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16/12/2019 | FRANCE | N°19BX02970,19BX02995

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 16 décembre 2019, 19BX02970,19BX02995


Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

Mme D... F... épouse E... et M. G... E... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux, par deux requêtes distinctes, d'annuler les arrêtés du 1er juillet 2019 par lesquels le préfet de la Dordogne les a obligés à quitter le territoire français s un délai de 30 jours, a fixé le pays de destination d'un éventuel éloignement, leur a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée d'un an, les a assignés à résidence pour une durée de 45 jours et leur a fait obligation de s

e présenter tous les jours, à l'exception des dimanches et jours fériés, au commi...

Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

Mme D... F... épouse E... et M. G... E... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux, par deux requêtes distinctes, d'annuler les arrêtés du 1er juillet 2019 par lesquels le préfet de la Dordogne les a obligés à quitter le territoire français s un délai de 30 jours, a fixé le pays de destination d'un éventuel éloignement, leur a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée d'un an, les a assignés à résidence pour une durée de 45 jours et leur a fait obligation de se présenter tous les jours, à l'exception des dimanches et jours fériés, au commissariat de police de Périgueux.

Par un jugement n° 1903638 du 25 juillet 2019, le magistrat désigné par le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la demande de Mme E.... Par un jugement n°1903639 du même jour, il a rejeté la demande de M. E....

Procédures devant la cour :

I - Par une requête enregistrée le 5 août 2019, sous le n° 19BX02970, Mme D... E..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le tribunal administratif de Bordeaux du 25 juillet 2019 ;

2°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;

3°) d'annuler l'arrêté du 1er juillet 2019 du préfet de la Dordogne ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Dordogne de lui restituer son passeport et de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi de 1991.

Elle soutient que :

En ce qui concerne l'arrêté pris dans son ensemble :

- il est insuffisamment motivé dans ses différentes composantes ;

- il n'a pas été procédé à un examen réel et sérieux de sa situation.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle a été prise en méconnaissance du droit d'être entendu notamment garanti par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 4 du protocole n° 4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article 19§1 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

En ce qui concerne la décision portant fixation du pays de renvoi :

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention internationale sur les droits de l'enfant ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet s'est cru lié par les décisions de l'office français de protection des réfugiés et apatrides.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour :

- elle est privée de base légale ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'intérêt supérieur de l'enfant ;

- elle méconnaît la liberté d'aller et de venir, composante de la liberté personnelle, garantie par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

Par une ordonnance du 9 septembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 23 octobre 2019 à 12 h 00.

Le préfet de la Dordogne a produit un mémoire enregistré le 7 novembre 2019, qui n'a pas été communiqué.

Mme E... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 octobre 2019.

II - Par une requête enregistrée le 5 août 2019, sous le n° 19BX02995, M. G... E..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le tribunal administratif de Bordeaux du 25 juillet 2019 ;

2°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;

3°) d'annuler l'arrêté du 1er juillet 2019 du préfet de la Dordogne ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Dordogne de lui restituer son passeport et de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi de 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne l'arrêté pris dans son ensemble :

- il est insuffisamment motivé dans ses différentes composantes ;

- il n'a pas été procédé à un examen réel et sérieux de sa situation.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle a été prise en méconnaissance du droit d'être entendu notamment garanti par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 4 du protocole n° 4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article 19§1 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

En ce qui concerne la décision portant fixation du pays de renvoi :

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention internationale sur les droits de l'enfant ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour :

- elle est privée de base légale ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'intérêt supérieur de l'enfant ;

- elle méconnaît la liberté d'aller et de venir, composante de la liberté personnelle, garantie par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

Par une ordonnance du 9 septembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 23 octobre 2019 à 12 h 00.

Le préfet de la Dordogne a produit un mémoire enregistré le 7 novembre 2019, qui n'a pas été communiqué.

M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 octobre 2019.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le Traité sur l'Union européenne ;

- le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme E..., ressortissants géorgiens, sont entrés en France le 4 août 2018 accompagnés de leurs deux enfants mineurs et du père de M. E.... Leurs demandes d'asile respectives ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 20 mai 2019. Par un arrêté du 1er juillet 2019, le préfet de la Dordogne a fait obligation à Mme E... de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours, a fixé le pays de destination d'un éventuel éloignement, lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée d'un an, l'a assignée à résidence pour une durée de 45 jours et lui a fait obligation de se présenter tous les jours, à l'exception des dimanches et jours fériés, au commissariat de police de Périgueux. Par un arrêté du même jour, la même autorité a pris des mesures identiques à l'encontre de M. E.... Ces ressortissants géorgiens relèvent appel des jugements du 25 juillet 2019 par lesquels le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.

Sur la jonction :

2. Les requêtes susvisées concernent la situation d'un même couple. Elles présentent ainsi à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur les demandes d'admission à l'aide juridictionnelle à titre provisoire :

3. Par deux décision du bureau d'aide juridictionnelle du 17 octobre 2019 M. et Mme E... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite leurs conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire sont devenues sans objet.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne les arrêtés pris dans leur ensemble :

4. M. et Mme E... reprennent en appel le moyen déjà soulevé en première instance tiré du défaut de motivation des arrêtés attaqués. Toutefois, les arrêtés litigieux mentionnent, avec une précision suffisante pour permettre aux appelants d'en comprendre les motifs et, dépourvues de caractère stéréotypé, les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement des différentes décisions qu'ils comprennent. Il ne ressort pas plus des pièces des dossiers, notamment de la motivation des arrêtés attaqués, que le préfet se serait abstenu de se livrer à un examen sérieux de la situation de M. et Mme E.... Par suite, ces moyens doivent être écartés.

En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français :

5. En premier lieu, il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne s'adresse non aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Ainsi, le moyen tiré de sa méconnaissance par l'arrêté contesté, pris par une autorité d'un Etat membre, est inopérant. En revanche, il résulte également de la jurisprudence de la Cour de Justice que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il appartient donc aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles le respect de ce droit est assuré. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause. En outre, une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision.

6. Si M. et Mme E... soutiennent, en première instance comme en appel, qu'ils ont été privés de leur droit d'être entendus, il ne ressort pas des pièces des dossiers et n'est d'ailleurs même pas allégué qu'ils auraient eu à faire valoir des éléments pertinents qui auraient pu conduire le préfet à prendre des décisions différentes à leur encontre. Dès lors, le moyen de la méconnaissance du principe du respect des droits de la défense ne peut qu'être écarté.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

8. M. et Mme E... sont entrés en France le 4 août 2018 accompagnés de leurs deux enfants âgés de 4 et 6 ans et du père de M. E.... Ils n'ont été autorisés à séjourner en France que le temps de l'examen de leurs demandes d'asile qui ont été rejetées le 20 mai 2019. S'ils font état d'efforts d'intégration, notamment caractérisés par l'apprentissage de la langue française et le respect des valeurs républicaines, il ne ressort pas des pièces des dossiers qu'ils seraient particulièrement insérés dans la société française. En outre, alors qu'ils n'établissent pas être dépourvus d'attaches familiales dans leur pays d'origine où ils ont vécu l'essentiel de leur vie, il ne ressort d'aucune pièce des dossiers qu'ils ne pourraient reconstituer la cellule familiale en Géorgie dès lors, notamment, qu'ils font tous deux l'objet de mesures d'éloignement identiques. Dès lors, eu égard notamment aux conditions de séjour des intéressés en France, les décisions en litige n'ont pas porté une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale au regard des buts en vue desquelles elles ont été prises. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

9. En troisième lieu, l'article 4 du protocole n° 4 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 1 de l'article 19 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne prohibent les expulsions collectives d'étrangers.

10. En l'espèce, en l'absence d'expulsion collective au sens de ces textes, le moyen soulevé en appel tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 4 du quatrième protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article 19 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne les décisions portant fixation du pays de renvoi :

11. En premier lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

12. Il ne ressort pas des pièces des dossiers que les enfants de M. et Mme E..., âgés de 4 et 6 ans, seraient dans l'impossibilité de poursuivre une scolarité normale en Géorgie ni que la cellule familiale ne pourrait se maintenir dans ce pays. Dans ces conditions, le moyen soulevé en appel tiré de la méconnaissance, par les décisions attaquées, de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

13. En second lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". L'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

14. Si les appelants invoquent la méconnaissance de ces disposition et stipulation, ils n'apportent en appel pas plus qu'en première instance d'éléments de nature à démontrer les risques qu'ils allèguent encourir en cas de retour en Géorgie du fait, notamment, des menaces familiales dont Mme E... serait l'objet. Il ne ressort par ailleurs pas des pièces des dossiers que le préfet se serait cru lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides les concernant. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance des disposition et stipulation citées au point 13 et de l'erreur de droit doivent être écartés.

En ce qui concerne les décisions portant interdiction de retour sur le territoire français :

15. En premier lieu, les décisions portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas entachées d'illégalité, les appelants ne sont pas fondés à exciper de leur illégalité à l'appui de leur contestation des décisions d'interdiction de retour sur le territoire français.

16. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable à la date de la décision en litige : " III. - L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. ".

17. En troisième lieu et ainsi qu'il a été dit au point 8, M. et Mme E... sont entrés récemment en France, le 4 août 2018, et ne démontrent pas être dépourvus d'attaches familiales dans leur pays d'origine. Dans ces conditions, alors même qu'ainsi que le relèvent les décisions contestées leur présence en France ne représente pas une menace pour l'ordre public, le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation en prononçant à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

En ce qui concerne les décisions portant assignation à résidence :

18. Aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : 5° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé... ".

19. En se bornant à faire valoir qu'ils accompagnent leurs deux enfants mineurs à l'école, M. et Mme E..., domiciliés à Périgueux, ne démontrent pas en quoi les mesures d'assignation à résidence prises à leur encontre avec obligation de se présenter chaque jour à neuf heures au commissariat de Périgueux, à l'exception dimanches et des jours fériés, présenteraient un caractère disproportionné ou seraient entachées d'une erreur d'appréciation. De même, ils n'apportent aucun élément permettant d'établir que ces décisions porteraient une atteinte disproportionnée à leur droit à mener une vie privée et familiale normale ou méconnaîtraient leur liberté d'aller et venir.

20. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués du 25 juillet 2019, le magistrat désigné par le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter, d'une part, les conclusions présentées par les appelants aux fins d'injonction et d'astreinte, d'autre part, leurs conclusions tendant à l'application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les demande de M. et Mme E... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire.

Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. et Mme E... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... F... épouse E..., à M. G... E... et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée au préfet de la Dordogne.

Délibéré après l'audience du 18 novembre 2019, à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

Mme C... A..., présidente-assesseure,

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 décembre 2019.

Le rapporteur,

Karine A...Le président,

Pierre Larroumec

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°s 19BX02970, 19BX02995 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX02970,19BX02995
Date de la décision : 16/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: Mme karine BUTERI
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : KAOULA

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-12-16;19bx02970.19bx02995 ?
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