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16/12/2019 | FRANCE | N°17BX04177

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 16 décembre 2019, 17BX04177


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler la décision du 21 septembre 2015 par laquelle l'inspectrice du travail a refusé d'autoriser le licenciement de M. G..., ensemble les décisions implicite, puis du 4 mai 2015 par lesquelles le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a rejeté son recours hiérarchique.

Par un jugement n° 1600617 du

26 octobre 2017, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler la décision du 21 septembre 2015 par laquelle l'inspectrice du travail a refusé d'autoriser le licenciement de M. G..., ensemble les décisions implicite, puis du 4 mai 2015 par lesquelles le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a rejeté son recours hiérarchique.

Par un jugement n° 1600617 du 26 octobre 2017, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 30 décembre 2017 et le 4 juin 2018, la SARL Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 26 octobre 2017 ;

2°) d'annuler la décision de l'inspectrice du travail du 21 septembre 2015 et les décisions implicite et du 4 mai 2015 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social;

3°) de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de M. G... la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le ministre n'ayant pas répondu avant la clôture de l'instruction et ce malgré une mise en demeure, il est réputé avoir acquiescé aux faits. Dès lors, les premiers juges ne pouvaient rouvrir l'instruction pour communiquer le mémoire du ministre sans méconnaître les droits au procès équitable ;

- qu'elle n'a pas disposé d'un délai suffisant pour répliquer au mémoire en défense produit par le ministre moins de huit jours avant la date d'audience. En outre, l'instruction n'a pas été clôturée à la suite de cette réouverture ;

- elle n'a pas été mise à même de présenter ses observations préalablement à la décision de l'inspecteur du travail en méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure ;

- les décisions sont entachées d'un défaut de motivation concernant l'existence d'un lien entre le mandat et la demande d'autorisation de licenciement ;

- les décisions sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation, les fautes commises par M. G..., en l'occurrence la méconnaissance des obligations de négociation préalable et de dépôt d'un préavis de grève en méconnaissance de l'article L. 2512-2 du code du travail et de l'article L. 1324-2 du code des transports, étant de nature à justifier son licenciement. En effet, cette grève illicite est à l'origine de lourdes pénalités financières pour la société. La circonstance que la grève fut justifiée ne saurait l'exonérer du respect des obligations légales. L'exception d'inexécution ne peut être opposée puisqu'il pouvait faire grève à condition de respecter la procédure y afférente. M. G... n'ignorait pas l'obligation de respecter un préavis eu égard à sa qualité de représentant syndical, à la circonstance qu'il avait déjà participé en 2010 à une grève illicite, que dans une réunion du 10 mars 2010 à laquelle il a assisté a été rappelée l'obligation de déposer un préavis et eu égard à l'information dispensée sur ce sujet aux salariés de l'entreprise. Lors de son entretien préalable, M. G... n'a d'ailleurs pas affirmé qu'il ignorait cette obligation ;

- cette grève illicite constituait une entrave à la liberté de travail des salariés non grévistes dès lors qu'il y a eu blocage de l'entreprise et sabotage du matériel. Si ce motif n'avait pas été formulé auprès de l'inspecteur du travail, il est sollicité une substitution de motifs ;

- la demande de licenciement est dépourvue de tout lien avec le mandat comme en atteste le licenciement d'autres salariés protégés pour ce motif. L'existence de multiples demandes de licenciement de M. G... est uniquement le fruit des multiples manquements commis par l'intéressé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 mars 2018, M. E... G..., représenté par la SCP Ezelin-Dione, conclut :

- au rejet de la requête ;

- à ce que soit mise à la charge de la Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens invoqués par la Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 février 2019, le ministre du travail a conclu au rejet de la requête en s'en remettant à ses écritures de première instance dont il joint une copie.

Par ordonnance du 18 février 2019, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 21 mars 2019 à midi.

Un mémoire présenté pour la SARL Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires a été enregistré le 22 mars 2019, postérieurement à la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. H... A...,

- et les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. G... a été recruté par la SARL Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires en 1995 en qualité de conducteur de bus. A la suite d'une grève inopinée initiée le 11 mai 2015 en raison de retards dans le paiement des salaires, la SARL Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires a décidé de licencier plusieurs grévistes dont M. G.... Eu égard à sa qualité de délégué du personnel, la société a demandé à l'inspectrice du travail l'autorisation de le licencier. A la suite du refus opposé par cette dernière le 21 septembre 2015, la SARL Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires a formé un recours hiérarchique auprès du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Ce recours ayant été implicitement rejeté puis expressément rejeté par une décision du ministre du 4 mai 2016, la SARL Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires a sollicité l'annulation des décisions de l'inspectrice du travail et du ministre du travail devant le tribunal administratif de la Guadeloupe. La SARL Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires relève appel du jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 26 octobre 2017 rejetant sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...) ". Aux termes de l'article R. 613-2 de ce code : " Si le président de la formation de jugement n'a pas pris une ordonnance de clôture, l'instruction est close trois jours francs avant la date de l'audience indiquée dans l'avis d'audience prévu à l'article R. 711-2. Cet avis le mentionne (...) ". Selon l'article R. 613-3 dudit code : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication, sauf réouverture de l'instruction. ". Aux termes de l'article R. 613-4 de ce code : " Le président de la formation de jugement peut rouvrir l'instruction par une décision qui n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours. (...) La réouverture de l'instruction peut également résulter d'un jugement ou d'une mesure d'investigation ordonnant un supplément d'instruction. Les mémoires qui auraient été produits pendant la période comprise entre la clôture et la réouverture de l'instruction sont communiqués aux parties. ". Il résulte de ces dispositions que lorsqu'il décide de soumettre au contradictoire une production de l'une des parties après la clôture de l'instruction, le président de la formation de jugement du tribunal administratif ou de la cour administrative d'appel doit être regardé comme ayant rouvert l'instruction. Lorsque le délai qui reste à courir jusqu'à la date de l'audience ne permet plus l'intervention de la clôture automatique trois jours francs avant l'audience prévue par l'article R. 613-2 du code de justice administrative mentionné ci-dessus, il appartient à ce dernier, qui, par ailleurs, peut toujours, s'il l'estime nécessaire, fixer une nouvelle date d'audience, de clore l'instruction ainsi rouverte.

3. Il ressort des pièces du dossier que si le mémoire en défense du ministre du travail a été communiqué le 7 septembre 2017 et qu'une ordonnance du même jour a rouvert l'instruction et fixé la clôture de l'instruction le 12 septembre 2017, il ressort également des pièces du dossier que l'affaire a été radiée du rôle de l'audience du 14 septembre 2017 pour être inscrite au rôle de l'audience du 5 octobre 2017 et que par conséquent une nouvelle ordonnance du 11 septembre 2017 a rouvert l'instruction. Dès lors, le délai restant à courir jusqu'à la date de l'audience du 5 octobre 2017 permettant l'intervention de la clôture automatique trois jours francs avant l'audience, il n'était nécessaire de clôturer l'instruction. Dans ces conditions, l'absence d'ordonnance de clôture de l'instruction est sans incidence sur la régularité du jugement attaqué.

4. En deuxième lieu, si la SARL Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires soutient que le mémoire en défense du ministre du travail a été communiqué moins de huit jours avant l'audience et qu'elle n'a ainsi pas disposé d'un délai suffisant pour pouvoir y répliquer, il résulte de ce qui est énoncé au point précédent que le mémoire en cause a été communiqué le 7 septembre 2017 et qu'en raison du report de l'audience au 5 octobre 2017 et du report de la clôture de l'instruction trois jours francs avant cette audience, elle a disposé d'un délai de trois semaines et donc d'un délai suffisant pour produire ses observations.

5. En troisième lieu, d'une part, devant les juridictions administratives et dans l'intérêt d'une bonne justice, le juge a toujours la faculté de rouvrir l'instruction, qu'il dirige, lorsqu'il est saisi d'une production postérieure à la clôture de celle-ci. D'autre part, il résulte des articles R. 612-3 et R. 612-6 du code de justice administrative que le défendeur ne saurait être réputé avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant s'il a produit un mémoire avant la clôture de l'instruction ou si le juge, ayant décidé de rouvrir l'instruction, quel qu'en soit le motif, doit tenir compte d'un mémoire du défendeur produit avant la nouvelle date de clôture.

6. Dès lors, si la SARL Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires soutient que la réouverture de l'instruction pour communiquer le mémoire en défense du ministre du travail méconnaît les " droits à un procès équitable " dès lors qu'elle a fait obstacle à l'acquiescement aux faits du ministre, il résulte de ce qui est énoncé au point précédent que la réouverture de l'instruction n'a pas entaché d'irrégularité le jugement attaqué.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

7. En premier lieu, en application de l'article R. 2421-11 du code du travail, l'inspecteur du travail saisi d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé " procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat ". Le caractère contradictoire de l'enquête menée conformément à ces dispositions impose à l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé fondée sur un motif disciplinaire, de mettre à même l'employeur et le salarié de prendre connaissance de l'ensemble des éléments déterminants qu'il a pu recueillir, y compris des témoignages, et qui sont de nature à établir ou non la matérialité des faits allégués à l'appui de la demande d'autorisation.

8. Il résulte de ce qui précède que si le caractère contradictoire de l'enquête menée par l'inspecteur du travail implique que l'employeur soit mis à même de prendre connaissance en temps utile de l'ensemble des éléments déterminants recueillis, il n'implique pas pour autant que l'employeur soit invité à présenter ses observations préalablement à la décision de l'inspecteur du travail, cette obligation résultant uniquement du caractère contradictoire de la procédure en vertu des articles L. 121-1, L. 122-1 et L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, lesquels ne sont pas invoqués par la société requérante. En tout état de cause, si la SARL Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires soutient que l'inspectrice du travail ne l'a pas invité à présenter des observations pour justifier sa décision, il ressort des visas de la décision de l'inspectrice du travail du 21 septembre 2015 qu'un courrier daté du 27 juillet 2015 a été adressé à la société pour l'aviser de la prolongation du délai de réponse. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 2421-11 du code du travail ne peut qu'être écarté.

9. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article R. 2421-12 du code du travail : " La décision de l'inspecteur du travail est motivée (...) ". Cette motivation doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. Il incombe à ce titre à l'inspecteur du travail, lorsqu'il est saisi d'une demande de licenciement motivée par un comportement fautif, d'exposer les faits reprochés au salarié de manière suffisamment précise et de rechercher si les faits reprochés sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi. D'autre part, en ce qui concerne la décision du ministre du travail, l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " (...) doivent être motivées les décisions qui : (...)8° Rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou réglementaire. ". L'article L. 211-5 de ce code précise que : " la motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".

10. Si la SARL Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires soutient que la décision de l'inspectrice du travail et la décision du ministre du travail sont insuffisamment motivées en ce qui concerne l'existence d'un lien entre le mandat et la demande d'autorisation du licenciement, il ressort des motifs des décisions litigieuses que ce lien a été regardé comme établi par l'existence de quatre demandes antérieures visant à obtenir le licenciement de M. G... et par les déclarations de M. D..., gérant de la société, recueillies le 12 août 2015, la décision du ministre du travail précisant que l'employeur ne conteste pas avoir tenu des propos hostiles aux représentants du personnels. La motivation des décisions litigieuses est ainsi suffisante sur ce point. En outre, la société requérante ne peut utilement critiquer le bien-fondé des motifs pour établir un défaut de motivation. Par suite, et alors qu'il ressort des décisions litigieuses que leur motivation satisfait aux prescriptions énoncées au point précédent, le moyen tiré de l'insuffisante motivation des décisions en litige doit être écarté.

11. En troisième lieu, d'une part, en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle. Lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi. En outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée a l'un ou l'autre des intérêts en présence.

12. D'autre part, aux termes de l'article L. 2512-1 du code du travail : " Les dispositions du présent chapitre s'appliquent : (...) 2° Aux personnels des entreprises, des organismes et des établissements publics ou privés lorsque ces entreprises, organismes et établissements sont chargés de la gestion d'un service public.". Aux termes de l'article L. 2512-2 de ce code : " Lorsque les personnels mentionnés à l'article L. 2512-1 exercent le droit de grève, la cessation concertée du travail est précédée d'un préavis. Le préavis émane d'une organisation syndicale représentative au niveau national, dans la catégorie professionnelle ou dans l'entreprise, l'organisme ou le service intéressé. Il précise les motifs du recours à la grève. Le préavis doit parvenir cinq jours francs avant le déclenchement de la grève à l'autorité hiérarchique ou à la direction de l'établissement, de l'entreprise ou de l'organisme intéressé. Il mentionne le champ géographique et l'heure du début ainsi que la durée limitée ou non, de la grève envisagée. Pendant la durée du préavis, les parties intéressées sont tenues de négocier. ". Ces dispositions sont applicables dès lors que l'organisme en cause assure la gestion d'un service public, quelles que soient les modalités de dévolution du service ou de l'éventuelle rémunération du gestionnaire du service. En outre, la participation à un mouvement de cessation concertée du travail ne respectant pas le préavis de cinq jours prévus par les dispositions de l'article L. 2512-2 du code du travail alors en vigueur ne constitue une faute que l'employeur est en droit de sanctionner qu'à la condition que les salariés aient conscience d'enfreindre ces dispositions.

13. Il ressort des pièces du dossier que la SARL Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires est attributaire de plusieurs marchés lui confiant la gestion du service public de transports scolaires. Il ressort également des pièces du dossier que la SARL Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires a sollicité l'autorisation de licencier M. G... pour avoir participé à un mouvement de grève du 11 au 20 mai 2015, qui n'avait pas fait l'objet préalablement d'un préavis alors qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal de la réunion du 10 mars 2010 à laquelle M. G... a assisté, qu'il était informé de l'obligation de déposer un tel préavis avant le début de cette grève. S'il est par ailleurs soutenu que cette grève s'est accompagnée de désordres, notamment le sabotage de cinq bus durant la nuit du 12 au 13 mai 2015, il n'est pas établi et il n'est d'ailleurs pas expressément allégué que ces désordres lui soient imputables. En outre, s'il est soutenu que la grève a fait obstacle à la liberté du travail du personnel non gréviste, aucune pièce n'est produite au soutien de cette allégation au demeurant peu précise sur les manoeuvres de blocage du personnel non gréviste à l'exception du sabotage des bus dont il n'est pas établi qu'il soit imputable à M. G.... Dès lors, la seule participation à un mouvement de grève ne respectant pas le préavis de cinq jours prévu par l'article L. 2512-2 du code du travail, ne saurait être regardée, eu égard à la durée de la grève, comme constituant une faute d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement de M. G.... Dès lors, et sans qu'il soit besoin d'apprécier le bien-fondé de l'autre motif opposé tiré du lien entre le projet de licenciement et le mandat détenu par M. G..., l'inspectrice du travail, puis le ministre du travail, dont il ressort des pièces du dossier qu'ils auraient pris les mêmes décisions en se fondant sur le seul motif de l'insuffisante gravité de la faute, ont pu valablement refuser d'autoriser le licenciement de M. G....

14. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de l'inspectrice du travail du 21 septembre 2015, de la décision implicite du ministre du travail et de la décision de ce dernier du 4 mai 2016.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge solidaire de l'Etat et de M. G..., qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, la somme demandée par la SARL Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SARL Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires, la somme demandée par M. G..., au même titre.

DECIDE

Article 1er : La requête de la SARL Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de M. G... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires, au ministre du travail et à M. E... G.... Copie en sera adressée au ministre des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 2 décembre 2019, à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

Mme F... C..., présidente-assesseure,

M. H... A..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 décembre 2019

Le rapporteur,

Paul-André A...

Le président,

Pierre LarroumecLe greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre du travail en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX04177


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 17BX04177
Date de la décision : 16/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-02 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour faute.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : SCP EZELIN DIONE

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-12-16;17bx04177 ?
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