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11/02/2020 | FRANCE | N°19BX02994

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 11 février 2020, 19BX02994


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 15 novembre 2018 par lequel le préfet de la Haute-Vienne lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1801973 du 22 mars 2019, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 juillet 2019

, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 15 novembre 2018 par lequel le préfet de la Haute-Vienne lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1801973 du 22 mars 2019, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 juillet 2019, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Limoges du 22 mars 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 15 novembre 2018 du préfet de la Haute-Vienne ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de vingt jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au profit de son conseil d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

Sur la décision portant refus de renouvellement du titre de séjour :

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa vie privée et familiale et de ses conséquences sur sa situation personnelle ; il vit en France depuis 8 ans et y réside de manière régulière depuis le 29 septembre 2011 ; sa mère, qui constitue sa seule famille, y réside également sous couvert d'une carte de séjour temporaire ; il a suivi une formation de carrossier et a créé son entreprise en 2015 ;

Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi :

- elle sont privées de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, porte une atteinte manifestement disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et s'avère entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle compte tenu de l'ancienneté de sa présence en France, de son insertion et de la présence de sa mère, avec laquelle il vit, sur le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 novembre 2019, le préfet de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 30 octobre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 29 novembre 2019.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n° 2019/008445 du 20 juin 2019 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code pénal ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., de nationalité arménienne, né le 15 décembre 1989, est entré en France en août 2010 et y a déposé une demande d'asile, qui a été rejetée par une décision du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 16 décembre 2010. Son recours contre cette décision a été rejeté par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 24 novembre 2011. Il a cependant été admis au séjour et s'est vu délivrer, le 29 septembre 2011, une carte de séjour temporaire en raison de son état de santé, laquelle carte a été régulièrement renouvelée. M. C... a sollicité, le 28 juillet 2017, le renouvellement du titre de séjour dont il bénéficiait. Par un arrêté du 15 novembre 2018 et après avoir recueilli l'avis du collège médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), le préfet de la Haute-Vienne a refusé de renouveler son titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à défaut de se conformer à cette obligation. M. C... relève appel du jugement du 22 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour contenue dans l'arrêté du 15 novembre 2018 :

2. En premier lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

3. Il ressort des pièces du dossier que M. C..., âgé de 27 ans à la date de la décision contestée, est entré en France à l'âge de vingt ans, après donc avoir vécu la majeure partie de sa vie dans son pays d'origine. Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, il n'a résidé régulièrement en France qu'en qualité de demandeur d'asile, puis sous couvert d'une carte de séjour temporaire délivrée en raison de son état de santé, ne lui donnant pas, sous réserve d'autres circonstances, vocation à s'établir durablement en France. L'intéressé ne conteste pas que son état de santé ne justifie plus l'attribution d'un tel titre de séjour. Nonobstant le caractère régulier de son séjour en France, sous couvert d'un titre de séjour entre 2011 et 2017, il n'établit pas une insertion particulière dans ce pays. Ainsi, s'il fait état d'une part, de la création en Haute-Vienne, en 2015, d'une entreprise ayant pour objet notamment l'achat et la vente de véhicules neufs et d'occasion et le nettoyage intérieur et extérieur, et d'autre part, de son implication dans la création en Charente en 2018 d'une entreprise d'achat-vente de véhicules neufs et d'occasion, il n'apporte aucun élément de nature à justifier de l'activité réelle ou pérenne de ces entreprises, le chiffre d'affaires déclaré étant faible et en nette baisse entre 2017 et 2018, le résultat des exercices clos étant nul ou négatif sur cette même période. En outre, s'il invoque la présence en France de sa mère, titulaire d'un titre de séjour valable de juin 2018 à juin 2019, il n'établit pas le caractère indispensable de sa présence à ses côtés non plus que la pérennité du séjour de cette dernière en France où elle ne dispose d'aucun autre lien familial. Il ressort, par ailleurs, des pièces du dossier que sa demande d'asile a également été rejetée et qu'elle est venue en France uniquement pour y rejoindre son fils. Enfin, M. C..., qui est célibataire et sans enfant à charge, n'établit pas ne plus avoir de liens personnels et familiaux en Arménie. Dans ces conditions, en refusant de renouveler le titre de séjour de l'intéressé, le préfet de la Haute-Vienne, qui n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la mesure qu'il a édictée, n'a pas davantage méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

4. En second lieu, et pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, le préfet de la Haute-Vienne, qui ne s'est pas fondé sur la mise en cause de M. C... pour des faits d'escroquerie en bande organisée pour lesquels il a été convoqué devant le tribunal correctionnel de Limoges le 8 février 2019, n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. C....

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français contenue dans l'arrêté du 15 novembre 2018 :

5. En premier lieu, il résulte de ce qui vient d'être exposé que le moyen tiré, à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français, de l'exception d'illégalité du refus de renouvellement de titre de séjour ne peut qu'être écarté.

6. En second lieu, et ainsi qu'il a été dit plus haut, le préfet, qui ne s'est pas fondé, pour prendre la mesure contestée, sur les poursuites judiciaires engagées à l'encontre de M. C..., s'est borné, dans son arrêté, à souligner que son absence lors de sa convocation devant le tribunal correctionnel ne faisait pas obstacle à son éloignement dès lors qu'il peut se faire représenter par son avocat et qu'il n'établit pas que sa présence serait indispensable. Au demeurant, le recours introduit par l'intéressé devant le tribunal administratif de Limoges ayant eu un caractère suspensif de l'exécution de cette mesure, il n'a pas été empêché de se présenter à sa convocation prévue le 8 février 2019. Il y a lieu, par suite, d'écarter les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3 du présent arrêt.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

7. Ainsi qu'il a été précédemment exposé, la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour et la mesure portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas illégales, la décision fixant le pays de renvoi de M. C... n'est pas privée de base légale de sorte que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de ces décisions a également été, à bon droit, écarté par le tribunal.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne en date du 15 novembre 2018. Par voie de conséquence, les conclusions qu'il présente à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Vienne.

Délibéré après l'audience du 14 janvier 2020 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

Mme Anne Meyer, président-assesseur,

M. Thierry B..., premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 11 février 2020.

Le rapporteur,

Thierry B...Le président

Catherine Girault

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

No 19BX02994


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX02994
Date de la décision : 11/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Thierry SORIN
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : MARTY

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-02-11;19bx02994 ?
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