par lequel le préfet de Mayotte a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi.
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes de M. B... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Mayotte.
Délibéré après l'audience du 23 janvier 2020 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président-rapporteur,
Mme D..., présidente-assesseure,
Mme Florence C..., premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 20 février 2020.
Le rapporteur,
Florence C...Le président,
Éric Rey-Bèthbéder
La greffière,
Camille Péan
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°19BX02360 - 19BX04163